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ChatGPT : une force disruptive pour les investisseurs ?
Par Virginie Maisonneuve, directrice mondiale des investissements actions d’Allianz Global Investors
Le 5 juin 2023
Récemment, le lancement du chatbot ChatGPT a obtenu une large couverture médiatique, dépassant le cadre des médias spécialisés pour arriver à la connaissance du grand public. Cet intérêt a été suscité par la capacité de l’application à produire un texte similaire à ce qu’aurait pu rédiger un être humain. Cela a d’ailleurs été salué comme un moment décisif pour l’Intelligence Artificielle (IA).
Sans surprise, les implications de cette nouvelle technologie ont été beaucoup discutés dans la presse, avec des articles traitant des ramifications dans des domaines aussi variés que la géopolitique, la cybercriminalité et l’expérience client. L’impact de cette technologie ira au-delà de celui des technologies traditionnelles, et elle aura donc également des conséquences pour les investisseurs dans de nombreux secteurs.
Quelles industries sont susceptibles d’être impactées par cette technologie ?
Pour en savoir plus, voici ce que ChatGPT a rédigé comme contenu sur le sujet suivant : « quelles sont les 5 industries qui seront révolutionnées par ChatGPT et pourquoi ? »
- Service à la clientèle : ChatGPT peut automatiser et rationaliser les opérations de service à la clientèle en fournissant des réponses instantanées et précises aux demandes, en réduisant les temps d’attente et en améliorant la satisfaction des clients.
- Santé : ChatGPT peut aider les professionnels de la santé à diagnostiquer et à traiter les patients, en leur donnant accès à de grandes quantités d’informations médicales et en contribuant à améliorer les résultats pour les patients.
- Éducation : ChatGPT peut révolutionner les méthodes pédagogiques proposées aux étudiants en fournissant des expériences éducatives personnalisées et interactives, permettant un apprentissage plus efficace.
- Finance : ChatGPT peut améliorer la prise de décision financière en fournissant des analyses de marché en temps réel et des recommandations d’investissement, contribuant ainsi à améliorer les résultats d’investissement.
- Commerce : ChatGPT peut transformer le secteur en offrant aux clients des expériences d’achat personnalisées, permettant des recommandations de produits plus efficaces et améliorant ainsi la satisfaction des clients.
Les secteurs choisis reflètent des domaines où l’IA générative fait déjà impression, ou dans lesquels l’impact de la technologie est prometteur.
Santé et éducation
En termes de service à la clientèle, l’argument clé de vente de ChatGPT – la capacité à maintenir une conversation à la manière d’un être humain – offre déjà des expériences plus immersives aux consommateurs. La santé et l’éducation sont des domaines où l’impact de l’IA générative pourrait bientôt se faire sentir, mais tous deux posent des défis. En effet, la santé étant l’un des secteurs les plus réglementés au monde, il est probable que nous assistions à une approche prudente dans ce domaine.
L’éducation sera confrontée à des défis similaires. Bien qu’elle ne soit pas aussi fortement réglementée que la santé, elle reste un secteur où l’État est fortement impliqué. Il y aura également des questions sociales et de gouvernance à résoudre dans les domaines où l’IA commence à empiéter sur des tâches précédemment effectuées par des humains, dont beaucoup peuvent être hautement qualifiés.
Les effets plus importants
ChatGPT semble avoir oublié un secteur qui lui permettrait de réaliser les prouesses d’écriture quasi créatives : le matériel informatique. Les bonds récents de l’IA auraient été impensables sans les progrès réalisés dans le domaine des semi-conducteurs. Les puces développées à l’origine pour le graphisme ont été essentielles pour traiter les données nécessaires à l’entraînement d’IA telles que ChatGPT. Il n’est donc pas étonnant que les semi-conducteurs soient au cœur des tensions commerciales mondiales.
De nombreuses technologies nouvelles et innovantes s’accompagnent de risques qui posent des dilemmes éthiques. Par exemple, la prévalence récente des « deepfakes » creuse le problème des « fake news« . Le monde de l’art et le monde académique devront développer des méthodes pour co-exister avec ces outils, et la loi devra gérer les ambiguïtés du droit d’auteur concernant la propriété du contenu. Ces questions ont été récemment mises en lumière par la décision de l’autorité italienne de surveillance de la protection des données d’ordonner aux propriétaires de ChatGPT de cesser de traiter les données des utilisateurs italiens, interdisant de fait l’application dans le pays.
Le point de vue des investisseurs
La réponse de ChatGPT à cette question démontre que l’impact potentiel de l’IA générative est majeur. Cependant, il est également clair que ces conséquences seront inégales et que les industries évolueront à des rythmes différents. Dans de nombreux secteurs, les entreprises seront soumises à un darwinisme numérique où il y aura clairement des gagnants et des perdants. Celles qui s’adapteront rapidement seront les grandes gagnantes, tandis que les autres risquent d’être laissées pour compte. Pour les investisseurs, cela signifie qu’il faut adopter une approche de stock picking qui tienne compte des nuances entre les secteurs et au sein de ceux-ci, ainsi que de l’impact inégal qu’auront le développement et le déploiement de l’IA générative.
L’eau – « source de vie » devient source de tristesse
Le 2 mai 2023
Par Andreas Fruschki, Responsable des actions thématiques chez Allianz Global Investors
Le 22 mars dernier, avait lieu la Journée mondiale de l’eau. Cette journée est célébrée par les Nations Unies depuis 30 ans maintenant pour rappeler l’importance essentielle de l’eau comme ressource vitale. En 2023, le thème de la Journée mondiale de l’eau était « Accélérer le changement ».
En effet, il semble urgent d’accélérer les efforts en vue d’un meilleur approvisionnement mondial en eau utilisable. Alors qu’environ deux tiers de la surface de notre planète bleue est recouverte d’eau, seulement 0,3% de l’approvisionnement mondial est de l’eau douce. Sa disponibilité subit une pression croissante, par exemple en raison du changement climatique ou de la population mondiale croissante. Et cela se produit théoriquement déjà à nos portes.
Sécheresse hivernale
En effet, un phénomène assez inhabituel s’est produit dans certains pays européens ces derniers mois : une sécheresse hivernale. Les grands cours d’eau comme le Pô et le Rhin ont enregistré des niveaux historiquement bas. En France, cela a entraîné une baisse de la production d’électricité nucléaire, entraînant une hausse des prix de l’électricité, aggravant les répercussions de la guerre en Ukraine et l’augmentation du coût du gaz. L’Espagne, le Portugal, l’Italie et la Turquie ont également enregistré de faibles précipitations, ce qui a entraîné une diminution de l’approvisionnement en eau pour l’agriculture et les villes.
En outre, l’absence de chutes de neige dans les Alpes en France, en Suisse et en Italie entraînera moins de fonte des neiges au printemps et en été. Fin janvier 2023, l’équivalent de l’eau de neige (EEN – une mesure de la quantité d’eau liquide stockée dans la neige) affichait un déficit de 35 % par rapport à la moyenne de la dernière décennie. Avec environ 60 % de l’eau qui coule dans les rivières italiennes provenant de la neige fondue, cela ne présage rien de bon.
Gestion des pénuries
Au vu de ces évolutions, il n’est pas surprenant que les responsables politiques en Europe examinent également de manière intensive les mesures de gestion des pénuries d’eau. Les mesures vont de l’élaboration de plans appropriés et d’appels à l’économie d’eau, à la promotion d’une utilisation plus efficace de l’eau et à l’investissement dans la modernisation des infrastructures.
La bonne nouvelle est donc : une prise de conscience du problème qui s’accroît, les gouvernements, les entreprises et le secteur de l’agriculture ont reconnu la nécessité d’agir. Une autre bonne nouvelle est que des « gains rapides » tels que la réparation des fuites ou la réduction des eaux usées sont possibles avec relativement peu d’efforts. Toutefois, les réparations locales sont souvent insuffisantes. Dans de nombreux endroits, l’infrastructure de l’eau vieillit et atteint la fin de sa vie physique. Cela nécessite une modernisation à grande échelle. En Italie, par exemple, on estime que 40% de l’eau n’atteint pas les utilisateurs finaux à la suite de fuites. Et rien que pour Londres et son réseau d’eaux (usées) datant de l’époque victorienne, on estime qu’environ 25.000 litres s’écoulent par seconde.
Investissements nécessaires
En termes de portée et de durée financières, la mise en place d’une infrastructure mondiale moderne de l’eau est une tâche titanesque. Le déséquilibre entre l’offre et la demande s’accentue. Par conséquent, pour maintenir notre niveau de vie et relever les défis du changement climatique, des investissements croissants sont nécessaires tout au long de la chaîne de valeur de l’industrie de l’eau.
Pour cette raison, le secteur de l’eau représente également une chance de croissance à long terme pour les investisseurs. En effet, il existe suffisamment de solutions au problème de la rareté. Ce qui est important ici, c’est qu’il ne s’agit pas de promouvoir la pénurie d’eau ! Au contraire, il s’agit d’investir dans des technologies capables de pallier durablement la pénurie imminente ou, idéalement, de l’éviter complètement.
Les entreprises dont les produits contribuent à réduire la consommation d’eau et les déchets ont du potentiel. Et les investisseurs peuvent rejoindre ces fournisseurs de solutions qui contribuent activement à l’amélioration de l’approvisionnement, de la qualité et de la durabilité des ressources mondiales en eau. Il peut s’agir d’opérateurs de réseau efficaces et d’entreprises spécialisées dans la réparation d’infrastructures, ainsi que d’entreprises de l’industrie de traitement ou de fabricants de technologies intelligentes de l’eau.
Si l’on considère l’ampleur des défis et des opportunités d’investissement présentés par le thème de l’eau, il devient clair que cela ne fait pas que promouvoir les Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies 6 (Eau propre et assainissement). Naturellement, cet objectif était au centre de la Journée mondiale de l’eau. Au contraire, les mesures portent également sur l’ODD 9 (Industrie, innovation et infrastructure), l’ODD 11 (Villes et communautés durables) ou l’ODD 12 (Consommation et production durables). Et cela ne semble pas incompatible avec l’importance primordiale de l’eau en tant que « source de vie ».
Ou en sont les investissements en or ?
Par Alexis Bienvenu, Fund Manager à La Financière de l’Echiquier
Le 20 avril 2023
L’or se rapproche de ses sommets historiques : passé au-dessus des 2.040 dollars le 13 avril dernier, il frôle son niveau historique du 6 août 2020, lorsqu’il a atteint 2.063 dollars, un niveau approché également en mars 2022.
Certes, en prix « réels », ajustés de l’inflation, le record est encore éloigné, car sur trois ans, l’inflation cumulée est considérable. Il n’empêche : la tendance récente à l’appréciation est nette, surtout lorsqu’on le compare à son niveau de début 2019, sous les 1.300 dollars. Soit plus de 50% de hausse.
Effet annonciateur
Or le métal est jaune est intelligent. Il réagit, par l’intermédiaire des prises de positions tactiques ou spéculatives des financiers, aux conditions monétaires, avec finesse et anticipation. On s’aperçoit, souvent, rétrospectivement, qu’il était annonciateur de crises ou de mouvements importants de politique monétaire. En 2008 par exemple, l’or avait nettement progressé juste avant la grande crise financière, alors que les banques centrales montaient leurs taux.
En 2011, lors de ses précédents records à plus de 1.800 dollars (soit beaucoup plus en dollars actuels), il avait joué un rôle de couverture efficace contre la dégradation de la note souveraine des Etats-Unis et la crise de la monnaie unique.
Qu’annonce donc son envolée actuelle ?
Tentons de le faire parler. « Je vois les taux réels baisser ». L’or réagit favorablement aux taux réels négatifs, c’est-à-dire lorsque l’inflation dépasse le niveau des taux. Certes, le message est imprécis, car il y a plusieurs mesures d’inflation, dans des pays différents, et de nombreuses références sur les taux (courts, longs, actuels, anticipés…).
Mais considérés dans leur ensemble, les facteurs en cause sont clairs. Le niveau général d’inflation attendu à quelques mois aux Etats-Unis, si l’or a raison, creuserait son écart positif avec la moyenne des taux. Ce qui peut signifier soit que l’inflation resterait élevée, voire remonterait, à niveau de taux égal, soit que les taux d’intérêts rebaisseraient nettement, et surtout plus vite que l’inflation. La dernière hypothèse est aujourd’hui favorisée par le marché.
Depuis la faillite de quelques banques en mars aux Etats-Unis, le marché anticipe de fortes baisses de taux directeurs de la part de la Réserve fédérale (Fed) dès la seconde moitié de 2023. Ce qui implique, en creux, des craintes élevées de récession, confirmées d’ailleurs par le dernier compte rendu de la réunion de la Fed où cette hypothèse fut considérée comme centrale.
Autre message possible de l’or : « je vois le dollar baisser ». Exprimé en dollars, le prix de l’or peut avoir tendance à monter afin de conserver sa valeur réelle si le dollar baisse. C’est ce qui se passe actuellement. Face à un panier de devises mondiales, le dollar perd du terrain depuis le dernier trimestre 2022. La raison de cette faiblesse tient à l’hypothèse que fait le marché sur le niveau des taux directeurs, qu’il voit baisser plus tôt et plus fortement aux Etats-Unis que dans la plupart des autres régions. Par exemple, le consensus n’entrevoit aucune baisse de taux en zone euro en 2023, contre plusieurs aux Etats-Unis. Idem pour le Royaume-Uni ou le Japon où le marché incline même en faveur d’une hausse de taux. Quant à la Chine, il est peu probable qu’elle baisse ses taux alors que l’activité décolle.
Une crise de la dette ?
Dernier message concevable : « je vois une crise de la dette américaine ». Que ce soit en raison des fragilités des banques régionales ou de l’immobilier commercial, tous deux sous la pression des hausses des taux, ou, plus grave encore, du blocage politique sur le plafond de la dette américaine, il n’est pas impossible que la note de crédit américaine soit questionnée. On se souvient de la dégradation de la note américaine le 5 août 2011. Coup de tonnerre dans le ciel d’été, elle avait correspondu au sommet de la précédente vague haussière de l’or. Or, on constate justement depuis 2022 une hausse ininterrompue du coût de la couverture contre un défaut des Etats-Unis. Même si un réel défaut paraît inimaginable, car suicidaire économiquement, les tensions autour du vote sur le relèvement du plafond de la dette pourraient encore augmenter dans les prochains mois. En 2011, l’agence S&P avait justifié sa dégradation par la déclaration suivante : « la dégradation de la note reflète notre vue que l’effectivité, la stabilité et la prédictibilité de la politique et des institutions politiques ont été affaiblies ». Des ressemblances avec la situation actuelle ?
Notre vieil ami l’or nous met en garde, sachons l’écouter. Heureusement, les actifs de qualité ne manquent pas, mais il faut les repérer et consentir à un certain prix.
Rédaction achevée le 14/04/2023
La biodiversité est la thématique la plus importante après le changement climatique
Par Daniel Wild, Chief Sustainability Officer chez J. Safra Sarasin
Le 19 avril 2023
Les effets de la perte de biodiversité sont déjà perceptibles et mesurables. De nombreuses espèces animales ont ainsi disparu au cours des 50 dernières années. Il faut reconnaître que notre compréhension de la biodiversité et la fixation de mesures et d’objectifs ont peut-être dix ans de retard par rapport au changement climatique.
Quelle importance pour la planète ?
La biodiversité est cruciale pour la planète et est la thématique la plus importante après le changement climatique. On estime que plus de la moitié du PIB mondial dépend directement ou indirectement d’écosystèmes intacts (par exemple le sol, l’air, l’eau) grâce à des services écosystémiques connexes tels que la pollinisation, la protection contre les inondations ou le stockage du CO2. La perte de biodiversité repose essentiellement sur cinq menaces :
- Changement d’affectation des sols et des mers
- Pollution
- Surexploitation des espèces
- Changement climatique
- Espèces invasives
Le danger est réel et pas seulement hypothétique, car les effets de la perte de biodiversité sont déjà perceptibles et mesurables. Ainsi, le « Living Planet Index », qui rassemble des données de 20.811 populations de 4.392 espèces, a diminué de plus de 68 % au cours des 50 dernières années.
Une attention suffisante ?
Ce sujet important suscite de plus en plus d’attention, grâce à une plus grande couverture médiatique et des reportages plus nombreux. Mais aussi parmi les personnes qui observent leur propre environnement : les oiseaux et les papillons que nous connaissions pendant notre enfance ont disparu. Autrefois, les pare-brises étaient couverts d’insectes après un trajet dans la campagne. Ils restent étonnamment propres aujourd’hui. La société commence à discerner tous ces liens, même si elle a encore du mal à comprendre l’énorme complexité de l’écosystème mondial.
Les agriculteurs sont-ils suffisamment sensibles à la biodiversité ?
L’agriculture et la sylviculture font assurément partie des thèmes principaux de la biodiversité, car elles ont de nombreux impacts négatifs (utilisation des terres, déforestation, utilisation de pesticides, ruissellement, monocultures, etc.) mais elles dépendent aussi fortement de services écosystémiques sains.
Toutefois, accuser uniquement les agriculteurs ne suffit pas, car les consommateurs devront eux aussi adapter leur demande. À cet égard, il sera important de réduire la demande de produits à forte intensité de ressources (par exemple, la production de viande bovine à forte intensité de CO2 et d’eau), en plus de mettre l’accent sur des moyens de production plus durables.
COP15 : quel résultat ?
Il faut reconnaître que notre compréhension de la biodiversité et la détermination des mesures et des objectifs nécessaires ont peut-être dix ans de retard par rapport au changement climatique. La convention de Montréal sur la biodiversité, issue de la COP15, pose donc les jalons, s’accorde sur l’importance de la biodiversité et établit un cadre mondial pour relever les défis de la perte de biodiversité.
Elle fixe aussi des objectifs concrets tels que la restauration de 30 % des écosystèmes dégradés, la réduction d’au moins 50 % des risques liés aux pesticides ou la réduction d’au moins 50 % de l’introduction d’espèces exotiques invasives. Le tout d’ici 2030.
Toutefois, sur la base de cette feuille de route, il reste encore beaucoup à faire pour définir les méthodes. Le succès du cadre dépend fortement de la volonté politique de coopérer au niveau mondial et de mettre en œuvre en temps utile les règles nécessaires pour atteindre ces objectifs.
Biodiversité et retour sur investissement : un duo compatible ?
Cela dépend de la conception de la stratégie. Comme pour d’autres thèmes du développement durable, les fournisseurs de solutions affichent souvent une croissance supérieure à la moyenne lorsqu’ils contribuent aux Objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU, dont la biodiversité fait évidemment partie. Mais comme la pertinence de la biodiversité couvre de nombreux secteurs, il n’est pas facile de définir les caractéristiques financières d’une approche potentielle, ni même de déterminer une référence pertinente.
Quelles sont les pertes économiques mondiales dues à des catastrophes naturelles ?
Par AON plc
Le 13 avril 2023
Le rapport « Weather, Climate and Catastrophe Insight 2023 » décrit les tendances mondiales en matière de catastrophes naturelles et de climat en vue d’aider à prendre de meilleures décisions pour gérer la volatilité et améliorer la résilience mondiale.
Ce rapport révèle que les catastrophes naturelles survenues au cours des 12 mois sous revue ont provoqué une perte économique de 313 milliards de dollars à l’échelle mondiale (4 % de plus que la moyenne du 21ème siècle), dont 132 milliards étaient couverts par des assurances. Si une grande partie des pertes subies en 2022 n’étaient pas couvertes, le défaut de couverture de 58 % est tout de même l’un des plus bas jamais enregistrés, signe d’un changement positif dans la façon dont les entreprises luttent contre la volatilité en atténuant les risques et de la protection accrue qu’offrent les assureurs aux communautés défavorisées via l’accès au capital.
Les données montrent que 2022 a été la cinquième année la plus coûteuse de tous les temps pour les assureurs, avec approximativement 50-55 milliards de dollars de dommages assurés liés à l’ouragan Ian aux États-Unis (la deuxième catastrophe naturelle la plus coûteuse de l’histoire des assurances).
En Belgique aussi
La Belgique a connu de sérieuses catastrophes naturelles ces dernières années. En juillet 2021, des inondations historiques ont frappé une grande partie du pays et entraîné d’énormes pertes économiques et assurées. La catastrophe a coûté la vie à 41 personnes et les pertes assurées se sont élevées à environ 2,5 milliards d’euros, dont approximativement 1 milliard d’euros ont été indemnisés par les Régions (principalement la Région wallonne) dans le cadre d’un partenariat public/privé. Les autorités sont actuellement en train de réévaluer le niveau de coopération entre les assureurs et les Régions. Avec le soutien de ces derniers, le risque inondation devrait rester assurable. On estime que la période de retour d’un événement tel que les inondations de juillet 2021 dépasse 300 ans, confirmant ainsi la nature très extrême de cette catastrophe naturelle au niveau de la Belgique.
En 2022, la Belgique a de nouveau été frappée, cette fois par une violente tempête européenne. Les pertes assurées sur le marché belge totalisent 600 millions d’euros. Ces récentes pertes ont eu des conséquences significatives sur la couverture de réassurance achetée par les assureurs belges.
D’une part, les réassureurs ont demandé que les assureurs conservent plus de risque en rétention, ce qui rendra les résultats de ces derniers plus volatils. D’autre part, les réassureurs ont considérablement augmenté leurs tarifs au fil des ans. Combiné aux niveaux actuellement élevés de l’inflation, cela aura un impact négatif sur le pricing des polices d’assurance.
Divers constats
Alors que l’innovation technologique permet de mieux comprendre le mécanisme des catastrophes et d’évaluer plus rapidement et de manière plus approfondie les dommages causés par un événement, l’étude examine la résilience et la capacité à surmonter les conséquences du dérèglement climatique (pas seulement au niveau des risques physiques, mais aussi dans des domaines comme la santé de la main-d’œuvre) et insiste sur la nécessité d’élaborer des stratégies à multiples facettes qui tiennent compte de l’atténuation des risques liés au changement climatique sur tous les fronts.
Parmi les autres conclusions du rapport « Weather, Climate and Catastrophe Insight » de 2023, citons notamment les suivantes :
- 421 catastrophes naturelles significatives ont été recensées en 2022, un chiffre supérieur à la moyenne du 21ème siècle (396).
- 300 personnes ont perdu la vie à cause des catastrophes naturelles en 2022, dont plus de 19.000 décès liés à la chaleur rien qu’en Europe, principalement à cause des canicules.
- Eunice a été la tempête la plus coûteuse en Europe depuis 2010, avec 3,4 milliards de dollars de pertes assurées. Les tempêtes de grêle généralisées en France ont contribué aux deuxièmes versements les plus élevés en termes de catastrophes naturelles dans le pays, avec un montant record de 6,9 milliards d’euros (7,4 milliards de dollars).
- Les sécheresses et les vagues de chaleur ont durement touché l’Europe, les États-Unis, la Chine et d’autres régions. Les prestations d’assurance pour le risque de sécheresse ont été les deuxièmes plus élevées jamais enregistrées, à 12,6 milliards de dollars au niveau mondial.
- Les inondations liées à la mousson au Pakistan ont eu un impact humanitaire de grande ampleur dans le pays. Dans un récapitulatif de la saison des moussons 2022, l’agence météorologique pakistanaise explique que les précipitations dans l’ensemble du pays ont dépassé la moyenne de 175 % entre juillet et septembre.
Améliorer la résilience
Les ravages causés par les catastrophes dans le monde entier mettent en évidence la nécessité de mettre en œuvre de manière plus généralisée des stratégies d’atténuation des risques, avec notamment une meilleure gestion des catastrophes et des systèmes d’alerte qui permettent d’améliorer la résilience. Alors que les effets du changement climatique sont de plus en plus visibles dans le monde, les aspects socio-économiques, les évolutions démographiques et la répartition des richesses font toujours partie des principales causes des pertes financières. Les données de ce rapport aideront les organisations non seulement à mieux atténuer leurs propres risques, mais aussi à prendre des mesures pour réduire le manque de protection dans le monde et mieux protéger les communautés dans lesquelles nous vivons et travaillons.
Le tableau ci-dessous présente les 10 événements ayant causé le plus de pertes économiques en 2022.
Le rapport complet et une courte vidéo sont disponibles sur le microsite interactif d’Aon. En plus de ce rapport, les lecteurs peuvent consulter les données actuelles et historiques sur les catastrophes naturelles ainsi que les analyses des événements sur catastropheinsight.aon.com.
Qu’est-ce que la shrinkflation ?
Par ODDO BHF AM
Le 23 mars 2023
Si la boîte de chocolats que vous avez reçue pour la Saint-Valentin était à moitié vide, la faute incombe à certaines marques qui n’hésitent pas à réduire les quantités tout en gardant le même prix et en utilisant des emballages surdimensionnés. Cette pratique, communément appelée la shrinkflation, mélange de l’anglais « shrink »(réduire) et inflation, est parfaitement légale. Dans un contexte marqué par une inflation généralisée des coûts ainsi que des tensions sur les chaines d’approvisionnement, les marques ont de plus de plus recours à la shrinkflation ainsi qu’à d’autres stratégies peu orthodoxes. Cependant, selon une étude de l’entreprise 84,51° appartenant à Kroger, un consommateur sur trois n’est pas conscient de ce phénomène.
La shrinkflation : une pratique floue visant à protéger les marges
Comme l’illustre l’indice des prix à la consommation aux Etats-Unis, qui est passé de quasiment 0% juste après le Covid pour atteindre un pic autour de 9% durant l’été dernier, l’année 2022 a connu un choc d’inflation extrêmement virulent. Quand on regarde plus en détails, il apparait que ce choc était très généralisé et qu’il a impacté aussi bien les matières premières agricoles que les salaires, en passant par les coûts de l’énergie ou du transport.
Ainsi, le secteur de l’agroalimentaire n’a pas été épargné et beaucoup d’acteurs ont augmenté leurs prix, passant les coûts de l’inflation aux consommateurs, une pratique bien connue. En plus des hausses de prix, les producteurs disposent d’autres pratiques plus floues afin de protéger leurs marges dans un contexte de hausse des coûts généralisés.
La pratique la plus connue et la plus répandue chez les producteurs est la « shrinkflation », ou réduflation en français. Sa définition est extrêmement simple : réduire la quantité tout en gardant, voire en augmentant le prix de vente. Son application est difficile à identifier par le consommateur qui est rarement attentif au poids des produits qu’il met dans son chariot. Ainsi, la shrinkflation peut s’apparenter à une inflation invisible qui est très probablement sous- estimée dans les indices classiques de mesure de l’inflation.
Quels produits ?
Les produits les plus touchés sont ceux dits transformés, tels que les yaourts, les snacks, les boissons ou encore les fromages. Il n’existe pas, hormis le poids du produit, d’indicateur permettant de suivre l’évolution du rapport quantité/prix de ces produits. A l’inverse, les produits les moins transformés tels que les produits frais (fruits et légumes, etc.) voient leurs prix affichés au kilo, les consommateurs peuvent alors plus aisément repérer les hausses de prix.
Les marques rivalisent d’ingéniosité pour tromper les acheteurs et n’hésitent pas à jouer sur la taille des emballages afin de faire croire que les quantités sont plus importantes. L’exemple le plus connu est celui des paquets de céréales dont la taille est très souvent disproportionnée par rapport à la quantité de produits contenus. Encore plus fort, les marques vont même jusqu’à convaincre les acheteurs que cette baisse de quantité est pour leur bien. Ainsi, en avril 2019, la marque Coca-Cola a fait passer la taille de ses cannettes vendues en Suisse de 50 cl à 45 cl, tout en expliquant que cette baisse répondait, en fait, aux attentes des consommateurs.
Contre toute attente, dès le mois de mai prochain, le format 50 cl fera son grand retour en terre helvète. Le porte-parole de la marque justifie ce virement de bord à coup d’enquêtes sur les consommateurs. Cependant, les supermarchés ont joué un rôle décisif dans cette bataille. Ainsi, la Coop avait décidé de contre-attaquer en important des bouteilles de 50 cl, d’abord de Pologne, puis d’Ukraine et de Serbie, toujours à 1,35 franc l’unité, tout en vendant les flacons de 45 cl suisses en même temps. De plus, le détaillant avait décidé de réintroduire dans son assortiment les bouteilles de Pepsi, le rival historique de Coca-Cola. Finalement, quatre ans plus tard, le producteur de soda a décidé de faire machine arrière tout en maintenant les mêmes prix !
L’Europe en première ligne
Malheureusement, cet exemple reste minoritaire et la tendance est plutôt à la hausse de l’utilisation de la shrinkflation. En effet, les retours en arrière sont rarissimes, même en période de baisse de l’inflation. Ainsi, en France en 2022, l’association Foodwatch estime que 6% des produits vendus ont vu leurs quantités baisser et, devant cette recrudescence, le gouvernement a décidé de faire le point.
Fin 2022, la Répression des fraudes a donc ouvert une enquête dans des usines de conditionnement. Elle a pu comparer les quantités indiquées sur les emballages et le poids réel des produits. L’enquête a aussi été menée dans les magasins d’alimentation afin de scruter les étiquettes de ces produits. Les résultats communiqués fin janvier font état d’anomalies dans 11% des commerces visités et dans 7 des 31 usines contrôlées concernant surtout des tablettes de chocolat, des produits ménagers et d’hygiène, mais aussi des yaourts. Le gouvernement français demande donc plus de transparence et prône l’utilisation d’applications mobiles afin de mieux informer les consommateurs.
Après la France, c’est au tour de la Pologne de faire la Une des journaux et, comme le mentionne très bien le Financial Times : « le consommateur doit non seulement se munir d’un porte-monnaie bien garni mais aussi d’une loupe pour passer au crible les emballages ». Avec une inflation en Pologne aux environs de 17%, soit presque le double de la moyenne de la Zone Euro, la shrinkflation est pratiqué avec une intensité jamais connue auparavant.
Si aujourd’hui on ne peut pas passer une journée sans que ce sujet soit abordé dans la presse, la shrinkflation n’est pas une pratique nouvelle.
Cette technique a été utilisée par des empereurs romains, qui ont rogné les bords de pièces d’argent et d’or, ou même introduits du cuivre et d’autres métaux moins chers afin de financer la construction de leur empire. Plus récemment, après le Brexit en 2016, les producteurs et distributeurs opérants sur le sol britannique ont massivement eu recours à cette stratégie alors que les coûts, notamment les taxes douanières, ont explosé.
Mais il existe également d’autres armes dont disposent le secteur agroalimentaire. On peut citer ici la cheapflation, qui consiste à utiliser des ingrédients moins chers, ce qui est encore plus difficile à identifier pour les consommateurs. A titre d’exemple, on peut citer le beurre dans lequel l’huile de palme remplace le lait, les confiseries où le sirop de glucose se substitue au sucre ou enfin le dentifrice qui comporte de moins en moins de fluor. Ces changements ont souvent un impact négatif sur la santé du consommateur, sans mentionner les répercussions écologiques.
En conclusion
Les conséquences du choc d’inflation de 2022 vont au- delà de la hausse des prix mesurée par les indicateurs traditionnels. Des pratiques floues ayant toujours existées, comme la shrinkflation, ou encore des méthodes plus récentes, comme la cheapflation, ont connu une adoption record. Le but des acteurs du secteur de l’agroalimentaire est de protéger leurs marges dans un contexte de hausse généralisée des coûts. Mais ces techniques ne sont pas sans conséquences sur la confiance des consommateurs, leur santé et celle de notre planète. Ainsi, on ne peut que recommander à chacun d’éviter au maximum les produits transformés et à passer plus de temps en cuisine. Comme le dit le journaliste culinaire Michael Pollan : «Vous pouvez manger tout ce que vous voulez du moment que vous le cuisinez vous-mêmes».
Un an après l’invasion russe de l’Ukraine, quelles leçons tirer pour l’ESG ?
Par Matt Christensen, Global Head of Sustainable and Impact Investing, Allianz GI
Le 20 mars 2023
La portée mondiale de l’invasion de l’Ukraine par les forces armées russes, qui a débuté en février 2022, a été considérable et a eu des répercussions énormes sur l’économie « just in time », la politique et les notions de durabilité. Un an après le début du conflit, on peut identifier quelques-unes des leçons spécifiques apprises (ou en cours d’apprentissage dans certains cas).
Accélérer la mise en place de sources d’énergie alternatives propres et abordables
La Russie est le deuxième producteur mondial de gaz naturel. Elle possède les plus grandes réserves de gaz au monde et est l’un des trois premiers producteurs mondiaux de pétrole brut. Le conflit a rapidement mis à l’épreuve la sécurité, l’accès et le caractère abordable de l’énergie au niveau mondial, mais surtout en Europe, obligeant les principales parties prenantes à envisager des sources comme le gaz et le nucléaire. L’hiver plus doux a protégé l’économie et le climat des impacts les plus graves de la guerre jusqu’à présent. Néanmoins, les arguments en faveur d’une architecture énergétique résiliente sont clairs. Les énergies renouvelables devraient avoir franchi le cap des 300 GW pour la première fois l’année dernière.
Réorganiser les économies
Pour soutenir les ambitions en matière d’énergie propre, il faut totalement repenser la façon dont nous nous approvisionnons en métaux et minéraux stratégiques. La Russie est un grand producteur de métaux de base et selon l’Economist Intelligence, des pays représentant plus de 77 % du PIB mondial importaient des quantités significatives d’au moins un métal de base de Russie ou d’Ukraine. Plus précisément, l’énergie propre dépend du nickel, dont la Russie est le premier producteur mondial, mais l’incertitude géopolitique a mis l’attention à la contribution de la Chine aux minerais de lithium et de terres rares. La seule façon de répondre durablement aux besoins en matières premières de l’énergie propre à l’avenir est de recycler efficacement les produits électroniques (« e-déchets »).
Food for thoughts
On a aussi découvert l’ampleur des économies agricoles russe et ukrainienne et leur contribution à la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale, ajoutant une autre dimension à la crise du coût de la vie. Le conflit a donné un aperçu de ce que pourrait entraîner une interruption durable de la chaîne d’approvisionnement alimentaire mondiale, éventuellement provoquée par des événements liés au climat ou à la biodiversité. Sans une transformation systématique de l’écosystème mondial, les inégalités alimentaires s’aggraveront, la contribution de l’alimentation au changement climatique ne s’améliorera pas et les services de santé, déjà en difficulté, pourraient être soumis à des pressions supplémentaires.
La défense
Le sujet de l’allocation de capital vers le secteur de la défense a occupé le devant de la scène en mars 2022. Alors que le marché était parvenu à un consensus sur les armes controversées, les avis étaient partagés sur l’inclusion ou l’exclusion des entreprises de défense dans les fonds labellisés développement durable basés sur les équipements et services militaires ou les armes nucléaires (dans le cadre ou en-dehors du Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP).
L’ESG est mort, vive E, S et G ?
La crise énergétique découlant du conflit a très vite fait de l’ESG un sujet politique brûlant. Le sous-investissement dans l’infrastructure énergétique mondiale, mais surtout en Europe, a été imputé à l’ESG et à un agenda climatique dépassé. Même si une grande partie de cette situation était motivée par des agendas politiques plutôt que par la substance, l’ESG a dû répondre à de véritables questions sur la manière dont elle était appliquée aux décisions d’investissement.
Il y a donc une nécessité d’un cadre de risque non financier modernisé et robuste, capable d’informer toutes les stratégies d’investissement.
Passer à la transition
En plus de tester la résilience de l’ESG, les événements de l’an dernier ont mis les marchés au défi d’envisager la transition vers l’économie verte au lieu de se concentrer uniquement sur l’économie verte. La nouvelle réglementation verte a été dénoncée comme étant déroutante, et déconnectée du monde réel de la décarbonisation et de l’atténuation des risques. Une approche plus globale de l’impact sur le monde réel et de la résilience économique future est nécessaire. La transition pourrait en être la pierre angulaire. La formalisation de la contribution que la transition et un engagement solide avec les sociétés pourrait fonctionner parallèlement à la réglementation verte pour augmenter les investissements nécessaires.
Même un pays aussi politiquement divisé que les États-Unis sur les questions de changement climatique a adopté la notion de transition comme base de son économie future. Peut-être en partie en réaction aux événements survenus dans la lointaine Ukraine, l’administration Biden a réussi à faire passer plusieurs textes de loi pour un montant total de plus de 1.000 milliards de dollars, qui permettront de créer un réseau vert et de subventionner les technologies vertes. Une transformation pluriannuelle mettra la pression sur d’autres plans de transition existants dans l’Union européenne et en Chine.
Si nous avons appris quelque chose des événements choquants qui ont débuté le 24 février 2022, c’est que le monde de l’ESG va s’affiner dans sa logique économique et politique à l’avenir, à mesure que les pays et les blocs économiques s’assureront que leur sécurité énergétique est plus étroitement définie par rapport à leurs ambitions climatiques.
Comment protéger son partenaire en cas de décès ?
Par Astrid Dutré et Sophie Slits, Senior Estate Planners chez Nagelmackers
Le 2 mars ars 2023
Comment faire pour que son partenaire soit financièrement et juridiquement bien protégé en cas de décès ?
Le choix juridique d’une union entraîne d’importantes conséquences tant sur le plan juridique que fiscal durant la vie mais également au moment du décès d’une des deux personnes formant le couple.
Quels sont les points d’attention les plus importants ?
- La dévolution successorale légale des partenaires
- La planification successorale
Dévolution successorale légale des partenaires
Si vous l’on n’a pas fait de testament, le législateur a pris des dispositions afin de déterminer qui sont les héritiers et ce à quoi ils ont droit.
Il s’agit dans ce cas de la ‘dévolution légale’, dont voici les règles spécifiques pour les partenaires.
Le conjoint survivant se voit attribuer un statut spécial parce qu’il hérite toujours, quelles que soient les personnes avec lesquelles il accède à la succession.
S’il y a des enfants, le conjoint survivant hérite toujours de l’usufruit de la succession et les enfants de la nue-propriété.
S’il n’y a pas d’enfants, le conjoint survivant hérite de la pleine propriété du patrimoine commun ou indivis constitué ensemble quel que soit le régime matrimonial. Le conjoint survivant hérite de l’usufruit des biens propres du défunt. Les autres héritiers (frères, sœurs, mère, père) héritent de la nue-propriété.
Cependant, si le conjoint survivant vient en concours avec des héritiers très éloignés (oncles, tantes, cousins…), le conjoint survivant recueille toute la succession en pleine propriété.
Et qu’en est-il des cohabitants ?
Commençons par les cohabitants légaux, ceux qui ont déposé une déclaration de cohabitation légale devant l’officier de l’état civil.
Le cohabitant légal survivant hérite de l’usufruit sur la maison familiale et les meubles meublants. Les autres héritiers légaux, comme les enfants, recueillent la nue-propriété de la maison familiale et la pleine propriété des autres biens.
Ce droit successoral légal est donc assez limité. En outre, le cohabitant légal n’est pas un héritier réservataire. Le droit successoral sur l’habitation familiale est, par conséquent, incertain car il peut lui être retiré par le biais d’un testament. A contrario, le conjoint survivant marié bénéficie de droits successoraux plus sûrs vu qu’il est un héritier réservataire.
