Cette page est animée par différents acteurs économiques et financiers sur des thématiques d’actualité.
A l’aube d’un tournant : les obligations d’entreprises des pays émergents
Par Cornel Bruhin et Andranik Safaryan, gérants MainFirst dans l’équipe Emerging Markets.
Le 16 août 2023
La hausse des prix des matières premières est une bénédiction pour les marchés émergents. Les obligations d’entreprises sous-évaluées affichent désormais des rendements à deux chiffres. Les investisseurs de cette classe d’actifs sont bien positionnés pour profiter de la reprise qui se dessine.
En tant que grands producteurs, les économies des pays émergents bénéficieront de la hausse des prix des matières premières. La faiblesse du dollar américain et la fin annoncée du cycle de hausse des taux d’intérêt de la banque centrale américaine sont autant de signes de cette évolution.
Quels pays en profitent ?
Cela vaut non seulement pour le Chili, premier producteur mondial de cuivre avec une part de marché de 35 %, et pour l’Indonésie, qui contrôle plus d’un tiers de la production mondiale de nickel, mais aussi pour les producteurs de pétrole.
La hausse des prix des matières premières se traduit également par une augmentation des bénéfices des entreprises et des salaires des travailleurs, ainsi que par une hausse des recettes fiscales. Au fil du temps, cela se répercute sur l’ensemble de l’économie sous la forme d’une progression de la consommation et de l’investissement. Par conséquent, les obligations d’entreprises des marchés émergents devraient se redresser dans les mois à venir, après les pertes historiquement élevées de l’année dernière.
Consommation de pétrole : hausse prévue pour les décennies à venir
La transition énergétique, les voitures électriques et la réindustrialisation des pays développés (relocalisation de la production) sont les moteurs de la demande en matières premières. Ces derniers consomment beaucoup plus de matières premières qu’auparavant. À côté de cela, les investissements dans la production future restent à des niveaux inférieurs par rapport à ceux observés dix ans plus tôt. À long terme, cette situation entraînera inévitablement une hausse des prix.
La démographie représente un autre facteur d’augmentation de la consommation de combustibles fossiles. Parmi les sept milliards de personnes vivant aujourd’hui dans les marchés émergents, beaucoup ne possèdent pas de réfrigérateur et n’ont pas accès à l’électricité. Le potentiel de rattrapage est colossal.
En raison de la prospérité croissante, la consommation de pétrole dans ces pays continuera d’augmenter pendant les décennies à venir. Il est important de rappeler qu’un Américain consomme 18 barils (18 fois 159 litres soit 2.862 litres) de pétrole par an et par personne. Un Indien s’en sort avec un seul baril, et la consommation en Afrique est encore plus faible.
Les plateformes de forage et infrastructures télécoms
De nombreuses entreprises des marchés émergents méritent une attention particulière. Par exemple, Shelfdrilling, à Dubaï, est une spin-off de Trans Ocean, anciennement cotée à la Bourse suisse (Six Swiss Exchange). Shelfdrilling loue une denrée rare : des plates-formes de forage pour l’extraction de pétrole en mer. Les prix de location de ces installations sont passés de 40.000 à plus de 80.000 dollars à la journée au cours des dernières années. Ils sont susceptibles d’augmenter encore, sachant que les plus grandes réserves de pétrole présumées se trouvent dans les profondeurs des océans.
Le producteur nigérian de pétrole et de gaz Seplat bénéficie également de l’augmentation de la demande. L’entreprise est lourdement endettée. L’acquisition des activités nigérianes d’Exxon Mobile triplera ses revenus. En Amérique du Sud, la compagnie pétrolière argentine Ypf est en plein essor. Grâce au gazoduc récemment ouvert vers le Chili, l’Argentine est en passe de devenir exportatrice de combustibles fossiles.
Niveau d’endettement
Le niveau d’endettement des entreprises des pays émergents est inférieur à celui des pays développés et se situe à un niveau historiquement bas.
Une entreprise intéressante en dehors du secteur des matières premières est IHS-Towers, fondée en 2022 au Nigeria. Celle-ci loue des infrastructures de télécommunication en Afrique, au Moyen-Orient et en Amérique du Sud. La démographie joue en sa faveur : une population plus nombreuse, des volumes de données plus importants et une demande plus forte. En termes de nombre de pylônes de télécommunication, IHS-Towers est la quatrième plus grande entreprise de ce type au monde.
