Transmission et fiscalité – MoneyStore

Transmission et fiscalité

Cette rubrique est animée par Consilium GST

 

Actualités en matière de droits de succession et de donation à Bruxelles

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst

 Le 13 novembre 2023

Voici quelques actualités concernant les droits de succession et de donation en Région de  Bruxelles-Capital.

Assimilation des cohabitants de fait aux partenaires

Là où le statut civil des cohabitants de fait est le même partout en Belgique, il en va autrement sur le plan fiscal. En effet, chacune des trois régions dispose de ses propres règles en matière de droits de succession.

En Région de Bruxelles-Capitale, les cohabitants de fait ne peuvent actuellement pas bénéficier des tarifs les plus avantageux en droits de succession (3 à 30% au-delà de 500.000 euros). Ces tarifs ne s’appliquent qu’en ligne directe et entre partenaires. Par « partenaires », la législation bruxelloise vise les personnes mariées et certains cohabitants légaux. Les cohabitants de fait appartiennent quant à eux à la quatrième catégorie, à savoir celle qui s’applique entre toutes les autres personnes. Dans cette catégorie, les droits de succession peuvent monter jusqu’à 80% au-delà de 175.000 euros.

Récemment, le statut fiscal des cohabitants de fait a été modifié par l’ordonnance bruxelloise du 6 juillet 2023 et ce, à plusieurs égards. La principale modification consiste à étendre la notion de « partenaires » à certains cohabitants de fait. C’est ainsi qu’à partir du 1er janvier 2024, la personne qui, au jour de l’ouverture de la succession, cohabitait avec le défunt de façon ininterrompue et formait avec lui un ménage commun depuis au moins un an bénéficiera des mêmes tarifs que les personnes mariées. L’inscription dans le registre de la population ou dans le registre des étrangers à la même adresse que le défunt constituera une présomption réfragable de cohabitation et de formation d’un ménage commun avec le défunt.

À noter que l’assimilation des cohabitants de fait aux personnes mariées ne sera pas totale. Ainsi, le législateur bruxellois n’a pas souhaité étendre l’exonération totale de droits de succession sur l’habitation familiale aux cohabitants de fait. Seules les personnes mariées et certains cohabitants légaux continuent à bénéficier de cette exonération.

En adoptant cette réforme, le législateur bruxellois emboite le pas à la Région flamande qui assimile depuis un certain temps déjà certains cohabitants de fait aux personnes mariées. En Région wallonne, la situation des cohabitants de fait est beaucoup moins intéressante. En effet, dans cette région, ce sont les tarifs entre toutes les autres personnes qui s’appliquent. Dans cette catégorie, le taux maximal s’élève à 80% au-delà de 75.000 euros sauf à démontrer qu’un lien de parenté existe entre le cohabitant de fait survivant et le défunt (par exemple entre frères et sœurs).

Donations mobilières non enregistrées : modification de la « période suspecte »

Après s’être inspiré de son homologue flamand pour construire son régime fiscal des cohabitants de fait, la Région bruxelloise s’apprête à faire un copier-coller de la mesure prise en 2021 par son voisin wallon en matière de donations mobilières non enregistrées. Dans son récent accord budgétaire, le gouvernement bruxellois a en effet annoncé vouloir faire passer le délai de la période suspecte de 3 à 5 ans. Ce nouveau délai s’appliquerait à toutes les donations réalisées après le 1er janvier 2024. En procédant de la sorte, le gouvernement entend encourager les donateurs bruxellois à enregistrer leurs donations mobilières et ce, dans le but d’augmenter ses recettes fiscales. Pour rappel, une manière simple et peu couteuse de couvrir le risque de décès du donateur endéans les 5 ans consiste à souscrire une assurance décès temporaire.

 

Les informations contenues dans le présent document sont fournies à titre purement informatif et ne sauraient être considérées comme un avis juridique ou fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement de la part de Consilium Gst SRL. Les informations contenues et mentionnées dans ce document, considérées comme légitimes et correctes le jour de leur publication, conformément à l’environnement juridique, économique et financier en place à cette date, sont susceptibles d’évoluer à tout moment.


Pourquoi planifier sa succession ?

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst

Une planification successorale a pour objectif de mettre en place des solutions à long terme en vue de transmettre son patrimoine dans les meilleurs conditions. Chaque planification successorale est différente. Il n’existe pas une planification successorale unique. Pourquoi ? Car les solutions à mettre en œuvre impliquent de devoir tenir compte de la situation et des souhaits de la personne concernée. Pour ces raisons, chaque planification successorale doit être minutieusement organisée au risque de compromettre le patrimoine à transmettre.

Pour beaucoup de personnes, la planification successorale se limite à réduire voire supprimer les droits de succession. En réalité, les choses sont bien différentes. Dans les prochaines lignes, on voit en quoi planifier sa succession va bien au-delà d’une simple recherche d’économie fiscale.

Organiser le transfert de son patrimoine

Planifier sa succession, c’est avant tout organiser soi-même le transfert de tout ou partie de son patrimoine. Par défaut, le Code civil énumère les personnes appelées à recueillir les biens du futur défunt. La plupart des règles étant supplétives, le futur défunt peut y déroger. À titre d’exemple, le Code civil prévoit que ce sont les enfants du futur défunt qui recueillent en premier sa succession. L’espérance de vie augmentant, il n’est pas rare de voir des personnes atteindre l’âge de 90 ans. Dans ce contexte, des grands-parents pourraient vouloir transmettre directement une partie de leur patrimoine à leurs petits-enfants plutôt qu’à leurs propres enfants. Pour y parvenir, des outils existent.

Protéger son partenaire de vie

Planifier sa succession, c’est prendre des dispositions pour protéger son partenaire de vie (conjoint, cohabitant légal ou cohabitant de fait). Le choix d’un régime matrimonial peut, dans certains cas, générer d’importantes inégalités au sein d’un couple. Des mesures devront être prises pour y remédier. Il faut penser également à la situation des cohabitants de fait. Ces derniers n’héritent pas l’un de l’autre. Fiscalement, ils sont traités comme des étrangers. Par conséquent, toute transmission entre eux s’avère extrêmement onéreuse. Si un cohabitant souhaite protéger son partenaire en lui transmettant tout ou partie de ses biens, il devra être attentif à planifier sa succession.