Enfin, il y a les cohabitants de fait, à savoir ceux qui sont domiciliés à la même adresse. En vivant en cohabitation de fait, on n’hérite légalement de rien de son partenaire. Dans cette situation, si l’on souhaite attribuer des droits successoraux entre cohabitants, il faut prendre des mesures. Par exemple, on peut établir chacun un testament.
Plus que jamais, il est clair que les droits successoraux du partenaire diffèrent fortement en fonction du statut de l’union. La présence d’enfants communs ou d’un premier lit peut également avoir une influence sur l’héritage du partenaire.
Planification successorale
Dans la pratique, certains partenaires veulent aller plus loin que ce qui a été prévu par la loi. Ils veulent s’attribuer des garanties supplémentaires pour se protéger. Ils ont souvent des bonnes raisons pour ce faire. Cela peut être le cas d’un couple qui n’a pas d’enfants ou, par exemple, d’un couple qui estime que leurs enfants sont encore trop jeunes ou immatures pour être impliqués dans des démarches de structuration de patrimoine.
On parle dans ce cas d’une planification horizontale, à savoir une planification de patrimoine entre partenaires.
Dans un premier temps, ils travaillent entre eux sans optique de transmission à la génération suivante.
A quels instruments de planification patrimoniale peuvent-ils faire appel ?
- Le contrat de mariage
En cas de mariage, il est important d’analyser le régime matrimonial et, s’il y a un contrat de mariage, quelles clauses d’attribution de patrimoine ont été convenues entre époux.
Pour les personnes qui vont se marier ou qui se sont mariées, le recours à un contrat de mariage et le choix d’un régime matrimonial permet de mettre en place une planification horizontale.
On peut penser à l’ajout d’une clause d’attribution alternative du patrimoine commun pour les couples mariés sous le régime de la communauté. Pour les couples mariés sous le régime de la séparation de biens, cette clause d’attribution alternative peut s’appliquer s’ils ont créé entre eux un patrimoine commun interne.
Par l’ajout d’une clause d’attribution alternative, le conjoint survivant pourra, au moment du décès de son conjoint, faire un choix entre plusieurs options quant à la manière dont le patrimoine commun lui sera attribué. Ce choix variera en fonction de ses souhaits à ce moment précis et aura son propre traitement fiscal.
- La donation
La donation est possible pour les différentes formes d’union.
La donation entre époux est bien évidemment un instrument très pratique. Les donations entre époux faites hors contrat de mariage sont toujours révocables. Cela est d’autant plus important si le mariage devait un jour se solder par un divorce.
Pour les cohabitants (légaux ou de fait), il en va autrement. La donation est irrévocable. Donner c’est donner.
Une clause de retour conventionnel peut aussi être ajoutée à la donation. Cette clause permet que les biens donnés puissent réintégrer le patrimoine du donateur en exemption de droits de succession s’il devait y avoir prédécès du donataire.
Une donation entre époux est uniquement possible sur les biens propres. Ainsi, les biens qui appartiennent à la communauté ne peuvent pas faire l’objet de donations entre époux.
En cas de donation, il faut tenir compte de la réserve des enfants. La part dont on peut toujours disposer librement, et donc donner à son partenaire, s’élève à la moitié du patrimoine.
- Le testament
Un testament est un acte par lequel on détermine à qui reviendra une partie du patrimoine au moment du décès.
Il est alors possible de décider aujourd’hui ce qu’il adviendra du patrimoine après le décès.
La rédaction d’un testament peut être utile, voire nécessaire, quand les partenaires veulent se protéger de manière optimale ou veulent attribuer quelque chose au moment de leur décès.
En cas de mariage sans enfants, la loi prévoit que le conjoint survivant ainsi que les parents, les frères et les sœurs du défunt seront appelés légalement à la succession. Parfois, cela n’est pas souhaité. Dans pareille hypothèse, il est possible de déroger à la dévolution légale par le biais d’un testament. Les parents n’étant plus considérés comme des héritiers réservataires, la totalité de la succession pourrait dès lors être attribuée au partenaire survivant par ce biais.
Les cohabitants de fait n’héritent pas automatiquement l’un de l’autre et les cohabitants légaux n’ont qu’un droit successoral limité (usufruit sur le logement). Il peut dès lors être utile de s’avantager mutuellement par le biais d’un testament.
Un testament ne prend effet que lors du décès et présente l’avantage de toujours pouvoir être révoqué.
Il ne faut toutefois jamais perdre de vue la réserve des enfants qui correspond à la moitié du patrimoine du parent défunt.
- La clause d’accroissement
La clause d’accroissement est un contrat par lequel deux parties prévoient réciproquement qu’en cas de décès de l’une d’elles, certains biens mobiliers viendront accroître le patrimoine de l’autre.
De par la nature aléatoire de ce contrat, aucun droit de succession ou de donation n’est dû sur l’accroissement du patrimoine mobilier. Cette technique de planification patrimoniale est néanmoins dans le collimateur du fisc. Chaque région a ainsi fixé ses propres conditions. C’est pourquoi il est d’autant plus important de contacter un conseiller juridique ou un notaire à cet égard.
- Assurance vie – Clauses bénéficiaires
Lorsque l’on souscrit à une assurance vie, on peut indiquer qui sera le bénéficiaire du capital en cas de décès. A défaut d’indication précise, le capital sera attribué à la succession au moment du décès.
L’assurance-vie permet donc de désigner des bénéficiaires qui sont chers.
Il ne faut cependant pas oublier de vérifier de temps en temps que ces bénéficiaires sont toujours les personnes à qui on veut attribuer le capital décès.
Sauf acceptation expresse du bénéfice de l’assurance-vie par le bénéficiaire, on a la possibilité d’adapter selon ses souhaits le nom du bénéficiaire au cours de sa vie.
Enfin, selon la structure de l’assurance-vie et selon le lien juridique avec le bénéficiaire, il peut y avoir des différences au niveau fiscal mais aussi au niveau de la répartition du capital décès.
Il faut faire le point régulièrement et se renseigner auprès de son banquier ou assureur.
Cette publication a un caractère purement informatif et n’engage nullement la banque. Elle ne tient pas compte de votre situation personnelle et ne peut donc jamais être considérée ni comme un avis juridique ou fiscal ni comme une consultation en planification financière. Vu la complexité de certaines opérations et leurs implications au niveau civil et fiscal, nous vous encourageons vivement à consulter votre notaire ou votre conseiller personnel. La présente brochure est basée sur la législation en vigueur en janvier 2023
Le défi climatique face aux enjeux énergétiques
Par Ludivine de Quincerot, Responsable ESG & Analyse financière, et Andréa Sekularac, Chargée d’affaire Investissement durable chez Rothschild & Co Asset Management
Le 20 février 2023
Au sortir de l’année 2022, l’environnement géopolitique et économique semble peu favorable au renforcement des mesures environnementales alors que, de surcroît, les tensions sociales latentes se sont encore accentuées. Le respect de l’Accord de Paris et l’atteinte de l’objectif Net Zero sont-ils toujours viables dans ce contexte, a priori, peu favorable à la cause environnementale ?
Une COP dans un contexte international tendu
La COP27 s’est achevée avec un sentiment mitigé. Certains engagements sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre ou la sortie des énergies fossiles ont été renforcés. Cependant, la question des pertes et dommages a davantage cristallisé les débats. Les pays en développement étant les premiers exposés aux conséquences d’un réchauffement climatique dont les pays développés sont les principaux responsables, les participants ont finalement entériné la création d’un nouveau fonds d’aide aux États les plus affectés.
Fruit d’un constat vieux de 30 ans, cette décision n’est pas anecdotique et envoie un signal fort. Jusqu’à présent, les investissements étaient peu, voire pas, consacrés à la gestion des répercussions du changement climatique. Aider les pays les plus impactés s’avère légitime. Néanmoins, cette réorganisation des priorités révèle que nous cherchons désormais à compenser les effets autant qu’à agir sur les causes et éclaire d’un jour nouveau les conséquences économiques et sociales du changement climatique.
Comment en est-on arrivé là ?
L’éclatement du conflit russo-ukrainien a englué l’Europe dans une crise énergétique sans précédent, accentuée par la mise à l’arrêt de la moitié du parc nucléaire français, principale alternative aux centrales thermiques. Face à l’explosion des prix du gaz et de l’électricité et aux risques économiques et sociaux en découlant, les décideurs politiques ont assez logiquement placé les intérêts nationaux en amont de l’enjeu global, reléguant la question climatique au second plan. Cette situation a surtout mis en lumière la très forte dépendance de certains États vis-à- vis d’un nombre limité de producteurs d’énergies fossiles, mais également le manque de diversité du mix énergétique européen.
Confronté à l’absence d’alternative, le recours aux substituts parfois les plus “carbonés” a généralement été retenu pour parer à l’urgence. L’année 2022 a ainsi été marquée par le retour en force des énergies fossiles, au premier rang desquelles, le charbon dont l’utilisation devrait augmenter de 1,2%(1). Dans le même temps, la demande en gaz s’est accrue afin de reconstituer des stocks au plus bas à l’approche de l’hiver et éviter que la crise énergétique ne se mue en profonde crise sociale.
L’Accord de Paris est-il caduc ?
La crise énergétique illustre particulièrement la problématique de la temporalité et l’opposition entre intérêts de court et de long terme. Cette même question se pose continuellement aux acteurs du secteur financier. Si la situation actuelle a favorisé le court terme, les engagements préexistants, que ce soit le calendrier de sortie du charbon ou la trajectoire de baisse des émissions et des investissements n’ont été ni revus, ni supprimés. Au contraire, ils ont parfois même été renforcés.
De surcroît, une crise contraint à innover et peut accélérer les prises de décisions. Ainsi, aux États-Unis, la crise pétrolière de 1970 avait poussé les politiques à chercher des sources d’approvisionnement alternatives visant à assurer leur indépendance énergétique. Par ailleurs, selon l’IEA(2), les énergies renouvelables sont actuellement les plus rentables. Bien qu’encore très limitées, elles font office d’amortisseur dans un contexte énergétique tendu. Selon l’agence, compte tenu des prix actuellement élevés du gaz et de l’électricité et grâce aux investissements en cours, la capacité de production renouvelable pourrait devenir la première source de production d’électricité avant 2030. D’ici là, la situation énergétique devrait rester fragile, les tensions contribuant à allonger le processus de transition, sans pour autant remettre en cause l’objectif initial.
Des ambitions fortes au niveau international
En Europe, le nouveau programme RePowerEU, estimé à 210 milliards d’euros, vise 45% d’approvisionnement ENR(3) d’ici 2030, mais également 13% d’économies d’énergie (contre 9% actuellement) et a dernièrement été renforcé par un dispositif de taxe carbone aux frontières de l’Union. Aux États-Unis, l’inflation Reduction Act of 2022 voté en juin dernier (près de 400 milliards de dollars sur 10 ans) entend supporter l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 50% à 52% d’ici à 2030 par rapport à 2005 et porte, pour l’essentiel, sur des crédits d’impôt visant à favoriser la production d’énergie renouvelable “made in USA”.
Cette volonté affichée de s’émanciper de la Chine au travers de mesures ultra-protectionnistes constitue néanmoins une source de tensions pour ses partenaires européens qui deviennent, encore une fois, dommage collatéral d’une guerre commerciale qui perdure en dépit de la fin du mandat de Donald Trump. En Chine, justement, le Parti envisage une réduction de l’intensité carbone de plus de 65% par rapport à 2005 et une augmentation de la part des énergies non fossile à hauteur de 25% de la consommation d’énergie (contre 15,3 % fins de 2019). Si la question de la temporalité se pose, ces annonces révèlent clairement l’ambition d’un État qui souhaite se positionner en leader des énergies renouvelables et sait généralement se donner les moyens d’atteindre ses objectifs.
La transition énergétique face aux enjeux économiques et sociaux
En dépit de la volonté affichée par les États, la situation actuelle démontre qu’un revirement brutal de stratégie énergétique n’est pas viable. Ce processus implique notamment de prendre en considération les impacts sociaux (reconversion professionnelle, mesures de soutien et d’accompagnement, formation…) ou les conséquences pour les territoires (délocalisation, surconcentration…). Pour être soutenable le nouveau modèle ne doit pas recréer ou accroître les déséquilibres inhérents aux précédents. En outre, la nécessité de diversifier le mix énergétique européen, notamment via des politiques publiques encourageantes, est un sujet de longue date mais la désorganisation dans sa mise en œuvre risque d’avoir un impact conséquent sur la stabilité des prix et, in fine, sur les populations. En effet, selon les modélisations de la BCE, en Europe, une transition ordonnée engendrera une hausse des prix de l’énergie de l’ordre de 3,5% par an, par rapport à un scénario de base. Ce scénario conduirait à une inflation de 0,10% en moyenne annuelle et a un impact légèrement négatif, à court terme, sur le PIB de la Zone euro. En revanche, une transition climatique désordonnée s’accompagnerait d’une hausse des prix de l’énergie de 13,5% par an en moyenne et serait inflationniste (+0,5% en moyenne annuelle par rapport au scénario standard) et négative en termes de croissance à court et moyen terme(4). Par ailleurs, ces scenarii se confrontent désormais à la crise actuelle qui tend à accroître les effets inflationnistes de la composante énergétique.
Un contexte inflationniste préjudiciable à la transition ?
Déjà alimentée par la crise sanitaire mondiale, l’inflation a bondi dans de nombreuses régions du globe, sous l’effet conjugué de la crise énergétique et des pénuries de matières premières. Face à cette situation, les principales banques centrales ont amorcé un mouvement de hausse de taux non observé depuis plus de 10 ans.
Dans un contexte où le coût de la dette augmente, est-il dès lors réaliste d’espérer que les entreprises engagent des plans d’investissement en faveur de la transition ? La nouvelle donne obligataire ne remet pas nécessairement en cause leur capacité à investir. L’environnement de taux très favorable au sein duquel nous avons évolué au cours de la dernière décennie a permis à la plupart d’entre elles, notamment les énergéticiens, d’afficher des bilans financiers sains. Par ailleurs, la plupart des évolutions réglementaires ont pour effet de favoriser l’investissement dans des solutions durables. Du point de vue financier, on constate également que les critères de durabilité influent sur les primes de risque en raison des garanties supplémentaires qu’ils offrent aux investisseurs. La transparence et la lisibilité des investissements seront donc la clé pour entreprises désireuses de financer leur transition et que cela contribue à renforcer leur valorisation. Le rôle reviendra à l’investisseur de sélectionner les acteurs engagés et les mieux positionnés pour bénéficier de ce potentiel de d’appréciation.
Le Net Zero, une utopie ?
Plus de 80% de l’économie mondiale est actuellement engagé dans l’atteinte de l’objectif Net Zero(5). Si le rythme pose question, la dynamique n’en est pas moins amorcée. La crédibilité de ces engagements passera toutefois par la définition d’objectifs à différentes échéances et de plans de transition organisés avec des moyens clairement identifiés. Parvenir à une standardisation des engagements (intégrés dans la stratégie de l’entreprise, l’allocation de capital avec un suivi du budget CO2) s’avère essentiel, de même que la prise en considération du scope 3(6), malgré la complexité inhérente à cette donnée.
Aussi, la création d’une autorité de contrôle pour encourager la transparence et limiter l’écoblanchiment contribuera nécessairement à l’émergence de “best practices” et de standard de marché. La réglementation œuvre en ce sens et investisseurs et entreprises sont globalement favorables à la mise en œuvre d’initiatives telles que la taxonomie, qui offrent un cadre légal et unifié. Par ailleurs, au-delà des énergies fossiles et de leurs alternatives (hydrogène, fusion nucléaire…), les questions de l’efficience énergétique et de l’innovation technologique seront cruciales dans les années à venir. En dehors des seuls énergéticiens, les secteurs particulièrement émetteurs (industrie, services aux collectivités, matières premières, chimie…) auront donc un rôle fondamental à jouer en faveur de la transition.
(1) IEA, Coal 2022 – Analysis and forecast to 2025, décembre 2022..(2) International Energy Agency : Agence internationale de l’énergie.
(3) Énergies renouvelables.
(4) Source : BCE, 2020.
(5) University of Oxford, novembre 2021.
(6) Émissions de carbone indirectes liées aux différentes étapes du cycle de vie d’un produit.
L’alternatif, oui mais lequel ?
Par Alexis Grutter et Ludovic Berthe, Gérants, La Financière de l’Echiquier
Le 15 février 2023
En 2023, les investisseurs, qu’une année boursière atypique a mis à l’épreuve en 2022, doivent réviser leurs portefeuilles. Cette révision doit se faire à l’heure où l’ère des taux zéro et de la subvention monétaire s’achève, dans un contexte de volatilité et d’incertitudes persistantes. Une des réponses possibles peut être cherchée du côté de la gestion alternative.
Apparue dans la seconde moitié du XXe siècle, son essor s’est accéléré au gré des crises subies par les marchés, des chocs pétroliers des années 70, à la crise financière de 2008, en passant par le krach de 1987, la bulle internet des années 2000 ou encore le contexte de polycrises que nous avons connu en 2022…
Des stratégies spécifiques
En parallèle à la hausse des actifs sous gestion au niveau mondial, estimés à ce jour à plus de 5.000 milliards de dollars[1], la démultiplication des stratégies alternatives a permis à cette gestion d’apporter des réponses à des typologies de gestion ou d’environnement bien particuliers, chacune de ces stratégies comportant son lot d’avantages et d’inconvénients.
La majorité des stratégies de gestion alternative est assez corrélée aux actifs risqués, ce qui, lors des crises, est un écueil majeur. On est, en effet, en droit de s’attendre à ce que ces fonds apportent, en périodes troublées, une décorrélation bienvenue au sein d’un portefeuille.
Si l’histoire a révélé que beaucoup de ces stratégies n’apportent pas la diversification tant attendue, une stratégie fait, crise après crise, ses preuves : les CTAs (Commodity Trading Advisor). Au-delà de leur décorrélation des actifs traditionnels, ces stratégies systématiques ont en effet la capacité de générer des performances positives lors des périodes de dislocation de marché, et donc de couvrir une partie des pertes accumulées par les autres stratégies.
Capteurs de tendances
Suiveurs de tendance, trend followers, les CTA ont pour objectif de capter les tendances à moyen et long terme sur un grand nombre de classes d’actifs, indices boursiers, obligations d’État, devises ou encore matières premières, sur lesquelles ils s’exposent le plus souvent via des produits dérivés, des contrats de futures.
Autre atout, ces investissements ne sont pas affectés par les émotions humaines. Les signaux sont générés systématiquement par des modèles quantitatifs. Un cadre systématique qui permet d’éviter les erreurs de comportement humain, telles que l’arrêt trop précoce des gains ou une prolongation des pertes trop étendue. Cette caractéristique a historiquement aidé les fonds CTA à obtenir des rendements positifs tant sur les marchés haussiers que baissiers.
Enfin, les CTA ont la capacité de surperformer lorsque la volatilité du marché est élevée ou en hausse, car la volatilité tend à faire monter ou baisser les prix de toutes les classes d’actifs dans une plus grande mesure. Les stratégie CTA se sont ainsi notamment avérées très intéressantes lors des périodes de correction, comme la bulle Internet entre 2000 et 2003 ou la grande crise financière de 2008.
Mais aussi dépendants des tendances
Cependant un CTA est dépendant des tendances. Lors des brusques retournements, il peut se voir significativement impacter. De plus, dans les périodes de faible volatilité, les tendances sont plus difficilement exploitables. Mais, dans le cadre de portefeuilles diversifiés, ce n’est pas problématique puisque les actifs traditionnels performent généralement très bien dans ce type d’environnement.
A contrario, la situation délicate de 2022, qui a conjugué hausse des taux d’intérêt, inflation et instabilité des marchés, a été propice à ce type de stratégie. Les tendances baissières sur les marchés actions et obligataires, ainsi que la hausse du dollar et des matières premières ont su être exploitées et ont permis à cette approche de générer des performances positives. Au-delà de proposer une simple alternative, la stratégie CTA est surtout extrêmement complémentaire des actifs traditionnels et se marie parfaitement avec un portefeuille diversifié.
Hausse des taux d’intérêt, une opportunité pour les CTA ?
2023 sera sans doute une année riche en rebondissements et en incertitudes. Les taux plus élevés présents partout dans le monde auront un effet de réévaluation sur de nombreuses classes d’actifs et devraient engendrer des tendances exploitables. Les stratégies CTA sont ainsi un outil de diversification pertinent, notamment lors de périodes plus complexes compte tenu de leur décorrélation des stratégies traditionnelles. Dans l’éventualité d’un affaiblissement des tendances après une année 2022 exceptionnelle à ce titre, il peut être judicieux de sélectionner des fonds quantitatifs qui, sans être uniquement tributaires du trend following, exploitent également d’autres sources de rendement. Des fonds qui seront moins pénalisés en cas de brusques retournements de tendances.
Disclaimer : Les opinions émises dans le document correspondent aux convictions des gérants. Elles ne sauraient en aucun cas engager la responsabilité de LFDE.
[1] Etude Global Alternatives menée par Willis Towers Watson
Le secteur des énergies nouvelles devient stratégique pour la Chine
Par ODDO BHF AM
Le 9 février 2023
L’expansion de la Chine au sein du secteur des énergies nouvelles relève de deux préoccupations stratégiques : l’autosuffisance énergétique et la transition de producteurs bas de gamme vers des producteurs haut de gamme dans le secteur manufacturier.
Des énergies nouvelles pour atteindre l’autosuffisance énergétique
Le développement des énergies nouvelles est nécessaire pour que la Chine réduise sa dépendance vis-à-vis des ressources énergétiques extérieures. La Chine dispose d’abondantes ressources en charbon mais dépend fortement de l’importation de pétrole brut et de gaz en raison de l’insuffisance de l’offre nationale. La dépendance extérieure de la Chine au pétrole brut et au gaz naturel s’élevait à environ 72 % et 44 % respectivement en 2021.
L’offre nationale en énergie ne peut pleinement répondre à la demande de l’usine du monde, même pour ce qui concerne les ressources en charbon. Avec l’augmentation des prix de l’énergie et l’intensification des tensions géopolitiques, l’autosuffisance énergétique revêt une importance encore plus grande pour la Chine.
Les énergies nouvelles pour la transition du secteur manufacturier
Alors que les capacités de production bas de gamme se déplacent progressivement vers l’Asie du Sud-Est, la Chine cherche à évoluer vers une production haut de gamme. Les modules photovoltaïques (PV) et les véhicules électriques (VE) ouvrent la voie vers un nouvel environnement manufacturier. Malgré des décennies d’efforts entrepris pour promouvoir les marques de véhicules locales, la Chine n’a pas réussi à devenir un leader du secteur des véhicules conventionnels (essence/diesel), pas même sur son marché national.
Toutefois, comme les moteurs et boîtes de vitesse, qui constituent les éléments clés des véhicules conventionnels, ne sont plus utilisés par les VE, la Chine y voit une opportunité de rompre la domination des prestigieuses marques multinationales. Des résultats sont déjà visibles dans de grandes villes comme Shanghai. En novembre 2022, un véhicule sur deux vendus à Shanghai était électrique. Pour la jeune génération d’acheteurs, il n’est plus question de choisir entre « BMW ou Audi », mais entre « BYD ou Tesla ». En septembre 2022, BYD (marque chinoise) était leader du marché chinois des VE avec environ 29 % de part de marché, SAIC (marque chinoise) et Tesla (dont la production est assurée dans son immense usine en Chine) arrivant ensuite avec une part de marché respective de 9 % et 8 %.
Un avantage concurrentiel chinois immense sur les énergies nouvelles
Les sociétés chinoises sont profondément intégrées aux chaînes industrielles mondiales. Par exemple, la Chine domine 80 % de la chaîne d’approvisionnement mondiale des produits PV solaires, et fabrique plus de la moitié des composants d’éoliennes du monde. Le géant chinois des batteries pour VE CATL représente à lui seul plus de 34 % de l’offre mondiale en batteries pour VE (contre environ 15 % pour la société coréenne LG au premier semestre de 2022).
L’avantage concurrentiel chinois repose sur des investissements, une production et une consommation à grande échelle. La demande et les investissements massifs stimulent la production à grande échelle, ce qui incite les sociétés du secteur des énergies nouvelles à intensifier l’innovation, améliorer l’efficacité et réduire le prix de l’énergie. Une baisse des prix stimulerait davantage la demande en énergies nouvelles.
La position de leader du secteur des énergies nouvelles qu’occupe la Chine ne peut s’obtenir que grâce au soutien continu qu’apporte le gouvernement depuis des dizaines d’années.
Les investisseurs pourraient aussi avoir de nombreuses opportunités de croissance à saisir.
La dette d’entreprise au début 2023, puis la technologie
Par Christopher Govaerts, Stéphane Denys, Pascale Nachtergaele et Rik Dhoest, Banque Nagelmackers
Le 23 janvier 2023
On s’oriente vers un environnement volatil au premier semestre 2023, avant que le contexte économique devienne plus favorable pour un retour des actions technologiques sur le devant de la scène. En effet, on ne doit pas s’attendre à un scénario catastrophe comparable à 2008 pour les prochains mois. Pour 2023, une croissance de 0,5% est attendue pour la zone euro. On n’attend pas de récession dure, avec une croissance qui ressortira à 2,7% au niveau mondial et à 1% aux Etats-Unis.
Stabilisation
Mais comme en 2022, c’est l’inflation qui occupera vraisemblablement le devant de la scène durant les prochains trimestres. On table alors sur une inflation qui va se fixer autour de 6,5% au niveau mondial et de 4,4% dans les pays développés. Pour un retour total à une certaine forme de normalité du contexte inflationniste, il faudra toutefois attendre 2024.
En dépit du relâchement des tensions sur les chaînes d’approvisionnement, le pic d’inflation est encore devant nous aux Etats-Unis en raison d’une poursuite des pressions sur les salaires et sur les prix du logement, ainsi qu’en Europe en raison du maintien à un niveau élevé des coûts de l’énergie. Le taux directeur de la Banque Centrale Européenne devrait atteindre un sommet à 3,25% vers la fin du premier semestre 2023 pour se stabiliser ensuite sur ce niveau, tandis que la Réserve Fédérale américaine devrait faire grimper le sien vers 4,75-5%, avant d’éventuellement pouvoir envisager un relâchement durant le second semestre de 2023.
Activer les liquidités
Dans l’ensemble, les obligations restent encore sous-pondérées par rapport à une allocation neutre, mais on devrait repasser en surpondération durant les prochains mois . Au niveau de la poche actions, la préférence reste pour les actions non américaines, notamment pour l’Europe et le Japon. La volatilité devrait rester élevée durant le premier semestre, avec une préférence sectorielle pour le secteur bancaire.
On pourrait redevenir plus constructif sur les actions de croissance dans le courant de 2023, et plus particulièrement sur les actions technologiques de croissance. Lorsque les marchés commenceront à anticiper le retournement de politique de la Reserve Fédérale, ces actions devraient retrouver de l’intérêt chez les investisseurs. Enfin, dans un contexte plus favorable aux grandes classes d’actifs traditionnelles, les investissements alternatifs (or, matières premières, actifs réels, etc) devraient moins bien se comporter.
Confiance sans complaisance
Par Olivier de Berranger, Directeur Général Délégué et CIO, et Enguerrand Artaz, Gérant, La Financière de l’Echiquier (LFDE)
Le 18 janvier 2023
Chaque année boursière comporte ses spécificités et charrie son lot d’événements particuliers. Il en est quelques-unes qui, des décennies après, continuent de marquer l’histoire des marchés financiers. 2022 sera sans doute de celles-là. Les actions et les obligations ont baissé de concert, aboutissant aux pires performances des portefeuilles diversifiés depuis les années 1930. L’éclatement du conflit russo-ukrainien, la guerre la plus profonde sur le sol européen depuis la seconde guerre mondiale, le resserrement monétaire le plus fort depuis les années 1980, mené par la quasi-totalité des banques centrales du monde, face à la résurgence d’une inflation atteignant des records de plusieurs décennies… Autant de faits historiques qui devraient faire entrer 2022 dans le club très fermé des années boursières remarquables.
Enfin une année sereine ?
Des faits qui ont aussi mis à l’épreuve les investisseurs. Après des mois passés dans le rouge, ponctués de très rares bonnes nouvelles, 2023 leur procurera-t-elle un peu de sérénité et de confiance ? Force est de constater qu’à court terme, les perspectives économiques sont moroses. Si elle semble avoir été efficace pour juguler une inflation qui a peut-être enfin atteint un plateau, la violence du resserrement monétaire devrait provoquer une récession mondiale. La capacité d’action des banques centrales et des Etats sera limitée, les premières en raison de la persistance d’une inflation élevée, les seconds à cause du renchérissement du coût de la dette.
Ce contexte incite donc à la prudence sur des marchés actions, dont les valorisations se sont comprimées sans pour autant pouvoir être qualifiées de bradées, et qui pourraient connaître des révisions de perspectives bénéficiaires à la baisse. Dans une logique de long terme en revanche, les baisses de prix et de multiples qu’ont connu les actions ces derniers trimestres pointent vers de très probables performances positives, à l’horizon de quelques semestres.
Prudence mais bonnes nouvelles
Prudence à court terme donc, avec une volatilité élevée persistante et de potentielles nouvelles déconvenues. Mais certaines faiblesses pourraient permettre de reprendre du risque actions au sein des portefeuilles. Dans cette optique, les petites et moyennes valeurs de croissance, particulièrement malmenées en 2022, pourraient offrir d’intéressantes opportunités. L’autre bonne nouvelle est le fort regain d’attractivité des grandes perdantes de ces dernières années : les obligations, au premier rang desquelles, les obligations d’entreprises privées. Avec un portage à nouveau très intéressant, l’arrêt prochain de la montée des taux par les banques centrales et des primes de risque intégrant partiellement un scénario de ralentissement économique, le crédit devrait en effet retrouver son rôle de diversification au sein des portefeuilles.
Alors que l’ère des taux à zéro et de la subvention monétaire prend fin, les investisseurs seront confrontés à un environnement a priori moins favorable, incitant à réviser et diversifier la composition des portefeuilles. Une réinvention qui, selon l’immuable principe de destruction créatrice, ouvrira la voie à des innovations susceptibles de générer de la performance dans les prochaines années.
Disclaimer : Les opinions émises dans ce document correspondent aux convictions de l’auteur. Elles ne sauraient en aucun cas engager la responsabilité de LFDE.
Croissance durable : comment répondre aux besoins des particuliers fortunés ?
Par Simon Gorbutt, Directeur, Responsable de la planification patrimoniale chez Lombard International Assurance
Le 12 janvier 2023
La notion de durabilité et les facteurs Environnementaux, Sociaux et de bonne Gouvernance (ESG) sont désormais incontournables dans l’univers de la gestion privée. Les investisseurs fortunés et ultrafortunés (HNW et UHNW), ainsi qu’une génération émergente d’investisseurs, ont adopté de nouvelles attentes et de nouveaux besoins. À l’heure où la réglementation ESG transforme le secteur de la gestion privée, comment les gestionnaires de patrimoine et les conseillers financiers peuvent-ils rester pertinents aux yeux d’un investisseur soucieux de la durabilité ?
Un changement de comportement
À l’instar de la révolution digitale, la durabilité bouleverse le secteur de la gestion privée et devrait profondément transformer les approches traditionnelles de structuration et de planification patrimoniales. On constate un changement d’attitude évident de la part des investisseurs qui se tournent vers l’avenir. Ceux-ci souhaitent que la gestion de leur patrimoine reflète leurs préférences, qu’ils estiment devoir s’accorder avec les rendements potentiels de leur portefeuille, que ces rendements revêtent une forme financière ou altruiste. Le fondateur de Patagonia et sa famille en sont le parfait exemple. Pour contribuer à la lutte contre le changement climatique et à la protection des terres sous-développées à travers le monde, ils ont fait le choix de transférer leur participation d’une valeur de 3 milliards de dollars à une fiducie dédiée et à une organisation à but non lucratif.[1]
De nouveaux défis pour le secteur
En termes d’investissement, on peut identifier davantage d’options pour les investisseurs soucieux du développement durable. Par exemple, la proportion d’investissements à impact dans les portefeuilles atteignait 41 % en 2021. Cela crée toutefois de nouveaux défis pour les conseillers patrimoniaux et le secteur de la gestion privée dans son ensemble.[2]
Une importance croissante est accordée à l’intégration des facteurs ESG dans la planification patrimoniale à long terme et, à mesure que les générations se succèdent, cette question est de plus en plus récurrente dans les discussions. Il ne s’agit plus de préserver l’héritage d’une seule famille. L’impact du patrimoine est une préoccupation pour beaucoup. La planification patrimoniale et la raison d’être de ce patrimoine vont de pair.
Plusieurs objectifs
Mais l’investissement durable n’est qu’une partie de l’équation patrimoniale. La durabilité est omniprésente et des résultats durables peuvent être obtenus à travers un éventail d’objectifs. Les conseillers en gestion de patrimoine doivent aider les investisseurs à surmonter leurs doutes et élaborer un plan patrimonial adapté à leur mode de vie. La réalité est que, dans un monde de plus en plus complexe et incertain, le besoin de conseil des investisseurs ne fera que croître. Les ingénieurs patrimoniaux doivent être en mesure d’apaiser les inquiétudes en matière de structuration, de protection et de diversification du patrimoine, tout en tenant compte du contexte géopolitique actuel. Les facteurs ESG font partie intégrante de cette équation.
Evolution réglementaire
Dans l’intervalle, la réglementation ESG évolue rapidement. Depuis août 2022, les conseillers doivent désormais collecter et évaluer les préférences en matière de durabilité de leurs clients. Par ailleurs, les normes techniques d’exécution (RTS) du règlement SFDR (règlement délégué (UE) 2022/1288 de la Commission) qui sont entrées en vigueur en janvier 2023 exigent des acteurs des marchés financiers et des conseillers financiers qu’ils fournissent aux clients des informations relatives au développement durable pour certains produits financiers. Cela inclut des documents d’information précontractuels sur les options d’investissement durable accessibles avec un contrat d’assurance vie et, par la suite, des rapports périodiques pour les clients qui investissent dans ces options.
Dans le domaine de la gestion privée, la réglementation ESG fait écho et répond à l’appétit des investisseurs pour des options d’investissement plus durables. Il faut continuellement remettre en question la compréhension de la notion de performance durable. Il est essentiel d’aller au-delà du cadre de conformité ESG et de découvrir comment tirer parti des principes de durabilité dans le domaine de la gestion privée. La réglementation s’efforce d’atteindre des niveaux d’harmonisation et de transparence susceptibles d’encourager cette tendance.
Libérer le potentiel
Pour rester pertinents dans leur approche de la durabilité, les professionnels doivent tenir compte de ces multiples facettes. Il est autant question de choix d’investissement que de choix personnels, de philanthropie, de famille et de gouvernance d’entreprise. Les conseillers peuvent contribuer à cet équilibre, mais la force motrice est la raison d’être que les familles fortunées souhaitent donner à leur patrimoine.
Les récents travaux de Kenneth Goh, Iraj Ispahani et Philip Marcovici illustrent parfaitement comment découvrir de nouvelles façons de parvenir à cet équilibre. Ils ont appliqué les principes d’une économie circulaire au monde du patrimoine privé et ont montré comment ce qui s’apparente à des paradoxes peut être converti en avantages mutuels. De la protection des actifs, la transmission du patrimoine aux générations futures, la diversification des portefeuilles d’investissement, à la portabilité du patrimoine, les ingénieurs et les conseillers patrimoniaux se distinguent en libérant le potentiel présent dans tous les aspects d’un plan patrimonial global, y compris les opportunités d’investissement durables. Ce faisant, ils restent pragmatiques et facilitent la création de valeur supplémentaire.
Par définition, la planification patrimoniale repose sur le long terme, et le nouvel état d’esprit associé à la durabilité encourage des stratégies qui maximisent l’impact réel de la richesse pour les générations futures. Plus la durabilité est perçue comme une priorité, plus elle retentit sur l’investissement, le mode de vie, le choix du lieu de résidence, l’activisme et la gestion du patrimoine. La durabilité n’est pas un sprint mais plutôt une épreuve d’endurance.
[1] Yvon Chouinard, s.d., https://eu.patagonia.com/lu/en/ownership/.
[2] « Investing for Global Impact 2021: Barclays Private Bank », Investing for global impact 2021 | Barclays Private Bank
2022 : Annus horribilis pour les obligations
Par Olivier de Berranger, CIO à La Financière de l’Echiquier
20 décembre 2022
En novembre 2022, l’indice Global Aggregate publié par Bloomberg a terminé le mois sur une performance positive de 4,7%. Cet indice est une mesure large de la performance mondiale des obligations de meilleure qualité, qu’elles soient souveraines, d’entreprises ou même titrisées. Cette performance mensuelle nettement positive, égale, à quelques points de base, celle de décembre 1991, de septembre 1998 ou encore de septembre 2003, et se situe à la deuxième place des 32 meilleures années enregistrées, après celle du mois de décembre 2008.
Cocktail explosif
Si cette performance mensuelle semble flatteuse, elle cache une année 2022 épouvantable. Malgré ce violent rebond, l’indice Global Aggregate est en effet en marche vers sa pire année, avec une performance négative qui dépasse 15%, reléguant la baisse de 5% de 2000 ou 2005 à celle d’une ‘’aimable’’ correction. L’année 1994, dite du ‘’krach obligataire’’, s’était quant à elle terminée sur une performance étale.
On connait les raisons conduisant les marchés obligataires à la panique : inflation galopante dans la plupart des zones économiques, goulets d’étranglement pour produire plus et plus vite, explosion des déficits publics dans les économies développées, agressivité des banques centrales devenues toutes ‘’volckeriennes’’… Un vrai cocktail explosif.
L’horizon semble pourtant commencer à se dégager. Après des années de taux nuls, voire négatifs. Le compartiment obligataire recèle, en effet, aujourd’hui une noria d’émetteurs qui proposent un taux de rendement attractif. Une obligation LVMH à 5 ans, par exemple, rapporte 2,5% après avoir généré un rendement négatif il y a à peine plus d’un an, alors qu’Iliad offre plus de 5,5% pour le même type de maturité. Les rendements dépassent 7% sur les meilleurs emprunteurs High Yield.
Quid de la volatilité ?
Reste à la volatilité à quitter les marchés obligataires. Proportionnellement, la volatilité sur les marchés de taux a, en effet, été nettement plus importante que sur les marchés actions, et ce, depuis que les banques centrales ont entamé leur séquence de hausses de taux. Le niveau terminal des taux qu’elles visent n’est pas encore clairement défini. La stabilisation des marchés obligataires est, comme à chaque crise économique ou financière, un prérequis pour que les marchés actions se calment plus durablement.
Dans l’intervalle, les marchés de crédit – c’est-à-dire avant tout et surtout la dette d’entreprise privée qu’elle soit senior ou subordonnée, convertible ou plus classique – présentent un couple rendement/risque attractif. Le risque obligataire enfin correctement rémunéré, tout investisseur, quel que soit sa classe d’actifs de prédilection, ne peut que se sentir rassuré.
Disclaimer : Les opinions émises dans ce document correspondent aux convictions de l’auteur. Elles ne sauraient en aucun cas engager la responsabilité de LFDE.