En tant qu’investisseur, il est également intéressant de jeter un œil sur l’entreprise péruvienne Auna. Là aussi, les signes de croissance sont au rendez-vous : l’exploitant de cliniques privées s’étend au Mexique et à la Colombie.
Obligations d’entreprises : des signes de redressement
De nombreux pays émergents vont commencer à baisser leurs taux d’intérêt avant la banque centrale américaine, accélérant ainsi la croissance dans ces pays. Le taux directeur américain a bientôt atteint son point culminant et le dollar américain est en baisse depuis septembre 2022. La faiblesse du dollar incitera les investisseurs à rechercher des actifs sous-évalués offrant un potentiel de rattrapage. Le tournant pour les obligations des marchés émergents se rapproche donc de plus en plus.
Les investisseurs peuvent d’ores et déjà profiter de la reprise qui se dessine sur les marchés émergents en investissant dans une classe d’actifs fortement sous-évaluée, au potentiel de baisse limité et aux fondamentaux solides.
Investir dans un avenir durable : des entreprises s’attaquent au changement climatique
Par Lee Qian, Investment Manager chez Baillie Gifford
Le 6 juillet 2023
Le rapport de cause à effet entre les émissions de gaz à effet de serre et le changement climatique est clair. Si l’on examine la source des émissions de gaz à effet de serre, la grande majorité provient de la consommation d’énergie (73 %). Si l’on y ajoute les émissions provenant de l’agriculture, les émissions atteignent plus de 90 %. C’est pourquoi, il est essentiel de décarboniser notre système énergétique pour lutter contre le changement climatique.
Quatre mesures à prendre
Quatre mesures devraient être prises:
- Électrifier autant que possible la consommation d’énergie : transport, chauffage et autres usages.
- Produire de l’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables. Cela signifie accélérer la mise en place de sources d’énergie solaire, éolienne et autres sources d’énergie renouvelables et investir dans le réseau électrique pour faire face à une production d’électricité plus intermittente et à une demande d’électricité plus élevée.
- Décarboniser les secteurs d’activité difficiles à rendre durables en améliorant l’efficacité, en réduisant les déchets et en développant et adoptant de nouvelles technologies.
- Développer des projets d’élimination du carbone à haute valeur ajoutée afin d’éliminer l’excès de CO2.
Électrification
La faible progression de l’électrification jusqu’à présent est une nouvelle preuve que l’électricité a deux limites majeures. Elle n’est pas bien adaptée aux applications qui nécessitent de l’énergie sous des formes à haute densité, et elle est moins économique pour les processus qui requièrent des températures élevées. Heureusement, les progrès technologiques permettent de remédier à ces deux limites, ce qui accélérera l’électrification au cours des prochaines décennies.
Des batteries moins chères et de meilleure qualité aident à résoudre la première contrainte et permettent l’électrification des transports. Tesla est un pionnier des véhicules électriques. Depuis le lancement de la première Tesla Roadster, Tesla a progressivement réduit le coût des véhicules électriques grâce à l’innovation et aux économies d’échelle. Le rythme de réduction des coûts est à la base de l’avantage concurrentiel de Tesla et est essentiel pour rendre les véhicules électriques plus abordables. Tesla a livré 1,3 million de véhicules électriques en 2022 et a pour objectif à long terme de produire 20 millions de véhicules électriques par an.
Le transport routier représente 12 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. L’électrification complète du transport routier et la garantie que l’électricité provient de sources renouvelables permettraient d’éviter l’équivalent de six milliards de tonnes de dioxyde de carbone (CO2e) par an, soit l’équivalent des émissions annuelles de gaz à effet de serre de l’Amérique du Nord.
L’électrification est également en train de décoller littéralement. L’entreprise américaine Joby Aviation est à la tête du développement et de la commercialisation d’une nouvelle forme de transport, le décollage et l’atterrissage vertical électrique (eVTOL). L’avion de Joby a une autonomie de 240 kilomètres et une vitesse maximale de 320 km/h. L’entreprise s’efforce d’obtenir la certification de l’Administration fédérale de l’aviation (FAA) pour l’utilisation commerciale de l’avion avec des passagers et s’est associée à Delta, ANA et d’autres pour réaliser ce concept.