Assurer la paix familiale

Planifier sa succession, c’est prendre des mesures pour éviter que des difficultés surgissent entre tous les membres d’une famille après le décès d’un parent. Des parents ont pu avantager financièrement un enfant pour lancer sa start up, tout en donnant un coup de pouce à un autre pour payer ses études à l’étranger. Au décès des parents, cette situation pourrait créer des difficultés d’équité. Il existe des outils pour réduire au maximum les conflits qui pourraient se poser entre les membres d’une famille.

 

Réaliser des économies fiscales

Planifier sa succession, c’est finalement réfléchir à des solutions visant à diminuer voire supprimer les droits de succession ou les droits de donation. Attention toutefois à ce que l’économie fiscale ne se fasse pas au détriment des intérêts civils et financiers du futur défunt.

Les informations contenues dans le présent document sont fournies à titre purement informatif et ne sauraient être considérées comme un avis juridique ou fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement de la part de Consilium Gst SRL. Les informations contenues et mentionnées dans ce document, considérées comme légitimes et correctes le jour de leur publication, conformément à l’environnement juridique, économique et financier en place à cette date, sont susceptibles d’évoluer à tout moment.


Acheter son logement familial en société : une bonne idée ?

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst

Le 13 septembre 2023

Au moment d’acheter leur logement familial, les époux se posent souvent la question de savoir si cette acquisition se fera en privé ou via une société. Nombreux sont ceux qui optent pour la seconde option. Pour justifier l’achat en société, les avantages fiscaux et financiers liés à cette opération sont souvent avancés. Les futurs propriétaires oublient toutefois que loger sa maison en société se fait souvent au détriment d’autres intérêts. Quels sont-ils ?

Civilement

Selon l’article 215 de l’ancien Code civil, le logement familial bénéfice d’une protection spécifique. En vertu de cette disposition, un époux ne peut vendre le logement familial sans l’accord de l’autre. Cette protection s’étend aux meubles meublants qui garnissent le logement familial.

Grâce à ce mécanisme de protection, l’accord des deux époux est nécessaire pour vendre le bien et ce, même si ce dernier n’appartient qu’à un seul d’entre eux. Une fois entré dans une société, le logement familial perd la protection accordée par l’article 215 de l’ancien Code civil.

Successoralement

Le conjoint survivant est un héritier réservataire. Cela signifie qu’une part successorale minimale doit obligatoirement lui revenir. La réserve du conjoint survivant se compose d’une réserve abstraite et d’une réserve concrète. La réserve abstraite consiste en l’usufruit de la moitié des biens composant la succession. La réserve concrète comprend l’usufruit du logement familial et des meubles qui le garnissent.

Si le logement familial est la propriété d’une société, le conjoint survivant se voit amputer de son droit successoral minimal à l’usufruit du logement familial et aux meubles qui le garnissent.

Fiscalement

Entre conjoints, les droits de succession varient entre 3% et 30% en fonction des régions. Bien souvent, le logement familial constitue une part importante du patrimoine du défunt. Le conjoint survivant pourrait donc être contraint de le vendre pour payer l’impôt.

Pour cette raison, les trois régions ont prévu une exemption de droits de succession sur le logement familial en faveur du conjoint survivant. Dans les trois régions, l’exemption est totale. Elle a pour conséquence d’exclure de la base imposable la part nette recueillie par le conjoint survivant dans le logement familial.

L’exonération en droits de succession sur la part nette recueillie par l’époux survivant sur le logement familial ne s’applique pas lorsque la maison a été achetée par une société.

Conclusion

Sous un certain angle, l’achat du logement familial en société peut se concevoir comme une opération fiscalement et financièrement intéressante. En logeant cet actif spécifique qu’est le logement familial dans une société, les conjoints se privent néanmoins de ces différents mécanismes de protection et se trouvent dans une situation plus précaire. Comme toute décision patrimoniale, l’achat de son logement familial doit être murement réfléchi en tenant compte de toutes les conséquences patrimoniales.

Les informations contenues dans le présent document sont fournies à titre purement informatif et ne sauraient être considérées comme un avis juridique ou fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement de la part de Consilium Gst SRL. Les informations contenues et mentionnées dans ce document, considérées comme légitimes et correctes le jour de leur publication, conformément à l’environnement juridique, économique et financier en place à cette date, sont susceptibles d’évoluer à tout moment.


Le précompte mobilier en Belgique

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst

Le 10 août 2023

Le précompte mobilier est certainement l’impôt le plus connu des investisseurs belges. Il s’applique aux revenus mobiliers, principalement aux dividendes et aux intérêts. En Belgique, le taux normal du précompte mobilier s’élève à 30%.

Comment est-il prélevé ?

Généralement, le précompte mobilier est prélevé à la source. C’est donc la société débitrice ou l’intermédiaire financier belge qui se charge de le retenir et de le payer à l’État belge. Si l’investisseur personne physique encaisse directement les revenus à l’étranger, aucun impôt n’est retenu.

Dans la majorité des cas, le précompte mobilier est libératoire. Cela signifie que les investisseurs ne sont pas tenus de mentionner les revenus qui y ont été soumis dans leur déclaration fiscale annuelle à l’impôt des personnes physiques. Dans ce cas, le précompte mobilier devient un impôt définitif et ne peut de ce fait être imputé sur l’impôt des personnes physiques, ni être remboursé. À l’inverse, si les revenus n’ont pas subi le précompte mobilier, le contribuable belge devra les déclarer spontanément dans sa déclaration fiscale

Quels sont les revenus soumis à cet impôt ?

Les dividendes et les intérêts sont les principaux revenus mobiliers soumis au précompte mobilier.