Hedge funds : un retour imminent ?
Par UBP
Le 13 décembre 2022
Les marchés n’ont pas facilité la tâche des investisseurs durant les dix premiers mois de l’année 2022. Les investisseurs ont subi de sérieuses pertes, tant avec les obligations qu’avec les actions, de telle sorte qu’il leur était difficile de trouver un refuge. L’évolution des conditions du marché (toujours aussi difficiles) devrait ouvrir la voie à un retour des hedge funds, car ils sont capables de générer de bons rendements sans augmenter significativement le risque.
Les hedge funds offrent des alternatives aux investisseurs
Depuis cette année, l’incertitude sur les marchés financiers a fortement augmenté et, après des années d’accalmie, la volatilité a resurgi. Une période de 30 ans, marquée par la désinflation, la baisse des taux et la valorisation élevée des actifs, a pris fin. Dans ces nouvelles conditions de marché, il est fort probable que la répartition traditionnelle du portefeuille, à raison de 60 % d’actions et 40 % d’obligations, s’avère moins performante.
Les investisseurs pourraient alors intégrer un volet de placements alternatifs dans leur portefeuille. Les hedge funds, qui ont perdu une partie de leur popularité ces dernières années, devraient à nouveau être envisagés. En effet, sur la base de leurs données historiques, ils enregistrent de bonnes performances quand les marchés sont difficiles et imprévisibles, comme c’est le cas aujourd’hui. Ils présentent des profils risque/rendement attractifs et peuvent apporter une diversification supplémentaire. De plus, sur le plan réglementaire, beaucoup de choses ont changé et les hedge funds sont aujourd’hui plus accessibles, plus liquides, plus transparents et moins chers.
Un scénario avec des rendements moyens plus élevés pour les hedge funds et plus faibles pour le portefeuille traditionnel 60/40, pourrait se produire dans les années à venir. Depuis la grande crise financière, la stratégie 60/40 a produit un rendement supérieur à la moyenne grâce à des conditions de marché favorables, notamment une baisse constante des taux d’intérêt, alors que les hedge funds ont historiquement sous-performé dans ce contexte.
Les marchés étant devenus plus incertains, les rôles pourraient cependant s’inverser et tant les hedge funds que les portefeuilles 60/40 pourraient revenir à leur moyenne historique ou à long terme.
Trois catégories
Dans le segment du marché des hedge funds, le choix ne manque pas, allant des très conservateurs aux très agressifs, des très sensibles aux peu sensibles au marché. Il y en a donc pour tous les goûts et il s’agit de voir quel rôle les placements dans des hedge funds peuvent jouer dans l’allocation du portefeuille et avec quels fonds il est possible de réaliser les meilleurs résultats. Le choix de la stratégie et la sélection des fonds sont donc primordiaux.
On peut identifier trois catégories de hedge funds. Premièrement, on peut distinguer « un investissement asymétrique en actions ». Il s’agit d’une manière plus conservatrice d’investir en actions et, à l’aide de stratégies long/short qui permettent de mieux répartir le risque, de réaliser une surperformance à la fois sur des marchés baissiers et sans direction. Dans les conditions de marché volatiles actuelles, cette catégorie devrait pouvoir enregistrer d’excellentes performances.
Deuxièmement, il y a les « alternatives à l’obligataire », qui doivent offrir le même profil risque/rendement que les placements à revenu fixe traditionnels alors que le rendement est généré par d’autres éléments. L’arbitrage de crédits en fait notamment partie. Ces stratégies devraient bien se comporter en cas de hausse des taux d’intérêt et fournir une protection contre la volatilité des spreads de crédit.
Troisièmement, il est possible d’opter pour une « diversification supplémentaire ». Cette stratégie cherche des sources alternatives de rendement peu corrélées aux actions ou obligations. Elle est particulièrement efficace en cas de baisse des marchés, de volatilité des taux d’intérêt et de fortes différences entre les segments de marché. Les global macro et les fonds de trading actif font partie de cette catégorie.
En pratique
Voilà pour la théorie. Il est également important de prendre en considération les performances des différentes stratégies ces deux dernières années. La performance générale apparaît dans l’indice composite HFRI Fund Weighted. En 2021, pratiquement toutes les catégories se sont relativement bien comportées, avec des rendements compris entre 6 et 12 %. La stratégie Macro : Discretionary Thematic (stratégie basée sur l’analyse top-down de variables macroéconomiques) est restée un peu à la traîne. Cette catégorie ne doit pas être confondue avec la stratégie Macro : Systematic Diversified Index (processus d’investissement basé sur des modèles mathématiques, algorithmiques et techniques) qui a manifestement fait mieux. Il en va de même pour l’ensemble de 2022, avec un rendement moyen de 19,5 % jusqu’à présent.
Les stratégies qui ont sous-performé cette année sont Equity Hedge (actions long/short), Event Driven (qui jouent sur certains événements), Fixed Income Corporate (qui misent sur les obligations d’entreprise et les spreads de crédit) et Fixed Income Convertible Arbitrage (qui tirent profit des écarts de prix entre les obligations convertibles et les actions sous-jacentes), qui ont toutes perdu du terrain. Les stratégies Relative Value (utilisation du levier pour bénéficier de la compression d’écarts de prix entre actifs similaires) et Merger Arbitrage (qui mise sur les écarts de prix après certains événements des entreprises), sont restées quasiment stables.
Et pour l’avenir ?
On peut cependant entrevoir des rendements supérieurs à la moyenne pour les 12 à 24 prochains mois. Dans les fonds Equity Long/Short, les gestionnaires affirment n’avoir jamais vu autant de valeur fondamentale dans leurs univers respectifs. Comme le marché a tout vendu sans distinction depuis début 2022, il est aujourd’hui possible de générer un rendement en distinguant les entreprises fondamentalement fortes (positions longues) et faibles (positions courtes).
Dans l’environnement macro, on peut être positif pour les hedge funds qui jouent sur les tendances existantes, notamment dans les matières premières. Les hedge funds qui gèrent la politique des taux d’intérêt dans les pays du G10 sont également très performants. Dans Credit & Event Driven, on voit de nombreuses possibilités pour les gestionnaires parce qu’une éventuelle récession pourrait s’avérer néfaste, surtout en matière de « distressed » et, notamment, d’arbitrage. Dans Relative Value, c’est surtout la volatilité accrue qui créera des opportunités parce qu’elle engendre plus d’opportunités de trading et plus de dispersion entre les segments de marché, surtout à court terme. Il en va de même dans Systematic.
Investir dans un bien immobilier en Espagne ? Les questions à se poser avant !
Par Jonathan Buchet, CEO Belgium de ZAPINVEST (spécialiste de l’immobilier de résidences secondaires en Espagne)
Le 22 novembre 2022
L’Espagne figure dans le top 3 des destinations favorites des Belges[1]. Chaque année, plusieurs milliers d’entre eux décident d’y acquérir un bien immobilier pour les vacances, pour y vivre ou comme investissement locatif. Ils ne sont pas les seuls : les derniers chiffres publiés par les bureaux d’enregistrement espagnols[2] montrent que 16% des acquisitions de biens immobiliers ont été réalisés par des étrangers, au 3e trimestre 2022.
Que faut-il savoir si l’on souhaite investir dans l’immobilier en Espagne ? Et que faut-il prévoir pour que cet achat soit un succès ? Voici quelques conseils.
Préparer l’acquisition
Le marché espagnol est très réactif. Les Belges sont en concurrence avec les Espagnols et de nombreux candidats acquéreurs d’autres nationalités. C’est pourquoi il faut définir précisément ce que l’on recherche pour saisir l’offre qui correspondra le mieux. Il faut penser au but recherché (investir pour y vivre à la pension, venir en vacances en famille, générer des revenus locatifs, faire la fête entre amis…), au budget maximum à y consacrer, au type de bien (neuf ou ancien, maison ou appartement, avec ou sans piscine, etc.) et au type d’environnement (front de mer, centre-ville, campagne…).
Au niveau des prix, le m² moyen est moins cher qu’en Belgique (actuellement 1.958 €/m²) mais la tendance est à la hausse et cela va s’accentuer. L’année prochaine, il y aura certainement moins de m² pour le même budget.
Le prix moyen varie aussi significativement en fonction de la région : par exemple, 1096 €/m² dans la région de Murcie, 1646 €/m² en Andalousie, 2431 €/m² en Catalogne, 2306 €/m² dans les îles Canaries, etc.
Faire une offre
Si l’on achète un bien existant, on peut essayer de négocier le prix. Par contre, si l’on achète sur plan un bien neuf, les promoteurs ne font pas de ristourne. L’acquéreur signera dans ce cas un contrat de réservation du bien en attendant le compromis de vente.
Pour le neuf, passer par un professionnel permet d’être au courant très tôt des opportunités offertes au démarrage des projets des développeurs immobiliers : les premiers acquéreurs peuvent souvent obtenir des prix plus intéressants.
Préparer l’acte
Contrairement à la Belgique ou à la France, ce n’est pas le notaire qui prépare le dossier, mais l’avocat.
Pour un bien existant il n’y a pas de compromis, on signe directement l’acte de vente. Pour les biens neufs, le compromis est signé environ un mois après la réservation. Il faut alors verser, en général, un acompte correspondant à 30% du montant.
Avant de signer chez l’avocat, il faut obtenir un numéro d’identification pour les étrangers qui est une sorte de carte de résident.
Financer le projet
Si l’on a besoin d’un crédit hypothécaire, on peut solliciter un banquier belge (qui hypothéquera un bien belge) ou espagnol (qui hypothéquera votre bien espagnol).
Attention, si l’on achète du neuf sur plan, certaines banques belges ne libèreront le crédit qu’à la livraison du bien. Ce qui signifie que l’on devra financer soi-même les 30% d’acompte et les frais, soit environ 45% du prix d’acquisition.
Si l’on achète du neuf, le taux de TVA est de seulement 10% contre 21% en Belgique. Si le bien existe déjà, les droits de transmission se montent à 8-10% selon les régions.
A cela s’ajoutent les droits d’enregistrement de 1,5% et l’on payera à l’avocat soit 1,21% TVAC. Il faut compter au total des frais de l’ordre de 12% à 14% du prix de vente.
Rester un heureux propriétaire
Une fois le bien acheté, il faut le rénover ou l’aménager, l’entretenir et éventuellement le louer.
Il est clair que le propriétaire ne va pas sauter dans un avion à chaque fois qu’il faut tailler la haie ou trouver des locataires. Il est important alors de se faire accompagner après l’acquisition.
[1] 1,2 million de voyages effectués par des Belges en Espagne en 2021 https://statbel.fgov.be/fr/themes/menages/enquete-sur-les-vacances-et-les-voyages
[2] https://www.registradores.org/actualidad/portal-estadistico-registral/estadisticas-de-propiedad#portlet_com_liferay_journal_content_web_portlet_JournalContentPortlet_INSTANCE_92PKQIzgTNBS
Obligations à haut rendement : une classe d’actifs essentielle ?
Par Alexis Renault, Global Head of High Yield, ODDO BHF AM
le 16 novembre 2022
Le marché des obligations d’entreprises spéculatives à haut rendement en euros (Euro high yield) n’est plus un segment de niche. Après plusieurs années de croissance, il s’élève aujourd’hui à plus de 350 milliards d’euros. Les obligations high yield permettent de financer des entreprises présentes dans de nombreux secteurs : l’industrie, les services, la santé, etc… Le marché Euro high yield est composé de plus de 350 émetteurs et offre donc une bonne diversification.
Les classes d’actifs risquées comme les actions et les obligations high yield ont largement bénéficié ces dernières années de la tendance baissière à long terme des taux d’intérêt. Cependant, la remontée des taux initiée par les banques centrales pour lutter contre l’inflation a mis fin à cette situation. Les investisseurs ont été confrontés cette année à de forts ajustements à la baisse des valorisations, quelle que soit la qualité de la signature. Mais aujourd’hui, les valorisations des obligations high yield redeviennent potentiellement intéressantes. En outre, cette classe d’actifs offre des avantages significatifs en termes de diversification.
Un ratio risque-rendement potentiellement attractif
Pour de nombreux investisseurs, les obligations high yield sont une classe d’actifs risquée. Mais sont-elles vraiment aussi risquées que les actions, comme certains le prétendent ? Le risque d’une classe d’actifs peut se mesurer par les fluctuations de sa performance. À moyen et long terme, la volatilité du marché high yield est inférieure à celle des actions. En effet les obligations High Yield ont un positionnement prioritaire dans la structure de capital d’une entreprise.
En moyenne, les obligations high yield ont des maturités plus courtes que celles de qualité supérieure soit investment grade et sont donc exposées à un risque de taux d’intérêt plus faible. La duration actuelle du marché Euro high yield(indice HEAE) est d’environ 3,2 ans, contre 4,8 ans pour le marché Euro investment grade (indice ER00)[1]. Avec des rendements plus élevés et une duration plus courte, les obligations Euro high yield offrent une meilleure résilience face à la hausse des rendements.
Une faible corrélation avec les autres classes d’actifs
Pour définir si une classe d’actif apporte une réelle diversification au sein d’un portefeuille, il convient d’analyser la corrélation des différents segments entre eux. Les analyses montrent que les obligations High Yield sont faiblement corrélées aux actions et encore moins avec les emprunts d’État. En effet, le rendement d’une obligation high yield est essentiellement déterminé par la prime de risque, qui dépend de la capacité de l’entreprise à assurer le remboursement de sa dette et reste donc peu sensible aux hausses de taux d’intérêt. Par conséquent, ajouter des obligations High Yielddans un portefeuille investi sur plusieurs classes d’actifs contribue effectivement à améliorer sa diversification.
Différentes approches pour intégrer des obligations high yield dans les portefeuilles
A l’image des actions, des emprunts d’État et des obligations d’entreprises de qualité supérieure soit investment grade, les obligations High Yield sont donc une classe d’actifs indispensable pour les investisseurs. Toutefois, pour optimiser leurs performances, il est essentiel d’adopter une approche d’investissement rigoureuse reposant sur les piliers suivants :
- Une analyse crédit fondamentale permettant d’évaluer la qualité d’une entreprise et sa capacité à assurer le service et le remboursement de sa dette
- Un portefeuille bien diversifié réparti sur plus d’une centaine d’émetteurs issus de différents secteurs d’activité
- Une politique de vente rigoureuse afin de maintenir un portefeuille de grande qualité et d’anticiper toute détérioration de la qualité de signature des entreprises sélectionnées.
Plusieurs stratégies d’investissement permettent de s’exposer au marché High Yield. Il y a celles qui cherchent à répliquer l’indice de référence du marché avec des portefeuilles dont la duration est légèrement supérieure à 3 ans. D’autres sont investies en obligations à échéance plus courte, ce qui permet de construire des portefeuilles dont la duration est inférieure à 2 ans. Enfin, en plus de ces approches classiques, certains fonds proposent une gestion avec une date d’échéance fixe.
Par rapport aux fonds obligataires traditionnels investis en High Yield, les fonds à maturité fixe offrent une bonne visibilité et un profil de risque qui diminue à mesure que l’échéance approche. Investir dans un fonds à maturité fixe permet de répliquer le comportement d’une obligation, de bénéficier d’une bonne diversification ainsi que des ressources d’une société de gestion pour sélectionner des émetteurs de qualité et ajuster les positions si la situation d’une ou plusieurs sociétés se détériore.
En conclusion, les obligations High Yield sont une classe d’actifs indispensable dans les portefeuilles des investisseurs, au même titre que les actions, les emprunts d’État et les obligations d’entreprise investment grade. Cependant il est important de rappeler que la classe d’actif des obligations High Yield dites spéculatives à haut rendement présente un risque de perte en capital.
[1] Source : ODDO BHF Asset Management : Bloomberg ; ICE BofA ; données au 31/08/2022
Quelques raisons pour investir dans des fonds actions de style value
Par ODDO BHF
Le 6 octobre 2022
La gestion « Value » consiste à sélectionner des actions décotées, c’est-à-dire des actions dont le prix est inférieur à ce qu’il devrait être au regard de la valeur intrinsèque de l’entreprise. Ce style de gestion mise sur la correction de cette anomalie de marché qui viendra réévaluer le titre à sa juste valeur sur le moyen-long terme.
Quelles sont les raisons qui justifient un intérêt à long terme pour cette stratégie?
- Toute entreprise peut traverser des difficultés qu’elles soient d’ordre économique, stratégique, concurrentiel ou managériale.Cela conduit souvent à un désintérêt de la part des investisseurs et donc à une sous-valorisation. Toute société, quel que soit son secteur d’activité, son niveau de croissance et son niveau de marge, peut se retrouver à un moment décotée.
- A court terme, les marchés tendent à réagir de manière excessive. La gestion « Value » permet de mettre en place des méthodes rigoureuses d’analyse afin de ne pas suivre ces mouvements mais de se concentrer sur la valeur réelle de l’entreprise.
En effet, la gestion « Value » est une approche d’investissement à long terme qui se focalise sur la valorisation d’une entreprise au regard de sa rentabilité normative. Ce style de gestion suit un processus rigoureux avec l’objectif de participer à ces excès de marché, tout en s’appuyant sur une connaissance profonde des métiers d’une entreprise, d’un point de vue de la valorisation, de la qualité du bilan et de l’analyse extra-financière.
- La gestion dite « Growth » a particulièrement bénéficié depuis 2014 des différentes politiques monétaires accommodantes ainsi que de la forte baisse des taux d’intérêt. En effet, la constante révision de la valeur des « Cash-Flows » futurs par la baisse des taux d’actualisation a bénéficié à ce style de gestion. Le retour récent de l’intérêt des investisseurs pour la gestion « Value » provient en premier lieu du retournement brutal des anticipations d’inflation et des mouvements de taux d’intérêt.
- Les investisseurs cantonnent souvent la gestion « Value » à certains secteurs emblématiques tels que la banque ou l’énergie. En réalité, cette approche de gestion peut et doit s’appliquer à tout type d’entreprise et ne doit pas se limiter à certains secteurs afin de tirer pleinement profit des opportunités décotées.
- La gestion « Value » n’est pas à opposer à la gestion « Growth » car elle offre une exposition complémentaire à celles obtenues par le style de gestion « Growth ».
La « Value » tend à surperformer dans des périodes de cycles différents de la gestion
« Growth », ce qui milite pour une diversification de styles dans le cadre d’une gestion à long terme où les changements de cycles sont très difficiles à prévoir. La combinaison des deux styles permet donc de diversifier son portefeuille, en favorisant à long terme une réduction de la volatilité et une optimisation des rendements.
En conclusion, les investisseurs ont eu tendance ces dernières années à oublier cette cyclicité des marchés actions qui favorisent un style par rapport à un autre à des moments différents. Le retrait en cours des politiques monétaires extraordinaires devrait ramener les marchés actions vers des cycles d’alternance plus « normaux » obligeant ainsi les investisseurs à combiner les deux styles dans leurs portefeuilles.
Le défi de la numérisation du secteur financier
Par Werner Temmerman, sales lead pour la Belgique chez Penneo
Le 26 septembre 2022
Les services financiers jouent un rôle essentiel dans l’économie mondiale. Si la crise de 2008 nous a appris quelque chose, c’est que si le secteur financier ne remplit pas correctement sa mission, il y aura de l’instabilité. Il est donc important que les prestataires de services financiers innovent pour s’aligner au mieux aux besoins évolutifs des entreprises, des consommateurs et des régulateurs.
En outre, la pandémie du COVID a amplifié les attentes en matière de transformation numérique. Plus que jamais, le passage au numérique est crucial pour la résilience et la compétitivité des banques et des acteurs financiers sur les marchés locaux. Voici un aperçu des principales conclusions de plusieurs études1 récentes sur la numérisation dans le secteur financier.
Où en est l’industrie financière aujourd’hui quant à sa numérisation ?
La transformation numérique étant un impératif commercial dans tous les secteurs, la plupart des entreprises de services financiers ont entamé leur processus de modernisation, soit en prenant quelques mesures expérimentales, soit en élaborant une vraie roadmap stratégique. Plus de la moitié des entreprises ayant participé à une récente enquête ont déclaré avoir établi un plan d’action pour atteindre leurs objectifs numériques.
La plupart des entreprises financières reconnaissent l’importance de disposer d’une fonction de gestion pour guider les efforts numériques. Plus des trois quarts des entreprises financières ont en fait déjà créé une fonction de management qui coordonne les initiatives numériques et de nombreuses entreprises financières ont déjà mis en place un comité de pilotage pour l’innovation numérique, 54 % font appel à des consultants externes et 60 % embauchent de nouveaux employés possédant l’expertise nécessaire pour mettre en œuvre et piloter ces processus.
Quels sont les défis auxquels le secteur est confronté ?
Le manque de vision des décideurs est un problème majeur pour la plupart des organisations. En outre, la sous-priorisation (61%), ainsi que la mauvaise communication et la gestion de projet (53%) sont considérées comme des difficultés.
Il incombe à la direction d’instaurer une culture d’entreprise axée sur l’innovation et la numérisation, d’impliquer les employés et de faire de l’innovation numérique une partie intégrante de la stratégie commerciale. 73 % des organisations ont cité le manque de compétences ou l’insuffisance de formation comme le principal obstacle à la mise en œuvre d’une nouvelle initiative numérique. Si l’embauche de nouveaux talents peut contribuer à la compétence numérique globale, les entreprises doivent également veiller à ce que le personnel actuel reçoive une formation et les ressources nécessaires pour rester efficace à mesure que leurs rôles changent en raison de la numérisation.
Comment les entreprises financières prévoient de répondre à ces questions ?
La transformation numérique consiste à tirer parti des technologies pour adapter les processus d’entreprise existants (ou en créer de nouveaux) et implique non seulement la façon dont le travail est effectué, mais aussi la culture et le modèle d’entreprise.
Pour relever les défis qui se présentent à la fois pendant la phase de planification et pendant la mise en œuvre du projet de numérisation, la plupart des dirigeants des services financiers reconnaissent qu’ils doivent favoriser une culture de l’innovation à tous les niveaux de l’entreprise, en mettant l’accent sur l’engagement et la montée en compétence des employés. L’adoption de nouvelles technologies exigeant un engagement à l’échelle de l’entreprise, 81 % des entreprises lancent des programmes de formation pour leur personnel et 75 % équipent le bureau d’outils nécessaires pour faciliter la transition du flux de travail manuel vers le numérique.
Agilité des sociétés financières
L’agilité désigne la facilité et la rapidité avec lesquelles une organisation peut adapter ses processus, intégrer de nouvelles technologies et réussir sa transformation numérique.
Lorsqu’on leur a demandé comment ils évaluaient les capacités numériques de leur entreprise par rapport à leurs pairs du secteur, seuls 23 % des établissements financiers interrogés ont déclaré qu’ils se considéraient meilleurs que leurs concurrents, et seuls 10 % ont défini leur niveau actuel d’agilité comme excellent.
Croissance du revenu résultant des investissements numériques
Stimuler la croissance de l’entreprise et le temps de mise sur le marché : telles sont les principales priorités mentionnées par les CEO d’entreprises financières interrogés sur leur stratégie numérique concurrentielle dans une récente enquête de McKinsey. Tous les secteurs partagent le besoin urgent d’acquérir un avantage sur le marché grâce à l’accélération numérique. Dans ce contexte, la capacité d’une organisation à réagir aux changements devient un véritable facteur de différenciation. 71% des répondants ont souligné que l’agilité pour répondre aux besoins changeants des clients est la principale préoccupation.
Les investissements numériques sont récompensés par un retour sur investissement positif
C’est pourquoi la plupart des entreprises privilégient la croissance et la rapidité de l’innovation par rapport aux coûts. Cette stratégie semble être un succès si l’on considère l’impact des investissements numériques sur le revenu des entreprises.
Trois entreprises financières sur quatre qui ont travaillé activement à leur numérisation ont enregistré une croissance de 1 à 9 % de leurs revenus et de leurs bénéfices après un an, et elles s’attendent à une augmentation de plus de 10 % dans les 18 à 36 prochains mois.
Conclusion
La transformation numérique se concentre sur le voyage et non la destination. Le passage au numérique n’est pas un projet avec une date de début et de fin, ni une tâche ponctuelle. Les technologies étant en constante évolution, les entreprises ont besoin d’un apprentissage et d’un investissement continus.
Les entreprises d’aujourd’hui sont en concurrence non seulement avec leurs homologues, mais aussi avec toutes les expériences numériques avec lesquelles leur public cible interagit. Il y a encore une dizaine d’années, la transformation numérique était considérée comme une démarche stratégique pour devancer les concurrents. Maintenant, il s’agit d’évoluer ou de mourir.
La numérisation à l’échelle de l’entreprise dans les services bancaires et financiers est compliquée. Mais à long terme, elle sera source d’innovation et de croissance des revenus.
[1] Sources:
- Business Insider, Financial Services Industry Overview in 2020: Trends, Statistics & Analysis
- McKinsey & Company, Next-gen Technology transformation in Financial Services, 2020
- BDO International, BDO’s 2019 Middle Market Digital Transformation Survey
- Deloitte, 2021 financial services industry outlooks
- Refinitiv, The cost benefits of KYC managed services
- Bain & Company, Banking Regtechs to the Rescue?
- GLEIF Research, A New Future for Legal Entity Identification
- MarketsandMarkets Research, Anti-money Laundering Market Report – Global Forecast to 2025
- Bain & Company, Many Consumers Trust Technology Companies More than Banks, 2019
- Deloitte, Digital transformation in financial services. The need to rewire organizational DNA, 2016
Plus vite, plus haut, plus fort
Par Clément Inbona, gérant de fonds d’investissement, La Financière de l’Echiquier.
Le 15 septembre 2022
La devise olympique caractérise à merveille le défi auquel la Banque Centrale Européenne (BCE) est actuellement confrontée.
Plus vite, car il y a urgence à freiner l’activité économique afin d’éviter qu’une surchauffe pérenne des prix finisse par s’auto-alimenter. Plus haut, car, après 10 années de taux faibles voire négatifs, les taux directeurs atteignent des niveaux inexpérimentés depuis plus d’une décennie. Plus fort, enfin, car l’amplitude des hausses annoncées ces derniers mois est inédite en si peu de temps : 50 points de base en juillet, puis 75 lors de la réunion du 8 septembre, soit +1,25% en à peine deux mois, bien au-delà des directives annoncées en juin dernier.
L’inflation réclame des mesures d’urgence
Il faut dire que l’urgence est bien réelle. En août, l’inflation de l’ensemble de la zone euro atteignait 9,1% sur un an. Si certains pays parviennent à limiter la casse en amortissant une partie de la hausse des prix de l’énergie au moyen de mesures budgétaires – c’est notamment le cas de la France (6,5%) ou de l’Allemagne (8,8%) – une majorité de pays affronte une inflation galopante supérieure à 10%, voire au-delà de 20% pour les trois pays Baltes !
Ce choc sur les prix d’une ampleur si significative nécessite donc un remède à sa mesure, quitte à faire plonger l’activité économique en connaissance de cause, puisqu’elle constitue l’une des sources de la fièvre inflationniste. La mise à jour des anticipations de croissance et d’inflation par la BCE sont éloquentes de ce point de vue. Elle anticipe à nouveau une inflation de 5,5% en 2023, bien au-delà de son objectif de moyen terme de 2%. La croissance 2023 n’est attendue qu’à 0,9%, en baisse notable par rapport aux 2,1% anticipés au début de l’été.
Quelles armes ?
Si la banque centrale et les gouvernements partagent le même adversaire – l’inflation – ils ne disposent pas des mêmes armes pour le contrer. Si, socialement, les mesures étatiques destinées à amortir le choc énergétique sont louables, cela est plus discutable d’un point de vue économique. En maintenant des prix de l’énergie artificiellement bas, les Etats creusent un déficit et une dette déjà profonds.
Mais ils annihilent également une partie de l’impact de la politique monétaire en soutenant le pouvoir d’achat des ménages et en baissant les coûts énergétiques des entreprises, donc la demande. Les Etats font sans doute le pari implicite que le choc sur l’énergie est temporaire, erreur dans laquelle les banquiers centraux s’étaient empêtrés en considérant la poussée inflationniste héritée du choc de la crise sanitaire comme passagère.
Pour combien de temps encore ? La réponse pourrait venir de la BCE, car si elle venait à marcher sur les pas de Réserve Fédérale américaine (Fed) en réduisant son bilan dans les mois à venir, l’impact haussier sur les taux d’emprunt gouvernementaux mettrait en difficulté la logique du « quoi qu’il en coûte » toujours à l’œuvre dans bon nombre de pays.
Exercice des droits de vote : un moyen de peser sur le comportement ESG des entreprises
Par Rachida Mourahib, Global Head of ESG Research, ODDO BHF Asset Management & Private Equity
Le 31 août 2022
L’engagement actionnarial s’est généralisé ces dernières années parmi les investisseurs qui souhaitent jouer un rôle pour influer sur les activités ou le comportement des entreprises dans lesquelles ils investissent. En effet, la pratique du dialogue et l’exercice des droits de vote constituent aujourd’hui les stratégies d’investissement responsable les plus utilisées après l’application des filtres d’exclusion.
D’une part, la réglementation demande de publier davantage d’informations sur les initiatives de dialogue et de gestion actionnariale. D’autre part, les investisseurs conviennent que le fait d’anticiper les potentiels risques et opportunités associés à la durabilité aideront les entreprises à générer de la valeur à long terme.
Les droits de vote : un facteur clé pour influencer la stratégie des entreprises
En conséquence, le recours à l’activisme lors d’Assemblée générale ordinaire (AGO) et la soumission de résolutions d’actionnaires sont de plus en plus fréquents. Les investisseurs exercent de plus en plus leurs droits de vote, non seulement pour approuver les pratiques de gouvernance mais aussi pour mettre les entreprises au défi de relever les problématiques de durabilité. L’AGO est plus que jamais perçue comme une occasion d’adresser des questions aux administrateurs. Elle permet d’améliorer le dialogue entre les investisseurs et les sociétés dans lesquelles ils investissent, en particulier sur les sujets sensibles. Par exemple, lors de la saison 2022 des AGO des entreprises du CAC40, plus de 35 investisseurs ont posé environ 200 questions sur diverses thématiques environnementales, sociales ou de gouvernance.
La durabilité fait désormais partie du débat
Il est vrai que la crise liée au COVID-19 a également renforcé la croyance que les risques associés à l’ESG – comme les pandémies ou le changement climatique – sont des risques d’investissement. La pression supportée par l’écosystème financier a suscité des prises de conscience sur la façon dont la durabilité est intégrée à la stratégie des entreprises et à la vision du conseil d’administration.
On a donc observé une augmentation du nombre de propositions liées à la durabilité, ainsi que des votes contre des administrateurs n’ayant pas réussi à résoudre ces problèmes. En lien avec cela, les pratiques de rémunération des dirigeants sont désormais sous les feux des projecteurs. La légitimité de l’affectation de la rémunération variable et l’inclusion d’objectifs de durabilité sont des sujets sensibles. Ainsi, lors des AGO des entreprises du STOXX 600 tenues en 2021, 34 % des résolutions ayant reçu plus de 10 % de votes défavorables portaient sur la rémunération des dirigeants.
Le changement climatique s’inscrit à l’ordre du jour
Toutefois, si les résolutions sur la rémunération constituent une pratique courante depuis des années, le concept de « résolution climatique » est plus récent et surtout le fait des entreprises européennes, en raison des pressions qu’y exercent les parties prenantes à propos des sujets environnementaux. L’accent mis sur le changement climatique joue un rôle important dans les actions d’engagement menées par les investisseurs, qui demandent aux entreprises que les plans de transition vers la neutralité carbone soumis aux votes des actionnaires soient crédibles. Même si la pratique est loin d’être généralisée, les entreprises commencent à préparer des rapports dans ce but. Les investisseurs apprécient ce fait car, en moyenne, le soutien des actionnaires à ces propositions a dépassé 90 % en 2021.
Néanmoins ces résolutions ne procurent pas systématiquement un niveau d’information qui permettrait de se faire une opinion pertinente sur l’ambition de la stratégie climatique de l’entreprise, au risque de frustrer les investisseurs. Une solution consisterait à disposer d’un contenu plus standardisé pour présenter les résolutions proposées par les équipes de direction. La réglementation ira probablement dans ce sens. Mais, d’ici là, la soumission au vote des stratégies climatiques demeure un outil essentiel pour accroître la transparence et permettre aux entreprises de s’engager publiquement envers les parties prenantes.
Enfin, même si la pratique de « résolution climatique » est en train de gagner du terrain et qu’un cadre commun n’existe pas encore, plusieurs outils sont aujourd’hui disponibles pour prendre position. En effet, les principaux fournisseurs de procuration tiennent compte du profil de risque climatique et de la stratégie climatique des principales entreprises émettrices de GES dans leur recommandation de vote pour la direction, posant les bases d’une trajectoire favorable aux politiques de vote sur le climat.
On peut conclure que l’engagement actionnarial est un pilier majeur pour impliquer les entreprises sur une stratégie durable à long terme. S’il faudra du temps pour réaliser la transition climatique, l’activisme est l’un des outils les plus puissants pour y parvenir.
Un regain d’attrait pour les valeurs de croissance et de qualité
Par Fares Benouari, Gérant Actions, Union Bancaire Privée (UBP)
Le 4 août 2022
Dans un contexte boursier propice à la gestion «value», les sociétés de croissance et de qualité ont été sanctionnées par les investisseurs ces derniers mois, mais celles qui créent de la valeur à long terme présentent toutes les caractéristiques pour générer les meilleures opportunités d’investissement au second semestre.
Au cours du premier semestre, les valeurs de croissance et de qualité ont enregistré une contre-performance prononcée (de l’ordre de 25%), subissant des prises de profit alors que les investisseurs privilégiaient les valeurs décotées (style «value»). Il est vrai que ces dernières sortaient d’une décennie de contre-performance relative. Le rattrapage des titres «value», qui avait débuté en 2021, s’est donc poursuivi sur fond de fortes tensions inflationnistes.
Prise de bénéfices
Ainsi, les investisseurs n’ont pas hésité à prendre leurs bénéfices sur des valeurs de croissance et de qualité affichant de la liquidité et qui avaient surperformé ces dernières années. Les valeurs technologiques ont tout particulièrement subi l’hallali de la part des investisseurs, dans un contexte très défavorable, marqué par le conflit en Ukraine et les mesures de confinement strictes prises par les autorités chinoises au nom de la politique ‘zéro-covid’.
Cette divergence entre styles d’investissement a été manifeste et s’est traduite, pour les valeurs de croissance et de qualité, par une compression des multiples de valorisation, alors même que leurs perspectives de bénéfices sont restées solides, comme en témoignent les révisions à la hausse des analystes entre janvier et juin.
En effet, le sentiment pessimiste parmi les investisseurs diffère de celui des sociétés qui, jusque-là, n’ont pas constaté de ralentissement des commandes. Par contre, les entreprises admettent rencontrer de multiples problèmes d’approvisionnement qui contraignent leur activité et exacerbent les tensions inflationnistes.
Quelles anticipations ?
Si les entreprises ont, traditionnellement, des difficultés à saisir les points d’inflexion du cycle économique, que peut-on anticiper à ce stade de l’année ? En tablant sur un scénario macroéconomique relativement pessimiste conduisant à un repli de 5% des bénéfices (contre +11% attendu à fin juin) et une compression des multiples, en baisse de 25%, on pourrait terminer l’année avec une correction de 25-27% sur les actions mondiales.
Notons toutefois que, lors des points d’inflexion, les multiples agissent habituellement comme un amortisseur en se normalisant à la hausse au moment où les bénéfices des entreprises sont (enfin) révisés à la baisse. Ces multiples de valorisation ont déjà reculé au premier semestre, les actions mondiales se négociant actuellement à moins de 14 fois les bénéfices tandis que la moyenne des P/E sur vingt ans ressort plutôt autour de 16. On constate donc que beaucoup de mauvaises nouvelles sont déjà intégrées par le marché, en particulier sur un segment bien ciblé.
Quel cocktail gagnant ?
Bilan sain, endettement faible, innovation et «pricing power» élevé: le cocktail gagnant des valeurs de croissance et de qualité
Dans un contexte inflationniste, les investisseurs devraient par ailleurs rechercher en priorité les valeurs disposant d’un bilan sain, d’un endettement faible, d’une capacité à innover, et de fortes barrières à l’entrée leur permettant d’afficher un «pricing power» élevé.
Ces entreprises se retrouvent plus largement dans la catégorie des valeurs de qualité, moins dans le segment «value». Et, alors que l’économie ralentit, les sociétés de croissance devraient elles aussi être à nouveau appréciées à leur juste valeur. Les investisseurs ont ainsi de meilleures raisons de revenir vers des sociétés qui évoluent principalement dans la santé, la technologie et la consommation.
A l’inverse, l’énergie, les services aux collectivités («utilities») et l’immobilier comptent moins de valeurs répondant à ces caractéristiques.
Vers une normalisation des matières premières et de l’inflation
Au cours des trois derniers mois, le recul des prix des matières premières s’est accéléré, avec des baisses comprises entre 20 et 50%. Par conséquent, les prochains chiffres de l’inflation devraient intégrer cette normalisation constatée sur les marchés de matières premières. De même, l’effet de base va mécaniquement pousser les chiffres de l’inflation à la baisse, à partir du quatrième trimestre.
Ce contexte devrait inciter les investisseurs à se repositionner sur des actifs risqués (actions), et en particulier sur les valeurs de croissance et de qualité. En outre, les investissements réalisés pour désengorger les chaînes d’approvisionnement devraient commencer à produire leurs effets durant le second semestre et créer une dynamique plus favorable pour faire reculer les tensions inflationnistes.
Croissance et qualité
De leur côté, certaines entreprises devraient réussir à maintenir leurs prévisions de résultats pour l’année 2022. Il s’agit ainsi de repérer, parmi elles, les sociétés de croissance et de qualité créant de la valeur, au sens de leur «Cash-Flow Return On Investment» (CFROI®). Les entreprises qui parviennent à maintenir leur CFROI® à un niveau élevé et stable disposent typiquement de fortes barrières à l’entrée et sont capables de continuer à investir dans la prochaine génération de produits, là où la compétition est forcée de baisser le pavillon.
Leur profil est atypique dans le sens où elles sont plus défensives pendant les phases de ralentissement et font mieux que participer à la tendance de marché lors du retournement du cycle. Un gage de surperformance à long terme et des caractéristiques particulièrement recherchées dans l’environnement actuel.
Changement de boussole pour les marchés?
Par Clément Inbona, Gérant de fonds d’investissement, la Financière de l’Echiquier
Le 25 juillet 2022
Après un premier semestre focalisé sur l’inflation, les investisseurs sont-ils en train de s’en détourner pour porter leur attention sur le ralentissement de la croissance mondiale ?
Ces dernières semaines, cela semble bien être le message délivré par l’évolution des taux gouvernementaux, qui jouent de nouveau leur rôle d’actif refuge. Après avoir tutoyé les 3, 5% pour le 10 ans américain et 2% en Allemagne, ils ont reflué respectivement à 3 et 1,2%, signe que les investisseurs craignent désormais moins que l’inflation s’enferme dans une spirale haussière.