Une série d’innovations est nécessaire pour remédier à la deuxième limitation de l’électricité. Par exemple, l’entreprise australienne Calix développe un nouveau type de four qui peut chauffer des minéraux à 950°C en utilisant l’électricité. Cette technologie pourrait contribuer à décarboniser des secteurs tels que la production de chaux et de ciment, qui dépendent jusqu’à présent des combustibles fossiles pour le chauffage.
Production d’énergie renouvelable et le réseau électrique
Depuis 2010, la part de l’énergie solaire et éolienne dans la production mondiale d’électricité a été multipliée par cinq, passant de 2 % à 10 %. La société danoise Ørsted joue un rôle important dans l’expansion de la production d’énergie renouvelable. L’entreprise est le leader mondial de l’énergie éolienne en mer, après avoir été pionnière dans ce secteur au début du 21e siècle. Elle est également l’un des principaux promoteurs de projets éoliens et solaires terrestres et investit dans de nouvelles technologies telles que l’hydrogène vert.
À mesure que les énergies solaire et éolienne entrent dans le mix de production, nous devons investir davantage dans nos réseaux électriques pour résoudre le problème de la fluctuation de la production d’électricité. Le stockage de l’énergie jouera un rôle important. Le stockage de l’énergie permet d’emmagasiner l’électricité excédentaire et de maintenir la stabilité du réseau grâce à la gestion de la fréquence et à l’inertie synthétique. Tesla et Northvolt sont deux entreprises actives dans ce domaine. Tesla est l’un des principaux fournisseurs de systèmes et de logiciels de stockage d’énergie stationnaire, avec un déploiement annuel de 6,5 gigawattheures (GWh) en 2022. Northvolt développe la capacité de fabrication de batteries en Europe, en mettant l’accent sur la durabilité grâce à l’utilisation d’énergies renouvelables et au recyclage.
Secteurs où il est difficile de réduire les émissions
L’agriculture représente 20 à 25 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Rendre la production alimentaire durable est un défi complexe qui nécessite des solutions multiples. Deere y contribue avec ses applications d’agriculture de précision. L’agriculture de précision utilise les technologies numériques pour aider les agriculteurs à obtenir de meilleurs rendements tout en réduisant l’utilisation de pesticides et d’engrais. Par exemple, la technologie See & Spray de Deere utilise la vision par ordinateur et l’apprentissage automatique pour distinguer les mauvaises herbes des cultures, et cela en temps réel. Les pulvérisateurs ne ciblent alors que les mauvaises herbes, ce qui permet de réduire de plus de deux tiers l’utilisation d’herbicides.
Le secteur de la construction est une industrie où la durabilité peine à décoller. Les bâtiments représentent 38 % des émissions de gaz à effet de serre liées à l’énergie et aux processus dans le monde. Le secteur de la construction est l’un des plus lents en termes de numérisation. Par conséquent, une grande partie des projets sont terminés en retard et 10 % des matériaux utilisés dans la construction sont perdus. Autodesk est en train de changer cette situation. L’entreprise est le principal fournisseur de logiciels pour les secteurs de l’architecture, de l’ingénierie et de la construction. Ces dernières années, elle a lancé une gamme de produits qui contribuent à améliorer l’efficacité du secteur de la construction.
Élimination du carbone
Pour maximiser nos chances de limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré Celsius, le monde doit réduire les émissions à un rythme sans précédent et éliminer les émissions historiques de CO2 de l’atmosphère. Si les solutions naturelles telles que la gestion des sols et le reboisement sont appelées à jouer un rôle, on s’accorde de plus en plus à penser que les solutions techniques viendront compléter les solutions naturelles en garantissant une élimination du carbone à long terme et contrôlable.
Climeworks est un leader dans le domaine de la capture directe de l’air (CDA). En 2021, l’entreprise a lancé Orca, la plus grande installation opérationnelle de CDA et de stockage au monde, en Islande. Elle a travaillé avec des entreprises telles que Microsoft, BCG, UBS et Swiss Re. Climeworks construit actuellement sa prochaine installation, Mammouth, qui, si elle est opérationnelle, aura une capacité nominale annuelle de 36.000 tonnes. Climeworks ne s’arrêtera pas là. L’entreprise a pour ambition d’éliminer 1 million de tonnes de CO2 de l’atmosphère d’ici à 2030 et d’atteindre une capacité d’une gigatonne d’ici à 2050.