Exemple. Imaginons qu’en 2022 vous avez souscrit un bon de caisse auprès de votre banque. La valeur nominale du bon de caisse est de 100 et le coupon s’élève à 1,50%. En 2023, vous allez donc percevoir un intérêt net de 1,05. Soit, un montant brut de 1,50 duquel est déduit le précompte mobilier de 30%. En pratique, la banque va retenir le précompte mobilier et le verser à l’État belge. Dans votre chef, le précompte mobilier constitue l’impôt définitif.

Existe-t-il des réductions ou des exonérations ?

Pour les dividendes, les investisseurs peuvent bénéficier d’une exonération jusqu’à 800 euros (exercice d’imposition 2024 – revenus 2023). Cela correspond donc à une économie fiscale de maximum 240 euros. À noter que cette exonération n’est pas automatique. Pour en bénéficier, l’investisseur doit en faire la demande dans sa déclaration fiscale.

Pour les comptes d’épargne réglementés, les investisseurs sont exonérés d’impôt sur la première tranche des intérêts jusqu’à 980 euros. Au-delà de ce montant, le taux du précompte mobilier est réduit à 15% (au lieu de 30%).

Quid en cas de revenus mobiliers d’origine étrangère ?

Il n’est pas rare qu’un investisseur perçoive des revenus d’origine étrangère. Le cas typique est celui de l’actionnaire belge qui recueille des dividendes d’une société française. Dans ce cas, le précompte mobilier est aussi dû, mais uniquement sur le revenus « net frontière ».

Pour éviter qu’un même revenu soit taxé deux fois, les pays signent entre eux des conventions fiscales. Le 9 novembre 2021, la Belgique et la France ont signé une nouvelle convention préventive de la double imposition (non encore entrée en vigueur). En vertu de celle-ci, la Belgique a le pouvoir d’imposer les dividendes de source française perçus par un résident belge. De son côté, la France est autorisée à prélever un impôt en sa qualité d’État de la source des revenus. Toutefois, cet impôt ne peut excéder 12,8%.

Exemple. Imaginons que vous ayez investi dans la société française LVMH. En 2023, celle-ci vous distribue un dividende brut de 5.500 euros. En tant qu’actionnaire résident belge, vous subirez une retenue à la source française de 704 euros. Si le dividende est payé par l’intermédiaire de votre banque belge, celle-ci sera tenue de retenir l’impôt au taux de 30 %, soit 1.438,80 euros. Au final, vous percevrez un dividende net de 3.357,20 euros. L’imposition totale s’élève donc à 38,96 %.

Le précompte mobilier est-il le seul impôt ?

Non, ce n’est pas le seul impôt auxquels sont soumis les revenus des investisseurs belges. D’autres impositions viennent directement impacter leur rendement final. Il peut s’agir de la taxe sur les opérations de bourse (TOB), de la taxe sur les comptes-titres (0,15%) ou encore de la taxe Reynders de 30%.

Les informations contenues dans le présent document sont fournies à titre purement informatif et ne sauraient être considérées comme un avis juridique ou fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement de la part de Consilium Gst SRL. Les informations contenues et mentionnées dans ce document, considérées comme légitimes et correctes le jour de leur publication, conformément à l’environnement juridique, économique et financier en place à cette date, sont susceptibles d’évoluer à tout moment.


Quelle est la fiscalité applicable au dénouement d’un contrat d’assurance-vie en France ?

Par Martin Piret Gérard, Associé et Martin Le Breton, Conseiller financier et patrimonial chez CONSILIUM Gst

Le 12 juillet 2023

En France, la fiscalité assurantielle n’a pas été un long fleuve tranquille. Le contrat d’assurance-vie n’en demeure pas moins un support d’investissement intéressant et un outil efficace pour optimiser la transmission de son patrimoine mobilier. C’est donc sans surprise qu’il reste l’un des véhicules d’investissement préférés des Français.

Pour déterminer la fiscalité applicable au dénouement d’un contrat d’assurance-vie souscrit par un résident fiscal français, deux éléments sont importants : la date de souscription du contrat ainsi que l’âge de l’assuré au moment de l’investissement des capitaux.

Capitaux investis après les 70 ans de l’assuré

Avant le 20 novembre 1991, les montants versés suite au décès de l’assuré[1] échappaient à l’impôt successoral français. Depuis cette date, le barème progressif des droits de succession s’applique, mais uniquement pour les capitaux investis après le 70ème anniversaire de l’assuré. Pour rappel, en ligne directe, les droits de succession varient entre 5% et 45% au-delà de 1.805.677 euros. Les droits sont calculés après un abattement de 30.500 euros et ce, quel que soit le nombre de contrats souscrits par l’assuré et le nombre de bénéficiaires.

Capitaux investis avant les 70 ans de l’assuré

Les capitaux investis entre le 20 novembre 1991 et le 13 octobre 1998 restent exonérés de toute fiscalité. Le 13 octobre 1998, l’article 990 I du Code général des impôts est entré en vigueur. Depuis cette date, les avoirs investis avant le 70ème anniversaire de l’assuré font l’objet d’une fiscalité sui generis, différente de l’impôt successoral. Schématiquement, ce régime fiscal est doublement intéressant : un abattement spécifique et des taux d’imposition préférentiels.

Abattement de 152.500 euros

Lors du dénouement du contrat, un abattement de 152.500 euros s’applique par souscripteur et par bénéficiaire et ce, quel que soit leur degré de parenté avec l’assuré.

Prenons l’exemple suivant : Madame Dupont a 52 ans et deux enfants. Elle dispose d’un compte-titres de 1.000.000 euros et d’une résidence principale évaluée à 200.000 euros. À son décès, elle souhaite gratifier sa nièce d’un montant de 100.000 euros. Pour y parvenir, elle a deux options : rédiger un testament dans lequel elle institue comme légataire à titre particulier sa nièce ou investir dans un contrat d’assurance-vie et désigner sa nièce comme bénéficiaire.

Dans la première hypothèse, sa nièce devra payer 50.618 euros de droits de succession (après déduction de l’abattement légal de 7.967 euros). En revanche, si Madame Dupont optait pour la seconde option, sa nièce ne devrait payer aucun impôt sur les montants recueillis. Le gain fiscal est donc important.