Cap sur les défensives et la qualité
C’est aussi le signe de la fragilité de la croissance à venir. La raison réside dans des données macroéconomiques qui ne cessent de se détériorer, même si elles n’annoncent pas encore clairement une récession à court terme. Autre élément intéressant, la décorrélation entre les actions et les obligations d’Etat redevient peu à peu effective. En moyenne, lorsque le prix des obligations monte, celui des actions baisse et vice versa. Ce n’était majoritairement plus le cas depuis le début d’année, actions et obligations ayant baissé de concert.
La perspective d’un ralentissement de la croissance, voire d’une récession, n’est évidemment guère réjouissante pour la valorisation des actions, car elle assombrit mécaniquement les perspectives de profits des sociétés. Mais cette nouvelle donne redonne aussi du lustre aux sociétés et aux secteurs résilients dans pareil cas de figure. Voilà pourquoi les sociétés dites défensives ou de qualité ont eu tendance à mieux performer ces dernières semaines que celles plus fragiles ou sensibles aux cycles économiques. De ce point vue là aussi, le marché actions semble s’être tourné vers le thème de la croissance économique, en se détournant de celui de la hausse des prix.
La Fed encore focalisée sur l’inflation
En revanche, au sein de la Réserve fédérale américaine (Fed), toute l’attention est encore portée sur les questions d’inflation. En témoigne le compte-rendu des échanges de la réunion des 14 et 15 juin derniers, les fameuses Minutes de la Fed. Le terme « inflation » y apparaît à 90 reprises, tandis que la croissance du PIB n’est citée que 10 fois. A l’inverse des marchés, la Fed n’a, pour le moment, d’yeux que pour l’inflation.
Les semaines à venir seront clés pour dire qui de la Fed ou des marchés a raison, avec les publications d’entreprises du second trimestre qui s’annoncent, les premières estimations de PIB pour les Etats et de nouvelles enquêtes sur le moral des sociétés et des consommateurs.
Après leur bévue sur l’inflation, trop longtemps considérée comme temporaire, les banquiers centraux sont-ils cette fois-ci « beyond the curve 1» ? Ou est-ce au contraire les marchés qui se fourvoient ? L’avenir nous le dira.
1.Au-delà de la courbe. Autrement dit, en retard face au contexte macroéconomique et financier.
Quatre thèmes d’investissement d’avenir
Par Laurent Denize, CIO chez ODDO BHF AM
Le 27 juin 2022
Ces dernières années ont été marquées par un fort appétit des investisseurs pour les fonds actions mondiales thématiques, cherchant ainsi à participer aux tendances structurelles de long terme que connait la société. Ces mégatendances se développent indépendamment des cycles économiques et affectent le modèle d’affaires des entreprises. On peut alors identifier quatre mégatendances, qui sont sources d’opportunités pour les années à venir.
La transition écologique
Le changement climatique est l’un des plus grands défis du XXIème siècle. En effet, le monde est sur une trajectoire de réchauffement de +2,1 à +2,4°C, bien au-delà de la limite de 1,5°C fixée par l’Accord de Paris. Il est encore temps de lever des capitaux dans de nombreux domaines pour accompagner la transition écologique : production d’énergie durable, augmentation de l’efficacité énergétique par exemple dans les bâtiments, mobilité durable et conservation des ressources naturelles.
L’intelligence artificielle
L’IA fait maintenant partie de notre vie quotidienne : les algorithmes de recherche de Google nous permettent de nous orienter sur Internet. Alexa et Siri nous assistent avec des instructions vocales. De nouveaux films et musiques sont suggérés par Netflix ou Spotify en fonction de nos goûts. Dans le domaine de la santé, l’IA permet une médecine et des traitements plus personnalisés. L’IA, technologie clé, ouvre donc des opportunités d’investissement dans de nombreux pans d’activité, bien au-delà du secteur technologique.
La révolution financière
Les prestataires de services financiers sont challengés dans tous leurs domaines d’activité clés (financement, épargne, paiements et assurance). L’utilisation de technologies innovantes telles que la blockchain, l’émergence et la concurrence de nouveaux prestataires spécialisés, l’explosion des moyens de paiement mobiles et l’engouement pour les actifs numériques ne sont que quelques-uns des grands bouleversements qui façonnent le secteur. Tant les Fintechs que les acteurs bien établis qui embrassent ces changements peuvent constituer, pour les investisseurs, de potentielles opportunités à saisir.
L’avenir de l’alimentation
La façon dont les aliments sont produits, distribués et consommés est également bouleversée. L’enjeu est de taille : pour nourrir une population mondiale croissante, la production alimentaire doit augmenter de 60 % d’ici à 2050. Mais les aliments doivent aussi être cultivés dans le respect de l’environnement et être moins gaspillés. Le changement vient aussi des habitudes alimentaires qui évoluent dans les pays industrialisés. On y accorde plus d’attention à la santé, les régimes végétaliens ou végétariens sont en vogue et les entreprises qui produisent des substituts de viande sont par exemple en pleine croissance. La mégatendance nutritionnelle est une source d’opportunités tout au long de la chaîne de valeur du système alimentaire.
Disclaimer
ODDO BHF AM est la branche de gestion d’actifs du Groupe ODDO BHF. Elle est la marque commune des cinq sociétés de gestion juridiquement distinctes ODDO BHF AM SAS (France), ODDO BHF PRIVATE EQUITY (France), ODDO BHF AM GmbH (Allemagne), ODDO BHF AM Lux (Luxembourg) et METROPOLE GESTION (France). Ce document, à caractère promotionnel, est établi par ODDO BHF ASSET MANAGEMENT SAS. Sa remise à tout investisseur relève de la responsabilité exclusive de chaque distributeur ou conseil. L’investisseur potentiel doit consulter un conseiller en investissement avant d’investir dans une stratégie. L’attention de l’investisseur est attirée sur le fait que toutes les stratégies présentées ne sont pas autorisées à la commercialisation dans tous les pays. L’investisseur est informé que les stratégies présentent un risque de perte en capital, mais aussi un certain nombre de risques liés aux instruments/stratégies en portefeuilles. La valeur de l’investissement peut évoluer tant à la hausse qu’à la baisse et peut ne pas lui être intégralement restituée. L’investissement doit s’effectuer en fonction de ses objectifs d’investissement, son horizon d’investissement et sa capacité à faire face au risque lié à la transaction. ODDO BHF ASSET MANAGEMENT SAS ne saurait également être tenue pour responsable de tout dommage direct ou indirect résultant de l’usage de la présente publication ou des informations qu’elle contient. Les informations sont données à titre indicatif et sont susceptibles de modifications à tout moment sans avis préalable.Les opinions émises dans ce document correspondent à nos anticipations de marché au moment de la publication du document. Elles sont susceptibles d’évoluer en fonction des conditions de marché et ne sauraient en aucun cas engager la responsabilité contractuelle d’ODDO BHF ASSET MANAGEMENT SAS.
Le « grand transfert de richesse » va accélérer la transition ESG en gestion
Par Stuart Parkinson, Group CEO, Lombard International Group
Le 1er juin 2022
Alors que les investisseurs institutionnels accroissent leur engagement en faveur des critères Environnementaux, Sociétaux et de Gouvernance (ESG) et des Objectifs de Développement Durable de l’ONU, la transition qui est à l’œuvre chez les particuliers et les familles (très) fortunés apparaît comme l’un des principaux facteurs de cette évolution. Les groupes sociaux les plus soucieux de l’impact social et environnemental de leurs investissements, comme les femmes et les milléniaux, sont aussi des catalyseurs importants à cet égard. Par conséquent, le secteur de la gestion de patrimoine doit se mettre au diapason de ces attentes et de ces besoins, et développer des produits et des solutions à même d’y répondre.
Une opportunité
Ce vaste défi est avant tout une opportunité. On estime que, au cours des prochaines décennies, quelque 5.500 milliards de livres sterling[1] seront transférés aux milléniaux et à la génération Z. Ils se verront ainsi confier la responsabilité d’atteindre leurs objectifs financiers tout en préservant la planète pour les générations futures. Tout porte à croire que ces groupes sont enclins et prêts à relever ce défi. Environ un tiers des milléniaux recourent souvent ou exclusivement à des investissements qui tiennent compte des facteurs ESG[2], tandis que, selon une étude de l’Institute for Sustainable Investing de Morgan Stanley[3], 86 % des investisseurs milléniaux s’intéressent à l’investissement durable ou à l’investissement dans des entreprises ou des fonds dont l’objectif est de générer des rendements financiers conformes au marché tout en produisant un impact social et/ou environnemental positif.
Un thème en développement
Selon le deuxième sondage annuel que Julius Baer[4] a mené auprès des conseillers des particuliers très fortunés, l’ESG est le thème d’investissement qui s’est le plus développé ces cinq dernières années. Et le marché reflète aussi cette tendance. L’année dernière fut une année record pour l’ESG, avec un volume estimé de 120 milliards de dollars dirigés vers des placements durables, soit plus du double du montant qui avait été investi en 2020 (51 milliards de dollars)[5]. Mais les rendements et le greenwashing font hésiter les investisseurs, et le manque de standardisation des produits constitue un obstacle supplémentaire. Au fur et à mesure que l’investissement durable se démocratise, les exigences des clients deviendront de plus en plus complexes, faisant également de la capacité à mesurer l’impact ESG un enjeu crucial.
Exigence de mesures tangibles
L’orientation générale est claire. Les entreprises devront prendre des mesures tangibles en ce sens pour éviter de devenir obsolètes et « hors-sujet » aux yeux de leurs futurs clients et de leurs parties prenantes. Les échéances des objectifs net zéro se rapprochent et les leaders du secteur des services financiers, comme les acteurs économiques au sens large, ont pour mission de concilier croissance et développement durable. Mais les solutions pour y parvenir restent complexes à mettre en œuvre. La capacité à surmonter les défis internes et externes du développement durable sera pourtant déterminante pour le succès des entreprises. Celles qui en seront incapables risquent de se voir distancer par les entreprises concurrentes.
Défendre le développement durable au-delà des mots
Les entreprises doivent revoir à la hausse leurs objectifs ESG car de plus en plus d’investisseurs les tiennent pour responsables à cet égard. Pour ces investisseurs, l’ESG doit être une priorité stratégique de l’entreprise, et non pas un enjeu parmi d’autres. Mais résoudre les problématiques internes que cela engendre est plus complexe qu’il n’y parait. La plupart des entreprises ont aujourd’hui conscience des aspects ESG et ont pris de premières mesures en ce sens.
Et ensuite ? L’ESG va au-delà de la réduction des trajets aériens, de l’implantation de ruches sur le toit des immeubles et de la limitation des plastiques à usage unique dans les cuisines. Cela implique également de s’interroger sur le fonctionnement de l’entreprise à l’échelle mondiale, sur sa gouvernance et sur son impact sur la population, ce qui est bien plus difficile à décider, mettre en œuvre et quantifier.
Vers une approche ESG holistique
Pour le moment, il semblerait que les gestionnaires d’actifs suivent une approche volontariste de type « s’engager d’abord, désinvestir ensuite ». Les entreprises sont de plus en plus mises au défi de développer et de mettre en œuvre une approche ESG holistique, une approche qui non seulement dénote une réelle volonté d’améliorer leur comportement, mais qui indique aussi clairement une destination et une feuille de route crédible. Cette exigence de plus en plus forte est telle que les entreprises prennent conscience de l’impact que leurs manquements pourraient et même vont avoir sur leur réputation, et donc sur leurs bénéfices et leur cours boursier.
Taxonomie et pressions
Bien qu’une réglementation soit en cours d’élaboration (le texte final de la taxonomie européenne n’a toujours pas été officiellement adopté), une vision et une stratégie uniques font cruellement défaut, de sorte que les entreprises puissent évaluer précisément l’environnement dans lequel elles évoluent, c’est-à-dire intégrer pleinement que l’impact climatique et social de leurs décisions est extrêmement complexe, nuancé, et parfois intangible.
Il est vrai que les entreprises sont soumises à des pressions pour créer de la valeur pour leurs parties prenantes, et aux fortes attentes de la population et de la société au sens large, mais leurs hauts dirigeants et leur PDG, surtout, doivent admettre que la réponse est parfois hors de leur portée ou de leur expérience. Ayant admis cela, il n’en reste pas moins que les dirigeants doivent donner le « la » et fixer un cap, et s’ériger en ardents défenseurs du développement durable au sein de l’entreprise.
Devoir fiduciaire de l’assurance vie en unités de compte… aussi !
Au-delà du monde de l’entreprise, le secteur de l’assurance vie en unités de compte est la voie par laquelle un nombre croissant de particuliers (très) fortunés s’orientent, avec leurs conseillers, pour mettre en œuvre leurs stratégies d’investissement ESG. Le modus operandi des fournisseurs de services financiers évolue et les investisseurs ne basent plus leurs décisions sur les seuls résultats financiers. Pour faire face à ces nouveaux défis, les entreprises doivent, plus que jamais, s’être fixé un objectif clair et authentique, et s’y tenir. Elles doivent certes créer de la valeur pour leurs parties prenantes, mais il faut aussi que ces dernières voient en elles de la valeur.
Les facteurs qui font la robustesse d’une stratégie ESG, comme l’engagement continu en faveur du digital, l’excellence du service, un solide cadre de gouvernance et l’éthique commerciale, sont aussi nécessaires pour garantir la rentabilité et la croissance durable de l’entreprise. Ces facteurs sont le point de rencontre entre les intérêts des personnes (très) fortunées d’aujourd’hui et celles de demain. On estime que la fortune des investisseurs particuliers s’élève à 42.000 milliards de dollars dans le monde[6]. Ayant accès à des capitaux très importants, ils pourraient être des facteurs de changement déterminants. Les particuliers et les familles (très) fortunés sont dans une position unique pour amplifier l’impact de la philosophie ESG et contribuer aux objectifs à long terme de la société en mobilisant le capital privé. Réussir cette transition nécessitera de la transparence, la liberté de choisir et de la confiance.
[1] Are advisers ready for the intergenerational wealth transfer? – FTAdviser.com
[2] Millennials spurred growth in sustainable investing for years. Now, all generations are interested in ESG options – CNBC
[3] How Younger Investors Could Reshape The World – Morgan Stanley
[4]https://www.wealthbriefing.com/html/article.php?id=192843&mc_cid=96f914a36c&mc_eid=ebf70d311b#.YgT2bJbP02x
[5] https://www.bloomberg.com/news/newsletters/2021-12-01/the-esg-market-is-controlled-by-a-few-big-investors
[6] https://www.weforum.org/agenda/2022/01/private-investors-esg-investment
Quelles actions sélectionner en période d’inflation élevée et d’incertitude politique ?
Par Tilo Wannow, Portfolio Manager chez ODDO
18 Mai 2022
L’invasion de l’Ukraine par les troupes russes, les sanctions subséquentes contre la Russie et les pertes de production liées à la guerre dominent actuellement les marchés des matières premières et financiers. La forte pression sur les prix, combinée aux risques de ralentissement de l’économie, constitue un environnement difficile pour la sélection des actions. Il est important de se concentrer sur les entreprises qui peuvent augmenter leurs bénéfices même dans des conditions économiques défavorables et ainsi venir soutenir le prix de l’action.
- Privilégier les entreprises à forte rentabilité et à fort pouvoir de fixation des prix
La hausse des coûts de l’énergie et des matières premières constitue un défi pour toutes les entreprises et pèse sur les perspectives de bénéfices. Le fardeau est moins important pour les entreprises ayant des marges bénéficiaires brutes élevées, où l’effet de levier négatif sur la marge brute est le plus faible lorsque les coûts des matières premières augmentent.
Toutefois, les entreprises peuvent augmenter les prix de leur côté pour compenser. Avec des marges bénéficiaires élevées, un ajustement des prix relativement modéré suffit à compenser l’effet de l’augmentation des coûts. En période de forte inflation, il est donc intéressant de se concentrer sur les entreprises rentables disposant d’avantages compétitifs notables. Si les coûts de la main-d’œuvre n’augmentent pas autant que les prix des matières premières, les modèles économiques digitaux et les cabinets de conseil devraient mieux résister à la hausse des coûts de l’énergie et des matières premières.
- Se concentrer sur des secteurs stables et résistants aux phases de récession
Les incertitudes de la guerre et la hausse des prix de l’énergie et des matières premières laissent des traces chez les consommateurs. En cas de ralentissement économique ou même de récession, les fournisseurs de produits et de services considérés comme nécessaires et non cycliques devraient être relativement immunisés.
Les secteurs de la pharmacie et de la technologie médicale, les biens de consommation défensifs ainsi que les logiciels défensifs et les entreprises informatiques avec des modèles commerciaux d’abonnement sont considérés comme particulièrement prometteurs dans ce contexte.
- L’attrait des investissements thématiques en temps de crise
La Russie et l’Ukraine sont d’importants exportateurs de ressources minérales et de produits agricoles en raison de l’abondance de leurs matières premières et de leurs sols fertiles. La guerre entraînera très probablement un découplage accéléré des marchés occidentaux en fonction de leur dépendance en matières premières et notamment en énergie en provenance de Russie.
En outre, l’augmentation de la production de produits agricoles tels que le blé ou le maïs en dehors de la région sera d’une grande importance. Bien entendu, les producteurs de matières premières rares et de combustibles fossiles (pétrole, gaz, charbon) sont les bénéficiaires à court terme. Mais à moyen terme, on peut s’attendre à une accélération de la transition énergétique vers les énergies renouvelables.
Les fabricants de composants, les exploitants de parcs solaires et éoliens ainsi que les exploitants d’infrastructures font partie des opportunités d’investissement. Néanmoins, la prudence est de mise en raison de la forte intensité de la concurrence dans le secteur. Souvent, les grands gagnants de ces mégatendances sont les fournisseurs d’équipements et de services, tels que les exploitants de mines et les fabricants de machines agricoles. Outre la dépendance à l’égard de la Russie pour les matières premières, la sécurité extérieure est également devenue une question importante. La guerre moderne par le biais de cyberattaques doit être soutenue par du matériel et des logiciels puissants. La demande devrait croître encore plus fortement que par le passé pour les principaux fournisseurs.
GAFAM : le parfait reflet de la situation macroéconomique mondiale
Par Clément Inbona, gérant de fonds d’investissement, La Financière de l’Echiquier.
Le 17 mai 2022
Alors que la saison des publications de résultats du premier trimestre 2022 bat son plein, les publications des GAFAM, ces mastodontes américains de la tech, reflètent à merveille les difficultés que traverse l’économique mondiale. Conflit en Ukraine, hausse des salaires, difficultés d’approvisionnement, règlementation accrue, hausse du prix de l’énergie : chacun de ces obstacles a impacté directement une ou plusieurs sociétés de ce quintet majeur.
Google,Apple et Meta
Google, le géant de la publicité en ligne, a souffert directement du conflit en Ukraine avec la suspension de ses services publicitaires en Russie. Mais c’est aussi l’ensemble du marché européen qui pèse sur ses revenus publicitaires. Car comme dans toute période d’incertitudes, les budgets communications sont la première variable d’ajustement pour diminuer les charges des sociétés.
Apple, la firme de Cupertino, a publié un chiffre d’affaires au-dessus des attentes mais a revu ses ambitions pour le deuxième trimestre pour deux raisons principales. La première vient de l’Empire du Milieu qui est actuellement confronté à une vague sanitaire mettant à mal la digue ̎zéro covid ̎ érigée par le pouvoir central. Ainsi les mises sous cloche de Shenzhen, la Silicon Valley chinoise, puis de Shanghai, empêtrée dans une véritable pagaille navale, font craindre des difficultés de production et de transport pour les mois à venir. Pour Apple également, la décision de se couper du marché russe, est déjà, et sera dommageable économiquement.
Facebook, rebaptisé Meta il y a peu, réussit à renouer avec la croissance de ses utilisateurs mais déçoit sur ses résultats. Encore un acteur qui souffre du ralentissement du marché publicitaire européen. Ce trimestre, Meta peine principalement à cause des nouvelles règles mises en place par Apple visant à protéger les données de ses utilisateurs, le ciblage publicitaire devient alors moins précis et donc moins efficace. Sur l’année 2022, le groupe estime que cela le privera de la bagatelle de 10 milliards de dollars de revenus. Bien que cette règlementation ne provienne pas d’un acteur public, nous constatons le risque que celui-ci fait peser sur des entreprises de cette taille.
Amazon et Microsoft
Amazon, coincée entre une hausse des coûts salariaux et l’augmentation des coûts de transport, affiche des pertes au premier trimestre. Certes, celles-ci sont largement liées à un investissement infructueux dans le ̎Tesla des camions ̎ – Rivian, mais l’activité de distribution est en souffrance chez Amazon et l’oblige à revoir à la baisse ses prévisions pour 2022.
Enfin, Microsoft, dernière lettre de l’acronyme GAFAM, mais sans doute première par la qualité de ses résultats au premier trimestre, continue de bénéficier du courant porteur de la numérisation pour sa plateforme de cloudAzure. LinkedIn, porté par un marché du travail en tension, voit ses revenus en hausse de 34%. Par ailleurs, la division de produits informatiques physiques Surface croit de 11%.
Conclusion
Si ces acteurs font face à des difficultés microéconomiques, la macroéconomie ne leur est également pas favorable en ces temps agités. Le mouvement de hausse des taux affecte mécaniquement l’attractivité de leur valorisation à la baisse. Depuis le début de l’année, la baisse du cours de ces cinq entreprises équivaut peu ou prou au double de la baisse du S&P 500. Mais le succès de ces géants s’est bâti sur l’innovation et la croissance, et les voies pour en retrouver le chemin semblent nombreuses : cloud, metaverse, innovation hardware… Pour un rebond coïncidant avec celui de l’économie mondiale ?
Résilience des actions japonaises
Par Daisuke Nomoto, Responsable actions japonaises chez Columbia Threadneedle Investments
Le 12 avril 2022
La Bourse de Tokyo a fait preuve d’une grande résistance malgré la guerre en Ukraine, qui a fait grimper la volatilité sur les marchés boursiers. Cela s’explique par sa faible interdépendance avec l’économie russe. L’impact économique direct de l’invasion russe est minime pour le Japon, car la part des importations russes dans le total des importations japonaises se situe dans une fourchette à un chiffre. En outre, le marché des actions japonaises a le vent en poupe grâce à la poursuite de la reprise économique, au soutien fiscal du gouvernement et à l’augmentation des flux de capitaux sur le marché en raison des préoccupations mondiales dues à d’inflation.
Néanmoins, compte tenu de la hausse des prix du pétrole et d’autres matières premières, l’économie japonaise sera, elle aussi, indirectement touchée par l’inflation des coûts mais dans une moindre mesure que les économies européennes, où l’approvisionnement énergétique dépend davantage de la Russie.
Le moment est propice pour entrer sur le marché
Le thème de la réouverture prend également de l’élan au vu de l’assouplissement des mesures Covid, tandis qu’une augmentation des rachats d’actions soutient le marché boursier. Le plan de relance du Premier ministre Kishida devrait également entraîner des augmentations de salaires et, comme la rentabilité est dans une tendance structurelle à la hausse, les investisseurs y verront un point d’entrée intéressant dans le cycle des actions japonaises.
La récente transition d’une croissance économique élevée à une croissance économique faible, au milieu d’une inflation mondiale persistante, a conduit les investisseurs à se concentrer sur les actions japonaises, car elles offrent un rapport risque/rendement favorable.
Au niveau des entreprises, le Japon a affiché le profil de croissance des bénéfices le plus fort au monde ces derniers mois (mené par les entreprises exportatrices). La dynamique robuste des bénéfices devrait se poursuive. Dans un contexte de valorisation attractive, les entreprises japonaises disposent d’importantes liquidités dans leurs bilans, ce qui a encore stimulé le marché. Cela leur permet de maintenir ou d’augmenter les rendements pour les actionnaires. En outre, cela permet de financer des acquisitions, ce qui renforce encore l’argument d’investissement.
La numérisation et l’automatisation offrent des opportunités d’investissement
Le Japon a souvent été négligé par les investisseurs internationaux, en partie à cause de sa croissance économique lente et de sa population vieillissante. Le pays offre pourtant un univers d’investissement large et profond, avec des entreprises de qualité offrant une croissance durable des revenus à une valorisation raisonnable. Il est judicieux de porter une attention particulière au thème de l’innovation.
L’automatisation est l’un des domaines à considérer comme attractifs. Elle aide à résoudre le problème de la pénurie de main-d’œuvre et contribue à une production de masse de haute qualité. Les possibilités de robotique et d’automatisation vont considérablement augmenter au cours des dix prochaines années dans des domaines tels que l’automatisation des usines et l’automatisation des stocks dans le commerce en ligne.
La croissance économique mondiale devrait certes ralentir et exercer une certaine pression sur les marchés boursiers, mais le Japon ne sera pas exposé à une pression inflationniste accrue dans la même mesure que d’autres économies.
Il convient de continuer à suivre les progrès du programme du Premier ministre Kishida qui s’est engagé à maintenir des politiques budgétaires et monétaires expansionnistes pour soutenir la reprise économique.
L’inflation est-elle soluble dans la Tech ?
Par Rolando Grandi, CFA, Gérant actions internationales thématiques
Le 10 mars 2022
L’inflation persistera en 2022. Dans ce contexte, les valeurs de la Tech seront-elles particulièrement impactées ? Leur capacité à augmenter les prix sans réduire la demande (leur pricing power) sera-t-elle un rempart ? Un levier de performance ? On peut rester convaincus du potentiel de secteurs traversés par l’Intelligence Artificielle (IA) ou de l’automatisation, par exemple, et être confiants dans la capacité d’innovation des entreprises. Dans un monde qui se digitalise de manière irréversible, la demande reste forte.
Relever des défis planétaires
L’IA, la robotique et les technologies intelligentes qui réinventent les contours de l’économie sont porteuses de solutions et peuvent contribuer à relever des défis planétaires. Parmi ces défis, la recherche de productivité alors que des pénuries de main d’œuvre se profilent jusqu’en Chine. Quel sera l’impact de cette pénurie sur la production des usines alors que les chaînes d’approvisionnement sont désorganisées voire bloquées par des pénuries de matières et attisent les tensions inflationnistes ?
L’une des solutions est l’automatisation qui se révèle être un atout majeur de la digitalisation des entreprises. L’automatisation et la robotique permettront de gagner en productivité mais aussi d’adoucir ou de digérer l’inflation salariale. D’ici 2030, 60% des activités professionnelles à l’échelle mondiale ont, selon Mc Kinsey, au moins 30% de leurs activités qui pourraient être automatisées (800 millions de travailleurs)[1]. Les gains de productivité qui en découlent apportent en effet à l’économie mondiale +1,4% de croissance par an.
Quelques exemples
C’est d’autant plus pertinent dans un monde numérisé où les dépenses d’investissement sont moins pertinentes, à l’exception des énergies renouvelables et de la transition climatique qui mobilisent d’importants capitaux. Si les entreprises redoublent d’efforts pour augmenter les effectifs et recruter, au prix parfois d’augmentations de salaire pouvant atteindre +20%, elles déploient en parallèle des stratégies pour accroître la productivité des employés et des process de travail.
C’est le cas de l’américain Zoominfo, dont le logiciel automatise les efforts de vente et de marketing des employés. Cette plateforme d’IA permet de mettre à jour de manière dynamique les informations des clients, de prévoir les moments auxquels il convient de les contacter et d’automatiser les relances, et bien plus encore. Les forces commerciales peuvent ainsi accorder plus de temps aux activités stratégiques.
La solution d’Alteryx est également intéressante. Les ingénieurs de la data, dont l’inflation salariale est très importante, passent la moitié de leur temps à nettoyer et préparer les données avant de les transmettre vers les modèles d’analyse. La puissante plateforme d’Alteryx permet de nettoyer ces données et de libérer le temps des ingénieurs, qui se consacrent ainsi à des activités à plus forte valeur ajoutée, et plus épanouissantes.
Enfin, dans le contexte actuel où les nouvelles recrues se font plus rares et où les salariés quittent plus facilement leur entreprise, on assiste à l’essor de la société Qualtrics[2], dont le logiciel permet de fournir aux employés une meilleure expérience en entreprise, améliorant ainsi leur satisfaction mais également leur apprentissage et gains de productivité.
Dans un monde où l’inflation signe son retour, la technologie peut alors s’avérer un outil indispensable pour les entreprises. La transformation digitale de l’économie leur permet en effet de gagner en compétitivité, d’optimiser leurs coûts, d’être plus productives et donc de soutenir leur croissance future et cimenter leur leadership. Les perspectives semblent donc encourageantes pour le secteur technologique, dont les produits et services continuent de proliférer au sein de notre économie et dont le potentiel d’innovation est… illimité.
[1] McKinsey, Future of work, juin 2020
[2] Les valeurs sont citées à titre d’illustration, leur présence dans nos gestions n’est pas garantie
Quelles sont les tendances ESG pour 2022 ?
Par Martina Macpherson, responsable de la stratégie ESG, ODDO BHF AM
Le 25 février 2022
Ces dernières années, on assiste à un intérêt toujours croissant des investisseurs pour les fonds ESG. On constate ainsi que le volume des investissements ESG continue d’augmenter. En 2021, les fonds ESG ont continué de croître dans le monde et représentent 10 % des encours gérés dans les fonds. D’après une étude menée par Refinitiv/Lipper (nov. 2021)[1], en 2021, un montant record de 649 milliards de dollars a été investi dans les fonds ESG dans le monde, contre 542 milliards et 285 milliards de dollars respectivement en 2020 et 2019.
Quelle réglementation ?
Mais face à cette affluence, il devient nécessaire d’élaborer une réglementation européenne pour améliorer la transparence et la cohérence entre les fonds
La règlementation SFDR sur les publications et le reporting ainsi que l’initiative de FinDatEx de créer un modèle de reporting « universel » pour les fonds, qui intègre les différentes obligations réglementaires, devraient faciliter la comparaison entre les fonds. Actuellement, dans un environnement marqué par la multiplicité des normes, des cadres juridiques et des labels, cela relève de la « mission impossible » pour les investisseurs sans que cela ait un impact sur la performance du portefeuille, souligne une étude récente de Qontigo (2022)[2],
Quelle méthode d’intégration ?
Selon une étude de la GSIA (2020)[3], l’intégration ESG est la stratégie d’investissement durable la plus courante, suivie de la sélection négative, de l’engagement actionnarial, de la sélection fondée sur les normes et de l’investissement thématique durable.
De plus, dans la plupart des régions du monde, et c’est le cas de l’Europe, les gestionnaires d’actifs associent de plus en plus plusieurs stratégies d’investissement durable dans un même produit d’investissement, telle que la sélection négative ou l’exclusion avec l’intégration ESG et l’engagement actionnarial.
L’investissement à impact : une nouvelle tendance en pleine expansion
Selon le GIIN (2012)[4], les investissements à impact désignent des investissements réalisés dans des entreprises, des organisations et des fonds avec une intention de produire des effets sociaux et environnementaux en plus du rendement financier. Ces investissements à impact peuvent être effectués sur les marchés émergents et développés, cotés et non cotés et cibler une large gamme de rendements espérés, selon les cas de figure.
Ces investissements concernent souvent un projet précis. Ils se distinguent d’une action de philanthropie car les investisseurs restent propriétaires de l’actif et espèrent en obtenir un rendement financier. Ces investissements à impact comprennent la microfinance, l’investissement solidaire, les fonds d’entrepreneuriat social et les fonds solidaires français.
Une demande aussi des particuliers
Après avoir bénéficié d’une forte dynamique sur le marché des investisseurs institutionnels, l’investissement ESG prend à présent de l’ampleur sur le marché des particuliers avec de nouvelles exigences.
D’après Eurosif (2018)[5], la part du marché des particuliers dans l’investissement ESG était supérieure à 30 % en 2018, contre 22 % en 2016, et bien au-delà des 3,4 % enregistrés en 2014. Ces chiffres corroborent une étude menée par 2DII sur les investisseurs particuliers (2019)[6], dans laquelle les deux tiers des particuliers français et allemands interrogés ont déclaré souhaiter investir dans des entreprises responsables au niveau environnemental, tout en ajoutant qu’on ne leur demande jamais leurs préférences en matière de développement durable.
Nouvelle réglementation MiFID
La réglementation MiFID II (EU2017/565)[7] a été modifiée pour résoudre cette incohérence. Il est maintenant demandé aux conseillers financiers de respecter les préférences de leurs clients en matière de développement durable, ce qui n’est sans doute pas étranger à cet engouement croissant pour les fonds durables (art 8 ou art 9 du règlement SFDR).
Les travaux menés en 2021 par Globe Scan[8] ont montré que 82 % des investisseurs particuliers dans le monde s’intéressent à l’investissement dans des entreprises responsables sur le plan social et environnemental et que 72 % veulent éviter les secteurs qui contribuent au changement climatique. Un tiers des personnes interrogées estiment néanmoins manquer des informations nécessaires pour choisir et évaluer leurs placements dans des entreprises socialement et environnementalement responsables.
La pandémie de COVID-19 a par ailleurs mis en évidence la pertinence des risques ESG systémiques et leurs conséquences sur la performance des entreprises. Le dernier rapport « Sustainable Signals » de Morgan Stanley (2021)[9] précise qu’elle incite les investisseurs particuliers à privilégier des objectifs de long terme et à se montrer notamment plus intéressés par la santé publique et la justice sociale, en plus des questions environnementales.
Consultez aussi sur MoneyStore le corner Chroniques d’experts
[1] Refinitiv/Lipper, Analysis: How 2021 became the year of ESG investing, dans Reuters, 23 déc. 2021, lien: https://www.reuters.com/markets/us/how-2021-became-year-esg-investing-2021-12-23/
[2] Qontigo, An ‘impossible product’? Comparing Europe’s dissonant ESG fund labels, 10 janv. 2022, lien: https://qontigo.com/an-impossible-product-comparing-europes-dissonant-esg-fund-labels/
[3] GSIA, Global Sustainable Investment Review, 2020, lien: http://www.gsi-alliance.org/wp-content/uploads/2021/08/GSIR-20201.pdf
[4] Global Impact Investing Network (GIIN), « What is Impact Investing? », 2012, lien: http://www.thegiin.org/cgi-bin/iowa/investing/index.html
[5] EuroSIF, European SRI Study, 19 nov. 2018, lien: https://www.eurosif.org/news/eurosif-2018-sri-study-is-out/
[6] 2DII, A Large Majority of Retail Clients Want to Invest Sustainably – Survey of French and German retail investors’ sustainability objectives, mars 2020, lien: https://2degrees-investing.org/wp-content/uploads/2020/03/A-Large-Majority-of-Retail-Clients-Want-to-Invest-Sustainably.pdf
[7] Commission EU, MiFID II (EU) 2017/565, 21 avril 2021, lien : https:// https://eur-lex.europa.eu/legal-content/FR/TXT/PDF/?uri=PI_COM:C(2021)2616&from=EN
[8] GlobeScan, Investors views on ESG, déc. 2021, lien : https://3ng5l43rkkzc34ep72kj9as1-wpengine.netdna-ssl.com/wp-content/uploads/2021/12/GlobeScan-Radar-2021-Retail_Investors_Views_of_ESG-Full-Report.pdf
[9] Morgan Stanley Sustainable Signals: Individual Investors and the COVID-19 Pandemic, 27 oct. 2021, lien: https://www.morganstanley.com/assets/pdfs/2021-Sustainable_Signals_Individual_Investor.pdf
Le style Value toujours source d’opportunités en 2022 ?
Par Anthony Bailly et Vincent Imeneuraët, Gestionnaires Actions Européennes chez Rothschild & Co AM
Le 4 février 2022
La dégradation sanitaire en fin d’année a éclipsé la normalisation des taux enclenchée en 2021. Deux sujets ont tour à tour animé le marché en 2021 : l’inflation et la situation sanitaire. À chaque fois que l’inflation revenait sur le devant de la scène, poussant les taux à la hausse, le style Value a surperformé.
Cela a été le cas sur la première partie de l’année où, jusqu’à mi-mai, le marché a joué la thématique du “reflation trade”, ou encore en septembre avec l’annonce du tapering. En revanche, à chaque résurgence du risque sanitaire (4ème vague au cours de l’été, puis 5ème vague à l’automne), c’est le style Croissance qui l’a emporté, entraînant une surperformance de la Croissance sur la Value à fin novembre.
Neutralité des styles
Durant le mois de décembre, ces deux sujets se sont neutralisés : l’apparition du variant Omicron renforçait les inquiétudes sanitaires, tandis que la disparition du caractère “transitoire” du vocable de la Fed au sujet de l’inflation marquait l’accélération du resserrement monétaire annoncé en septembre. Au final, malgré un mois de décembre où le style Value a retrouvé une dynamique favorable, le style Croissance a surperformé de 3,4% le style Value sur l’année 2021, les investisseurs favorisant les titres à forte visibilité, par crainte de l’impact de possibles mesures de restrictions en début d’année sur la croissance économique en 2022.
Inflation et situation sanitaire : où en sommes-nous ?
Sur le plan sanitaire, même si la propagation du variant Omicron se poursuit de façon fulgurante à travers le monde, sa moindre dangerosité et le degré élevé de vaccination dans les économies occidentales laissent penser que la situation reste maîtrisable. Il est possible de “vivre avec le virus”. C’est en tous cas le biais pris par les marchés en ce début d’année, ces derniers ayant clairement choisi de se focaliser sur les messages envoyés par les banques centrales. Et particulièrement celui de la Fed dont les Minutes, publiées le 5 janvier dernier, ont été explicites en évoquant l’accélération du tapering avec une réduction du bilan plus tôt qu’anticipé.
Cela se traduit par l’accélération du mouvement qui a débuté mi-décembre, caractérisé par une hausse des taux souverains, via la composante des taux réels alors que les anticipations d’inflation s’érodent légèrement dans le sillage du reflux de certaines matières premières à l’exception du pétrole. La hausse des taux réels, dont doutaient les investisseurs, se concrétise donc en ce début d’année. Elle pourrait être la thématique majeure de 2022. On connait la corrélation forte qui existe entre les taux (surtout réels) et le style Value, et c’est ce qui explique la forte rotation observée en ce début d’année.
Et quid des fondamentaux ?
Les fondamentaux solides ne sont pas encore reflétés dans la valorisation des secteurs Value.
Ces fondamentaux sont :
- Un contexte macroéconomique qui reste bien orienté. Le consensus de croissance économique de la Zone euro se situe aujourd’hui autour de 4,3%, ce qui reste bien supérieur à sa croissance potentielle (autour de 1-1,5%). Cette croissance est soutenue par l’excès d’épargne accumulée des ménages (environ 6 points de PIB en Zone euro), par la reconstitution de stocks par les entreprises, par les investissements nécessaires à la remise à niveau de l’appareil productif et enfin par le déploiement du plan de relance de la Commission européenne.
- Des attentes de croissance de BPA (bénéfices par action) trop conservatrices pour 2022. Malgré ce contexte macroéconomique porteur, le consensus attend une progression de seulement 7% des BPA sur l’Euro Stoxx pour 2022. Cela correspond au niveau d’attente le plus faible des 30 dernières années. Cela impliquerait un pincement sur les marges dû à une forte hausse du coût des intrants (matières premières, et hausse des salaires).