Bouleversements sur le marché du recyclage plastique
Par Michael Rae, gérant du fonds M&G (Lux) Climate Solutions Fund
Le 6 juin 2023
Alors que de nombreuses entreprises tardent à atteindre leurs objectifs pour réduire l’utilisation de nouveaux plastiques et accroître le volume de plastique recyclé dans leurs emballages, les gouvernements fixent des objectifs plus ambitieux pour accélérer sa démocratisation, tandis que le marché de l’emballage plastique continue de grossir. La pyrolyse, une forme de recyclage chimique, pourrait offrir une solution innovante pour traiter les déchets plastiques mixtes plus difficiles à traiter.
Augmenter le plastique recyclé
Dans le cadre des objectifs 2025, auxquels se sont engagées six des dix plus grandes entreprises mondiales de produits de biens de consommation (FMCG), le plastique vierge utilisé dans les emballages doit diminuer de 5 % par an d’ici à 2025. Pourtant, les chiffres sont restés globalement stables depuis 2018, selon le Global Commitment Report, publié par la Fondation Ellen MacArthur en novembre 2022.
Si l’on constate des progrès dans l’augmentation des matériaux recyclés utilisés dans les emballages, cette part ne s’élève qu’à 11 % en moyenne. Pour respecter leurs engagements à la mi-décennie qui se situent dans une fourchette de 25 à 50 %, les entreprises de FMGC doivent doubler leur taux de progression.
Les statistiques plus larges qui illustrent notre dépendance croissante à l’égard du plastique sont impressionnantes. Environ 40 % du plastique jamais synthétisé dans notre histoire a été fabriqué au cours des dix dernières années. Près de la moitié de ce plastique est utilisé pour l’emballage de produits de grande consommation, dont environ 95 % est jeté après une seule utilisation, car à usage unique, d’après les données de la Fondation Ellen MacArthur.
Malgré la prise de conscience croissante des problèmes de gestion des déchets plastiques, la situation ne peut qu’empirer. Même si la croissance de la consommation mondiale de plastique venait à ralentir de moitié, l’Organisation Internationale de Normalisation (ISO) estime que la taille totale du marché sera multipliée par plus de 2,5 à l’horizon 2050.
Les décideurs politiques mondiaux répondent au challenge
L’ampleur de ce défi n’échappe pas aux politiques du monde entier. L’Union européenne a fixé des objectifs ambitieux concernant le contenu recyclé de tous les plastiques et un taux de recyclage de 50 % de tous les déchets plastiques d’ici à 2025.
Mais il ne s’agit pas d’une simple définition d’objectifs vagues. Depuis janvier 2021, une taxe de 800 euros par tonne est appliquée à tous les déchets d’emballages plastiques non recyclés. Il appartient cependant aux États membres de décider de ses modalités. Le choix se résume à déterminer si la taxe doit s’appliquer aux entreprises pétrochimiques, aux fabricants d’emballages, aux entreprises de FMGC ou directement aux consommateurs.
Par ailleurs, les États-Unis visent également une part de 30 % de contenu recyclé dans ses emballages plastiques d’ici à 2025. La Chine a également pris des mesures en interdisant l’importation de déchets plastiques non triés en 2018.
Des bouleversements spectaculaires
La combinaison entre les exigences des fabricants de FMCG combinées à la pression réglementaire entraînera des changements radicaux dans l’industrie pétrochimique au cours de la prochaine décennie. Aujourd’hui, la chaîne de valeur des plastiques est construite autour d’actifs de plusieurs milliards de dollars, transformant des combustibles fossiles d’une façon tout à fait non circulaire. Au-delà de 2030, tout le plastique supplémentaire dont le monde aura besoin proviendra de sources recyclées mécaniquement ou chimiquement.