Taux d’imposition préférentiels

Au-delà des premiers 152.500 euros, l’article 990 I du CGI prévoit un prélèvement progressif de 20% ou 31,25%. À titre de comparaison, le taux d’imposition marginal sur les successions en ligne directe s’élève à 45% (voir tableau ci-dessous).

Reprenons l’exemple ci-dessus. Imaginons que 5 ans avant son décès, Madame Dupont effectue une donation-partage de sa résidence principale à ses enfants. Au terme de celle-ci, l’abattement légal de 100.000 euros par enfant a été complétement utilisé. À son décès, ses enfants devront en principe payer 196.388 euros de droits de succession. Si elle avait investi ses avoirs financiers dans un contrat d’assurance-vie avant ses 70 ans, ses enfants auraient payé 139.000 euros, soit une économie fiscale de 57.388 euros.

Prélèvements sociaux

 

Au dénouement du contrat, les produits générés par le contrat d’assurance-vie sont soumis aux prélèvements sociaux de 17,20% et ce, quelle que soit la date de souscription du contrat. À titre de comparaison, les héritiers qui recueillent un contrat de capitalisation ou un compte-titres doivent s’acquitter des prélèvements sociaux (17,20%) et du prélèvement forfaitaire unique (12,8%) non pas au moment de la succession, mais au moment du retrait.

(1) Dans cet article, la structure du contrat d’assurance-vie est de type « AAB ». L’identité du souscripteur/investisseur et de l’assuré est donc identique. Dans cette configuration, le contrat est automatiquement dénoué au décès de l’assuré.

 

Les informations contenues dans le présent document sont fournies à titre purement informatif et ne sauraient être considérées comme un avis juridique ou fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement de la part de Consilium Gst SRL. Les informations contenues et mentionnées dans ce document, considérées comme légitimes et correctes le jour de leur publication, conformément à l’environnement juridique, économique et financier en place à cette date, sont susceptibles d’évoluer à tout moment.

[1]


Achat scindé d’une maison en France par des résidents belges

Par Martin Piret Gérard, Associé et Martin Le Breton, Conseiller financier et patrimonial, CONSILIUM Gst

L’achat scindé est une technique de planification successorale fréquemment utilisée, tant en Belgique qu’en France. Au moment d’acheter un immeuble, les parents en acquièrent l’usufruit et les enfants la nue-propriété. De leur vivant, les parents peuvent occuper le bien et en percevoir les revenus. À leurs décès, les enfants deviennent automatiquement pleins propriétaires du bien et ce, sans devoir payer de droits de succession.

Maison située en France

Au moment d’acquérir leur résidence secondaire en France, beaucoup de Belges recourent donc à la technique de l’achat scindé. Dans ce contexte, comment sera fiscalement traité cet immeuble dans la succession du défunt résident belge ?

En vertu de la convention franco-belge en matière d’impôt sur les successions, la France dispose du pouvoir d’imposer les biens immeubles situés sur son territoire. De son côté, la Belgique peut également imposer ces biens et ce, même si ceux-ci ont déjà subi une imposition en France. Afin d’éviter la double imposition, la Belgique imputera sur l’impôt belge l’impôt éventuellement perçu en France.

En définitive, lorsque le défunt possédait une seconde résidence en France, il faudra tenir compte à la fois des règles fiscales belges et françaises. Dans un article précédent, nous avions déjà analysé les pièges à éviter en cas d’achat scindé d’un immeuble en Belgique. Qu’en est-il lorsque l’achat porte sur un immeuble situé en France ? Quelles sont les exigences fiscales à respecter de l’autre côté de la frontière pour éviter toute discussion avec l’administration fiscale française ?

Article 751 du CGI

De façon relativement similaire à la législation fiscale belge, l’article 751 du Code général des impôts français instaure une présomption. En vertu de celle-ci, tout bien meuble ou immeuble appartenant pour l’usufruit au défunt et pour la nue-propriété à l’un de ses héritiers est réputé, jusqu’à preuve contraire, faire partie de la succession de l’usufruitier.

Les héritiers qui peuvent démontrer que le démembrement résulte d’une donation régulière (acte notarié) consentie plus de trois mois avant le décès de l’usufruitier échappent à cette présomption. Dans cette hypothèse, aucun impôt successoral ne sera dû au décès de l’usufruitier. Dans le cas contraire, la valeur de la pleine propriété du bien réintègrera fiscalement la masse successorale et le nu-propriétaire sera imposé sur cette valeur.

Généralement, les enfants financent la nue-propriété du bien au moyen de fonds préalablement donnés par les parents via une donation indirecte belge (don bancaire). De cette manière, aucun droit de donation n’est dû en Belgique sauf si les parents ne survivent pas à la « période suspecte » de trois ans (Bruxelles et Flandre) ou cinq ans (Wallonie).

La donation indirecte ne semble pas remplir les conditions de formes exigées par l’article 751 du CGI. En effet, l’administration fiscale française apprécie strictement ces conditions : pour elle, seuls les dons manuels enregistrés en France sont considérés comme ayant une date certaine permettant d’écarter la présomption fiscale. Par conséquent, la combinaison des exigences du droit français avec la pratique belge des donations indirectes pourrait poser problème.

Pour parer à cette difficulté, il est conseillé de réaliser le don qui permettra aux enfants de financer la nue-propriété devant un notaire français. Celui-ci sera uniquement soumis aux droits de donation belges au moment de son enregistrement auprès de l’administration fiscale belge. Il faut également s’assurer que soit insérée dans l’acte notarié constatant le démembrement de propriété une clause sur l’origine des deniers.

Pour les propriétaires qui ont déjà acheté leur seconde résidence en France, et qui seraient passés à côté de ces considérations fiscales, il serait utile de se rapprocher de leur estate planner et/ou notaire français pour s’assurer que l’opération réalisée réponde aux conditions de l’article 751 du CGI.