Cette vision, notamment pour les secteurs cycliques et financiers, peut être remise en cause pour les raisons suivantes :
- La forte progression des résultats a permis aux sociétés Value de renforcer leur bilan et laisse envisager la poursuite de la progression de leurs marges Les fondamentaux des sociétés sont solides, en particulier pour les secteurs de la banque, de l’énergie, de l’automobile et des matières premières qui affichent les plus fortes progressions de bénéfices en 2021. Ceci s’explique certes par des bases de comparaison favorables, mais aussi par des résultats supérieurs aux attentes, lors de chaque saison de publication. Les valeurs cycliques et financières sortent de cette crise avec, pour la plupart, des bilans renforcés et des bases de coûts fortement abaissées, laissant encore présager d’un levier opérationnel important.
- Une dynamique économique et des coûts de l’énergie non intégrés à certains secteurs En outre, le consensus attend une croissance nulle sur les BPA du secteur bancaire, alors que ce dernier devrait mécaniquement être amélioré par la hausse des taux, par les volumes de crédit portés par la dynamique macroéconomique et par les programmes d’actions. De même, la hausse des prix de l’énergie (gaz, pétrole et électricité) ne parait pas intégrée dans les attentes de croissance de résultats des sociétés des secteurs de l’énergie et des services aux collectivités.
- Une valorisation toujours plus attractive. La performance des secteurs Value en 2021 n’a pas reflété la forte hausse de leurs bénéfices, dégradant encore la valorisation relative du segment Value en 2021. Le potentiel de révision additionnel à la hausse des attentes de résultats en 2022 rend donc particulièrement confiant sur la performance à venir du segment Value, dont la décote de valorisation est sur son point bas historique (les P/E restent inférieurs à 10x pour la plupart des secteurs).
L’humanisation des animaux de compagnie
Par TopTierAccess
Le 26 janvier 2022
Les animaux de compagnie est un secteur en plein essor et une prochaine mode dans le monde du capital-investissement. Ces animaux de compagnie sont une nouvelle tendance. Quelque 43 % des Belges ont aujourd’hui un animal de compagnie, les chats et les chiens étant les groupes d’animaux les plus importants. Avant la crise du Covid, il y avait déjà une tendance à ce que de plus en plus de personnes gardent des animaux de compagnie. Le Covid n’a fait qu’accélérer cette tendance.
En Belgique, on connaît déjà Tom&Co. Selon le bureau d’études GfK, les Belges ont dépensé 644 millions d’euros pour des achats d’articles animaliers l’année dernière, soit 7,8 % de plus que l’année précédente. Les entrepreneurs belges ont également constaté l’existence d’un vide sur le marché. Par exemple, deux vétérans belges d’eBay ont été les fondateurs de Pawshake, une plateforme en ligne où l’on peut trouver un gardien pour un chien ou un chat, tout comme on peut trouver une baby-sitter sur AirBsit. Le slogan de Pawshake est : « Trouvez un pet sitter local qui traite votre animal comme une famille ». Les animaleries ont quant à elles désormais une présence à la fois en ligne et hors ligne.
Humanisation
Il n’y a pas seulement plus d’animaux. La véritable nouvelle mégatendance est l' »humanisation » des chiens ou des chats. En bref, cela signifie que l’on prend soin des animaux de compagnie aussi bien, voire mieux, que nous-mêmes, car les animaux de compagnie sont désormais considérés comme un membre supplémentaire de la famille.
Les familles sont de plus en plus petites. Un chat ou un chien est désormais considéré comme l’égal d’un enfant. Il ne s’agit pas seulement d’une tendance en Belgique. La question de l' »humanisation des animaux de compagnie » revient sans cesse sur le tapis, avec une croissance incroyable sur les marchés américain et européen.
Quelques exemples
Voici quelques exemples de sociétés actives dans ce segment de marché.
– Petsmart était l’un des plus grands magasins d’articles pour animaux de compagnie aux Etats-Unis. Avec BC Partners, un fonds d’investissement privé, il a également racheté Chewy, le plus grand magasin en ligne d’articles pour animaux de compagnie. Il est désormais coté en bourse.
– Swiss Partners Group a acheté Wedgewood Pharmacy, une pharmacie en ligne pour les préparations magistrales de médicaments pour animaux. Ici, les pilules sont conçues sur mesure pour chaque animal.
– CVC, un autre acteur du capital-investissement, vient d’investir 1 milliard de livres dans Medivet, une chaîne britannique de quelque 350 cabinets de médecins généralistes qui peuvent s’occuper des animaux de compagnie 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.
– EQT a investi dans le groupe Musti, un Tom & Co scandinave qui est désormais également coté en bourse. EQT a également participé à la dernière augmentation de capital de Bought By Many, un assureur en ligne qui ne propose que des assurances pour animaux de compagnie. Environ 25 % des animaux de compagnie au Royaume-Uni sont assurés pour des procédures médicales. Aux États-Unis, ce chiffre n’est que de 2 %. EQT, poursuit l’expansion d’IVC Evidensia, qui est la plus grande chaîne vétérinaire européenne avec quelque 1.500 cliniques et cabinets vétérinaires. En raison de l’humanisation des animaux de compagnie, de nombreux généralistes ont soudainement besoin de connaissances et d’infrastructures telles que des scanners et des salles d’opération pour les animaux. Cette spécialisation n’est possible qu’au sein de grands groupes.
Surtout au Royaume-Uni
L’innovation vient essentiellement du Royaume-Uni.
– A titre d’exemple, à la « garderie pour chiens » de Bruce, les propriétaires peuvent laisser leur chien pour la journée. Les centres de jour pour chiens de Bruce disposent de zones où l’odorat des chiens est stimulé par toutes sortes d’odeurs cachées. Les chiots y apprennent également à interagir avec d’autres chiens. C’est idéal pour un chien qui vit dans une maison sans jardin ou avec un petit jardin.
– Barking Heads, pour sa part, vend des aliments haut de gamme pour chiens et chats sous des marques telles que « Fat Dog Slim », « Fish-N-Delish » et « Smitted Kitten », qui ne contiennent que des ingrédients naturels, sans arômes ni conservateurs.
– Forthglade est une autre marque d’aliments pour animaux de compagnie dont la devise est : « Si vous n’êtes pas prêt à le manger vous-même, ne le donnez pas à vos animaux ».
Et aux Etats-Unis
– Aux États-Unis, L.Catterton a investi dans JustFoodforDogs, un restaurant comptant huit succursales dans des centres commerciaux de Los Angeles, où des chefs préparent sur place des repas pour chiens et chats dans une cuisine ouverte, en utilisant des produits naturels locaux. Les clients peuvent ensuite emporter les plats fraîchement préparés chez eux.
– Toujours aux États-Unis, des investisseurs de renom tels que le Founders Fund de Mark Cuban et Peter Thiel ont investi quelque 23 millions de dollars dans Wild Earth, une marque d’aliments végétariens pour chiens. De nombreux amis des animaux sont eux-mêmes végétariens et souhaiteraient que leur animal de compagnie contribue également à la bonne cause. Après tout, environ 20 % de toute la viande abattue est destinée aux animaux de compagnie.
Sources :
Adoption d’animaux en Belgique
– https://www.coronadirect.be/nl/pers/bijna-een-op-drie-verwelkomde-nieuw-huisdier-sinds-covid-19/
Humanisation des animaux de compagnie (mondial et Belgique)
– https://www.euromonitor.com/pet-humanisation-the-trend-and-its-strategic-impact-on-global-pet-care-markets/report
– https://www.gondola.be/nl/news/comeos-bestudeert-de-belgische-huisdierenmarkt
Pawshake
– https://nl.pawshake.be/about-us
Stratégie sur les marchés obligataires : savoir rester flexible
Par ODDO BHF AM
Le 6 janvier 2022
La hausse de l’inflation et une croissance économique toujours forte, bien qu’à un rythme moins soutenu, mettent les investisseurs obligataires sous pression. Des stratégies d’investissement flexibles peuvent les aider à faire face aux turbulences à venir.
Taux d’intérêt
Les chiffres de l’inflation ont atteint des sommets inégalés depuis longtemps, tant aux États-Unis que dans la zone euro, en raison des bouleversements provoqués par la crise du Covid. L’économie restant solide, les banques centrales commencent à modérer leur politique monétaire accommodante. Aux Etats-Unis, la Réserve fédérale a déjà réduit les achats d’obligations, de sorte que le programme prendra fin au plus tard en juin 2022. De nombreux observateurs s’attendent à ce que les premières hausses de taux d’intérêt aient lieu au second semestre de l’année prochaine.
En Europe, de plus en plus de voix s’élèvent également au sein de la BCE pour mettre en garde contre un taux d’inflation qui resterait durablement supérieur à son objectif. Toutefois, compte tenu du rebond des chiffres de contaminations dans certains pays et de la menace de confinements, les hausses de taux d’intérêt ne sont pas forcément à l’ordre du jour immédiatement.
Duration ou opportunités
Mais les discussions de sortie de crise suffisent à impacter les prix des obligations de maturités longues. La conséquence pour les investisseurs obligataires est claire : la valeur des obligations à longues échéances baisse dans un contexte d’inflation élevée et de perspective de hausse des taux d’intérêt. La duration courte pourrait être une solution, mais elle n’offre pas aujourd’hui d’opportunités de rendement particulièrement attrayantes.
Dans ce contexte, les investisseurs obligataires sont confrontés à la question de savoir comment exploiter les opportunités de rendement dans cet environnement de marché volatil tout en limitant les risques. Les stratégies d’investissement offrant une plus grande flexibilité peuvent être une réponse. Elles consistent en une allocation flexible entre tous les segments obligataires (obligations d’Etat et sécurisées, obligations d’entreprises, dette financière subordonnée…).
Avantages potentiels de la flexibilité
Ces stratégies flexibles présentent, trois avantages potentiels :
- Elles peuvent s’appuyer sur un univers d’investissement élargi et ainsi diversifier les risques par région ou par segment obligataire.
- La sélection active des titres permet d’identifier des opportunités d’investissement même sur des marchés volatils.
- Une gestion active du risque de taux d’intérêt permet de générer des potentiels de rendements même dans les phases de hausse des taux.
Gagnants et perdants sur les obligations d’entreprises
Face au risque de hausse des taux d’intérêt, il est conseillé, par exemple, d’investir moins dans les obligations d’État et de profiter de l’environnement encore fondamentalement sain des obligations d’entreprises. Mais, là aussi, il faut agir avec discernement. En effet, nous avons atteint la phase intermédiaire du cycle de crédit durant laquelle la plupart des entreprises affichent des bénéfices et des flux de trésorerie encore positifs.
Ainsi, dans une telle phase, l’analyse crédit fondamentale des sociétés et la sélection des titres deviennent cruciales. Certaines entreprises, par exemple les plus endettées, seront plus affectées que d’autres par la réduction du soutien des Banques centrales. Ces entreprises doivent être écartées.
Enfin, une inflation persistante signifie qu’il y aura des gagnants et des perdants. Les gagnants seront les entreprises disposant d’un pouvoir de fixation des prix suffisant pour répercuter la hausse des coûts. Les perdants, en revanche, seront les entreprises dont la position concurrentielle est plus faible et qui subiront des pressions sur leurs marges.
Les sociétés financières, quant à elles, devraient continuer à bien se comporter dans un tel environnement. Leurs bilans sont solides et leurs marges d’intérêt nettes devraient bénéficier de la hausse des taux d’intérêt. Ceux qui sélectionnent des entreprises capables de générer des cash-flows positifs même dans une phase du cycle de crédit plus difficile peuvent espérer des rendements supplémentaires pour leur portefeuille obligataire.
Les atouts d’une gestion active de la duration du portefeuille
Dans le cadre d’une stratégie d’investissement obligataire flexible, la duration du portefeuille peut être neutralisée voire négative. Dans ce cas de figure, l’investisseur n’est alors pas impacté par la hausse des taux d’intérêt, tout en continuant à capter les primes de risque potentielles des obligations d’entreprise. Il convient toutefois de noter que la couverture des taux d’intérêt peut être coûteuse et doit être utilisée à bon escient. Si aucune tendance durable à la hausse des taux d’intérêt n’est établie, un portefeuille d’obligations doit garder une duration « longue ». Des modèles de risque sont utilisés pour permettre d’identifier ces tendances et aider à établir au bon moment les stratégies de couverture des portefeuilles.
Y aura-t-il des cadeaux à Noël ?
Par Coline PAVOT, Responsable de la Recherche Investissement Responsable, La Financière de l’Echiquier
Le 23 décembre 2021
Pénurie. Ce mot était encore rare dans le quotidien des citoyens des pays développés il y a encore peu de temps. Mais depuis quelques mois, il est devenu une réalité concrète. Crise sanitaire, tensions géopolitiques et catastrophes climatiques ont progressivement désorganisé les chaînes d’approvisionnement et la logistique mondiale. Les ruptures, de plus en plus nombreuses, touchent tour à tour tous les secteurs de l’économie.
Retour sur une pénurie mondiale
Comment en sommes-nous arrivés là ? Sur fond de tensions géopolitiques multiples, de la Chine aux Etats-Unis en passant par la Russie, et d’événements climatiques extrêmes, la pandémie a mis à l’arrêt une grande partie de la production industrielle mondiale. De la production de pièces de vélo à celle du bois de charpente ou à l’extraction de métaux rares, tous les secteurs se sont retrouvés sous pression. Pourtant dopée par les plans de sauvetage déployés par les Etats pendant la crise, la consommation des ménages a finalement été freinée par un phénomène de pénurie généralisé, ralentissant la reprise de l’économie mondiale. Ce manque d’accès à la matière première est amplifié pour les entreprises qui adoptent des modes de production plus responsables. La demande pour ces ressources durables augmentant, leur prix flambe, et certaines deviennent introuvables.[1] L’augmentation des prix impacte alors tous les acteurs économiques et atteint peu à peu le consommateur. Les prix des biens sortant des usines chinoises ont crû en moyenne de 13,5 % sur un an, leur plus forte hausse en un quart de siècle.[2]
Des chaînes d’approvisionnement mondialisées
Les chaînes d’approvisionnement sont mondialisées, à l’image de la société de consommation. Avant d’atterrir dans un placard, un jean a pu parcourir jusqu’à 65.000 km, soit une fois et demi le tour de la Terre. Ces chiffres révèlent la triste réalité de la société de consommation. Le coton cultivé en Ouzbékistan peut être filé en Turquie, et teint en Bulgarie. La toile peut ensuite être tissée à Taïwan et le jean assemblé en Tunisie avant d’être livré en France.[3] Autre constat qui fait écho aux propos de l’économiste et philosophe britannique David Ricardo, auteur de la théorie des avantages comparatifs : nous prenons conscience de l’hyperspécialisation de certains pays et de notre très forte dépendance à leur égard. Alors que la dernière usine de paracétamol d’Europe a fermé ses portes en 2009[4], il a fallu 10 ans pour réaliser que plus de 80% de la production mondiale de cet antalgique provenaient d’Inde et de Chine. La crise que nous traversons agit comme un révélateur de la complexité des chaînes d’approvisionnement des entreprises et leur manque flagrant de contrôle sur cette dernière. Cette fragilité les expose – et nous expose – à des risques financiers évidents, mais également à de potentiels scandales environnementaux et sociaux majeurs.
Maîtriser l’approvisionnement
Dans ce contexte, les gagnants sont souvent ceux qui entretiennent, depuis des années, de bonnes relations avec leurs fournisseurs, par exemple en les payant bien et dans des délais corrects. En période de tensions, ils seront bien souvent favorisés, de quoi inciter d’autres entreprises à revoir leur politique d’approvisionnement, au regard des recommandations de la loi française sur le devoir de vigilance. Mieux maîtriser sa chaîne de valeur, en la simplifiant ou en relocalisant, c’est avoir une meilleure conscience de son impact social et environnemental et la possibilité de réduire au maximum ses externalités négatives. Derrière ce défi, il y a aussi un enjeu de souveraineté nationale. Aussi, le Plan France 2030 met-il le cap sur l’économie circulaire pour sécuriser l’approvisionnement en matériaux comme le plastique, le bois, les métaux et terres rares.
Si les entreprises prennent davantage conscience de leur pouvoir d’impact positif sur leurs fournisseurs et de leur responsabilité à maîtriser leurs impacts sociaux et environnementaux, le Père Noël sera en mesure de garnir les sapins dans les années à venir.
[1] Dans un contexte de pénuries, les entreprises engagées sont confrontées à de lourds dilemmes, Novethic, 11.2021
[2] Entre 10.2020 et 10.2021 – La production industrielle baisse en Europe, étouffée par les pénuries, Le Monde, 11. 2021
[3] La vie d’un jean, Mtaterre.com
[4] Usine RHODIA en Isère
Les marchés actions face au retour de l’inflation
Par Laurent Denize, Responsable des investissements, ODDO BHF AM
Le 15 décembre 2021
La saison de publication des résultats des entreprises vient à peine de s’achever réservant des bonnes surprises. Les entreprises ont, en général, prouvé leur capacité à s’adapter aux perturbations des approvisionnements, parfois en compensant la baisse des volumes par des hausses des marges.
En effet, en Europe, 60% des entreprises ont publié leurs résultats. Les bénéfices divulgués jusqu’à présent sont supérieurs de 10 % aux estimations du consensus. Ce dernier s’attend désormais à ce que les bénéfices augmentent de 60 % en glissement annuel en 2021 (soit 15 % au-dessus du niveau de 2019). Le phénomène est encore plus impressionnant aux Etats-Unis.
Impact de la hausse des coûts
Pour l’ensemble des secteurs, l’impact de la hausse des coûts des matières premières fut limité. En effet, la plupart d’entre eux ont été en mesure d’augmenter les prix pour faire face à la hausse des coûts. Mais, l’effet négatif pourrait devenir plus important au cours des prochains mois dans des secteurs emblématiques comme l’automobile, les biens d’équipement, l’alimentation et les produits de consommation courante.
Seuls deux secteurs semblent bénéficier à plein des goulots d’étranglement de la chaîne d’approvisionnement : les semi-conducteurs et les transports. La forte demande et les capacités limitées poussent les prix à la hausse.
Secteur automobile
Si on prend l’exemple du secteur automobile, il a souffert, face à l’effondrement de la demande en 2020 avec la crise du Covid. Mais, il a ensuite fortement rebondi en 2021, générant des problèmes d’ajustement de capacités, qui s’additionnent à une tendance antérieure, plus structurelle, pour adapter et sécuriser les chaines d’approvisionnement. Ainsi, la dé-globalisation est une tendance forte et certains pays comme les États-Unis tentent de relocaliser leur production. Il y a deux raisons principales à cela :
- Le désir d’être moins dépendant de la Chine en tant que partenaire commercial.
- La décarbonation. Les consommateurs (en particulier les plus jeunes) sont beaucoup plus sensibles aux questions environnementales, et militent pour que les fabricants réduisent leurs coûts de transport afin de diminuer leur empreinte carbone.
Les fabricants européens suivent la tendance et mettent en place, eux aussi, des process pour s’approvisionner davantage en matériaux et en production en Afrique du Nord et autres marchés émergents et s’éloignent de la Chine pour réduire les coûts de transport.
Anticipation d’inflation
Il reste que cet environnement met la pression sur les prix. Mais alors que l’inflation, soutenue par la hausse des matières premières et les difficultés d’approvisionnement, tarde à refluer et que les marchés obligataires anticipent désormais une inflation structurellement plus haute qu’avant 2020, cette bonne saison de publication des résultats est rassurante quant à la capacité des entreprises à répercuter les hausses de coûts sur les prix de ventes, et in fine sur les dividendes.
L’investissement en actions semble désormais plus adapté pour faire face au risque d’inflation que les obligations indexées sur l’inflation. C’est également un nouveau facteur favorable aux flux vers les marchés d’actions, source de soutien des cours et de diminution de la volatilité des indices.
Dans ce contexte, on peut maintenir une perspective positive vers les actifs risqués comme le sont les actions. D’autant plus que la baisse récente des taux longs redonne de l’air à ces actifs qui se révèlent d’autant plus intéressants à détenir dans un portefeuille, qui lui, se doit d’être diversifié.
Comment renforcer la « qualité » de ses investissements ?
Par ODDO BHF AM
Le 26 novembre 2021
La croissance économique ralentit dans le monde entier, l’inflation repart à la hausse et les banques centrales pourraient durcir leur politique monétaire. Il y a donc de bonnes raisons de devenir un peu plus prudent. Plus que jamais, il est donc essentiel de savoir sélectionner les titres (actions ou obligations) qui peuvent le mieux résister à un environnement difficile. Alors comment reconnaître un investissement de « qualité » ?
Miser sur les actifs de qualité
Les actions dites « de qualité » sont des titres de sociétés dont la croissance est régulière et moins cyclique. Pour ce faire, il convient de se concentrer fortement sur l’analyse fondamentale de chaque entreprise sélectionnée.
Dans l’environnement actuel, l’accent est mis en particulier sur leur potentielle capacité de résistance aux chocs économiques ou externes (prix du pétrole, impact de la pandémie liée au Covid-19…). Ces sociétés ont la possibilité de s’imposer même dans un environnement concurrentiel difficile. Les conditions préalables qui le permettent sont souvent liées à l’existence de fortes « barrières à l’entrée » telles que le pouvoir de la marque ou la protection des brevets.
Mais on peut aussi s’attendre à ce que les actions de qualité affichent un potentiel de croissance à long terme via une exposition directe aux grandes tendances d’aujourd’hui et de demain.
Surfer sur la vague des tendances de long terme
Ainsi, certains secteurs d’activité sont moins affectés que d’autres par les cycles économiques car ils s’inscrivent dans une tendance de potentielle croissance de long terme. C’est le cas de secteurs attenant à la digitalisation, à la technologie et la recherche médicale. Il en est de même pour les nouvelles tendances de consommation telles que le commerce électronique et les paiements sans contact, ainsi que les secteurs qui participent à l’augmentation de la consommation des ménages dans les pays émergents.
Ainsi, lorsque les valorisations boursières sont élevées, il peut être judicieux d’investir dans les entreprises qui sont présentes sur ces tendances de croissance à long terme. En effet, ces actions peuvent faire plus facilement face aux baisses à court terme des marchés grâce à leur visibilité sur leur cash-flow. Elles constituent donc un moteur de potentielle performance* à long-terme.
L’avantage de sélectionner des actions de qualité réside dans leur possible capacité de rebond après un choc de marché même si elles peuvent subir à court terme de fortes fluctuations à la baisse au cœur d’une tempête boursière.
* « Les performances passées ne présagent pas des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps. »
La contre-offensive des colombes
Par Enguerrand Artaz, gérant de fonds d’investissement, La Financière de l’Echiquier.
Le 16 novembre 2021
Depuis plusieurs mois, sur fond de forte reprise économique et de pressions inflationnistes persistantes, la perspective d’extinction des politiques monétaires accommodantes est l’un des thèmes centraux des marchés. Une étape importante vient d’être franchie. La Réserve fédérale américaine a officiellement annoncé la réduction de ses programmes de rachats d’actifs (tapering), à raison de 15 milliards de dollars par mois et une fin prévue en juin 2022. On assiste à un retour en force des discours accommodants de la part des différents banquiers centraux.
La Banque centrale européenne
La première salve a été tirée par la Banque centrale européenne. Christine Lagarde a assuré le service après-vente de sa précédente conférence de presse, assez critiquée, et qui avait fait apparaître la perspective d’une hausse des taux dès l’été 2022. Afin de calmer les ardeurs du marché, la patronne de la BCE a estimé très peu vraisemblable que les conditions soient réunies pour une hausse des taux en 2022. Les perspectives d’inflation à moyen terme restent pour l’heure modérées.
La Fed aussi
Le même jour, son homologue américain Jerome Powell annonçait certes le début du tapering, mais rappelait la déconnexion entre le début de la réduction des rachats d’actifs et une éventuelle hausse des taux. Selon le président du Conseil des gouverneurs, la Réserve fédérale se montrera « patiente » avant d’envisager tout mouvement de ses taux directeurs.
En filigrane, on comprend que la latitude que se laisse la Banque centrale sur le rythme du tapering signifie que si elle doit durcir sa politique monétaire, elle commencera par accélérer la réduction des rachats d’actifs avant d’agir sur les taux.
Et enfin, la Banque d’Angleterre
Puis, c’est la Banque d’Angleterre qui a clôturé le bal, en annonçant un surprenant statu quo alors que la majorité des observateurs s’attendaient à ce qu’elle relève son taux directeur. Une décision étonnante au regard des dernières déclarations d’Andrew Bailey et qui a été accompagnée d’un discours plutôt accommodant. En effet, le comité de politique monétaire a pointé un risque de ralentissement du momentum macroéconomique et des incertitudes quant à la normalisation du marché de l’emploi.
Cette contre-offensive des « colombes » – terme utilisé pour désigner les banquiers centraux en faveur d’une politique accommodante – pourrait néanmoins s’apparenter à un baroud d’honneur. Après avoir temporisé, la Banque d’Angleterre devrait, malgré tout, remonter ses taux très prochainement. Il semble de plus en plus certain qu’il en sera de même pour la Réserve fédérale américaine en 2022. La Banque centrale européenne, moins sous pression que ses deux homologues, devra décider de l’avenir de ses programmes de rachats d’actifs, à commencer par le PEPP (Pandemic Emergency Purchase Programme), qui doit arriver à échéance en mars 2022.
Gagner du temps
En réalité, les banquiers centraux ont surtout cherché à gagner du temps et à se laisser un maximum de portes ouvertes, afin d’éviter une surréaction qui impacterait trop négativement l’économie. Le risque est qu’elles finissent par être behind the curve, c’est-à-dire en retard par rapport à la dynamique de croissance et d’inflation, avec des décisions potentiellement à contre-temps. Pour l’instant, les marchés voient favorablement ce risque, en témoigne la nouvelle progression des indices actions.
Mais tout chiffre fort sur le marché du travail ou sur l’inflation rendra plus compliquée la communication de banques centrales qui évoluent déjà sur une ligne de crête bien mince.
Que faut-il penser des actions chinoises ?
Par Natasha Ebtehadj Portfolio Manager chez Columbia Threadneedle
Le 6 octobre 2021
Deng Xiaoping est souvent considéré comme l’architecte de la Chine moderne, ayant prôné une approche pragmatique du développement économique et adopté le système d’économie de marché des pays occidentaux. Cependant, bon nombre des principes qu’il a fait siens semblent avoir été remis en cause au cours des derniers mois, au point que les marchés ont commencé à se demander si le système économique engendré par les réformes engagées par le Petit timonier à la fin des années 1970 est sur le point de changer pour de bon.
Tour de vis réglementaire
Ces inquiétudes ont été alimentées par le tour de vis réglementaire à l’encontre des entreprises de soutien scolaire chinoises, anciennes coqueluches des marchés boursiers, dont l’essor a été favorisé par la forte demande émanant de parents désireux d’assurer la réussite leurs enfants dans un système éducatif très compétitif.
Toutefois, le secteur a récemment connu un coup d’arrêt brutal, une nouvelle réglementation ayant obligé ses entreprises à devenir des organisations à but non lucratif. Le marché potentiel de ces entreprises s’est ainsi rétréci de 100 à 25 milliards de dollars2, réduisant de plusieurs milliards la capitalisation boursière de sociétés spécialisées dans l’éducation privée, telles que New Oriental et TAL Education. Si la menace réglementaire planait depuis des années, peu d’investisseurs avaient anticipé un scénario aussi désastreux que le passage à un statut à but non lucratif.
Vers un modèle économique différent ?
Une fois l’agitation retombée, l’interdiction du soutien scolaire à but lucratif pourrait un jour être considérée comme un tournant important dans l’histoire du marché chinois. Au regard d’autres changements réglementaires auxquels sont confrontées les grandes entreprises technologiques du pays, peut-être faut-il y voir le signe le plus concret à ce jour de la volonté d’évoluer vers un modèle de croissance économique différent.
Le gouvernement chinois met de plus en plus l’accent sur la qualité de la croissance plutôt que sur son niveau et souhaite s’attaquer à l’accroissement des inégalités sociales, en particulier dans les trois domaines les plus préoccupants pour la classe moyenne : l’éducation, le logement et la santé. Dans ce nouveau contexte, il n’est pas surprenant que les juteuses entreprises de soutien scolaire, qui ont absorbé entre 7 et 9% des revenus des ménages en 20173, soient dans le collimateur des autorités. Désormais, il ne suffit plus que le chat attrape la souris, sa façon de faire importe également.
Innover puis réglementer
Dans le même temps, la nouvelle réglementation a également été une source de volatilité sur
les marchés pour les géants chinois de la technologie. Des entreprises comme Alibaba et Tencent ont été des moteurs de la nouvelle économie chinoise au cours de la dernière décennie et ont mené la numérisation de l’économie du pays en mettant en place des écosystèmes technologiques capables de défier ceux des principaux concurrents technologiques américains. Portées par leurs succès en matière d’innovation et une croissance exponentielle, les sociétés Internet représentaient près de la moitié de l’indice MSCI China lors du pic de février.5
La Chine a tendance à laisser les industries expérimenter dans les premières phases pour aider à dynamiser la croissance et à ne réglementer qu’après coup à mesure que des problèmes se font jour. Les valeurs technologiques en font à présent l’expérience.
Bon nombre des problèmes auxquels les autorités réglementaires cherchent à s’attaquer sont semblables à ceux rencontrés par les entreprises américaines : pratiques anticoncurrentielles, sécurité des données et droits des travailleurs. En revanche, la réglementation est plus facile à mettre en œuvre en Chine et l’absence de longues phases de consultations peut donner l’impression que les mesures sont soudaines et inconsidérées.
Autosuffisance technologique
Malgré le développement de la réglementation, il est important de ne pas confondre les mesures réglementaires avec les décisions à l’origine de la correction subie par les entreprises du secteur de l’éducation. Dans le cas des grandes entreprises technologiques, il est fort probable que le gouvernement chinois réalise qu’il a réellement besoin des sociétés à but lucratif pour atteindre un autre de ses objectifs politiques : celui d’une plus grande autosuffisance technologique, un objectif devenu de plus en plus pressant depuis que l’ancien président américain Donald Trump a commencé à mettre en œuvre sa politique d’endiguement de la Chine axée sur les technologies en 2018. Les autorités chinoises souhaitent toujours voir les entreprises technologiques prospérer, mais d’une manière qui réponde davantage à leurs objectifs politiques.
Cesser d’investir en Chine ?
Cela amène à considérer l’impact de ces initiatives sur le marché, alors que de nombreux opérateurs se demandent s’il faut cesser d’investir en Chine dans le nouveau contexte politique. On peut avancer qu’il est trop tôt pour tirer une conclusion aussi concrète. Des rumeurs récentes émanant de représentants du gouvernement confirmeraient son engagement durable en faveur des principes de l’économie de marché, les interdictions exceptionnelles d’activités à but lucratif étant susceptibles de se limiter au seul secteur de l’éducation.
On peut toutefois raisonnablement s’attendre à des mesures dans d’autres domaines, les régulateurs tentant d’interpréter et de mettre en œuvre les nouvelles priorités du gouvernement en matière d’autosuffisance technologique, de décarbonation et de réduction des inégalités sociales.
Une fois encore, la Chine réoriente son économie et les entreprises qui opèrent dans des domaines étroitement surveillés devront faire évoluer leur modèle d’affaires. La plupart émergeront de l’autre côté de la rivière, mais il est difficile de savoir quel sera le profil bénéficiaire de ces entreprises au cours des trois à cinq prochaines années. Cette incertitude affectant plus de 40% du marché boursier chinois, les multiples que les investisseurs sont prêts à payer pour les actions chinoises seront moins élevés.
Il ne faut cependant pas perdre de vue que la Chine est la deuxième économie mondiale et que des opportunités de croissance subsistent, même si le régime économique évolue. Certaines sociétés en portefeuille, cotées sur d’autres marchés, sont fortement exposées à la Chine. Par exemple, les projets de la Chine pour décarboner son économie devraient profiter aux constructeurs de véhicules électriques. De même, parallèlement à l’interdiction des activités de soutien scolaire privé, le gouvernement a annoncé de nouvelles mesures visant à promouvoir les activités sportives.
- https://www.theguardian.com/business/2008/dec/18/globaleconomy-economics
- Goldman Sachs, China’s after-school tutoring industry amid the new regulatory framework, 26 juillet 2021
- Goldman Sachs, Future of learning: Transforming China’s after-school tutoring in the digital era, 3 février 2020
- Lillian Li – Blog Chinese Characteristics ‘Let the bullets fly for a while’, https://lillianli.substack.com/p/let-the-bullets-fly-for-a-while, 15 juillet 2021
- Morgan Stanley, China’s Regulatory Reset, p9, 1er août 2021
- https://www.asianstudies.org/publications/eaa/archives/crossing-the-river-by-feeling-the-stones-deng-xiaoping-in-the-making-of-modern-china/
Un été sous le signe des risques physiques
Par Coline Pavot, La Financière de l’Echiquier
Le 1er octobre 2021
Au cœur de l’été, la nouvelle est tombée comme un coup de massue. Les conclusions du sixième rapport d’évaluation du GIEC[1], bien moins agréables que le dernier roman de l’été, sont sans appel. Le réchauffement de la planète est encore plus rapide et plus fort qu’on ne le craignait. Il menace l’humanité de désastres sans précédent. Pas vraiment de quoi se réjouir alors qu’au même moment, à plusieurs endroits sur le globe, des milliers de personnes affrontaient des évènements climatiques extrêmes : sécheresses, inondations, incendies, dômes de chaleur…
Quand les risques physiques se matérialisent
Ces conséquences du changement climatique, qui se matérialisent par des événements extrêmes, sont des risques physiques. Longtemps négligés car considérés comme lointains et peu probables, ils nous rappellent à l’ordre en venant frapper à notre porte. Dans des pays riches comme déshérités, sous des latitudes et des climats différents, de la Sibérie à la Belgique ou à l’Allemagne, en passant par la Grèce et la Louisiane, ils n’épargnent personne. Leurs conséquences sociales, environnementales et économiques sont désastreuses et ce sont bien souvent les plus démunis qui en payent le plus lourd tribut, creusant encore les inégalités entre les territoires.
Impacts en chaînes
Avec la montée en puissance de ces risques, les entreprises doivent faire face à de nouvelles pressions, qu’elles sont encore trop peu nombreuses à anticiper. Ils ont des répercussions financières directes (dommages aux actifs de l’entreprise) et indirectes, découlant par exemple de la perturbation de leur chaîne d’approvisionnement. Ils ont alors un impact significatif sur la performance financière des organisations, affectant à bien des égards la bonne conduite de leurs activités. En avril 2021, un important épisode de sécheresse à Taïwan a, par exemple, fortement mis en tension l’industrie des semi-conducteurs, dont la production est très gourmande en eau, engendrant des décalages dans les carnets de commandes jusqu’en 2023 de cette industrie hautement stratégique[2].
Une préoccupation tant pour les entreprises que les investisseurs
Les événements climatiques extrêmes de cet été et leurs impacts participeront-ils à la prise de conscience des dirigeants politiques et des populations ? L’avenir nous le dira. La mobilisation est croissante. En 2018, 58% des entreprises du CAC 40 mentionnaient explicitement les risques physiques dans leurs rapports[3]. Reconnaître l’enjeu est un bon point de départ. Certaines entreprises à l’image de Michelin, Air Liquide ou encore Kingspan vont encore plus loin en engageant des actions concrètes pour réduire leur vulnérabilité, comme la mise en place de plans de continuité de l’activité, la réalisation de travaux pour protéger leurs actifs exposés ou encore la diversification de leurs sources d’approvisionnement.
Dans ce cadre, le dialogue et l’engagement climatique cruciaux pour relever les défis environnementaux.
[1] Climat Change 2021 – The Physical Science Basis, IPCC, 2021
[2] Le Figaro, 21.04.2021
[3] Quelle place pour les risques physiques dans le reporting des entreprises ? Analyse du CAC 40, Carbone 4, 2019
Resserrement réglementaire en Chine : Que s’est-il passé ?
Par ODDO BHF Asset Management
Le 20 septembre 2021
La Chine est la deuxième puissance économique mondiale. Les actions des sociétés technologiques prospères sont donc représentées dans les portefeuilles de nombreux investisseurs au niveau global. Cependant, ces derniers mois, plusieurs mesures réglementaires ont fait chuter les cours des actions, en particulier ceux des valeurs du secteur de l’internet. Le coup d’envoi a été donné en novembre de l’année dernière avec l’annulation surprise de l’introduction en bourse de Ant, une filiale d’Alibaba suivi de nouvelles directives visant les plateformes en ligne puis des enquêtes sur des pratiques anticoncurrentiels d’Alibaba. En avril, Alibaba a été condamné à payer une amende de 2,8 milliards de dollars.
D’autres mesures qui ont ébranlé la confiance des investisseurs ont ensuite entraîné une véritable liquidation des valeurs technologiques chinoises. Il s’agissait notamment d’enquêtes sur le fournisseur de services de mobilité Didi, la version chinoise d’Uber, pour des violations de données quelques jours seulement après la cotation de la société à New York. Quelques jours plus tard, l’application de la société a été bannie des boutiques d’applications. L’interdiction faite aux prestataires de services d’éducation privée de générer des bénéfices et les tentatives de lutte contre l’addiction aux jeux d’argent chez les jeunes ont également provoqué des pressions à la baisse des cours.
Quel est le contexte de ce cycle règlementaire ?
On sait depuis la fin de l’année dernière que le gouvernement chinois souhaite renforcer la réglementation, jusqu’alors plutôt laxiste, des grandes entreprises de l’internet et du commerce électronique. À cette fin, l’autorité chinoise de la concurrence a été renforcée et des règles ont été établies pour identifier et éliminer les monopoles. En même temps, les fintechs comme Ant doivent être dorénavant considérées comme des institutions financières avec des exigences de capital comparables.
L’introduction en bourse de Ant a été reportée jusqu’à ce que ces règles soient mises en œuvre et que l’entreprise soit restructurée. En outre, les pratiques identifiées comme anticoncurrentielles ont été interdites. Cette mesure est dirigée, par exemple, contre Alibaba, qui oblige de facto les commerçants à vendre leurs produits exclusivement sur ses plateformes. Alibaba a également été la première entreprise à devoir payer une amende pour violation de la concurrence (équivalente à 2,8 milliards de dollars, en soi une somme abordable pour Alibaba).
Toutefois, des procédures similaires sont toujours en cours chez de nombreux concurrents et les acquisitions dans le secteur des technologies font l’objet d’un examen plus minutieux. Les entreprises qui ne respectent pas leurs obligations de déclaration des rachats devront s’attendre à des sanctions. Ces mesures ont été accueillies avec beaucoup d’inquiétude par les investisseurs. Pour eux, la question est de savoir si une réglementation plus stricte va avoir un impact durable sur les activités des grandes plateformes internet et dans quelle mesure il s’agit d’un jeu de pouvoir entre le gouvernement et les entreprises.
L’importance des grandes sociétés Internet pour l’économie nationale a rapidement augmenté ces dernières années. Cela rend les entreprises plus difficiles à contrôler. En outre, le gouvernement s’est senti mis au défi par les critiques ouvertes de Jack Ma, le fondateur d’Alibaba.