Le recyclage mécanique est la partie la plus facile. Il consiste à collecter, trier, nettoyer et refondre certaines catégories de plastique. Il est principalement utilisé pour le PET (bouteilles transparentes) et le PEHD (bouteilles opaques, de lait par exemple). Parce qu’il ne modifie pas la chimie du plastique, le recyclage mécanique est un processus relativement simple. Il génère également jusqu’à 80 % moins de gaz à effet de serre que le plastique vierge.
L’inconvénient est qu’il ne peut pas traiter les déchets plastiques mixtes, ce qui nécessite un tri important, et nécessite que le plastique soit relativement propre. En outre, à chaque refonte, le plastique se dégrade et fait l’objet d’un recyclage en aval, de sorte qu’il est généralement utilisé à d’autres fins, par exemple pour transformer des bouteilles en plastique en fibres de moquette.
Les opportunités liées au recyclage chimique
La réponse à l’élargissement de la palette de matières premières plastiques réside dans le recyclage chimique, qui se décompose lui-même en deux grandes technologies : le recyclage par pyrolyse et le recyclage monomères. Le recyclage par pyrolyse a l’avantage d’être une solution prête à l’emploi qui fournit des matières premières circulaires aux complexes pétrochimiques existants basés sur le naphta.
La pyrolyse décompose les déchets plastiques mixtes en blocs d’hydrocarbures originels à l’aide de la chaleur et en l’absence d’oxygène. Pour certains plastiques, elle peut produire des émissions de gaz à effet de serre plus élevées que l’utilisation de résine vierge, car elle nécessite des températures élevées. Cependant, cette méthode reste meilleure pour l’environnement, car une grande partie des matières premières plastiques jetées est généralement brûlée dans des usines de production d’énergie ou laissée à l’abandon dans des décharges. En outre, la fabrication de plastique représente environ 8 % de l’utilisation de pétrole mondiale, de sorte que toute croissance de la demande de plastique qui n’est pas satisfaite par une solution circulaire nécessitera une augmentation correspondante de l’exploitation pétrolière.
Il existe plusieurs autres avantages. La pyrolyse peut être appliquée aux plastiques qui n’ont pas de solutions mécaniques établies (comme le polyéthylène basse densité, le polypropylène et le polystyrène), et son grand avantage est qu’elle peut traiter les étiquettes, les encres et les résidus alimentaires, ce qui nécessite moins de tri et de nettoyage. Le naphta issu de la pyrolyse permet également de produire de nouveaux plastiques chimiquement identiques à ceux synthétisés à partir de combustibles fossiles. Cela signifie qu’ils sont exempts de la dégradation commune au recyclage mécanique et qu’ils sont adaptés au secteur alimentaire, un élément clé pour l’intérêt des entreprises de FMCG.
Aspects économiques
Actuellement, les aspects économiques sont également très intéressants. La demande de matières premières circulaires dépasse largement l’offre, de sorte que le plastique circulaire se vend à un prix supérieur à celui du plastique vierge, tandis que dans certains cas, la matière première des déchets plastiques partiellement triés est disponible à un coût faible, voire potentiellement négatif (si le vendeur doit par ailleurs s’acquitter de frais de mise en décharge).
L’industrie pétrochimique est en train de se doter de cibles sérieuses, qui soutiendront la croissance de l’industrie de la pyrolyse au cours de la décennie. Total Energies produit aujourd’hui 60.000 tonnes de polymères circulaires à haute valeur ajoutée et vise 1 million de tonnes en 2030. De même, INEOS vise à incorporer au moins 850.000 tonnes de polymères recyclés et biosourcés dans ses produits d’ici à 2030, contre près de zéro aujourd’hui. Les deux entreprises ont annoncé des partenariats de pyrolyse avec Plastic Energy.
Nous avons tous l’habitude de mettre les contenants en plastique dans la bonne poubelle et de supposer que l’industrie du recyclage fera le reste. Mais si la chaîne de valeur du recyclage mécanique s’est développée de manière impressionnante pour traiter des flux de déchets spécifiques, nous avons maintenant besoin de solutions de pyrolyse innovantes pour traiter le reste. C’est la voie à suivre pour que le taux de recyclage dans l’industrie du plastique passe des 14 % actuels aux 70 – 80 % observés dans les industries du papier ou du verre, niveaux désormais explicitement visés tant par l’industrie que par les décideurs politiques.