La donation immobilière comme alternative

Les parents pourraient aussi décider d’acheter la pleine propriété de l’immeuble et procéder par la suite à la donation de la nue-propriété à leurs enfants. L’article 751 du CGI prévoit expressément qu’une telle donation met en échec la présomption pour autant que le démembrement ait eu lieu plus de trois mois avant le décès et que la valeur de la nue-propriété ait été déterminée selon le barème de l’article 669 du CGI. S’agissant d’un immeuble situé en France, cette donation sera uniquement soumise à la fiscalité française. En fonction des circonstances (prix du bien, âge de l’usufruitier, abattement légal, etc.), cette solution pourrait s’avérer plus intéressante que l’achat scindé.

Pour éviter des mauvaises surprises souvent des années plus tard, les parents résidents belges auront à l’esprit toutes ces questions et y auront répondu avant d’envisager l’achat scindé d’une maison en France.

Les informations contenues dans le présent document sont fournies à titre purement informatif et ne sauraient être considérées comme un avis juridique ou fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement de la part de Consilium Gst SRL. Les informations contenues et mentionnées dans ce document, considérées comme légitimes et correctes le jour de leur publication, conformément à l’environnement juridique, économique et financier en place à cette date, sont susceptibles d’évoluer à tout moment.

 


L’habitation familiale en droits de succession : état des lieux

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst 

Le 10 mai 2023

L’habitation familiale constitue une part importante du patrimoine du défunt. Dans ce contexte, les héritiers pourraient être contraints de devoir la vendre pour régler les droits de succession. Pour cette raison, les trois régions ont prévu une exemption de droits de succession sur l’habitation familiale en faveur du partenaire survivant. Les règles varient légèrement d’une région à l’autre. Quelles sont-elles ?

Notion d’habitation familiale

Dans les trois régions, l’exemption porte sur l’immeuble qui servait de logement familial au défunt et à son partenaire au jour du décès.

En Région wallonne, le défunt et son partenaire doivent avoir occupé le logement familial de façon ininterrompue depuis au moins cinq années à la date du décès. Cette condition de durée de résidence n’existe pas à Bruxelles et en Flandre.

Dans les trois régions, la preuve résulte d’un extrait du registre de la population ou du registre des étrangers. Le cas échéant, le partenaire survivant peut démontrer qu’un élément a empêché le maintien de l’un des partenaires dans le logement familial (force majeure, raison impérieuse, etc.).

Qui peut bénéficier de l’exemption ?

En Wallonie et à Bruxelles, l’exemption s’applique au conjoint ainsi qu’au cohabitant légal survivant. En Région bruxelloise, le cohabitant légal ne bénéficie pas de l’exemption dans les hypothèses suivantes. S’il est un parent en ligne directe du défunt, un ayant droit qui est assimilé à un parent en ligne directe pour l’application du tarif, un frère ou une sœur, un neveu ou une nièce, ou un oncle ou une tante du défunt. En Région wallonne, le lien de parenté entre le défunt et le cohabitant légal n’a pas d’incidence.

Particularité en Flandre, le cohabitant de fait bénéficie aussi de l’exemption. Pour ce faire, il faut qu’au jour du décès, il forme avec le défunt depuis au moins trois années ininterrompues un ménage commun et qu’il ne soit pas un parent en ligne directe du défunt ou un ayant droit assimilé à un ayant droit en ligne directe. De son côté, le cohabitant légal peut bénéficier du régime sauf s’il est un parent en ligne directe du défunt ou est un ayant droit qui, pour l’application du tarif, est assimilé à un ayant droit en ligne directe.

Quelles sont les formalités ?

Lorsque les données du registre de la population ou du registre des étrangers confirment que les conditions du régime sont remplies, l’exemption est accordée d’office. Dans tous les autres cas, l’application de l’exemption doit être expressément demandée dans la déclaration de succession.

Quel est l’avantage fiscal ?

Dans les trois régions, l’exemption est totale. Elle a pour conséquence d’exclure de la base imposable la part nette recueillie par le partenaire survivant dans l’habitation familiale. Par « part nette », la loi vise la valeur de la part recueillie par le partenaire dans la résidence principale déduction faite des dettes. En étant exclue de la base imposable, cette part n’est pas prise en compte pour déterminer les tarifs applicables au reste de la succession du défunt.

L’exemption sur l’habitation familiale offre de belles opportunités de planification successorale. En fonction de votre situation, rédiger un testament ou modifier votre contrat de mariage pourraient être opportun. De cette manière, vous pourrez profiter de manière optimale de cet avantage fiscal.

Les informations contenues dans le présent document sont fournies à titre purement informatif et ne sauraient être considérées comme un avis juridique ou fiscal, une recommandation ou un conseil en investissement de la part de Consilium Gst SRL. Les informations contenues et mentionnées dans ce document, considérées comme légitimes et correctes le jour de leur publication, conformément à l’environnement juridique, économique et financier en place à cette date, sont susceptibles d’évoluer à tout moment.


L’assurance-vie et les héritiers réservataires en droit français

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst et Martin Le Breton, Conseiller financier et patrimonial chez CONSILIUM Gst

 

En droit français, l’assurance-vie se situe au carrefour entre le droit civil et le droit des assurances. Analyse et points d’attention.

 

Qui sont les héritiers réservataires ?

 

En droit français, certains héritiers sont protégés par la loi. On les appelle les héritiers réservataires. Cela signifie qu’ils doivent obligatoirement recevoir une quote-part minimale de la succession. Cette quote-part minimale est appelée « réserve héréditaire ». La partie dont le défunt peut librement disposer est appelée « quotité disponible ».

 

Seuls les enfants ont la qualité d’héritiers réservataires. En cas d’atteinte à leur réserve, ces derniers peuvent intenter une action en réduction. La réserve varie selon le nombre d’enfants. Elle est globale et correspond à une fraction de la succession en pleine propriété. A noter qu’en droit successoral belge, la règle diffère. En effet, depuis le 1er septembre 2018, la réserve héréditaire globale des enfants est invariablement fixée à la moitié et ce, quel que soit le nombre d’enfants.

 

Le conjoint survivant n’est pas un héritier réservataire. Il est donc possible de le priver de ses droits légaux. Une exception existe. En effet, la loi française prévoit que le conjoint survivant acquiert la qualité d’héritier réservataire lorsque le défunt décède sans enfant. Dans cette configuration, la réserve du conjoint survivant est fixée à un quart de la succession.