Qu’est-ce que cela signifie pour les investisseurs ?
Comme en Chine, des mesures visant à limiter le pouvoir de marché des grandes plateformes internet sont également discutées en Occident. Cependant, la communication et l’approche des régulateurs chinois sont beaucoup moins transparentes. Par exemple, les réglementations sont souvent formulées de manière si vague qu’elles laissent une grande place à l’interprétation. D’autre part, les procédures, comme celle contre Alibaba, sont souvent conclues relativement rapidement, alors qu’en Occident elles durent souvent des années. Même si d’autres mesures suivent dans les trimestres à venir, le cycle réglementaire en Chine pourrait donc se terminer plus tôt qu’en Occident.
La vente massive des valeurs technologiques chinoises peut également ouvrir de bons points d’entrées. En 2018, par exemple, les actions des développeurs de jeux en ligne ont subi une forte pression lorsque la Chine avait suspendu l’approbation de nouveaux jeux en ligne. Toutefois, les actions de Tencent, qui ont dégringolé, se sont redressées relativement rapidement par la suite.
Aux niveaux de prix actuels, le marché évalue un scénario pessimiste pour les principales sociétés de l’internet. Il est vrai que la croissance de ces sociétés se voit ralentie par ces mesures réglementaires et que les marges pourraient diminuer quelque peu. Néanmoins, ces sociétés figurent toujours parmi les entreprises dont la croissance est la plus forte au niveau mondial. Le gouvernement souhaite une concurrence équitable qui renforce l’innovation, assure l’emploi et fait de la Chine un concurrent technologique aux États-Unis.
Les grandes entreprises technologiques sont indispensables à cet effet. Les grandes entreprises technologiques chinoises, dotées de bilans solides et de flux de trésorerie disponibles positifs, offrent des opportunités à long terme au niveau actuel des cours de leur actions.
Aucune des entreprises susmentionnées n’est visée par une recommandation d’investissement.
*Les performances passées ne sont pas un indicateur fiable des performances futures et ne sont pas constantes dans le temps.
Xi Powell et Jerome Jinping : Deux pays, une pensée ?
Par Alexis Bienvenu, gérant de fonds d’investissement, La Financière de l’Echiquier.
Le 24 août 2021
Deux événements ont marqué les marchés en cette fin juillet : la chute brutale de certaines actions chinoises et la réunion du comité de politique monétaire américain.
A priori, aucun rapport entre ces deux événements. En réalité, un facteur commun les réunit : la préoccupation politique d’une meilleure cohésion sociale et nationale l’emporte sur la stricte orthodoxie économique.
Education en Chine
En Chine en effet, la chute des marchés découle en partie d’une intervention politique visant à brider les profits des entreprises dispensant des formations parallèles au système scolaire. Le prix élevé de ces formations constitue un frein pour la classe moyenne, même s’il peut permettre de renforcer les performances scolaires du pays. Xi Jinping a arbitré. Politiquement, mieux vaut éviter de renforcer encore les inégalités, quitte à réduire peut-être les performances d’une partie de la population. Mieux vaut en outre limiter le coût de l’éducation d’un pays en mal de natalité, quitte à se passer de la manne économique provenant des entreprises du secteur éducatif. Celles-ci, pourtant, auraient pu contribuer au rayonnement chinois dans le monde.
Autres facteurs
Si le secteur de l’éducation privée est bridé, quels autres secteurs ne risquent-ils pas de l’être à l’avenir ? On songe notamment à la santé, très chère et très discriminante socialement malgré les promesses d’une société communiste. Logiquement, les valeurs du secteur ont reculé de concert. Elles sont implicitement menacées par le même type de mise au pas.
Une autre raison de la chute du marché chinois réside dans l’évocation de la réduction des possibilités pour les entreprises chinoises d’être cotées aux Etats-Unis via les « ADR » (American Depositary Receipt). Sur ce point, la volonté politique de s’affranchir des exigences comptables américaines entre en concurrence avec l’ambition d’accéder plus largement aux flux de capitaux étrangers, pourtant essentiels au développement chinois. L’indépendance nationale se concilie difficilement avec la mise aux normes internationales, c’est-à-dire américaines.
La lutte économique entre les Etats-Unis et la Chine est également une guerre des normes, avec son lot de dommages collatéraux, en l’occurrence l’accès aux capitaux américains.
Et aux Etats-Unis ?
Quel rapport avec la réunion de la Fed le 28 juillet ? A priori aucun. Sauf que son président a reconnu que l’inflation élevée connue par les Etats-Unis (4,5% en juin pour sa partie la moins volatile) pourrait s’avérer moins passagère que prévu. De ce point de vue, elle pourrait mériter une politique monétaire nettement moins accommodante qu’actuellement. Sauf qu’à demi-mot, Jerome Powell reconnaît aussi que l’objectif de réduire le chômage des groupes les moins favorisés supplante en ce moment quasiment toute autre considération. Cela justifie une politique monétaire très expansionniste. Là encore, la cohésion sociale prime sur l’orthodoxie économique au sens étroit.
L’urgence est d’autant plus grande que la Fed est accusée d’avoir drastiquement accru les inégalités patrimoniales en gonflant le prix des actifs risqués, donc le patrimoine des plus favorisés, favorisant de ce fait les mouvements populistes.
Principes libéraux battus en brèche
Qu’on le déplore ou s’en réjouisse, les principes économiques libéraux voient leur influence réduite en ce moment. Dans l’empire du Milieu – le milieu entre l’économie capitaliste et la politique « socialiste » s’entend –, ce n’est guère étonnant à l’heure de la célébration du centenaire de la création du parti communiste chinois.
Ça l’est tout de même dans la mesure où le pays doit s’appuyer sur l’économie privée et attirer les capitaux étrangers pour accroitre sa puissance. Ça l’est davantage dans le pays porte-étendard du capitalisme. Sauf que les crises ont montré à quel point, même aux Etats-Unis, les principes libéraux étaient battus en brèche lorsque l’urgence survenait. Sur ce point, « Xi Powell » et « Jerome Jinping », comme le Yin et le Yang, sont au fond au diapason.
Chine : Stop ou encore ?
Par Jan Viebig, CIO Private Wealth Management et Laurent Denize, CIO Asset Management ODDO BHF AM
Le 26 juillet 2021
Après un excellent début d’année, portées par les anticipations de normalisation de la croissance mondiale, les actions chinoises (Shanghai Shenzhen CSI 300) sous-performent depuis mars. Essayons d’en comprendre les raisons et d’estimer s’il est maintenant opportun de se repositionner à l’achat.
Quelles sont les origines de cette sous-performance relative ?
- Le resserrement des conditions de crédit constitue de facto un frein à la croissance
Certes, la Chine a bénéficié à plein du fort rebond de l’économie mondiale et a même surpassé fin 2020 la tendance de croissance qui prévalait avant la crise (6.5% vs 6%). Néanmoins, afin de limiter la surchauffe, les responsables politiques ont donné la priorité à la maîtrise des risques financiers et de l’aléa moral. Le soutien de l’État aux émetteurs a donc été réduit et les banques ont reçu l’ordre de limiter les prêts. Ces efforts ont permis de ramener la croissance du crédit au rythme pré-covid mais ont mécaniquement agi comme un frein sur l’activité économique.
- L’appréciation de la devise
La surperformance de la monnaie chinoise (RMB ou Reminbi) est remarquable étant donné qu’elle se produit dans le contexte du ralentissement économique évoqué ci-dessus.
La force du RMB peut être attribuée à trois facteurs principaux. Premièrement, bien que la croissance du crédit décélère en Chine, les données ne suggèrent pas que l’économie s’effondre. Les indices PMI sont en territoire d’expansion. De plus, la reprise mondiale stimule la demande de produits chinois, et l’important excédent de la balance courante de la Chine est un facteur de renforcement pour le RMB. Troisièmement, bien que les écarts de rendement des obligations réelles sino-américaines se réduisent pour les échéances à court terme, les taux réels chinois restent relativement élevés, en particulier pour les échéances à long terme. Cette dynamique attire les flux de capitaux étrangers sur les marchés obligataires chinois. Ces forces étant susceptibles de se maintenir à l’avenir, les autorités chinoises reprennent la main et ajustent la parité RMB/USD en achetant des Treasuries américaines en USD. L’appréciation du RMB devrait donc être contenue dans les prochains mois et limiter l’impact négatif sur les exportations.
- Un biais « croissance » et technologique heurté par la guerre technologique US-Chine
Le durcissement de la réglementation dans le secteur de l’Internet a un impact considérable compte tenu de l’ampleur de la pondération de ce dernier dans les indices offshore (plus de 40 % du MSCI Chine). Depuis octobre dernier, le durcissement réglementaire a pris plusieurs dimensions. A titre d’exemple, on peut citer la mise en place systématique d’un audit des entreprises de FinTech (exigences plus strictes en matière de capital) ainsi qu’un débat sur la question de la concurrence qui se concrétise par des enquêtes et des amendes pour les entreprises ayant une position dominante (2,8 milliards de dollars américains pour Alibaba par exemple).
En conséquence, les indices HS Tech et CSI Internet ont reculé de 27 % et 34 %, respectivement, depuis leurs sommets de la mi-février, sous-performant non seulement les marchés chinois au sens large, mais aussi le secteur de la technologie américaine. Dans le même temps, les estimations à 2 ans des BPA sont restées stables à +30% en moyenne permettant une amélioration de la valorisation du secteur, avec un P/E à terme en baisse de 10 points pour atteindre 32x, en y+1 et 25x en y+2 soit des niveaux raisonnables pour des valeurs de croissance dans le secteur technologique.
Certains signes récents montrent une volonté de détente. La représentante des États-Unis pour le commerce, Katherine Tai, a indiqué qu’elle comptait rencontrer son homologue chinois « à court terme ». La nomination prochaine du chef du Bureau de l’industrie et de la sécurité au Département du commerce, l’agence en charge de l’application de la loi sur le commerce extérieur, est aussi un signe de la volonté de la Chine de s’engager dans la voie du dialogue.
Conclusion : faut-il acheter ou rester à l’écart ?
Sans aucun doute, le renforcement de la réglementation de l’Internet, la politique de désendettement et le ralentissement du crédit ont pesé sur les performances récentes des actions chinoises. Même si le ralentissement du crédit n’a peut-être pas encore atteint son terme, la nature différente du cycle de désendettement actuel n’a eu qu’un impact matériel limité sur les actions. Quant au risque réglementaire, il est devenu plus équilibré et mieux compris.
Après la correction du 1er trimestre, le ratio rendement-risque penche donc en faveur d’un repositionnement sur les 6 prochains mois notamment sur les secteurs de croissance, dont l’Internet. Le changement récent d’orientation de la FED aplatit par ailleurs la courbe des taux et, en ce sens, favorise les actions de croissance. A 15 fois les résultats (12 mois forward) pour le SS CSI 300, on est loin des 21 fois atteintes en mars dernier. C’est une opportunité de repositionnement que l’on peut saisir.
Néanmoins cette phase d’appréciation ne se fera pas en ligne droite
La phase du « miracle » de la croissance chinoise est terminée. La croissance potentielle du PIB ralentit structurellement (démographie et impact de la politique de l’enfant unique) et il sera plus difficile pour Pékin de maintenir la stabilité financière et sociopolitique.
La Chine n’est pas en mesure de modifier radicalement le cours de la politique nationale avant le vingtième congrès national du parti communiste en 2022. L’administration Xi s’attache à normaliser la politique monétaire et fiscale et à éviter toute perturbation sociopolitique avant cet événement critique au cours duquel le secrétaire général Xi Jinping pourrait se voir confier le poste de « président suprême » qu’occupait autrefois Mao Zedong. Cela signifie qu’il est peu probable que Pékin procède à un changement de cap majeur avant le remaniement de 2022. Et même alors, une nouvelle orientation est peu probable. Ainsi, le parti communiste redoute les conséquences d’un ralentissement de la croissance potentielle sur l’emploi. Le maintien du « pacte social » devra nécessairement passer par des mesures de soutien domestique et notamment de favoritisme national.
Il en résulte que les tensions avec les États-Unis et les voisins asiatiques de la Chine vont persister. La montée de l’incertitude politique est une tendance séculaire qui reprendra tôt ou tard, au détriment d’un environnement d’investissement stable et prévisible.
De la valeur relative donc mais au prix d’une volatilité élevée.
Comment mettre des thématiques dans les investissements ?
Par Backstage Communication
Le 7 juin 2021
L’investissement thématique est en vogue chez tous les gestionnaires de fonds, qui rivalisent de nouvelles idées pour attirer l’épargne des particuliers. Les fonds de placement constituent la solution la plus efficace pour diversifier rapidement un patrimoine financier. Avec quelques centaines d’euros, il est ainsi possible d’être investi sur plusieurs centaines d’actions et/ou d’obligations, et d’être beaucoup moins impacté par la faillite d’une société dans le portefeuille. Depuis une dizaine d’années, les avoirs investis dans les fonds de placement n’ont pas cessé d’augmenter. Ils dépassent désormais 215 milliards d’euros selon les derniers chiffres publiés par la BEAMA (l’association belge des gestionnaires d’actifs).
Fonds sectoriels
Si nous avons récemment vu que les fonds durables constituent une tendance majeure dans l’offre des gestionnaires de fonds, l’autre tendance lourde de ces dernières années est l’investissement sur des thématiques fortes. L’origine des fonds thématique se trouve dans les fonds sectoriels, des produits lancés il y a une trentaine d’années. Ces fonds investissent sur un secteur d’activité, comme la pharmacie, les télécoms ou les banques, par exemple.
Les différentes crises financières ont toutefois montré la fragilité de ces stratégies lorsqu’un événement remet en cause les fondamentaux d’un secteur. L’effondrement du secteur internet en 2000 a pesé pendant longtemps sur les fonds technologique, de même que le secteur bancaire suite à la grande crise financière de 2008. Cette crise a également pesé sur les fonds sectoriels fortement dépendants de subventions publiques (comme la production d’énergie renouvelable) après que les budgets publics aient été mis sous pression à partir de 2009.
Mégatendances
Dès lors, depuis une dizaine d’années, les sociétés de gestion ont progressivement développé une offre thématique basée sur l’identification de « Mégatendances », soit des mouvements de fond qui vont impacter durablement nos sociétés, comme par exemple le vieillissement de la population, la privatisation du système éducatif, la hausse de la consommation dans les pays émergents, la digitalisation croissante de nos sociétés ou encore la robotisation.
Autre avantage, ces fonds thématiques vont permettre de se détacher totalement de la notion de secteur d’activité pour adopter une vision beaucoup plus large. Par exemple, un fonds exposé sur le vieillissement de la population va pouvoir s’exposer sur le secteur de la santé (hausse des dépenses avec l’âge), mais également sur le tourisme, le luxe, les maisons de retraite, le secteur financier, etc. Bref, le fonds peut être piloté de manière à ne pas trop souffrir si un secteur est pénalisé (par exemple, le tourisme durant la crise du Covid-19).
De nombreux fonds sectoriels ont également été pilotés vers ces nouvelles thématiques. Ainsi, pratiquement tous les fonds qui étaient investis sur l’agriculture sont devenus des produits thématiques spécialisés sur les nouvelles formes d’alimentation. Ils vont alors investir sur l’ensemble de la chaîne alimentaire.
Afflux
Pour pouvoir entrer dans la composition d’un tel produit, une société devra généralement avoir un score de pureté suffisant par rapport à la thématique du fonds. Par exemple, un fonds exposé sur l’électrification des véhicules ne pourra investir sur un producteur de voitures traditionnelles (par exemple Peugeot ou BMW) que lorsque les ventes de voitures électriques atteignent un certain seuil dans le chiffre d’affaires.
L’idée de ces produits est que positionner son patrimoine sur une ou plusieurs de ces tendances permet d’investir dans des sociétés dont les perspectives de croissance sont nettement plus fortes que le reste du marché. Et de fait, les performances boursières d’une grande partie de ces fonds ont été tout simplement remarquables depuis leur lancement, de sorte qu’une grande partie des nouveaux fonds lancés ces derniers mois ont une ou plusieurs grandes thématiques associées à leur stratégie d’investissement.
Quelques exemples
En conséquence, une grande partie des flux qui entrent chez les gestionnaires de fonds se dirigent aujourd’hui vers ces stratégies thématiques. Voici quelques exemples. Chez La Financière de l’Echiquier, ces produits ont ainsi récolté plus de 50% des flux entrants durant l’année 2020, et notamment vers le fonds Echiquier World Next Leaders. Le gestionnaire parisien propose également une stratégie particulièrement performante sur les intelligences artificielles.
Forte croissance également chez DNCA Finance, avec une collecte de 700 millions d’euros en 2020 et un poids qui est passé de 3,75% à 6,43% des encours du gestionnaire français notamment sur les stratégies liées à la technologie ou aux infrastructures. Et le refrain est identique chez Rothschild & Co, ou les fonds R-co Thematic Silver Plus (thématique liée au troisième âge) et R-co Thematic Real Estate (thématique liée au marché immobilier) représentent désormais 3% des actifs du gestionnaire.
Chez ODDO BHF AM, les deux fonds thématiques (sur l’intelligence artificielle et sur la transition énergétique) font également partie des produits qui enregistrent les plus fortes croissances au niveau des encours tant chez les particuliers que chez les institutionnels. Le gestionnaire a également le projet de lancer d’autres stratégies thématiques d’ici la fin 2021.
Pictet Asset Management est le pionnier de la gestion thématique, avec une gamme de 15 produits dont les plus anciens ont été lancés de 1995. En 2020, les flux nets ont atteint 8,5 milliards d’euros, pour un encours qui atteint désormais près de 60 milliards d’euros, soit plus d’un quart des actifs sous gestion de l’ensemble du groupe suisse.
La neutralité carbone : une tendance d’investissement sur plusieurs décennies
Par Andrea Carzana, gérant actions européennes, Columbia Threadneedle Investments
Le 5 mai 2021
Les enjeux ESG sont un thème d’investissement qui existe depuis longtemps et qui est désormais largement reconnu et compris. Néanmoins, parmi les fonds ISR qui enregistrent une collecte en forte hausse, il y a une famille de stratégies moins connues qui est plus récente et encore loin de la maturité : les fonds durables. Une bonne partie de ces fonds investissent spécifiquement dans des entreprises qui facilitent la transition vers la neutralité carbone à l’horizon 2050, notamment dans les secteurs de la production d’électricité et du transport.
Un bon nombre de ces entreprises ont un lien avec des thématiques durables étroitement liées aux Objectifs de développement durable des Nations unies. Ces entreprises, fortes d’un avantage concurrentiel durable, sont susceptibles d’enregistrer une croissance plus forte et une meilleure rentabilité que les entreprises sans lien avec ces thématiques.
La transition vers la neutralité carbone au cœur des préoccupations en 2020
Les investisseurs confondent souvent les fonds ESG et les fonds durables et en concluent qu’ils ont peut-être raté le train de l’investissement durable. Ils ont tort. La gestion ESG connaît un essor depuis plusieurs années, mais ce n’est qu’en 2020 que les investisseurs ont commencé à se pencher véritablement sur les opportunités d’une transition vers la neutralité carbone.
L’engouement grandissant pour les fonds durables en 2020 tient notamment à la succession d’annonce par les gouvernements du monde entier de politiques et de plans de relance censés permettre aux économies d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, ou 2060 pour la Chine. Des pays comme la Chine, le Japon et la Corée du Sud, ainsi que les Etats membres de l’Union européenne et le Royaume-Uni se sont engagés à atteindre la neutralité carbone. Au 1er novembre 2020, les sommes promises pour financer la relance verte et accompagner les secteurs à forte intensité carbone dépassaient les 1.000 milliards de dollars et l’UE envisage une rallonge de 644 milliards de dollars.
Avec l’arrivée de Joe Biden à la Maison Blanche, les Etats-Unis devraient lancer leur propre plan de relance verte de grande envergure. La décision du nouveau président américain de faire revenir son pays dans l’Accord de Paris sur le climat témoigne de la nouvelle orientation prise par les Etats-Unis.2
Les engagements ambitieux pris en 2020 sont essentiels, mais l’année 2021 s’annonce comme la plus décisive jusqu’ici pour la transition vers la neutralité carbone.
L’amorce d’une tendance d’investissement qui s’inscrit sur plusieurs décennies
En 2021, les financements pour la transition vers la neutralité carbone commenceront à être débloqués. On devine déjà que les sommes annoncées jusqu’ici par les gouvernements pour transformer la façon dont le monde produit son énergie – une activité qui représente les trois quarts des émissions mondiales – sont loin d’être suffisantes. Par exemple, pour atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050, la part des voitures électriques dans le total des ventes doit passer de 3% à plus de 50% d’ici la fin de cette décennie, la production d’« hydrogène vert » devra passer de 450.000 tonnes à 40 millions de tonnes par an et les investissements dans l’électricité propre devront passer de 380 à 1.600 milliards de dollars par an.3
Les implications pour les investisseurs sont claires. Il faudra canaliser des sommes sans précédent vers la transition énergétique mondiale dans les décennies à venir. Compte tenu du montant faramineux des investissements requis, cette tendance d’investissement s’inscrira nécessairement sur plusieurs décennies et constitue une opportunité d’une ampleur inédite. Une bonne partie des technologies nécessaires à la transition ne sont pas encore commercialisées. Les entreprises qui développent ces technologies auront besoin du soutien constant de l’Etat au travers des plans de relance dans les années à venir.
Par conséquent, l’investissement durable en est encore à ses débuts. Il est tout à fait compréhensible que les investisseurs ne mesurent pas encore pleinement l’ampleur et la durée de cette opportunité.
Accélérer la transition
Toutefois, dans les mois à venir, deux événements majeurs devraient accélérer la transition vers la neutralité carbone et donner une impulsion davantage coordonnée au niveau international pour atteindre cet objectif à l’horizon 2050. Premièrement, au mois de mai, l’Agence internationale de l’énergie publiera sa première feuille de route censée permettre au secteur de l’énergie au niveau mondial d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Pour les entreprises du monde entier, ce document devra servir de cadre de référence pour évaluer leurs efforts de transition. Cela est primordial car les objectifs des différentes entreprises en matière de neutralité carbone sont très variables du point de vue de leur qualité et de leur ambition. Certaines entreprises visent la neutralité carbone dès 2030 tandis que d’autres s’y sont engagées, mais pas avant 2060. La coordination au niveau mondial permettra aux investisseurs de comparer plus facilement les entreprises avec leurs concurrentes et de déterminer l’orientation des flux d’investissement.
Le deuxième événement majeur de l’année 2021 est la 26ème Conférence sur le changement climatique (COP26), qui se tiendra en novembre à Glasgow, au Royaume-Uni. A cette occasion, les gouvernements s’efforceront de coordonner leurs programmes en matière de lutte contre le changement climatique. Cette conférence est également de nature à accentuer la pression sur les gouvernements pour qu’ils tiennent les engagements déjà pris et en prennent de nouveaux plus ambitieux pour atteindre les objectifs fixés à l’horizon 2050.
L’impulsion donnée à la transition vers la neutralité carbone aura un impact sur l’ensemble des entreprises et des investisseurs dans les prochaines décennies. Pour certaines entreprises comme les majors pétrolières, qui possèdent d’énormes actifs appelés à devenir obsolètes, le défi s’annonce considérable. D’autres entreprises investissent depuis des années dans les technologies plus vertes et, de ce fait, sont bien positionnées dans l’optique de la transition énergétique.
En définitive, les capitaux publics et privés afflueront vers ces entreprises qui mènent des actions concertées pour atteindre la neutralité carbone. Elles deviendront plus durables, plus résistantes et donc plus précieuses à long terme. Par conséquent, elles jouiront de coûts de financement inférieurs à ceux de leurs concurrentes moins vertueuses. La transition de l’économie mondiale vers la neutralité carbone ne fait que commencer : elle dictera les priorités d’investissement dans les décennies à venir.
Source :
1 Calastone, janvier 2021.
2 FT.com, What the US rejoining the Paris accord means for climate policy, 22 janvier 2021.
3 Columbia Threadneedle Investments, janvier 2021.
Qu’entend-on par «philanthropie»?
Par Christoph Courth, Head of Philanthropy Services chez Pictet Wealth Management
Le 21 avril 2021
Il existe de multiples définitions de la philanthropie. Il suffit d’ailleurs de chercher le terme sur Internet pour s’en rendre compte. La notion de charité remonte certainement aux débuts de l’humanité, mais la philanthropie au sens où nous l’entendons aujourd’hui n’est apparue qu’au début de XXème siècle avec l’essor des fortunes privées, dans le sillage de la deuxième révolution industrielle. Au XXIème siècle, la philanthropie connaît un nouveau souffle, et si les élans de prodigalité de célébrités et autres milliardaires de la technologie sont souvent médiatisés, force est de souligner que la générosité ne se limite pas à ces personnalités.
On observe aujourd’hui une augmentation des fortunes privées à l’échelle mondiale, et notamment parmi les entrepreneurs, qui sont statistiquement plus enclins à «donner en retour». Une partie de cette richesse accumulée provient aussi de particuliers ayant personnellement vu et/ou connu la pauvreté et les inégalités dans les pays en développement. Mais, la montée en puissance des «millennials», génération dotée d’une forte conscience sociale, et la volonté toujours plus prononcée des entreprises – familiales en particulier – à agir sur le long terme, alimentent également cet accroissement des ressources.
Dans un monde qui, grâce à la technologie, paraît soudain beaucoup moins vaste, il est difficile d’ignorer les innombrables défis auxquels l’humanité est confrontée. Et nos téléphones portables, toujours à portée de main, nous permettent d’agir de façon très réactive.
L’engagement des philanthropes modernes prend aujourd’hui des formes très variées, qu’il s’agisse de donner de son temps, de mobiliser son entreprise ou d’accompagner un capital philanthropique par des investissements visant à générer des changements à long terme pour l’humanité et la planète sur laquelle nous vivons.
Quelle voie choisir?
En matière de philanthropie, les voies d’action sont aussi multiples que variées. C’est ce qui rend le domaine passionnant, mais aussi complexe et difficile à appréhender. Quelles sont les bonnes et les mauvaises approches et quelle est la solution la plus adaptée à chaque situation?
Plusieurs possibilités s’offrent aux particuliers et aux familles qui souhaitent mobiliser leur fortune en faveur du bien social et environnemental.
- Les dons de bienfaisance ne requièrent généralement qu’un investissement en temps et en ressources limité. Ils reposent souvent sur une approche distanciée, consistant en donations financières à des organisations caritatives existantes et dont le travail est reconnu.
- La philanthropie recouvre le don d’actions ou de biens immobiliers, en nature ou en espèces. Elle nécessite un investissement en temps et en énergie plus important et exige une approche plus active. La philanthropie implique une connaissance plus approfondie de la destination des fonds donnés. Elle requiert un compte-rendu plus conséquent de la part des bénéficiaires. L’objectif final, ainsi qu’un plan d’action pour y parvenir, sont généralement définis à l’avance.
- La philanthropie catalytique suppose un objectif final et un plan d’action plus structurés, ainsi qu’une stratégie de sortie à tous les niveaux de l’opération. La philanthropie catalytique s’appuie généralement sur des données objectives et statistiques pour déterminer le choix des destinataires et des modes d’action et évaluer leur impact. Elle implique la mobilisation de toutes les ressources disponibles pour comprendre les causes profondes des problèmes auxquels elle entend remédier et vise la transformation de systèmes entiers.
- La finance sociale correspond généralement à des prêts et/ou investissements dans des entreprises sociales ou des organisations à but non lucratif. Elle recouvre les initiatives caritatives axées sur le résultat, les investissements en lien avec des programmes spécifiques, le capital-risque philanthropique, la microfinance, les obligations à impact social et de développement, les mécanismes de finance mixte et les prêts aux entreprises sociales.
Quelles sont les motivations des philanthropes?
Comprendre et s’interroger en toute honnêteté sur les raisons (souvent nombreuses) qui motivent une démarche philanthropique constitue une première étape cruciale. Pourquoi?
Dans une étude publiée en 1994, Russ Alan Prince et Karen Maru File ont identifié sept profils de philanthropes sur la base de leurs intérêts et des organisations à but non lucratif soutenues.
Chaque profil a été établi en fonction des comportements et convictions ayant justifié un soutien à un organisme à but non lucratif ou une action en son nom parmi l’échantillon de donateurs considéré. L’étude met en évidence les attentes des uns et des autres en termes de communication, d’engagement, de participation au processus décisionnel et de reconnaissance.
Bien sûr, personne ne s’inscrit dans une seule catégorie. Il s’agit surtout de déterminer les traits les plus et les moins dominants pour chaque profil.
- Le philanthrope communautaire
- souhaite soutenir une communauté, un réseau ou un groupe auquel il appartient;
- estime que la charité commence à la maison;
- cible ce qui lui donne le plus grand sentiment d’attachement, de transparence et
d’engagement actif.
- Le croyant
- agit sur la base d’une foi, d’une philosophie ou de croyances spécifiques;
- ne se limite pas à une contribution financière, mais donne aussi de son temps et de sa
- personne;
- s’aligne généralement sur l’action d’autres personnes dont il partage le mode de pensée.
- Le mondain
- est largement motivé par le plaisir tiré de son action;
- voit dans la philanthropie un échange de bons procédés;
- tend à soutenir les arts et les hautes études.
- L’altruiste
- agit par empathie et cherche à aider sans contrepartie;
- se laisse généralement guider par ses sentiments et ses émotions;
- tend à agir de façon distanciée, parfois anonyme, et n’attend pas de reconnaissance.
- Le philanthrope «redevable»
- cherche à «donner en retour» en soutenant un domaine dont il a directement bénéficié;
- estime qu’il est du devoir des plus riches de donner et attend de ses semblables qu’ils
- agissent en conséquence;
- donne de façon très directe et ne cherche généralement pas à changer le monde.
- L’héritier
- considère la philanthropie comme une tradition familiale, qui fait partie de son héritage;
- agit souvent dans un cercle proche et dans le cadre d’une fondation familiale;
- concentre généralement son action sur quelques domaines spécifiques.
- L’investisseur
- perçoit la philanthropie comme une opportunité intéressante;
- adopte une approche méthodique et aborde le domaine comme n’importe quel autre
- investissement;
- voit dans la philanthropie la possibilité d’un engagement gagnant-gagnant.
Planification patrimoniale : les besoins des particuliers et des familles fortunés évoluent
Par Stuart Parkinson, Group CEO, Lombard International Group
Le 16 avril 2021
Les attentes et les besoins spécifiques des particuliers et des familles fortunés en matière de protection, de préservation et de transmission du patrimoine sont de plus en plus sophistiqués. Ils exigent de leurs gestionnaires et fournisseurs une expertise pointue associée à des prestations sur mesure, des services digitalisés mêlés à des interactions humaines, ainsi qu’une large couverture géographique. Le tout dans un contexte géopolitique changeant et en perpétuelle évolution.
Crise du Covid-19
Ces 12 derniers mois, la pandémie a suscité bien des inquiétudes et généré une volatilité sans précédent sur les marchés. La volatilité journalière du MSCI ACWI Index, l’indice d’actions mondiales phare de MSCI, a atteint en effet 28 % en 2020, soit près de trois fois le niveau enregistré en 2019[1]. Cela a fait naître un désir de plus d’implication chez les personnes fortunées qui ressentent le besoin de s’engager davantage dans la gestion de leur patrimoine. Cela passe par la prise de décisions d’investissement notamment. Pour nombre de chefs de famille, hommes et femmes, le COVID-19 a été un véritable catalyseur de cette prise de conscience, la crise les incitant à réévaluer leurs plans de planification patrimoniale et successorale à long terme.
Solutions adaptées
La dynamique économique en constante évolution s’est traduite par un plus grand besoin de protection des actifs, de mobilité internationale et de diversification des portefeuilles grâce aux actifs alternatifs. Les solutions de planification patrimoniale sur mesure, adaptées aux besoins spécifiques des particuliers fortunés, sont en train de devenir la norme. Les investisseurs demandent à leurs conseillers de concevoir des solutions agiles et innovantes, qui facilitent la création de portefeuilles d’investissement flexibles et aussi diversifiés que possible. Aussi, il est crucial que ces solutions soient adaptables aux évolutions réglementaires sur le long terme, avec notamment une transparence maximale en termes de frais et d’administration des actifs.
Critères ESG
La conjoncture actuelle a aussi fait passer les considérations ESG au premier plan. La pandémie a tiré la sonnette d’alarme du changement climatique, suscitant un regain d’intérêt pour le développement durable chez de nombreux investisseurs. La crise sanitaire a eu comme deuxième effet de focaliser l’attention des investisseurs sur la façon dont les entreprises traitent leurs actionnaires, l’ensemble de leurs parties prenantes et leurs employés, ainsi que sur la conformité de leurs actes à leurs valeurs et leurs principes.
Examen de la finalité
Ces priorités nouvelles conduisent les particuliers fortunés à réexaminer la cible de leurs investissements, à se questionner sur les personnes chargées de la gestion de leurs actifs, à reconsidérer la « finalité » de leur patrimoine et à conformer leurs actifs à leurs objectifs non financiers.
Le World Wealth Report 2020 de Capgemini[2] révèle que 27 % des particuliers fortunés s’intéressent aux produits d’investissement durables, cette proportion allant même jusqu’à 40 % chez les particuliers ultrafortunés (plus de 30 millions de dollars US d’actifs financiers). Cette tendance est appelée à se poursuivre, alimentée par le nombre croissant de femmes et de « Millennials » fortunés et ultrafortunés. Ces deux groupes sont davantage enclins à se constituer un portefeuille d’investissement conforme à leurs considérations ESG et à leurs intérêts individuels. D’après une étude de Morgan Stanley, 84 % des femmes manifestent un intérêt pour l’investissement durable, contre 67 % des hommes[3].
Planification successorale
Le COVID-19 a non seulement eu des répercussions économiques et rendu plus aiguës les considérations ESG, elle nous a aussi renvoyés à notre propre finitude. La planification successorale est devenue une préoccupation majeure dans ce contexte économique incertain, caractérisé par une volatilité persistante et dans lequel certaines classes d’actifs sont boudées par les investisseurs. Les conseillers en gestion de patrimoine font état d’une hausse de la demande de la part de leurs clients fortunés qui souhaitent réexaminer les moyens les plus efficaces pour protéger et transmettre leur patrimoine, et pour assurer une véritable continuité et la mise en place de mesures appropriées.
En outre, les dynamiques et les structures de la famille moderne se complexifient de manière significative. Divorces, familles recomposées, membres dispersés aux quatre coins du monde… tout cela contribue à accroître la complexité financière, et rappelle l’importance d’un nouvel examen de la planification patrimoniale et successorale.
Digitalisation des services
La plupart des activités commerciales et des échanges avec les clients devant être menés de manière virtuelle pendant le confinement mondial, le secteur est en train d’opérer un virage digital rapide. Cette évolution a aussi révélé l’efficacité et les bénéfices de la digitalisation, un facteur d’excellence opérationnelle dans notre secteur. Compte tenu du nombre significatif de particuliers fortunés mobiles à l’échelle internationale, la connectivité digitalisée de leur patrimoine n’est plus une option. Surtout, cette portabilité doit parfaitement s’articuler avec l’expertise humaine et la gestion des relations afin d’offrir des solutions hautement personnalisées.
Au niveau le plus fondamental, l’excellence du service reste un facteur clé pour la rétention des clients. Fournisseurs et gestionnaires doivent être en mesure d’offrir une qualité de service perceptible, qui réponde aux attentes des clients en matière d’aide administrative, de reporting individualisé, détaillé et accessible et d’engagement.
Protection et stabilité
Par-dessus tout, il est capital de se rappeler que, malgré les mutations du monde, le patrimoine privé reste un sujet éminemment personnel et affectif. Souvent, les clients fortunés ont accumulé leur patrimoine au fil des générations et/ou à force de travail et au prix de nombreux efforts. Ces actifs hérités s’accompagnent d’un sentiment de responsabilité, il s’agit donc de les protéger. Le caractère volatil et imprévisible de l’économie mondiale a ravivé le désir de stabilité, créant des besoins aussi multiples que sophistiqués. Loin de l’infléchir, la pandémie a eu pour seul effet de renforcer la demande de solutions de planification patrimoniale sur mesure. La prévoyance est mère de sûreté. Les conseillers doivent impérativement saisir cette opportunité de se mettre au diapason des attentes et des besoins changeants de leur clientèle s’ils entendent continuer de nouer avec elle des relations durables et pérennes.
[1] https://www.alliancebernstein.com/library/When-Markets-Are-Recovering-Dont-Ignore-Volatility.htm
[2] https://worldwealthreport.com/
[3] https://www.morganstanley.com/pub/content/dam/msdotcom/ideas/sustainable-signals/pdf/Sustainable_Signals_Whitepaper.pdf
Intégrer la robotique en portefeuille : Un pari prometteur sur l’avenir
Par Backstage Communication
Le 18 mars 2021
Savez-vous qu’en Chine, le service en salle dans certains restaurants est complètement assuré par des robots ? Au Japon, pays où la population est vieillissante, ce sont parfois des robots qui se chargent efficacement de l’aide à la personne. L’automatisation des tâches dans l’économie n’est pas neuve. Elle remonte à la révolution industrielle avec les premières machines intégrées dans des chaînes de production.
Aujourd’hui, on parle de robotique. Les robots remplacent ou assistent les personnes qui sont actives dans différents domaines. Ils sortent aussi de l’industrie et pénètrent dans différents secteurs de l’économie. « Cette technologie est universelle. Elle est née dans l’industrie et, aujourd’hui encore, les trois quarts de la demande pour ces machines proviennent de l’industrie, du secteur automobile ou de l’électronique. Mais les robots s’exportent aussi dans d’autres secteurs. On pense ici à la santé avec les robots chirurgicaux, par exemple », explique Rolando Grandi, CFA, Gérant de fonds à La Financière de l’Echiquier.
Solutions et avantages
Désormais, grâce à l’innovation technologique rapide, les robots deviennent plus petits, plus efficaces, plus intelligents, moins chers et donc utilisables partout. « Dans un monde où la croissance est faible, les matières premières rares et la population vieillissante, les robots offrent des solutions importantes. Ils peuvent augmenter la productivité et ils contribuent à une utilisation plus précise des matières premières. Ils rapprochent la production des consommateurs. Ils augmentent la flexibilité de la production. Les robots rendent aussi la personnalisation moins coûteuse et ils raccourcissent les délais de livraison », estime Anjali Bastianpillai, Senior Client Portfolio Manager chez Pictet Asset Management.
Bel avenir
La robotique est donc un secteur d’avenir. En effet, elle répond à deux besoins essentiels : produire plus rapidement et à moindres coûts. Elle permet aussi de remplacer des tâches répétitives en-dehors de l’industrie, comme dans la comptabilité, par exemple. Les robots collaboratifs, qui aident les humains dans leurs tâches en les rendant plus précises et plus sécurisées, ouvrent la voie pour un développement futur. « Nous sommes véritablement dans un cercle vertueux. On se rend compte à quel point les robots peuvent améliorer un grand nombre de tâches. Leur développement va donc en s’accélérant », constate Rolando Grandi.