La renaissance des actions européennes ?
Par Christian Schmitt, Senior Portfolio Manager chez Ethenea
Le 11 mai 2023
Les actions européennes présentent un potentiel de surperformance cette année. Malheureusement, le contexte actuel ne suffit pas pour envisager une renaissance durable de ces dernières.
Pendant des années, de nombreux investisseurs internationaux se sont tenus à l’écart des valeurs européennes et s’en sont plutôt bien sortis. Depuis la crise financière mondiale de 2008/2009, l’évolution relative des principaux indices boursiers européens par rapport à leurs homologues américains n’a connu qu’une seule direction : la baisse !
Pas de surperformance mais des défis
Durant les deux décennies précédentes, ce qui correspond par exemple à la durée d’existence de l’indice allemand DAX ou celle depuis laquelle les indices européens STOXX sont calculés, la performance relative avait été beaucoup plus équilibrée. Mais cependant on n’a vu aucune trace d’une surperformance structurelle des valeurs européennes.
En février 2022, avec le début de la guerre russe contre l’Ukraine, la liste des défis auxquels le vieux continent est actuellement confronté s’est une nouvelle fois allongée de manière spectaculaire. Pour de nombreux observateurs du marché, il est d’autant plus étonnant que le marché boursier européen ait surpassé le marché boursier américain non seulement au cours de l’année 2023, mais aussi au cours de l’année civile 2022. Les investisseurs prudents à l’égard de l’Europe auraient-ils perdu quelque chose de vue ?
En principe, la performance des actions, aussi bien au niveau des titres individuels que des indices, dépend de l’évolution fondamentale des entreprises sous-jacentes et de la valorisation qui leur est attribuée. Plus la période d’observation est longue, plus l’évolution des ventes, des bénéfices, des flux de trésorerie et autres paramètres fondamentaux dominent. En d’autres termes : les écarts de valorisation peuvent être un bon point de départ (tactique) pour une surperformance relative. Mais pour une surperformance (stratégique) à plus long terme, la croissance fondamentale doit également être rendez-vous.
Une décote justifiée
Un bon croquis vaut mieux qu’un long discours. Dans un premier temps, examinons donc la situation initiale et l’évolution relative des facteurs d’influence mentionnés au cours de ces dernières années.
Source: Bloomberg Finance L.P., own calculations ETHENEA, 13.04.2023
La partie supérieure du graphique compare l’évolution des cours des valeurs européennes et américaines (en jaune). On y voit également l’évolution relative des prévisions bénéficiaires des entreprises pour les 12 prochains mois (en bleu). Les deux périodes sont indexées à 100 au 1er janvier 2010. Par exemple, une baisse de 100 à 90 signifie que l’Europe a sous-performé les États-Unis de 10 %. La partie inférieure du graphique présente la décote de l’Europe par rapport aux États-Unis sur la base des ratios cours/bénéfice. Alors que le cours des actions européennes vaut 12,7 fois les bénéfices attendus à 12 mois, il faut payer 18,2 fois les bénéfices attendus pour les valeurs américaines. Il en résulte une décote de 29 % pour l’Europe (en gris). En revanche, la médiane des 13 dernières années s’est établie à 16 % (ligne bleu turquoise en pointillés).
Ce graphique révèle deux choses. Tout d’abord, la nette surperformance des valeurs américaines sur le long terme s’est largement appuyée sur une croissance fondamentale correspondante. Ensuite, la décote des actions européennes semble s’expliquer, en partie, par des différences au niveau des structures sectorielles, une rentabilité moindre, une réglementation et une fragmentation plus fortes des marchés nationaux, une autosuffisance énergétique plus faible ainsi que par un capitalisme globalement plus social.
Mais l’on constate également que la décote de l’Europe a atteint de nouveaux extrêmes lorsque (mais pas seulement) la guerre en Ukraine a éclaté l’an dernier. Dans le même temps, la croissance fondamentale par rapport aux États-Unis a été étonnamment forte. Par ailleurs, de nombreux portefeuilles internationaux tendent à sous-pondérer l’Europe. Cette configuration explique la forte performance des indices boursiers européens de ces derniers mois, d’autant plus que la crise énergétique a été beaucoup moins aiguë que prévu grâce aux températures clémentes de cet hiver.