 

L’assurance-vie permet-elle d’échapper à ces règles ?

 

La figure juridique du contrat d’assurance-vie renferme une stipulation pour autrui. Cela explique que les capitaux versés au bénéficiaire n’ont jamais fait partie de la succession du souscripteur défunt. Par conséquent, les règles du rapport et de la réduction ne s’appliquent pas aux capitaux décès et aux primes versées.

 

Le siège de la matière se trouve à l’article 132-13 du Code français des assurances. Il précise ce qui suit : « le capital ou la rente payable au décès du contractant à un bénéficiaire déterminé ne sont soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du contractant. Ces règles ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes, à moins que celles-ci n’aient été manifestement exagérées eu égard à ses facultés. »

 

Compte tenu de ce qui précède, il est possible d’échapper aux règles du rapport et de la réduction sous réserve que les primes versées par le souscripteur ne soient pas manifestement exagérées. Sous cette réserve, tant les capitaux versés au bénéficiaire que les primes versées par le souscripteur dans le contrat d’assurance-vie échappent au mécanisme de protection de la réserve héréditaire.

 

En droit belge, la solution inverse prévaut depuis le 1er septembre 2018. En effet, l’article 188 de la loi relative aux assurances prévoit qu’« en cas de décès du preneur d’assurance, la prestation d’assurance est, conformément au Code civil, sujette à réduction et à rapport ». Par conséquent, le montant des capitaux versés au bénéficiaire est pris en compte pour le calcul de la réserve héréditaire.

 

Primes « manifestement exagérées »

 

En l’absence d’une définition légale du caractère « manifestement exagéré » des primes versées, il faut se référer à la jurisprudence de la Cour de cassation. Pour apprécier le caractère manifestement exagéré des primes, il y a lieu de tenir compte de la situation personnelle et patrimoniale du souscripteur, de son âge, de son état de santé ainsi que des motifs qui l’ont incité à investir dans un contrat d’assurance-vie.

 

Conclusion

 

Le contrat d’assurance-vie est un outil de transmission patrimoniale particulièrement intéressant. En particulier, il permet au parent-souscripteur d’orienter ou cibler sa générosité et ce, même en présence d’héritiers réservataires. Il convient toutefois de manier cet outil avec précaution et ce, afin d’éviter les mauvaises surprises au moment de l’ouverture de la succession.

 


Achat scindé et immobilier : technique de planification successorale

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst

Le 9 mars 2023

L’achat scindé est une technique parfaitement licite de planification successorale fréquemment utilisée en Belgique. On y recourt notamment pour acquérir un bien d’investissement ou une seconde résidence avec ses enfants.

 

Comment ça fonctionne ?

 

Au moment d’acheter un immeuble, les parents en acquièrent l’usufruit et les enfants la nue-propriété. De leur vivant, les parents peuvent occuper le bien et en percevoir les éventuels revenus. A leurs décès, les enfants deviennent automatiquement pleins propriétaires du bien et ce, sans devoir payer de droit de succession. En effet, ils deviennent pleins propriétaires du bien suite à l’extinction de l’usufruit et non en leur qualité d’héritier.

 

Bien souvent, les enfants ne disposent pas des fonds nécessaires pour l’achat de la nue-propriété. Au préalable, les parents leur font donc donation de cet argent. La plupart du temps, cette donation prend la forme d’un don bancaire. De cette manière, on évite de devoir payer les droits de donation. Pour rappel, en ligne directe, ceux-ci s’élèvent à 3,3% en Wallonie et à 3% en Flandre et à Bruxelles.

 

Correctement encadré, l’achat scindé permet d’éviter en toute légalité les droits de succession. Pour ce faire, il convient toutefois de respecter certaines règles afin d’éviter tout problème avec l’administration fiscale.

 

Démembrement et fiction fiscale

 

Afin de limiter l’utilisation abusive de cette technique, la loi fiscale a introduit une règle spécifique à l’article 9 du Code des droits de succession (article 2.7.1.0.7. du Code Flamand de la Fiscalité). En vertu de celle-ci, au décès des parents, l’immeuble est considéré comme se trouvant en pleine propriété dans leur succession et comme recueilli à titre de legs par les enfants. Autrement dit, la valeur de la pleine propriété du bien réintègre fictivement la succession des parents et pourra être soumise aux droits de succession à leurs décès.

 

L’objectif poursuivi par le législateur est d’imposer l’immeuble qui ne se retrouve pas dans la succession des parents et qui proviendrait d’une opération déguisant une libéralité. Tel serait par exemple le cas si des parents payaient eux-mêmes la nue-propriété au vendeur.

 

La présomption inscrite à l’article 9 du C. succ. (article 2.7.1.0.7. du CFF) est réfragable. Les enfants peuvent la renverser en prouvant que l’achat scindé ne déguise pas une libéralité à leur profit. Pour ce faire, ils devront pouvoir démontrer qu’ils disposaient des fonds personnels pour acquérir la nue-propriété du bien, qu’ils ont effectivement affecté ces fonds à l’achat de ce bien, et que l’évaluation de l’usufruit a été réalisée correctement.

 

Achat scindé et donation préalable : position de l’administration

 

Depuis 2002, la position de l’administration fiscale en matière d’achat scindé précédé d’une donation préalable a fortement évolué. Les derniers rebondissements datent de 2020. Actuellement, la position de l’administration peut être résumée comme suit.

 

La preuve contraire demandée par l’article 9 du C. succ. (article 2.7.1.0.7. du CFF) pour renverser la présomption de taxation peut être apportée par une donation antérieure des fonds réalisée par les parents à leurs enfants. En d’autres termes, il n’y a pas de libéralité lorsqu’il est démontré qu’il y a eu une donation préalable des fonds avant l’achat scindé.

 

Par ailleurs, il n’est plus exigé que la donation préalable des fonds soit reçue par acte authentique, ni même qu’elle ait été enregistrée. Il est suffisant de prouver que les fonds ont été donnés avant le paiement par les nus-propriétaires de leur part dans le prix du bien.