On trouvera désormais des machines qui nous aideront dans tous les domaines : les industries, les soins de santé, la consommation discrétionnaire ou encore les services de communication. Il y aura des applications robotiques dans tous les secteurs de l’économie : médecine, industrie automobile, technologique, consommation et services, … « Porté par sa capacité à accroître la productivité, à réduire les coûts et à répondre aux enjeux liés au vieillissement de la population, le secteur de la robotique est appelé à croître sensiblement plus vite que l’économie au sens large », prévoit Anjali Bastianpillai.
Valorisations et concentrations
Mais les actions de cette industrie de la robotique ne sont-elles pas trop chères ? On peut estimer que certaines valeurs se traitent à des valorisations élevées. « Mais ces sociétés s’en sont très bien sorties en 2020. Aujourd’hui, on assiste à une reprise de l’économie qui devrait bénéficier aux entreprises actives dans le domaine de la robotique. Mais, il faut bien sûr être sélectifs dans le choix des valeurs en portefeuille », prévient Rolando Grandi.
Ne court-on pas également le risque d’être trop concentrés sur les Etats-Unis ? En réalité, cette activité est très bien répartie au niveau international. Environ 40% des leaders dans ce domaine sont asiatiques. La Chine, le Japon et Taiwan sont très avancés dans ce domaine. Viennent ensuite les Etats-Unis avec 40% de part de marché. Puis l’Europe prend la suite du peloton avec des leaders en Allemagne et en Suisse.
Risques
Si un investissement dans ce segment de marché offre des avantages importants, il ne faudrait pas en négliger les risques. « Les risques liés au secteur de la robotique sont fonction des fluctuations de marché de chacun des segments dans lesquels on utilise des robots. Pour un thème comme la robotique, où les technologies évoluent tellement vite, il est important d’avoir un style d’investissement actif pouvant saisir les opportunités à mesure qu’elles se présentent tout en tenant compte des valorisations du marché », note Anjali Bastianpillai.
Dans ce pan de l’économie, il convient d’être particulièrement agiles. En effet, l’innovation évolue rapidement et il faut bien sélectionner ceux qui sont et resteront les leaders. La robotique est aussi un secteur cyclique qui dépend de la santé de l’économie en général. Il faut aussi tenir compte du facteur d’adoption. « Il faut que ces technologies soient adoptées dans les secteurs. Dans le domaine médical, par exemple, on peut parfois se heurter à un certain temps d’adaptation », ajoute Rolando Grandi.
La robotique est donc un bon thème dans lequel on peut investir en tenant compte des risques. L’investisseur doit cependant envisager ce thème dans le cadre d’une diversification du portefeuille. Il doit aussi concevoir cette thématique d’investissement sur le long terme.
Marchés émergents : la dynamique est en marche
Par Dara White, Responsable Actions Marchés Emergents chez Columbia Threadneedle Investments
Le 1er février 2021
Malgré son impact considérable sur la santé et le bien-être, la pandémie de Covid-19 n’a pas ébranlé outre mesure les puissantes tendances structurelles qui alimentent la croissance des marchés émergents. Ces tendances devraient prendre un nouvel élan au cours de l’année à venir. Les marchés émergents devraient demeurer le moteur incontesté de la croissance économique mondiale.
Contexte favorable
À l’aube de 2021, le contexte macroéconomique est extrêmement favorable. Plusieurs grandes économies, notamment la Chine et la Corée du Sud, ont été parmi les premières à être touchées par la pandémie. Mais grâce à la solidité de leur stratégie de lutte contre la propagation du virus, elles se sont fortement redressées et sont bien placées pour poursuivre leur rebond. Plus généralement, les marchés émergents bénéficient de la vague mondiale de réductions des taux d’intérêt et d’injections de liquidités. En outre, ils ont davantage de latitude que les marchés développés pour appliquer des mesures de relance supplémentaires, du fait de taux d’intérêt réels plus élevés.
Face à un environnement macroéconomique favorable et la promesse d’une large disponibilité des vaccins contre le Covid-19 en 2021, la principale tendance à long terme à l’œuvre sur les marchés émergents, à savoir leur transition d’une croissance axée sur les exportations au profit d’un développement fondé sur une demande intérieure florissante, s’affirmera plus fortement que jamais.
Expansion de la classe moyenne
Le glissement du centre de gravité des classes moyennes à travers le monde en est la parfaite illustration. En octobre, la Brookings Institution, basée à Washington, soulignait que la Chine connaissait l’expansion de la classe moyenne la plus rapide que le monde ait jamais connue.1 Elle ajoute que cette expansion se produisait « à une période où la classe moyenne mondiale se développe déjà à un rythme sans précédent, en partie grâce à certains de ses voisins comme l’Inde ». L’étude établie par Brookings prédit que la classe moyenne chinoise comptera quelque 1,2 milliard d’individus d’ici 2027, soit un quart du total mondial. En comparaison, dans les années 1950, plus de 90% de la classe moyenne dans le monde vivaient en Europe et en Amérique du Nord.
Consommation discrétionnaire
Cette évolution permanente alimentera une forte demande intérieure de biens et de services, à laquelle répondront en grande partie des entreprises nationales à croissance rapide. Dès lors, des thèmes tels que l’innovation numérique, le e-commerce et le taux de pénétration des paiements numériques, l’approfondissement financier et le développement lié à l’environnement (qui ont tous été renforcés par la pandémie) offriront d’importantes sources d’opportunités d’investissement au cours de l’année à venir et au-delà.
Il existe des opportunités importantes dans les secteurs de la consommation discrétionnaire, des technologies de l’information et des services de communication, où il y a un potentiel de croissance internationale très intéressant, dès lors que les entreprises développent des produits et des services afin de s’adapter aux goûts en constante évolution des consommateurs.
Secteur de la santé
Autre secteur ayant connu une accélération majeure durant la pandémie : les soins de santé. Les dépenses de santé en Chine ne représentent qu’environ 5% du PIB, contre 17% aux États-Unis,2 ce qui donne une indication claire de l’orientation que pourrait prendre la tendance dans ce secteur. En Chine, les gens vivent plus vieux, sont plus riches et tombent plus souvent malades. Les réformes exceptionnelles ont été un catalyseur clé pour l’industrie. L’adhésion au Conseil international pour l’harmonisation des exigences techniques relatives aux produits pharmaceutiques à usage humain (ICH)3 aide à intégrer le processus clinique de la Chine et l’adhésion aux normes mondiales. Ainsi, les délais d’approbation et de remboursement des médicaments ont depuis lors considérablement diminué.4 Le marché s’est ouvert. Il existe désormais une demande et la capacité d’y répondre. Le secteur de la santé pourrait doubler de volume au cours des prochaines années.
Autres opportunités
Ailleurs, il existe des poches de croissance dans la finance, grâce à l’innovation numérique. Par exemple, au Brésil, les taux d’intérêt historiquement bas5 stimulent l’investissement dans les actions et créent des opportunités. Alors que la déréglementation financière, les réformes structurelles et l’adoption des technologies se poursuivent, des domaines tels que le courtage et les paiements numériques offrent davantage de perspectives de croissance élevée. Bien que la pandémie ait quelque peu freiné le programme de réforme des marchés émergents, la tendance à long terme demeure intacte. En effet, d’importantes réformes progressent dans des pays comme le Brésil, l’Indonésie, l’Inde et la Chine.
Investisseurs sous-exposés
De nombreux investisseurs restent sous-exposés aux marchés émergents. Cependant, les arguments en faveur d’une participation dans cette classe d’actifs sont de plus en plus convaincants. Un nombre croissant d’entreprises répondent ainsi au style d’investissement « croissance de qualité ».
Les avantages de cette classe d’actifs en termes de croissance et de diversification paraissent convaincants.
1 https://www.brookings.edu/wp-content/uploads/2020/10/FP_20201012_china_middle_class_kharas_dooley.pdf, Octobre 2020.
2 https://data.worldbank.org/indicator/SH.XPD.CHEX.GD.ZS, Décembre 2020.
3 https://www.biopharminternational.com/view/china-joins-ich-global-harmonization-efforts, Août 2017.
4 FT.com, Global drugmakers strike deal to slash prices in China, 28 novembre 2019.
5 https://www.bloomberg.com/news/articles/2020-10-28/brazil-holds-key-rate-at-2-as-growth-woes-outweigh-fiscal-fears, Octobre 2020.
Pourquoi et comment investir dans un mode de vie plus sain ?
Par Pauline Grange, Portfolio Manager chez Columbia Threadneedle
Le 5 janvier 2021
Il n’est guère surprenant que de nombreuses personnes cherchent à rester en bonne santé compte tenu des rapports qui établissent un lien entre la gravité d’une contamination au Covid-19 et l’obésité. Ces rapports nous poussent non seulement à prendre en main notre santé, mais ils sont également susceptibles d’inciter les gouvernements à adopter des stratégies plus proactives pour combattre l’obésité et réduire l’incidence des facteurs de risque des maladies non transmissibles (MNT) telles que le diabète. Ces MNT sont non seulement associées aux cas les plus sévères de Covid-19, mais elles représentent également une charge croissante pour les systèmes de santé publics.
Obésité et maladies
Plus de 70% des Américains sont en surpoids ou obèses[i] et la prévalence de l’obésité morbide a augmenté au cours des deux dernières décennies. La situation est très similaire au Royaume-Uni, où 67% des hommes et 60% des femmes sont considérés en surpoids.[ii]
Ces taux élevés d’obésité constituent un problème de santé publique majeur et sont également à l’origine de maladies chroniques liées à l’alimentation, telles que les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 et certains types de cancer. A l’heure actuelle, six Américains sur dix sont touchés par une maladie chronique, et quatre sur dix sont touchés par deux maladies chroniques ou plus.[iii] Divers facteurs contribuent à la prévalence de ces maladies chroniques, mais les plus importants sont les mauvaises habitudes alimentaires et le manque d’activité physique.
Il est désormais largement reconnu que les taux d’obésité plus élevés du Royaume-Uni expliquent en partie pourquoi le pays affiche le taux de mortalité des malades du Covid-19 le plus élevé d’Europe. Alors que les pouvoirs publics prennent conscience du fait que les facteurs culturels et le mode de vie font plus que compenser les gains résultant des dépenses de santé supplémentaires par habitant, nous pouvons nous attendre à une réorientation des politiques en faveur de ces domaines, en particulier pendant la crise actuelle.
Alimentation saine
L’alimentation constitue pour les gouvernements l’un des leviers les plus évidents pour influencer la santé publique et l’incidence de l’obésité. Au fil du temps, les aliments et les boissons peu sains seront probablement soumis à des restrictions de plus en plus sévères en matière de publicité, à des taxes sur le sucre et à des exigences accrues en termes d’avertissements devant figurer sur les étiquetages. Il est plus probable que de telles mesures se concrétisent dans les pays où l’incidence du diabète est plus élevée, où les résultats des malades du Covid-19 sont moins bons et où les systèmes de santé publique sont plus étendus.
Le Royaume-Uni constitue un bon exemple à cet égard. En juillet, Boris Johnson s’est montré plus proactif sur la question de l’obésité après avoir lui-même contracté le Covid-19. Les nouvelles mesures proposées[i] comprennent : l’interdiction de la publicité télévisée et en ligne pour les aliments riches en graisses, en sucre et en sel avant 21 heures ; la fin de certaines offres (par exemple « 1+1 gratuit ») sur les aliments non sains riches en sel, en sucre et en graisses ; l’indication du nombre de calories sur les menus pour aider les gens à faire des choix plus sains lorsqu’ils mangent au restaurant ; et l’obligation de mentionner les « calories liquides » cachées pour les boissons alcoolisées. Enfin, une campagne est lancée pour aider les gens à perdre du poids, à faire davantage d’exercice physique et à mieux s’alimenter.
Investir dans un mode de vie plus sain
La lutte contre la crise mondiale de l’obésité passera par la promotion d’un mode de vie plus actif. L’Organisation mondiale de la santé affirme que le manque d’activité physique est l’un des principaux facteurs de risque de mortalité dans le monde. Les campagnes gouvernementales visant à aider les gens à perdre du poids et à faire plus d’exercice physique devraient jouer un rôle important dans l’inversion de ces tendances. Les enseignes de vêtements de sport telles qu’Adidas participent également à la promotion de ce mode de vie plus sain par le biais de leurs campagnes de marketing et de soutien communautaire, tout en bénéficiant financièrement de son adoption par les consommateurs.
La stratégie Global Sustainable Outcomes évite activement les entreprises dont les produits et services contribuent à la crise de l’obésité et de la santé, comme les producteurs de boissons alcoolisées et les chaînes de restauration rapide, tout en donnant la priorité aux entreprises de consommation dont les produits contribuent à une alimentation et à un mode de vie plus sains. Si les politiques gouvernementales portent leurs fruits, les entreprises proposant des produits plus sains en profiteront, tandis que les autres devront faire face à des coûts et des défis accrus à l’avenir.
Un dollar américain structurellement plus faible
Par Robin Maynadie, Trader chez Ebury
Le 22 décembre 2020
La crise du Covid-19 a soutenu le recul du billet vert face à l’ensemble des grandes devises mondiales, une baisse qui pourrait s’avérer structurelle face à la montée en puissance de l’économie chinoise. Depuis le mois de mai dernier, le dollar américain a entamé un reflux sur les marchés financiers, sur base d’une combinaison de facteurs qui remettent en cause la suprématie du billet vert sur les échanges internationaux. Le coronavirus n’est probablement pas la seule explication même si le nombre d’infections est aujourd’hui en train de ralentir en Europe alors que l’épidémie continue de faire rage aux Etats-Unis. Dans ce pays, plus de 300.000 morts sont désormais à déplorer avec des records d’infections qui continuent d’être battus jour après jour.
Sous pression
Ce qui a surtout brisé l’attrait du dollar sur le marché des changes, ce sont les baisses de taux décidées par la Réserve Fédérale (la banque centrale américaine) pour soutenir son économie. Avec la perspective d’un taux durablement bas pour les obligations d’état à 10 ans, les investisseurs ont perdu un instrument très bien noté qui leur permettait d’avoir un rendement supérieur au rendement sur les obligations européennes.
Le dollar a ainsi perdu une grande partie de son attrait depuis le deuxième trimestre, en particulier si l’on regarde les rendements qu’il est aujourd’hui possible d’obtenir en investissant sur les obligations chinoises (autour de 4 à 4,5%). Il est probable qu’une partie des flux qui allaient autrefois vers les Etats-Unis se dirigeront désormais vers ces nouveaux marchés obligataires.
De plus, la Chine et la Russie n’utilisent plus le dollar pour réaliser leurs échanges commerciaux. Cela constitue un autre facteur qui pèse sur le billet vert. A moins d’un élément externe majeur qui entraînerait un affaiblissement de l’euro face au dollar, il semble que la tendance baissière de l’euro face au dollar soit, aujourd’hui, arrivée à son terme.
Soutien à long terme
A terme, on s’attend à ce que le dollar continue de se déprécier vers 1,24 dollar pour un euro, même si la devise américaine pourrait encore venir ponctuellement se heurter sur le niveau de 1,2 dollar / euro. Le dollar devrait alors fluctuer entre 1,2 et 1,25 dollar jusqu’à la fin de l’année prochaine. Le billet vert ne devrait cependant pas plonger vers des niveaux de 1,35-1,4 dollar pour un euro.
La forte baisse du dollar n’est toutefois pas une bonne chose pour les entreprises européennes tournées vers les exportations. La BCE n’a sans doute pas envie d’avoir un dollar qui passe sous la barre de 1,25 dollar pour un euro. Cela compliquerait encore la reprise économique dans la zone euro. Dans le même temps, la Réserve Fédérale américaine ne cache plus son intention de laisser courir l’inflation durant les prochaines années au-delà de 2%. Il existe alors plusieurs éléments qui vont empêcher une appréciation trop forte de l’euro face au dollar.
Un autre élément sont les marchés boursiers avec des cours qui battent régulièrement leurs sommets historiques, ce qui a généralement tendance à favoriser le niveau de l’euro face au dollar. La valorisation des sociétés cotées est très élevée, et l’éclatement de cette bulle pourrait également favoriser le dollar face aux autres devises.
Finance, climat et pragmatisme
Par Coline Pavot, Responsable ISR à la Financière de l’Echiquier
Le 16 décembre 2020
Alors que 2020 se classe parmi les trois années les plus chaudes jamais enregistrées, la thématique du climat a été, ces derniers mois, de toutes les annonces. Des élections américaines aux plans de relance européens, en passant par les engagements de neutralité carbone des principales entreprises pétrolières, toutes ces annonces ont un objectif commun. Elles ont pour but de mobiliser la société dans son ensemble pour nous permettre de vivre, à l’horizon 2050, dans un monde dont l’augmentation de la température reste inférieure à 2°C. Face à ce défi de taille, la finance a un rôle majeur à jouer pour diriger, de façon pragmatique, les capitaux vers les entreprises qui façonnent le monde de demain.
Financer les apporteurs de solutions
Pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat, on pense naturellement au financement des entreprises qui apportent des solutions aux problématiques environnementales. Ces solutions peuvent générer un impact environnemental direct. C’est le cas, par exemple de Neoen, producteur français d’énergies renouvelables. Elles peuvent avoir un impact indirect comme, par exemple, Dassault Systemes dont les logiciels permettent de concevoir des véhicules et des bâtiments plus efficients. C’est cet axe de financement que privilégient les récents plans de relance post-Covid. Ils attribuent des capitaux aux secteurs de la rénovation énergétique, des énergies vertes ou encore de la mobilité durable.
Financer les pionniers de tous les secteurs
Mais comment se positionner face à des entreprises plus traditionnelles comme les sociétés hôtelières, textiles ou encore les banques ? Dans tous ces secteurs, il existe des entreprises ambitieuses et pionnières. Elles ont pris des engagements climatiques forts, afin d’aligner leur modèle économique avec un monde visant une augmentation de la température limitée à 1,5°C. Souvent identifiables par leur engagement auprès des Science Based Targets[1], elles font figure d’exemples dans leurs secteurs au sein desquels elles ont le pouvoir de faire bouger les lignes. Pour mener à bien ce double projet, elles ont besoin d’être soutenues et accompagnées par des investisseurs engagés à leurs côtés dans la durée.
Financer les oubliés de la transition
Dans la course climatique, certaines entreprises sont souvent mises à l’écart par les investisseurs, comme par exemple celles du secteur des énergies fossiles. Faut-il les exclure et les laisser aux mains d’investisseurs peut-être moins regardant ? Ou faut-il investir et s’engager à leurs côtés pour accélérer leur transition ? C’est le dilemme de tout investisseur responsable. La seconde option commence à prouver son efficacité. Total a ainsi revu à la hausse ses engagements climatiques à la suite des travaux du Climate Action 100+[2]. Il s’agit d’une initiative d’engagement collaborative dont le but est d’inciter les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre à réduire leurs émissions. Total agit aussi sous l’influence du dépôt d’une résolution environnementale de certains de ses actionnaires lors de la dernière assemblée générale du groupe. Si l’objectif est d’accompagner la transition de l’économie dans son ensemble, pouvons-nous nous passer de ces acteurs ? Non, mais à condition qu’ils prennent des engagements sérieux et sincères !
[1] Initiative mondiale regroupant des acteurs publics (ONU) et privés (WWF, CDP…) dont le but est de piloter une « action climatique ambitieuse » dont les objectifs sont fondés sur la science.
[2] Première coalition d’investisseurs mondiaux à l’origine d’engagements collaboratifs avec les plus grands émetteurs de gaz à effet de serre du monde afin de les inciter à réduire leurs émissions.
Crise du Covid-19 : fausse rupture ou vraie continuité ?
Par Enguerrand Artaz, gérant chez La Financière de l’Echiquier
Le 24 novembre 2020
« Il y aura un avant et un après », « demain ne ressemblera pas à hier »… Les poncifs relayés pour tenter de dessiner les contours du « monde d’après » ne manquent pas. C’est comme si la crise avait créé une rupture profonde dans la marche du monde, bouleversant les dynamiques qui prévalaient jusque-là. Mais, rien n’est moins vrai.
Ventes en ligne
Prenez la révolution digitale par exemple. Incontestablement, le secteur technologique est un des grands bénéficiaires de la crise. De plus, la consommation en ligne n’a jamais été aussi florissante. Ainsi, alors que les ventes au détail ont déçu en octobre aux Etats-Unis en ne progressant que de 0,3% (0,6% attendu), les ventes en ligne ont bondi de 3,1%. Sur un an, elles progressent de 29%, tandis que le total des ventes au détail n’augmente que de 5,7%. Il ne s’agit là que de l’accélération d’une tendance longue. Depuis début 2000, les ventes au détail[1] ont été multipliées par un peu plus de deux. Les ventes en ligne ont, pour leur part, été multipliées par plus de six. Ainsi, alors qu’elles représentaient à peine 8% du total [2]au début des années 2 000, elles représentent aujourd’hui 23%.
En comparaison, les ventes dans les grandes et moyennes surfaces de ville et épiceries représentaient plus de 18% en 2000 et 16% aujourd’hui. Les deux courbes n’ont pas attendu la crise Covid pour se croiser. Cela a eu lieu au dernier trimestre 2018 !
Déficits budgétaires
Autre exemple avec l’explosion des déficits budgétaires en Europe. Face à l’ampleur de la crise, la règle des 3%, chère aux Allemands, a volé en éclats. Après la prééminence de la logique d’austérité au début de la décennie 2010, cette règle fut fortement critiquée. On imaginait son existence en sursis. On se rappelle, par exemple, qu’en amont de leur arrivée au pouvoir en 2018, les leaders des partis italiens M5S et la Ligue l’avaient fustigée et voulaient l’enfreindre à l’été 2019 alors qu’ils préparaient le projet de budget 2020. La crise n’a fait qu’accélérer une tendance incontestablement présente.
Equilibres mondiaux
Même logique sur le front des grands équilibres mondiaux. Pourtant foyer de l’épidémie, l’Asie, la Chine en particulier, ressort comme le « grand vainqueur » de la crise. La gestion exemplaire de la pandémie par de nombreux pays asiatiques a réduit le nombre de morts et leur a permis de moins souffrir économiquement que les zones du globe ayant dû mettre en place des mesures plus drastiques. Avec en point d’orgue à cette réussite, l’accord commercial signé récemment entre quinze pays d’Asie-Pacifique, pour former le plus grand bloc de libre-échange mondial. Mené par la Chine, il regroupe les 10 pays de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (Asean), le Japon, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Cette nouvelle zone de libre-échange représentera 30% de l’économie mondiale. Elle concernera 2,2 milliards de consommateurs. Et davantage si l’Inde, qui s’est retirée du projet l’an dernier, la rejoint plus tard, comme elle en a la possibilité. C’est le point d’orgue mais surtout l’aboutissement d’un travail de longue haleine amorcé dès 2012. Couplé aux investissements chinois massifs réalisés dans les pays d’Asie du Sud-Est (Vietnam et Laos notamment) ces dernières années ou à la volonté d’ancrer les devises asiatiques sur le yuan depuis la crise de 2008, cet accord démontre que le basculement du centre de gravité du monde vers l’Asie n’a rien d’un projet nouveau.
Régionalisation
Tout comme les avancées sur la mutualisation de la dette en Europe, un tel accord accentue par ailleurs le phénomène de « régionalisation » du monde. Celui-ci paraît peu à peu se substituer au multilatéralisme des dernières décennies. Ainsi, plus que de constituer une rupture, la crise Covid semble avoir été l’accélérateur fulgurant de tendances sous-jacentes. Tendances qui, à n’en pas douter, continueront à se renforcer… et que les investisseurs ont sans doute tout intérêt à refléter dans leurs portefeuilles !
Ces informations ne sont pas constitutives d’un conseil en investissement. L’investissement sur les marchés présente un risque de perte en capital.
[1] hors automobile et alimentation
[2] id.
2020 : Quelle année cette année-là !
Par Frédéric Rollin, senior investment advisor chez Pictet Asset Management
Le 11 novembre 2020
L’année 2020 continue de jouer avec nos nerfs et pourtant il faut déjà penser à 2021 ! Il est effectivement crucial d’inscrire les investissements sur un horizon long.
Sur longue période, les actions devraient une fois de plus se retrouver gagnantes. Les obligations européennes n’offrent quasiment plus de rendement. Les actions, quant à elles, distribuent de généreux dividendes et leur cours de bourse bénéficiera du retour de la croissance mondiale l’année prochaine. Confinement, déconfinement, re-confinement…les bourses continueront de donner des sueurs froides, mais le jeu en vaut la chandelle.
Pays émergents
2021 devrait voir l’arrivée d’un vaccin. Aujourd’hui, 11 vaccins sont en tests à grande échelle et les annonces de Pfizer sont très encourageantes. Les actions asiatiques devraient tirer leur épingle du jeu. Alors que l’Europe et l’Amérique patinent, la Chine signe une reprise économique en V et ses avancées technologiques impressionnent. Les situations sanitaire et économique sont certes préoccupantes en Inde, mais, à long terme, ce pays recèle un immense potentiel. Jeunesse, éducation technique dynamique et production par habitant très faible, le pays concentre les avantages. Le Japon, délaissé des investisseurs internationaux, devrait revenir en grâce. La pandémie y est bien contrôlée et le pays bénéficiera du dynamisme de ses voisins.
La bonne tenue de l’Asie portera le secteur des matières premières. Les pays d’Amérique Latine en bénéficieront. Le premier client du Brésil est la Chine. Ceci sera favorable aux obligations émergentes, largement composées d’émetteurs de la région. Par ailleurs, la politique ultra-accommodante de la Réserve fédérale facilite les financements en dollar, si importants pour les pays en voie de développement.
Et l’or ?
L’or reste aussi un investissement de choix pour le long terme. Les économies développées ne se relèveront que très progressivement, les taux resteront bas en 2021. Et, cerise sur le gâteau, lorsque l’inflation reviendra, il y a fort à parier que les banques centrales attendront avant de resserrer leur politique. Taux au plancher, hausse de l’inflation : le métal jaune appréciera.
Achat scindé d’un bien immobilier en Belgique : comment cela fonctionne-t-il et quelles sont les nouveautés ?
Par Sophie Slits, Estate planner à la Banque Nagelmackers
Le 9 octobre 2020
L’achat scindé d’un immeuble est encore, aujourd’hui, un instrument très souvent utilisé dans le cadre d’une planification successorale. L’administration fiscale a depuis quelques années cette technique dans son collimateur. Cet achat scindé est-il encore possible aujourd’hui ? Comment faire ?
Le principe
Nous partons de l’exemple classique où les parents veulent acheter une seconde résidence en y associant directement les enfants. Par un achat scindé, les parents achètent l’usufruit du bien et les enfants achètent la nue-propriété.
Cela permet aux parents de conserver la jouissance du bien durant leur vie ou d’en percevoir les éventuels revenus locatifs. Les parents ont ainsi un certain contrôle sur leur seconde résidence. Au moment du décès du (dernier) usufruitier, l’usufruit s’éteint et les enfants deviennent pleins propriétaires.
Fiscalement
En principe, l’extinction de l’usufruit ne devrait pas engendrer le paiement de droits de succession mais le législateur est intervenu et a établi une présomption fiscale de legs. Il est ainsi prévu qu’au décès de l’usufruitier, l’administration fiscale considère que le bien immeuble est présent en pleine propriété dans la succession de l’usufruitier. Les enfants courent donc le risque de devoir payer des droits de succession sur ce bien.
Cette présomption légale est réfragable, ainsi les enfants peuvent la renverser à l’aide de preuves contraires :
- Les enfants disposaient des avoirs suffisants sur leur compte pour acheter la nue-propriété. Ces avoirs peuvent provenir de leurs parents suite à une donation préalable. Nous reviendrons sur cet élément ci-dessous.
- Les enfants ont payé leur part de nue-propriété via leur compte.
- Une évaluation correcte du démembrement usufruit/nue-propriété.
Donation préalable
En général, les enfants ne disposent pas des avoirs propres suffisants pour acheter la nue-propriété du bien. Les parents les aident souvent par le biais d’une donation. Dans le passé, il y a eu de nombreuses discussions pour savoir si la donation préalable devait ou non avoir été enregistrée. Depuis le 12 juin 2018, le Conseil d’Etat a mis fin aux discussions. Ainsi, dans les trois régions, il n’est désormais plus nécessaire que la donation préalable ait été enregistrée.
Les parents ont ainsi la possibilité de faire la donation préalable sans la faire enregistrer et payer les droits de donation. Mais… si les parents décèdent dans les 3 ans après la donation non-enregistrée, les enfants devront payer des droits de succession sur les biens donnés.
Sur la base du projet de décret flamand, le délai “de la période suspecte” est prolongé à 4 ans pour toutes les donations passées après le 1/07/2021. Ce projet doit encore être approuvé par le parlement flamand (source: https://www.notaris.be/nieuws-pers/detail/duolegaat-levert-geen-fiscaal-voordeel-meer-op)
Nouvelle décision fédérale
Région de Bruxelles-Capitale et région wallonne
Pour les actes passés à partir du 1er août 2020, les résidents fiscaux bruxellois et wallons devront tenir compte de la nouvelle position de l’administration fiscale fédérale pour leur achat scindé.
Cette position indique que les enfants doivent être capables de prouver qu’ils disposaient des liquidités suffisantes pour financer l’achat de la totalité de la nue-propriété dès la signature du compromis si un acompte est dû à ce moment-là.
Région flamande
Les résidents fiscaux flamands ne doivent pas tenir compte cette position fiscale fédérale.
L’administration fiscale flamande (Vlabel) accepte toujours que la donation préalable par les parents se fasse avant la signature de l’acte authentique.
Point d’attention
La question des droits de succession ne survient qu’au moment du décès des parents. A ce moment, les enfants doivent renverser la présomption légale.
La charge de la preuve repose sur eux.
Il est important de bien conserver les extraits de compte ainsi que l’éventuel pacte adjoint pour que les enfants puissent démontrer qu’ils ont payé la nue-propriété avec leur propre compte !
En résumé
En région de Bruxelles-Capitale et en région wallonne, la donation préalable ne doit pas être enregistrée et elle doit intervenir avant la signature du compromis si un acompte est dû.
En région flamande, la donation préalable ne doit pas être enregistrée et elle doit intervenir avant la signature de l’acte authentique.
Vous désirez faire un nouvel achat scindé, sachez que le notaire est l’interlocuteur idéal pour éviter toute discussion ultérieure.
Quelle part d’actions faut-il détenir dans son patrimoine ?
Par Pictet AM
Le 21 septembre 2020
Le Cac 40 a perdu 36,9% entre le 19 février et le 19 mars, et beaucoup d’épargnants ont profité de cette forte baisse pour acheter des actions. Quelle que soit la situation des marchés, ils doivent rester prudents et calculer quelle somme ils peuvent consacrer à leurs investissements boursiers.
La crise économique liée au Covid-19 a provoqué une lourde chute des marchés au printemps, qui se sont dépréciés de 36,9% en un mois avant de se ressaisir : à la fin août, ils ont regagné 34% depuis leur point bas du 18 mars. Beaucoup d’investisseurs, y compris chez les particuliers, en ont profité pour reprendre des positions sur les actions. Jusqu’où peuvent-ils aller dans leurs investissements sans mettre en péril leur patrimoine ?
Il existe plusieurs règles pour définir la part d’actions idéale.
La plus classique consiste à dire que plus l’épargnant est jeune, plus il peut se permettre de prendre des risques avec son patrimoine financier, et plus il doit détenir d’actions. Selon cette règle, au fur et à mesure qu’il avance en âge, il doit désensibiliser son portefeuille au risque des marchés, et donc céder progressivement ses actions.
Cette règle doit être nuancée. Un jeune qui souhaite utiliser son épargne pour acheter son logement, par exemple, ne doit surtout pas investir ces sommes sur les marchés. Il pourrait, en cas de krach, voir fondre son apport personnel et être obligé de différer son projet de plusieurs années. A l’inverse, des seniors déjà propriétaires de leur résidence principale, qui disposent d’une confortable retraite, et possèdent d’importantes liquidités disponibles immédiatement, n’ont aucun intérêt à réduire leur portefeuille d’actions. Dans les périodes plus prospères que celle que nous traversons, les actions leur rapportent régulièrement des dividendes, tandis que les obligations, réputées plus sures, ont vu chuter leurs taux de rendement de façon très forte au cours des dernières années. Ainsi, cette recommandation d’alléger son portefeuille en vieillissant n’est pas pertinente pour tous.
L’argent investi en actions doit être considéré comme indisponible pendant dix ans
Une autre règle, en revanche, peut guider la plupart des épargnants : l’argent investi en actions doit être considéré comme indisponible pendant dix ans ou plus. La Bourse est un investissement de long terme. Si les secousses des marchés sont, en général, absorbées par le temps, elles imposent précisément que les investisseurs aient de longues années devant eux.
Cela suppose qu’avant d’investir en Bourse, un épargnant doit disposer de liquidités importantes pour faire face aux imprévus : la plupart des spécialistes recommandent de détenir entre trois et six mois de salaire sur des comptes immédiatement disponibles.
Le Livret A ou le Livret de développement durable et solidaire (LDDS), qui permettent de loger respectivement 22 950 euros et 12 000 euros, sont idéaux pour placer ces sommes. Même s’ils sont mal rémunérés, il faut veiller à les maintenir à flot.
Pour certains, les livrets ne suffisent pas, car l’épargne de précaution doit être nettement plus élevée : un an de revenus, au moins, pour ceux qui ont des rentrées d’argent aléatoires. C’est notamment le cas des indépendants et des chefs d’entreprise, qui ont souvent été touchés de plein fouet par la crise et guettent les signes de reprise avec angoisse. Ceux-là, s’ils le peuvent, doivent avoir des livrets pleins et compléter leur enveloppe de précaution avec le fonds en euros de leur contrat d’assurance vie ou un Plan d’épargne logement (PEL).
Pour investir, il ne faut pas rechercher le meilleur point d’entrée
Un épargnant qui n’est pas propriétaire mais envisage de l’être doit conserver la majeure partie de son épargne à l’abri des secousses des marchés. Pour ceux qui ont déjà acquis leur logement, plus le remboursement du crédit est avancé, plus il sera possible d’exposer une part importante de son épargne.
Toutes ces recommandations semblent décourageantes pour ceux qui souhaitent saisir les meilleures opportunités dans un marché où certains titres sont encore nettement sous-valorisés. Qu’ils ne renoncent pas pour autant : la façon la plus rationnelle de faire fructifier son argent en Bourse consiste, précisément, à ne jamais rechercher le point le plus bas pour entrer sur les marchés mais, au contraire, à placer de petites sommes dans le cadre d’investissements réguliers.
L’essentiel à retenir
- Beaucoup de particuliers s’intéressent au marché des actions mais ne savent pas quelle part de leur épargne investir.
- Raisonner par tranche d’âge n’est pas toujours la façon la plus pertinente pour trouver l’allocation idéale.
- Il est important, avant d’investir en Bourse, de conserver une épargne de précaution, dont le montant doit être deux fois plus important pour ceux qui ont des revenus aléatoires.
Fin de la donation devant un notaire néerlandais ?
Par Sophie Slits et Solange Saghbini– Estate Planner, Banque Nagelmackers
Le 26 août 2020
Si l’on désire procéder à une donation de biens mobiliers comme des avoirs bancaires (liquidités ou tout autre actif financier), il existe différentes possibilités. L’acte de donation peut être un acte sous seing privé (via un ‘pacte adjoint’) ou un acte notarié.
L’acte de donation devant un notaire belge engendrera automatiquement le paiement de droits de donation. Si l’on établit un acte sous seing privé de donation, on peut l’enregistrer ou ne pas l’enregistrer et donc, payer ou non des droits de donation.
Les droits de donation varient en fonction du lien de parenté entre le donateur et le donataire et du domicile du donateur :
Voyage avantageux aux Pays-Bas ?
Les donations avec réserve d’usufruit ou les donations de parts nominatives doivent se réaliser par le biais d’un acte authentique devant notaire. Pour éviter de payer les droits de donation, certains donateurs se rendent aux Pays-Bas pour procéder à cette donation.
Si cette technique est tout à fait licite, il existe un risque fiscal en cas de décès du donateur dans les 3 ans de la donation (en Flandre, ce délai passera vraisemblablement à 4 ans pour les donations réalisées à partir du 1er janvier 2021). En effet, lorsque les donations n’ont pas été enregistrées (et n’ont donc pas donné lieu au paiement des droits de donation), le législateur prévoit ‘fictivement’ que les biens donnés sont réintégrés dans le patrimoine du donateur si ce dernier décède dans les 3 ans (ou 4 ans en Flandre à partir du 1er janvier 2021) suivant la donation. Les biens sont alors soumis aux droits de succession comme si la donation n’avait pas eu lieu.
Malgré les faibles taux des droits de donation mobilière en Belgique, de nombreux Belges se rendent ainsi aux Pays-Bas ou en Suisse pour procéder à leur donation authentique.
Enregistrement obligatoire pour les donations mobilières étrangères
Pour lutter contre cette technique, le législateur a décidé de mettre fin à cette possibilité de passer des actes notariés étrangers pour des donations mobilières réalisées par un résident belge. Ces actes devront désormais obligatoirement être enregistrés.
Néanmoins, ce texte a encore uniquement été adopté en Commission des Finances et du Budget. Dans ce texte, la date du 01/12/2020 a été avancée comme date d’entrée en vigueur. Le texte de loi doit ainsi encore être approuvé en commission plénière par le Parlement. En outre, la proposition de loi a été soumise à l’avis du Conseil d’Etat. Dès lors, tant le contenu que l’entrée en vigueur de cette loi pourraient encore être sujets à modifications. La fin de cette possibilité (dite ‘kaasroute’) n’a cependant que peu, voire pas d’impact du tout, sur la donation d’entreprises familiales. En effet, la donation d’une entreprise familiale peut bénéficier, dans les trois régions du pays, d’un tarif de 0%, moyennant respect d’une série de conditions. Malgré tout, certains décident d’opérer cette donation aux Pays-Bas, mais dans ce cas, la période dite ‘suspecte’ (pour la perception de droits de succession) sera de 3 ans (Région Bruxelles-Capitale et Région wallonne) ou de 7 ans (Région flamande).
Ce que nous savons aujourd’hui :
- Seuls les actes authentiques sont visés.
- Il sera toujours possible de faire un acte de donation sous seing privé (une donation bancaire pure et simple ou une donation avec une charge financière par exemple) et de procéder ou non à son enregistrement. Le risque fiscal du délai de 3 ans reste dans ce cas d’application (en Flandre, ce délai passerait, comme précisé plus haut, à 4 ans).
- A compter du 1er décembre 2020, les donations réalisées devant un notaire étranger par un résident fiscal belge devront très probablement être enregistrées auprès de l’administration fiscale belge par les parties concernées et elles devront payer les droits de donation.