Les actions européennes présentent encore un potentiel de surperformance à l’avenir car leur décote reste supérieure à la moyenne. Un retour à la médiane susmentionnée correspondrait à lui seul à une surperformance d’environ 18 %.
Un avenir moins radieux
Le contexte pour une poursuite du momentum fondamental (relatif) n’est pas aussi brillant. En effet, l’année dernière avait été marquée par des conditions spéciales qui ont, aujourd’hui, en grande partie disparu. Ainsi, les indices américains, qui accordent la part belle aux valeurs technologiques, ont profité d’une conjoncture exceptionnelle durant la pandémie en 2020/2021, avant d’être rattrapés par les effets de base tout aussi impressionnants en 2022.
Les investissements et acquisitions effectués ont en fait été des ventes anticipées et non supplémentaires. En outre, le dollar fort a pénalisé les multinationales américaines, tandis que les exportateurs européens ont bénéficié de la faiblesse de l’euro. La dissipation de ces tendances a déjà neutralisé les prévisions bénéficiaires des cinq derniers mois. Une poursuite du momentum fondamental positif en 2023 semble donc peu probable. En revanche, une évolution contraire défavorable à l’Europe n’est pas non plus en vue.
En fin de compte, il ne reste donc que l’argument de la valorisation, lequel ne peut soutenir à lui seul la force relative de l’Europe. Malheureusement, la situation actuelle ne suffit pas pour envisager une renaissance durable des actions européennes.
Les entreprises indonésiennes au cœur de la transition verte
Par Roddy Snell, Investment Manager Emerging Markets chez Baillie Gifford
Le 17 avril 2023
Les ressources naturelles de la chaîne d’îles en font la clé de l’énergie verte de demain. La politique gouvernementale en matière d’exportations permet à l’Indonésie de mieux valoriser ses richesses naturelles. L’amélioration des transports et de la connectivité digitale y joue un rôle important.
Des ressources en abondance
Selon la répartition par pays, les entreprises indonésiennes ont été très performantes dans la région Asie ex Japon en 2022. La façon dont le gouvernement indonésien maximise le potentiel de ses abondantes matières premières est de plus en plus convaincante. Il s’agit notamment de matières premières essentielles à la transition mondiale vers des technologies à faible émission de carbone.
Le quatrième pays le plus peuplé du monde bénéficie d’un boom mondial des ressources qu’il possède en abondance. Outre le nickel, il s’agit du pétrole, du cuivre, du cobalt, de la bauxite, de l’huile de palme et du caoutchouc. L’Indonésie extrait plus de nickel que les trois plus grands pays producteurs réunis. La « transition verte » serait presque impossible sans les propriétés conductrices du cuivre, par exemple. Les ingénieurs l’utilisent pour améliorer l’efficacité des systèmes solaires, éoliens et hydroélectriques. Ils utilisent le cobalt pour produire des aimants d’éoliennes et pour fabriquer du biogaz.
L’abondance de cobalt et de nickel fait de l’Indonésie un maillon essentiel de la chaîne d’approvisionnement en batteries pour véhicules électriques (VE). Ses responsables politiques cultivent depuis longtemps de bonnes relations avec l’Occident et la Chine, ce qui élargit l’éventail des clients potentiels. Le président indonésien Joko Widodo a également encouragé un transfert vers le haut de la chaîne de valeur par le biais d’une méthode peu orthodoxe. Après son élection en 2014, il a interdit certaines exportations de matières premières non raffinées, à commencer par le minerai de nickel. Cela a obligé les entreprises étrangères à transformer les ressources au sein de parcs industriels locaux afin que l’Indonésie puisse tirer davantage de valeur de ses ressources naturelles.
Extraction de nickel
Des entreprises telles que Merdeka Copper Gold soutiennent cette évolution. Merdeka développe un projet de nickel dans le sud-est de Sulawesi, comprenant une mine et deux nouvelles fonderies de nickel, en partenariat avec un fabricant de batteries basé à Hong Kong. La direction de la société minière indonésienne a de solides antécédents et elle est soutenue par des actionnaires bien connectés. Merdeka et d’autres sociétés, notamment Nickel Mines et Vale Indonesia, illustrent le potentiel du pays en termes de matières premières vertes.