 

Si un acompte est prévu au moment de la signature du compromis de vente, le montant total à payer par les nus-propriétaires doit avoir été donné par les parents avant la signature du compromis. A noter qu’en Région flamande, c’est la date de l’acte authentique qui est considérée comme le moment de référence. Par conséquent, les nus-propriétaires doivent disposer de la totalité des fonds avant la signature de l’acte authentique.

 

Si les conditions reprises ci-dessus ne sont pas remplies, l’actif immobilier sera réintégré dans la succession des parents et l’administration fiscale pourra réclamer les droits de succession sur le bien immobilier en question.

 

Conserver un dossier de preuves

 

La charge de la preuve incombe aux nus-propriétaires. C’est en effet eux qui sont présumés recevoir une libéralité aux décès de leur parent. En pratique, de nombreuses années peuvent s’écouler entre l’achat scindé et le décès des parents-usufruitiers. Afin de pouvoir renverser la présomption au décès des parents, et éviter les mauvaises surprises, il est important que les nus-propriétaires conservent soigneusement un dossier complet de preuves. Ce dossier contiendra notamment l’acte de donation ou le pacte adjoint, les extraits bancaires et le calcul de valorisation de l’usufruit.


Le legs en duo : toujours aussi intéressant ?

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst

Le 1er février 2023

 

Depuis le 1er juillet 2021, la Flandre a supprimé l’avantage fiscal du legs en duo. Pour compenser cette suppression, elle a introduit le régime de l’héritage entre amis. Le taux pour les libéralités faites aux associations caritatives a quant à lui été réduit à 0%. Statu quo en Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne. Dans ces deux régions, le legs en duo conserve donc toute son utilité. Petit tour d’horizon de cette technique de planification successorale.

 

Une question de taux et de philanthropie

 

Les droits de succession dépendent du lien de parenté entre le défunt et ses héritiers. Plus ce lien est éloigné, plus les taux d’imposition sont élevés.

 

Les héritiers en ligne directe (enfants, petits-enfants, parents, etc.) bénéficient du tarif le plus avantageux. Les mêmes tarifs s’appliquent entre partenaires1. Pour les parents éloignés (frères et sœurs par exemple), les droits de succession sont beaucoup plus élevés (jusqu’à 70% à Bruxelles et en Wallonie). Pour les personnes sans lien de parenté, les taux peuvent grimper jusqu’à 80%.

 

Pour les associations caritatives, les droits de succession sont nettement moins élevés. En Région wallonne et de Bruxelles-Capitale, ils s’élèvent à 7%. En Région flamande, ils sont dorénavant de 0% contre 8,5% auparavant.

 

Legs en duo : qu’est-ce que c’est ?

 

Le legs en duo est une technique de planification successorale, particulièrement utilisée pour une succession sans enfants. Elle permet de réduire significativement les droits de succession en présence d’un parent éloigné ou d’un ami tout en soutenant une bonne cause.

 

Plus précisément, un testateur désigne plusieurs bénéficiaires dans son testament. En plus d’un legs en faveur d’un parent éloigné ou d’un ami (fortement taxé), le testateur reprendra dans son testament un legs en faveur d’une œuvre caritative (faiblement taxée). A charge pour cette dernière de payer les droits de succession qui incomberont en principe au premier légataire.

 

Exemple

 

Jean vit seul et n’a pas d’héritier en ligne directe. Il réside en Région wallonne. Il décède en laissant un patrimoine de 500.000 euros. Durant les dernières années de sa vie, il s’est rapproché de son neveu Éric.

 

Si Jean rédige un testament au terme duquel il lègue l’intégralité de son patrimoine à Éric, ce dernier recueillera un montant de 190.625 euros après avoir payé 309.375 euros de droits de succession.

 

Imaginons maintenant que Jean ait désigné une œuvre caritative comme légataire universel, à charge pour elle de verser un montant net d’impôt à Éric de 250.000 euros. Éric recevra donc un montant de 250.000 euros et ne devra payer aucun droit de succession.

 

Grâce au legs en duo, Éric recueille un montant plus important. De son côté, l’ASBL reçoit un montant net de 98.125 euros, soit presque 20% de la succession totale.

 

 

 

Région flamande : nouveautés

 

L’héritage entre amis

 

En Région flamande, le décret du 19 mars 20212 a supprimé l’avantage fiscal3 du legs en duo. Le moment de référence est le 1er juillet 2021.  Les testateurs doivent donc être attentifs à revoir leur testament avec leur notaire pour l’adapter le cas échéant aux nouvelles dispositions. Pour tous décès intervenus avant cette date, l’avantage fiscal est maintenu.

 

Pour compenser cette suppression, un nouveau régime a vu le jour. Il s’agit de l’héritage entre amis (vriendenerfenis). Concrètement, un testateur a dorénavant la possibilité de désigner une ou plusieurs personnes (parents éloignés ou amis) dans son testament afin de leur permettre de bénéficier du taux le plus avantageux de 3% sur une partie limitée de son héritage. Sans cette disposition, ces personnes hériteraient au taux de 25%.

 

Plusieurs conditions limitent l’avantage fiscal du nouveau régime. En effet, la réduction d’impôt n’est accordée qu’aux personnes physiques désignées par le défunt sans équivoque dans son testament comme étant la ou les personnes habilitées à demander l’application de la réduction. L’avantage fiscal n’est donc pas automatique. En outre, la partie de la succession qui revient aux parents éloignés ou amis et qui peut bénéficier du taux avantageux est limitée à 15.000 euros. Il s’agit d’un montant forfaitaire à proratiser le cas échéant lorsque plusieurs personnes ont été désignées dans le testament.

 

Associations caritatives : réduction de taux 0%

 

Dans le même temps, le décret du 19 mars 2021 a réduit le taux des droits de donation et de succession à 0% pour compenser la perte de rentrées financières pour les associations caritatives. Ce taux s’applique aux successions qui se sont ouvertes à partir du 1er juillet 2021 et à toutes les donations qui ont été réalisées à partir de cette date. Les fondations privées sont exclues du bénéfice de ce taux. Celles-ci restent soumise au taux de 5,5% pour les droits de donation et de 8,5% pour les droits de succession.