En résumé
Suite à la fermeture de cette voie ‘néerlandaise’ dite ‘kaasroute’, voici les différents types de donation mobilière:
- donation authentique devant notaire belge – paiement obligatoire des droits de donation ;
- donation authentique devant un notaire étranger – enregistrement obligatoire en Belgique et donc, paiement obligatoire des droits de donation ;
- donation sous seing privé (souvent suivie de l’établissement d’un pacte adjoint) :
-avec paiement des droits de donation (et donc plus de droits de succession à payer ultérieurement)
-sans paiement des droits de donation – risque durant 3 ans (ou 4 ans en région flamande à partir du 01/01/2021)
Dettes publiques : comment passer le mur ?
Par Olivier de Berranger, CIO, La Financière de l’Echiquier
Le 23 juilllet 2020
Le Passe-Muraille est une célèbre nouvelle de Marcel Aymé dans laquelle un homme découvre sa capacité à traverser les murs. Le moins que l’on puisse dire, c’est que nous tous, investisseurs ou contribuables, nous demandons comment nous passerons le mur de dettes qui se présente devant nous.
L’envolée de l’endettement public est aujourd’hui acquise. Il représentera en fin d’année 2020 un montant inédit qui renvoie les critères de Maastricht aux oubliettes puisque la dette de la zone Euro dépassera les 100% du PIB. Croissance économique forte, retour de l’inflation, voire défaut ou restructuration, sont, pour l’instant, des moyens de « rembourser » hors d’atteinte.
C’est donc la monétisation, c’est-à-dire l’achat par les Banques Centrales des obligations émises par les Etats qui a été privilégiée. Maintenant que la Banque Centrale Européenne (BCE) détient 20% du total de la dette française ou italienne et même plus de 30% de la dette allemande, certains envisagent même l’abandon total de ces créances par l’institution monétaire. Plus probable est un scénario de « perpétualisation ». Les Etats emprunteurs rembourseraient leurs dettes à la BCE par l’émission de nouvelles dettes que ladite BCE achète à nouveau. Cela se rapprocherait de la solution japonaise.
Autre mur, moins connu celui-là mais dont l’épaisseur croît aussi inexorablement : celui de l’endettement privé. La dette des entreprises françaises non financières se hissera au-delà de 75% du PIB en fin d’année, s’approchant des 2.000 milliards d’euros. Le succès du mécanisme de Prêts Garantis par l’Etat (PGE) à près de 500.000 entreprises fait gonfler un stock de dettes initial déjà conséquent.
Si ce phénomène se constate partout en Europe, il est d’autant plus marqué dans les pays où le déficit de fonds propres du secteur privé est chronique. La Banque de France indique que les fonds propres des sociétés non financières représentent 74% du PIB1, soit peu ou prou la moyenne européenne. Aux Etats-Unis, cela monte à près de 125% du PIB, donnant à corporate america une force de frappe bien supérieure. Moins de capital rend en effet le recours à l’emprunt nécessaire pour redémarrer, réinvestir ou absorber un choc économique de l’ampleur de la crise sanitaire actuelle.
La fin de la nouvelle de Marcel Aymé est peu réjouissante. Le Passe-Muraille, fonctionnaire au Ministère de l’Enregistrement et aspirant cambrioleur, perd son pouvoir et se retrouve figé dans un mur pour l’éternité, comme englué à perpétuité. Souhaitons que l’attrait récent des particuliers pour la Bourse2, les initiatives de Place3ou le plan de relance européen concourent à renforcer les fonds propres des entreprises et à relancer l’investissement. C’est le seul moyen de sauter les murs.
1 F. Villeroy de Galhau, intervention à l’Assemblée nationale, 22.01.2018
2 Entre fin février et début avril 2020, la France compte 150 000 nouveaux investisseurs d’après l’AMF
3 La Fédération Française de l’Assurance a bâti un programme d’investissement de 1,5 milliard d’euros
Investissement à impact : Un levier pour une société plus durable
Par Funds for Good
Le 29 juin 2020
L’investissement à impact social (impact investing) consiste à investir dans des sociétés rentables dont l’activité a pour but d’améliorer certains pans de la société. Ces entreprises peuvent proposer des solutions pour diminuer la pauvreté, mettre à l’emploi des personnes fragilisées, offrir une aide aux personnes handicapées. Elles peuvent aussi développer des techniques pour lutter contre le réchauffement climatique et favoriser la transition énergétique.
Cette notion a vu le jour en 2007 à l’initiative de la Fondation Rockefeller. L’impact investing permet de financer des contrats sociaux innovants portés par différents acteurs. Il s’agit essentiellement d’investissements dans des sociétés non cotées. Le rendement de ces investissements est double. D’une part, il y a un rendement financier et, d’autre part, un rendement social. Dans certains cas, un objectif de rendement social peut être défini. Si cet objectif est atteint, le rendement financier de l’investissement peut être accru.
Quelques exemples concrets
Un des premiers projets à impact date de 2010 et concerne la prison de Peterborough au Royaume-Uni. Le rendement de ce Social Impact bond était lié au nombre de prisonniers réinsérés dans la société à leur sortie de prison. Investir avec impact permet donc de donner à son épargne une dimension sociale. Il y a différentes façons d’investir dans ce domaine. On peut le faire par l’intermédiaire de fonds spécialisés. Cependant, ceux-ci sont généralement destinés aux institutionnels ou aux détenteurs de capitaux importants car les investissements se font dans de petites structures non cotées.
Par les green bonds (obligations vertes) on peut aussi avoir un impact ciblé sur l’environnement. Il est également possible d’investir dans des fonds qui ont un impact environnemental ou social avec des thématiques plus ciblées. Même en gestion discrétionnaire, on peut investir avec impact. Dans le secteur des investissements, certaines sociétés comme Funds for Good présente une initiative plus particulière. Dans ce cas, les fondateurs rétrocèdent une partie de leurs commissions de gestion à une fondation qui finance des projets sociaux en Belgique. D’autres projets sont aussi développés en Belgique comme la plateforme de crowdfunding Lita.co (aussi très active en France), Crédal, Incofin ou la Banque Triodos. Tous ces acteurs d’attachent à financer des projets à dimension sociétale grâce à des sommes récoltées auprès d’investisseurs.
Quelle mesure ?
Mais comment mesure-t-on l’impact social d’une entreprise, d’un projet ou d’un investissement ? Il y a un grand débat sur la mesure de l’impact social. En réalité, il n’existe pas encore de méthode acceptée de façon unanime. Il y a trop de composantes différentes à prendre en compte et à intégrer : sociale, environnementale, gouvernance,… Chaque dimension nécessite une mesure qui lui est particulière. Cependant, des techniques se développent. On parle aujourd’hui de SROI pour Social Return on Investment. Il s’agit d’une méthodologie qui permet de calculer combien d’euros d’impact social sont générés pour chaque euro investi. On peut utiliser cette méthode pour prédire l’impact d’un projet ou pour évaluer des projets déjà mis en œuvre. Cette méthodologie facilite aussi la discussion entre toutes les parties prenantes d’un projet à impact. Elle intègre les coûts et les rendements sociaux, environnementaux et économiques d’un projet. Il s’agit d’un outil assez complexe qui nécessite une approche rigoureuse. On peut aussi comparer le retour social entre plusieurs projets ou organisations. Cet outil devient alors une aide à la décision d’investissement.
Et demain ?
L’investissement à impact doit devenir un levier de première ligne pour favoriser une société plus durable. Nous devons tirer les enseignements de la crise du Covid-19. Il faut impérativement orienter davantage de flux financiers vers des projets à impact social. Il existe déjà des initiatives pour les promouvoir. La France a une longueur d’avance dans ce domaine. Par le biais de l’épargne salariale, le salarié peut investir dans des fonds 90/10 qui permettent d’investir 10% dans du « non-côté ». Dans ce cadre, certains acteurs ont alors développé des fonds solidaire dans lesquels ils utilisent les 10% pour soutenir l’économie sociale et solidaire. Il convient cependant d’être toujours attentifs à la qualité sociale et solidaire de ces fonds.
Mais, il reste encore du chemin à parcourir pour que les investisseurs particuliers puissent accéder à des produits d’investissement soutenant l’économie sociale. La Commission européenne tente de faire avancer les choses. Elle a publié en 2019 une étude sur les investissements à impact social. Cette étude a pour but de soutenir le développement de ce marché. Cependant, il faut à la fois que l’offre et la demande pour ces produits financiers à impact se renforcent. Une impulsion politique est également attendue pour soutenir et encourager ces investissements durables sur le long terme. L’investissement à impact attend donc un soutien de la part de toutes les parties prenantes de la société. Affaire à suivre donc …
Assurance-vie et déclaration fiscale : quelles modalités ?
Par Nicolas MILOS, Senior Wealth Planner chez OneLife compagnie d’assurance-vie luxembourgeoise
Le 17 juin 2020
Le mois de juin rime avec l’obligation, pour le contribuable belge, de s’atteler à la préparation et l’introduction de sa déclaration fiscale. Que faire si l’on est titulaire d’un contrat d’assurance-vie à l’étranger ?, Voici quelques informations à ce sujet.
- Contrat d’assurance-vie détenu par une personne physique
Conformément aux dispositions du Code d’Impôt sur le Revenu, tout contribuable belge personne physique doit mentionner l’existence d’un contrat d’assurance-vie étranger qu’il aura conclu. Cette déclaration d’existence du contrat d’assurance-vie fait partie intégrante du contexte général de l’échange automatique d’informations (CRS, Common Reporting Standard).
En effet, dans le cadre de cet échange d’informations, la compagnie d’assurance-vie, a l’obligation de faire parvenir aux autorités fiscales de son pays les informations concernant les titulaires de contrats d’assurance-vie. Ce sont ensuite les autorités étrangères (par exemple, luxembourgeoises) qui ont pris l’engagement de communiquer ces informations au pays de résidence du souscripteur au contrat (i.e. la Belgique). Cet échange automatique d’informations permettra ainsi aux autorités fiscales belges de vérifier si oui ou non le contribuable a rempli son obligation déclarative.
Qui doit déclarer le contrat en cas de la cession de droits du contrat d’assurance-vie dans le cadre d’une planification patrimoniale ?
Le mécanisme de la cession de tous les droits au contrat permettra au souscripteur de « donner » à un tiers déterminé les droits matérialisant le contrôle sur les actifs sous-jacents au contrat d’assurance-vie. Face à ce mécanisme, les autorités fédérales belges, dans une position datée du 28 juin 2019, requièrent que désormais, autant le preneur original du contrat (souscripteur) que le bénéficiaire de la cession des droits (cessionnaire), mentionnent l’existence du contrat d’assurance-vie dans leur déclaration fiscale à l’impôt des personnes physiques.
Qui dit « assurance-vie », dit « simplicité »
L’enveloppe assurantielle présente sans aucun doute, en matière de déclaration fiscale, un avantage indéniable en comparaison avec une détention en direct de comptes-titres.
En effet, seule l’existence du contrat d’assurance devra être mentionnée, alors que dans le cas d’une détention directe de compte-titres (portefeuille-titres bancaire), plusieurs étapes laborieuses nécessitant souvent l’intervention d’un professionnel seront inévitables, à savoir notamment :
- La détermination du montant de revenus à déclarer
- La déclaration des revenus à proprement parler
- Une éventuelle déclaration supplémentaire concernant la taxe sur les opérations de bourse.
A ces étapes s’ajouteront également, dans le cas d’intérêts ou de dividendes d’origine étrangère perçus par une personne physique résidente fiscale belge :
- La détermination des revenus d’origine étrangère.
- Une détermination de la Convention préventive de la double imposition applicable et son analyse.
- La demande d’exonération des revenus étrangers déjà taxés, ou du moins l’application du pourcentage réduit en vertu de la Convention applicable.
- Le suivi avec les administrations fiscales compétentes.
Finalement, il est sans doute pertinent de mentionner à ce stade que cette obligation déclarative de l’existence du contrat d’assurance-vie ne conduira, en rien, à l’application d’une quelconque imposition dans le chef du contribuable.
- Demandes de renseignements de la part du fisc belge ?
Nombreux sont les contribuables ayant reçu une demande de renseignements de la part des autorités fiscales mentionnant un défaut de déclaration. L’administration fiscale leur renseigne qu’elle pense qu’ils sont titulaires d’un compte bancaire à l’étranger, alors qu’ils sont effectivement titulaires d’un contrat d’assurance-vie qu’ils avaient correctement renseigné dans leur déclaration.
Il est important de noter que les documents standardisés relatifs à l’échange automatique d’informations ne font pas la distinction entre les comptes bancaires et les contrats d’assurance-vie (tout est compris sous la notion de « compte financier »). Ainsi la compagnie d’assurance, dans le cadre du CRS, ne peut pas faire mention de contrat d’assurance-vie spécifiquement.
Afin de résoudre ce malentendu, il conviendra de mentionner au fisc belge qu’il s’agit bien d’un contrat d’assurance-vie tel que mentionné dans la déclaration fiscale à l’IPP. L’administration fiscale ne fera pas obstacle à cette remarque, qui peut même être réalisée par email.
Un défaut de déclaration, par contre, pourra notamment conduire à une amende administrative allant d’EUR 50 à 1.250.
En résumé, ce qu’il faut retenir :
Pour le contrat d’assurance-vie (personne physique) :
- Le titulaire, et le cas échéant le cessionnaire également, déclare uniquement « l’existence » du contrat. Aucune autre information n’est requise.
- Les revenus issus des contrats d’assurance-vie branche 23 (sans aucune garantie de rendement) demeurent fiscalement non-imposables.
En cas de demande de la part du fisc mentionnant un « défaut de déclaration »:
- Afin de dissiper tout malentendu, il suffira de clarifier auprès du fisc belge qu’il s’agit bien d’un contrat d’assurance-vie tel que mentionné dans la déclaration fiscale à l’IPP (et non d’un compte bancaire). Cela peut se faire par l’envoi d’un simple email.
Assurance-vie et gestion de patrimoine : Quels avantages fiscaux ?
Par OneLife (compagnie d’assurance-vie luxembourgeoise)
Le 14 mai 2020
L’assurance-vie fait souvent partie intégrante de la stratégie de planification patrimoniale des particuliers. Elle peut être utilisée pour transmettre une somme forfaitaire aux membres d’une famille en cas de décès, mais également pour assurer le versement d’un capital ou d’un revenu régulier au moment de la retraite. Elle comporte également des avantages fiscaux notables par rapport à un portefeuille d’investissement classique. Lorsque le contrat arrive à maturité, le preneur d’assurance ou les bénéficiaires reçoivent une somme forfaitaire majorée de la croissance des actifs. S’il décède avant la maturité, les bénéficiaires reçoivent le montant accumulé ou le montant garanti, selon le type de contrat.
Revenus et plus-values
Les contrats d’assurance-vie sont destinés à des investisseurs avec un horizon de placement à moyen ou long terme. Ils bénéficient de régimes fiscaux de faveur dans la plupart des pays. Contrairement à un portefeuille d’investissement classique, dans lequel la vente et l’achat d’actifs engendrent une imposition au titre des plus-values réalisées les personnes qui investissent au travers de contrats d’assurance-vie peuvent gérer leurs investissements au sein du contrat sans subir d’imposition sur les ventes ou les arbitrages des actifs sous-jacents tant qu’il n’y a pas de rachat. Ce traitement fiscal favorable permet de capitaliser, au sein de leur portefeuille, sur une base brute sans que l’impôt n’entame les rendements.
De la même manière, en l’absence de rachat, les revenus (découlant de dividendes d’actions ou d’intérêts obligataires, par exemple) sont capitalisés et ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu, ce qui signifie là encore que les investisseurs bénéficient d’un report d’impôt. D’après une étude réalisée par le gestionnaire d’investissement britannique Schroders un investisseur qui aurait placé 1.000 dollars sur l’indice MSCI World le 1er janvier 1993 disposerait d’un capital d’un montant de 3.231 dollars au 7 mars 2018, soit un taux de croissance annuel de 5,9 %. Toutefois, s’il avait réinvesti l’intégralité des dividendes, le même investissement de 1.000 dollars aurait atteint 6.416 dollars, soit un taux de croissance de 8,3 % par an.
Transmission
Sur le plan civil, le bénéfice du contrat d’assurance est versé par la compagnie d’assurance au bénéficiaire défini dans le contrat au décès du preneur du contrat d’assurance (s’il en est bien la tête assurée). L’avantage est que le bénéfice de ce contrat revient au bénéficiaire et ce, même si la succession est bloquée. Sur le plan fiscal, le bénéfice versé au bénéficiaire du contrat au décès du preneur du contrat d’assurance est soumis à des droits de succession dans la succession du preneur.
Neutralité fiscale
Le traitement fiscal des produits du contrat, même s’il varie en fonction de la juridiction, est généralement plus avantageux que celui d’un portefeuille d’investissement classique.Les contrats d’assurance-vie luxembourgeois sont conçus pour être fiscalement neutres, c’est-à-dire adaptés au pays de résidence du preneur d’assurance. Pour les preneurs d’assurance non-résidents, le Luxembourg n’impose pas les primes ni les plus-values réalisées à la fin du contrat. Cet aspect peut être un facteur important à prendre en compte pour les expatriés considérant les différentes options de structuration de leur patrimoine. La double imposition internationale des revenus mobiliers est un exercice connu pour sa complexité. Cet aspect n’est cependant pas applicable lorsque l’un des pays concernés (par exemple, le Luxembourg) ne pratique pas d’imposition. Les contrats d’assurance-vie peuvent constituer un outil de choix pour la planification et la transmission patrimoniale. Ils peuvent être adaptés et répondre aux besoins de chacun tout en assurant la continuité des stratégies patrimoniales.
La gestion de patrimoine doit être innovante
Par Jurgen Vanhoenacker, Executive Director, Sales and Wealth Structuring Solutions, Lombard International Assurance
Le 27 avril 2020
L’innovation est, aujourd’hui, devenue un terme incontournable dans le secteur de la gestion de patrimoine. En réponse aux critiques pointant leur lenteur à s’adapter aux nouvelles technologies, qui pendant ce temps disruptaient d’autres secteurs, les professionnels du patrimoine se sont plongés dans l’innovation. Ils ont ainsi considérablement investi dans leur capacité à offrir les technologies les plus récentes et les plus en vue. Toutefois, dans leur détermination à conserver une longueur d’avance, beaucoup ont oublié la raison première d’investir dans l’innovation : mieux servir les clients dans un environnement en évolution rapide. Innover judicieusement implique une fine compréhension des facteurs d’évolution, mais aussi des défis et des opportunités qu’ils soulèvent pour les clients. Car cela influe également sur leurs attentes envers leurs conseillers.
Particuliers fortunés
Il n’y a jamais eu autant de Millennials, de femmes ou de ressortissants de pays émergents parmi les particuliers fortunés et ultra-fortunés qu’aujourd’hui. Et la tendance devrait se poursuivre. Au cours de cette année, les femmes devraient contrôler 72 000 milliards de dollars, soit environ 32 % de la richesse mondiale, contre 51 000 milliards de dollars en 2015. Les Millennials vont, quant à eux, hériter de 30 000 milliards de dollars au cours des 10 prochaines années. La Chine devrait compter un million de millionnaires de plus d’ici 2023.
Ces particuliers nouvellement fortunés ont des attentes, des ambitions et des objectifs d’investissement très différents des particuliers fortunés issus des générations précédentes. Par exemple, les Millennials ultra-fortunés sont davantage susceptibles de demander des services numériques.
Et pourtant, lors d’une enquête réalisée par MyPrivateBanking, 73 % des Millennials ultra-fortunés ont déclaré ne pas être convaincus par l’application numérique de leur gestionnaire de patrimoine. Preuve que le secteur est encore loin du niveau technologique attendu par les natifs de l’ère numérique en matière de communication.
Si les relations personnelles et la confiance continuent d’occuper une place importante pour les Millennials, ils attendent – et exigent même – une offre numérique fiable, qu’il s’agisse de consulter leur portefeuille sur une application ou de communiquer via un chat avec leur conseiller. Les professionnels du patrimoine doivent investir dans ce type d’outils technologiques afin de fournir le niveau de service attendu par ce segment de population.
Avantages de ce type d’innovation
La clientèle issue des marchés émergents est en plein essor et exigera également une expérience numérique qui lui apportera sérénité et commodité, en mettant constamment à sa disposition des conseillers, où qu’elle se trouve dans le monde. Toutefois, l’innovation technologique à elle seule ne suffit pas à garantir une réponse aux besoins des particuliers, dont les préoccupations se concentrent autant sur le caractère durable de leurs choix d’investissement que sur la protection et la préservation de leur patrimoine.
Les Millennials et les femmes ultra-fortunés sont connus pour attacher une importance particulière au caractère durable d’un investissement, mais aussi pour leur volonté d’investir dans un but précis. Selon l’Economist Intelligence Unit, 56 % des femmes ultra-fortunées au Royaume-Uni pensent que la capacité à générer des changements à travers des investissements à impact sociétal (impact investing) devient inhérente à la définition de la richesse patrimoniale, contre 38 % pour les hommes ultra-fortunés.
Afin de s’adapter aux exigences en constante évolution de ces segments de population en plein essor, les professionnels du patrimoine devront être en mesure d’offrir la gamme complète des options et opportunités d’investissement répondant aux critères ESG (environnement, social et gouvernance) et à la notion d’impact investing. À défaut, ils risquent de se désolidariser de la prochaine génération de particuliers fortunés au profit de concurrents ou d’autres canaux d’investissement.
Mobilité croissante à l’échelle internationale.
Le fameux Knight Frank Wealth Report nous apprend qu’en 2019, 26 % des particuliers ultra-fortunés prévoyaient d’émigrer cette année et que 36 % d’entre eux détenaient déjà un deuxième passeport. Il est désormais courant pour des particuliers fortunés de détenir des intérêts commerciaux ou financiers dans un pays, de vivre dans un autre et d’envoyer leurs enfants faire leurs études dans un troisième. Gérer le patrimoine de ces individus à travers plusieurs juridictions est très compliqué pour les professionnels du patrimoine, à la fois d’un point de vue fiscal et d’un point de vue réglementaire. Et ce n’est qu’un aspect des nombreux défis auxquels sont confrontés les clients mobiles à l’échelle mondiale.
Veiller à ce que les membres de leur famille, où qu’ils se trouvent dans le monde, bénéficient du nec plus ultra en matière d’assurance et de protection est également une composante essentielle de ce que les particuliers fortunés attendent de leurs conseillers. D’ailleurs, étant donné la constante incertitude politique et financière mondiale, ces derniers auront également besoin de l’expertise nécessaire pour signaler à leurs clients dont la mobilité n’a pas de frontière quelles sont les évolutions réglementaires probables et comment elles pourraient les affecter.
Afin de préserver une relation de confiance avec leurs clients et de leur proposer les solutions les plus efficaces, les professionnels du patrimoine doivent s’efforcer d’acquérir une expertise régionale à l’échelle mondiale. En ce sens, être innovant signifie développer les expertises régionales adéquates ainsi qu’acquérir les compétences linguistiques et culturelles requises. C’est en cela que réside l’innovation pour mieux servir les clients. Ces investissements sont indispensables à la bonne compréhension des facteurs qui incitent les particuliers fortunés à émigrer, afin de les orienter vers les solutions patrimoniales les plus appropriées.
L’innovation : un processus permanent.
Les investisseurs continueront à changer, tout comme leurs besoins et leurs aspirations. Alors que la génération Z a déjà commencé à entreprendre et construire son patrimoine, il faudra se poser les questions suivantes : Quelles vont être les priorités en matière d’investissement ? Quels services et quelle expérience de conseil la nouvelle vague de femmes ultra-fortunées va-t-elle attendre ? Comment les opportunités et les défis soulevés par la mondialisation et l’incertitude politique vont-ils influencer les investisseurs internationaux dans les années à venir ? Ce sont des questions fondamentales auxquelles les professionnels du patrimoine doivent répondre afin de s’adapter au mieux à la mosaïque en constante évolution que forment les nouveaux particuliers fortunés.
L’innovation en matière de technologie, d’expertise et de service à la clientèle est essentielle pour que les professionnels du patrimoine restent compétitifs. Mais ceux d’entre eux qui cherchent à « innover pour innover » pourraient s’égarer bien loin des solutions les plus adaptées à leurs clients. Il faut s’attacher à mieux comprendre ces nouveaux particuliers ultra-fortunés, une génération plus diversifiée, plus jeune et plus mobile à l’échelle mondiale, et investir dans les nouveaux outils nécessaires pour les accompagner dans la définition et la construction du patrimoine qu’ils transmettront.
10 facteurs qui pourraient transformer les économies et les marchés
Par Pauline Grange, Portfolio Manager chez Columbia Threadneedle
Le 20 avril 2020
La crise du Covid-19 éprouve les citoyens, les familles, les entreprises, les gouvernements et les marchés de capitaux du monde entier. Cette épreuve pourrait transformer en profondeur le comportement des consommateurs et des entreprises, mais aussi le fonctionnement des marchés financiers. Dans cette perspective, voici les dix tendances qui résulteront de la pandémie de Covid-19 et qui changeront à jamais les économies et les marchés.
Le pic de la mondialisation
Qu’il s’agisse de consommation ou de chaînes d’approvisionnement, les pays commenceront à accorder davantage d’attention à la provenance des produits, ainsi qu’à leur dépendance excessive à l’égard de certaines économies. Cela va clairement inciter les entreprises à diversifier les chaînes d’approvisionnement. Les petites structures locales pourraient également bénéficier d’une vague de soutien dans la mesure où les consommateurs se détourneront des marques « historiques » qu’ils avaient l’habitude d’acheter.
Accélération de la transition de l’argent liquide vers les cartes
Un plus grand nombre de personnes étant contraintes d’abandonner les magasins traditionnels au profit du commerce en ligne, et alors que les magasins « en dur » de nombreuses régions n’acceptent plus les paiements en espèces pour des raisons d’hygiène, la transition des paiements en espèces vers les paiements par carte pourrait s’accélérer.
Santé et hygiène
Les règles et réglementations vont se durcir, en particulier en Chine où les pressions en faveur d’une formalisation de l’industrie agroalimentaire du pays vont s’intensifier, compte tenu de l’origine de l’épidémie.
Avancées de la communauté médicale
La population sera surprise par les progrès rapides, obtenus grâce à la communauté médicale et de la génétique en termes d’enrayement de la maladie et de conclusions des essais cliniques. Le génome de la maladie a été cartographié à la mi-janvier. Le mécanisme de liaison aux protéines a été identifié il y a deux semaines. Le virus a été reproduit dans un laboratoire canadien il y a une semaine. Moderna, une entreprise américaine de biotechnologie, teste un vaccin depuis quinze jours. C’est prodigieusement rapide par rapport à « l’ancien temps », où les tests auraient pris des années et non des semaines. Il est possible que les populations sous-estiment l’évolution de la science et ses conséquences. En cas d’espoir prochain d’un enrayement de la maladie plus tôt que prévu, une bonne surprise est à prévoir.
Une meilleure acceptation du travail intelligent
Les entreprises étant obligées de permettre le travail à domicile, le télétravail pourrait devenir une pratique plus acceptable. Une telle transition aura des répercussions sur les investissements dans le cloud, avec un abandon accéléré des infrastructures informatiques existantes.
Les géants technologiques, désormais considérés comme un service public, sont moins attaqués
Cette période de confinement met clairement en lumière le soutien indispensable qu’apportent les plateformes technologiques, y compris les médias sociaux. Si des plateformes en ligne telles que Google Search, YouTube et Facebook/Instagram pourraient voir leurs revenus publicitaires plonger à court terme, elles bénéficieront à plus long terme d’une croissance plus robuste de leurs utilisateurs et d’un engagement accru. Les personnes qui avaient quitté les plateformes par souci de protection de la vie privée pourraient bien revenir, tandis que les attaques des gouvernements pourraient perdre en virulence compte tenu du rôle clé que les sociétés technologiques ont joué dans cette crise en soutenant les communautés.
Croissance de la consommation en ligne
Qu’il s’agisse de produits d’alimentation, d’éducation ou de commerce de détail au sens plus large, la consommation en ligne a augmenté, avec une base élargie d’utilisateurs désormais plus à l’aise avec ce mode de consommation. Il est possible que ce qui a débuté par nécessité pour beaucoup puisse devenir la norme. Une nouvelle accélération des investissements en ligne de la part des détaillants et des services traditionnels sera également observée.
Accélération des principales tendances technologiques
Les usines d’intelligence artificielle (IA) ont déjà connu une croissance rapide. Ces dernières utilisent des algorithmes basés sur les données pour la prise de décision automatisée plutôt que des processus à forte intensité de main-d’œuvre reposant sur la communication en face à face. Elles sont bien adaptées à un monde où les interactions humaines sont moins nombreuses, ce qui, comme indiqué plus haut, pourrait accélérer encore les investissements dans les « clouds » publics.
L’essor des priorités « vertes »
Alors que les pays constatent les avantages d’un air et de voies d’eau plus propres (à Venise, l’eau des canaux est bien plus claire et des bancs de poissons sont maintenant visibles), pourraient-ils avoir envie de conserver ces bienfaits ? Sous l’impulsion des mesures de relance budgétaire, nous pourrions assister à un renforcement de l’agenda vert et à une augmentation des investissements dans les énergies renouvelables, les infrastructures relatives aux véhicules électriques, etc..
Le développement du capitalisme moral
Les entreprises connaissent-elles une « crise » existentielle, qui les conduit à se concentrer davantage sur leur finalité, à savoir leur impact sur l’environnement et leurs clients, la communauté, les employés et la chaîne d’approvisionnement ? Dans un contexte d’inégalité sociale croissante dans les marchés occidentaux, le recours par les entreprises à des opérations de rachat pour gonfler le cours des actions au détriment des investissements et des bilans fait déjà l’objet d’une attention croissante. Mais une fois la crise du Covid-19 dépassée, est-il possible que cette attention se renforce encore ? S’agissant des consommateurs, il est possible que l’ordre des valeurs auxquelles nous sommes attachés soit modifié en profondeur, puisque nous avons été privés dans les faits de notre liberté. Soudain, les possessions perdent de leur intérêt tandis que les expériences, la santé/forme physique et l’engagement social « remontent » dans les priorités des consommateurs.
Comment envisager ses placements : en privé ou via sa société?
Par la Banque Nagelmackers
Le 10 mars 2020
Voici trois vidéos qui expliquent les avantages et inconvénients d’investir en privé ou via une société.
Dans la première vidéo, les différences de principe entre investir en personne physique et investir via sa société sont abordées. Il y est surtout mis l’accent sur le coût fiscal de l’une ou l’autre voie choisie.
Dans les deux vidéos suivantes, la fiscalité des placements en société ainsi que le traitement fiscal des SICAV RDT, produit-phare pour les personne morales, sont expliqués.
L’Intelligence Artificielle est-elle une thématique d’investissement porteuse ?
Par Rolando Grandi, La Financière de l’Echiquier
Le 14 février 2020
L’économie a toujours été portée par l’innovation. Les trois premières révolutions industrielles – la machine à vapeur, le pétrole/l’électricité, les NTIC – ont permis l’industrialisation de l’économie puis son virage vers les services. Aujourd’hui, l’or noir, c’est le Big Data. C’est grâce à une constellation de technologies que l’intelligence artificielle (IA) a pu émerger, en premier lieu grâce au cloud et à ses capacités de calcul quasi-infinies. De la plus grande à la plus récente, les entreprises sont aujourd’hui en mesure d’exploiter les données pour créer de la valeur ajoutée. La propagation de l’IA s’est accélérée sous l’effet du développement des réseaux neuronaux. Ceux-ci la dotent de capacités d’auto-apprentissage. Et les applications d’IA qui prolifèrent aujourd’hui mettent en mouvement cette thématique porteuse. On y trouve les voitures autonomes les algorithmes prédictifs en passant par l’e-santé ou l’agriculture intelligente. L’ère de l’IA ne fait que commencer. Les gisements de croissance y sont prodigieux.
L’IA et les entreprises
Les pionniers et géants de l’IA se trouvent bien sûr aux Etats-Unis et en Chine. Cependant, dans leur sillage, c’est tout un écosystème innovant qui se crée et d’autres pays s’illustrent dans les applications d’IA notamment. L’IA sera incontournable pour les entreprises du monde entier. Et, dans le contexte actuel de ralentissement de la croissance mondiale et d’inflation atone, les sociétés qui tirent leur épingle du jeu sont celles qui maintiennent leur dynamique d’innovation et de leadership. La société chinoise PING AN HEALTHCARE en est un très bon exemple. Son application Good Doctor permet d’avoir accès jour et nuit à un médecin via un smartphone. Ce médecin réalise plus de 656 000 consultations quotidiennes, prouesse possible puisqu’il s’agit d’une IA ! Un médecin humain valide ensuite bien sûr le diagnostic et l’ordonnance. Ce recours à l’IA permet de fluidifier l’accès à la médecine. Depuis le début de l’épidémie du coronavirus, le titre s’est d’ailleurs fortement apprécié, reflet de l’anticipation du succès de cette application par le marché.
Quelles sont les perspectives pour l’IA sur le terrain de l’investissement ?
Les perspectives restent porteuses sous l’effet de la prolifération de l’IA au sein de l’économie mondiale. L’IA est une technologie universelle. Elle n’a pas de frontières, comme en témoigne par exemple l’accélération du développement d’applications d’IA dans les pays émergents, en Asie Pacifique et en Amérique Latine notamment. La transformation digitale de l’économie, dont l’IA reste la clé de voûte, continue de soutenir la croissance des entreprises.
L’apport de l’IA à l’économie planétaire est estimé par PwC à 15 700 milliards de dollars d’ici 2030. Nous sommes à l’aube d’une profonde révolution !
L’eau : quelles opportunités d’investissement ?
par Cédric Lecamp, Senior Investment Manager, Pictet Asset Management.
Le 15 janvier 2020
L’eau est une ressource naturelle essentielle dont la demande augmente rapidement.
L’eau est une ressource essentielle à la vie – nul ne peut s’en passer. Or, bien que renouvelable, l’eau n’est pas une ressource inépuisable. Les grands défis mondiaux comme l’urbanisation, l’évolution démographique et le changement climatique viennent en outre accroître les pressions pesant sur les ressources en eau existantes. La nécessité de sécuriser l’offre d’eau actuelle et d’accroître sa capacité par le biais de technologies et de services innovants constituera par conséquent un thème majeur – soutenu par des milliards de dollars d’investissements – ces prochaines années. Les sociétés capables de proposer des solutions répondant à la problématique mondiale de l’eau devraient donc constituer des opportunités intéressantes pour les investisseurs au cours des décennies à venir.
La stratégie thématique de l’eau investit dans tous les segments du secteur, avec un intérêt particulier sur l’offre d’eau, les technologies liées à l’eau et les services environnementaux. Compte tenu du rôle croissant des entreprises privées dans la gestion du cycle de l’eau, les opportunités d’investissement à long terme sont appelées à se multiplier.
- Les infrastructures liées à l’eau
En matière d’offre d’eau, le secteur privé se compose d’entreprises desservant la population via l’offre et le stockage d’eau potable. D’ici à 2050, jusqu’à 4 milliards d’êtres humains pourraient vivre dans des régions soumises à un fort stress hydrique, contre 1,2 milliard aujourd’hui1. La croissance économique accentue la pénurie d’eau, en dopant la richesse individuelle et en entraînant une consommation accrue de produits tels que les protéines animales, dont la production exige davantage d’eau. Ainsi, produire un kilogramme de bœuf requiert 15 000 litres d’eau, soit six fois plus que le volume nécessaire pour produire une quantité équivalente de riz2.
Confrontés à des budgets serrés et à des infrastructures vieillissantes, les Etats sont de moins en moins aptes à assurer l’offre d’eau, malgré les risques encourus. Les sociétés privées seront par conséquent appelées à jouer un rôle toujours plus important dans le cycle humain de l’eau, particulièrement Amérique du Nord et en Europe centrale et orientale, où elles devraient accroître leur part de marché de plus de 10% entre 2013 et 20253. Sachant que d’autres régions, comme l’Amérique du Sud et l’Asie, nécessiteront jusqu’à 14.000 milliards de dollars d’investissements d’ici à 2030 pour assurer leur offre d’eau, d’innombrables opportunités de profits se présenteront aux sociétés proposant des solutions innovantes, notamment en matière de recyclage et de désalinisation de l’eau4.
- Les technologies liées à l’eau
- Les fournisseurs de solutions de traitement des eaux
Le secteur des technologies de l’eau se compose d’entreprises développant des outils et des systèmes permettant une efficience accrue en matière d’utilisation d’eau. Par exemple, jusqu’à 75% de l’eau de source disponible sur la planète est impropre à la consommation car contaminée ou polluée5. Si les Etats peuvent mettre en œuvre des mesures visant à protéger les sources d’eau contre les polluants, ce sont des sociétés privées actives dans le développement de systèmes de filtrage innovants, tels que la filtration par membrane ou le filtrage par ultraviolets, qui offrent les réponses à ces problèmes.
- La prévention de fuites
Dans les pays émergents, plus de 45 millions de mètres cubes d’eau6 sont perdus chaque jour à cause des fuites. A l’échelle mondiale, le coût de restauration des infrastructures publiques existantes entre 2005 et 2030 devrait excéder les 20.000 milliards de dollars4. Les sociétés proposant des solutions novatrices en matière de technologies de l’eau, telles qu’une prochaine génération de détecteurs et des équipements de contrôle capables d’accroître notre efficience en termes d’utilisation d’eau et de prévenir le gaspillage dû à des fuites, représentent de très belles opportunités d’investissement.
- L’irrigation
Sachant que 70% de l’eau douce disponible sur la planète est utilisée à des fins de production agricole7, les Etats s’efforcent de limiter les gaspillages dans ce secteur, notamment en sanctionnant l’arrosage des cultures en journée lors des périodes de sécheresse par des amendes (comme c’est le cas en Californie). Cette focalisation sur le gaspillage crée des opportunités pour les sociétés travaillant à l’optimisation des technologies hydriques à usage agricole, telles que les systèmes d’irrigation goutte à goutte, permettant une humidification par intermittence des racines des plantes uniquement, avec à la clé des niveaux d’humidité supérieurs pour une utilisation d’eau réduite.
- La gestion des déchets
Alors qu’en Chine, près de 60% des eaux souterraines et un tiers des eaux de surface ont été répertoriées comme « impropres au contact humain »8, la nécessité de répondre aux problèmes découlant d’une mauvaise gestion des déchets fait l’objet d’une prise de conscience croissante, notamment dans les pays émergents.
Le gouvernement chinois a démontré sa détermination à assainir la situation par le biais de son programme 2015 « Water Ten Plan », imposant aux industries polluantes des objectifs très rigoureux en matière de protection écologique et environnementale9. Le traitement des eaux usées industrielles en Chine atteignant un taux de pénétration d’environ 90%, l’attention est désormais appelée à se tourner vers l’augmentation des déchets domestiques10. Les sociétés actives dans le secteur des services environnementaux et proposant des solutions de collecte devraient donc en bénéficier.
[1] OCDE
[2] Réseau Empreinte de l’eau (Water Footprint Network)
[3] Envisager
[4] OCDE Morgan Stanley Pictet Asset Management
[5] UNESCO
[6] Banque mondiale
[7] Programme des Nations Unies pour l’environnement Pictet Asset Management
[8] Ministère chinois de la terre et des ressources
[9] Initiative China Water Risk Conseil d’Etat chinois
[10] Nomura