 

Consultez aussi le corner Transmission et fiscalité

 

(1) En Région de Bruxelles-Capitale et en Région wallonne, le terme « partenaire » vise le conjoint survivant et le cohabitant légal. En Région flamande, ce terme a une portée juridique plus large puisqu’il recouvre non seulement le conjoint survivant et le cohabitant légal, mais également le cohabitant de fait.

 

(2) Décret du 19 mars 2021 modifiant le Code flamand de la Fiscalité du 13 décembre 2013, en ce qui concerne la réduction tarifaire pour les legs et les dons sans but lucratif et l’introduction de l’héritage « d’ami », M.B., 7 avril 2021.

 

(3) Seul l’avantage fiscal a été supprimé. La technique du legs en duo reste donc valable sur le plan civil.


Quelles sont les règles de conversion de l’usufruit du conjoint survivant ?

Par Martin Piret Gérard, Associé chez CONSILIUM Gst

Le 10 janvier 2023

 

Au décès d’une personne, la loi prévoit que son conjoint recueille l’usufruit sur toute la succession. La nue-propriété est quant à elle recueillie par ses enfants. Il se créé alors un démembrement de la propriété sur les biens faisant partie de la succession du défunt. Dans certains cas, une telle situation peut s’avérer problématique et des tensions peuvent apparaitre entre l’usufruitier et le(s) nu(s)-propriétaire(s). Pour remédier à ces difficultés, le législateur a prévu la possibilité de convertir l’usufruit du conjoint survivant. De cette manière, l’usufruit cesse et est converti en des droits en pleine propriété.

 

Qui peut demander la conversion de l’usufruit ?

 

La conversion peut être sollicitée tant par le conjoint survivant (usufruitier) que par les enfants du défunt (nus-propriétaires). A défaut d’accord, c’est le juge qui appréciera s’il convient d’accorder ou non la conversion.

Il est admis que le prémourant peut limiter le droit de demander la conversion. Par testament, ce dernier pourrait ainsi interdire au conjoint survivant et/ou à ses enfants de solliciter la conversion. Cette interdiction pourrait porter sur tous les biens démembrés ou une partie d’entre eux (à l’exception des biens dits « préférentiels » – voir ci-dessous).

 

Il existe une exception importante. En présence du conjoint survivant, les enfants d’une précédente union du prémourant ne peuvent être privés du droit de demander la conversion.

La loi du 31 juillet 2017 a introduit un régime particulier dans le cadre des familles recomposées. Ce régime s’applique à toute succession ouverte à partir du 1er septembre 2018. Dans un certain délai, tant les enfants du défunt que leur beau-parent survivant peuvent exiger la conversion de l’usufruit. Contrairement au régime général, le juge ne dispose ici d’aucun pouvoir d’appréciation. Il s’agit d’un « droit absolu » à la conversion dans le chef du beau-parent survivant et dans celui des enfants non communs.

 

Pour les biens préférentiels, et quelle que soit la situation de concours, le conjoint survivant dispose d’un droit de veto. Cela signifie que son accord est toujours requis lorsque la demande de conversion porte sur l’immeuble affecté au jour de l’ouverture de la succession au logement principal de la famille et sur les meubles meublants qui le garnissent. Même en présence d’enfants non communs, le conjoint survivant peut s’opposer à la conversion de l’usufruit qui grèvent ces biens préférentiels.

 

Comment convertir l’usufruit ?

 

Il existe différentes méthodes pour convertir l’usufruit du conjoint survivant. La conversion en une somme d’argent est la plus répandue. Dans ce cas, l’usufruit du conjoint survivant est converti en capital, lequel est payable par le nu-propriétaire. Les biens démembrés peuvent également être vendus. Dans ce cas, l’usufruitier percevra également une somme d’argent. Le conjoint survivant peut également décider de racheter la nue-propriété et ainsi devenir plein propriétaire des biens démembrés. Une autre méthode consiste à convertir l’usufruit en une rente indexée et garantie.

 

Il est également admis que le prémourant puisse aménager les modalités de conversion de l’usufruit. Il pourrait ainsi prévoir par testament que tel bien démembré devra être converti selon telle méthode.

 

Une nouvelle fois, la loi du 31 juillet 2017 a prévu un régime particulier pour les familles recomposées. Sauf si les nus-propriétaires et le conjoint survivant en disposent autrement, l’usufruit doit être converti en une part indivise de la succession en pleine propriété. A défaut, cette méthode de conversion est donc obligatoire. Cette part est déterminée sur la base des tables légales de conversion, et de l’âge de l’usufruitier à la date de la demande. Toutefois, lorsqu’en raison de l’état de santé de l’usufruitier, sa durée de vie probable est manifestement inférieure à celle des tables légales, le juge peut, sur la demande d’un nu-propriétaire ou du conjoint survivant, écarter les tables de conversion et fixer d’autres conditions de conversion.

 

Comment valoriser l’usufruit à convertir ?

 

Dans cette matière, l’autonomie des parties prévaut. Pour valoriser l’usufruit, celles-ci s’appuieront généralement, et suivant les circonstances, sur la valeur des biens, de leurs revenus, des dettes et charges qui les grèvent et de la durée de vie probable de l’usufruitier. Pour s’aider, les parties pourront également recourir aux tables élaborées par des actuaires (table Ledoux, par exemple). Ces tables permettent de valoriser forfaitairement la valeur de l’usufruit.

 

En cas d’absence d’accord des parties, ces dernières pourront soumettre leur demande au juge. Ce dernier devra alors obligatoirement appliquer l’évaluation forfaitaire fixée par les deux tables de conversion établies, au 1er juillet de chaque année, par le ministre de la Justice. L’une pour les hommes et l’autre pour les femmes. Lorsqu’en raison de l’état de santé de l’usufruitier, sa durée de vie probable est manifestement inférieure à celle des tables légales, le juge peut écarter les tables légales et fixer d’autres conditions de conversion. Il pourrait également refuser la conversion.