Bien que l’Indonésie soit un gros émetteur de gaz à effet de serre parce qu’elle brûle du charbon domestique pour produire de l’énergie, elle promeut agressivement son potentiel d’investissement dans l’énergie hydroélectrique, éolienne, solaire et géothermique, ainsi que son engagement à atteindre un niveau d’émissions nettes nulles d’ici 2060.
Production de batteries
Jusqu’à présent, la politique du président Widodo concernant les matières premières a attiré 25 milliards de dollars d’investissements étrangers. La société chinoise CATL et la société sud-coréenne LG Energy font partie des entreprises qui construisent des usines de transformation locales. Le gouvernement négocie actuellement avec Tesla la construction d’une « gigafactory » pour la fabrication de voitures et a déjà signé un accord de 5 milliards de dollars pour approvisionner le fabricant de véhicules électriques en produits à base de nickel.
Il y a davantage d’investissements directs étrangers dans des endroits tels que le parc industriel de Tanah Kuning. Sa construction à Bornéo couvre 30.000 hectares, soit la même superficie que deux fois la Région de Bruxelles-Capitale. Il s’agira du plus grand site de ce type au monde alimenté par des énergies renouvelables (hydroélectricité et énergie solaire) et spécialisé dans la production de batteries.
Connectivité
Le taux de croissance impressionnant du PIB de l’Indonésie est soutenu non seulement par le succès des mineurs et des transformateurs de minerais, mais aussi par les entreprises qui profitent de l’augmentation de la consommation intérieure. Sa population d’un quart de milliard d’habitants est jeune et la classe moyenne se développe.
L’un des bénéficiaires est PT Bank Rakyat Indonesia, qui est considérée comme la meilleure entreprise de microcrédit de tous les marchés émergents. Le réseau d’agences du prêteur, qui couvre les nombreuses îles du pays, est pratiquement impossible à reproduire pour ses rivaux. Des décennies de données sur les clients et de connaissances locales lui permettent de fixer le prix des prêts de manière efficace et rentable. Une forte croissance pour les décennies à venir est ainsi prévue.
Astra International profite également de la marée montante de la prospérité. Ce conglomérat bien géré distribue des voitures et des camions, vend des services financiers et loue des équipements industriels lourds. Il détient une part de marché considérable, et il compte Toyota, BMW et Honda parmi ses partenaires.
Economie et entreprises publiques aussi
Le président Widodo a réussi à déréglementer l’économie et à assainir les entreprises publiques. Entre-temps, l’internet et les smartphones ont atténué les inconvénients d’un pays qui s’étend sur 17.500 îles souvent montagneuses et couvertes de jungle. En effet, Jakarta est aujourd’hui l’un des principaux incubateurs régionaux d’entreprises technologiques. Depuis l’élection de Widodo en 2014, il a supervisé l’achèvement de 2.000 km de routes. C’est deux fois et demi plus que ce que ses prédécesseurs ont réalisé au cours des trois décennies précédentes. À cela s’ajoutent de nouveaux ports, aéroports et barrages hydroélectriques. L’amélioration des systèmes de transport de masse a allégé le trafic tristement célèbre de Jakarta, et Java dispose désormais de la première liaison ferroviaire à grande vitesse du pays. Après des décennies au cours desquelles ses performances n’ont pas été à la hauteur de sa taille et de ses ressources naturelles, l’Indonésie est enfin sur la bonne voie.
Le financement des habitations sans gaz porte ses fruits
Par Kay van der Kooi, gestionnaire d’investissement chez Triodos Investment Management
Le 15 mars 2023
La crise énergétique provoquée par la guerre en Ukraine a fait prendre conscience à chaque ménage européen du véritable prix de la dépendance aux combustibles fossiles. Aussi douloureux soient-ils, ces prix élevés sont une occasion unique de se détourner le plus rapidement possible du gaz et des autres sources fossiles pour le chauffage domestique.
Dans le cadre de la transition énergétique en Europe, quelles sont les solutions de chauffage durables pour remplacer les combustibles fossiles sur le marché du logement ?
Les investisseurs peuvent aussi jouer un rôle dans l’énorme défi que représente la réussite de la transition thermique. Parler de transition énergétique implique des questions complexes qui sont longtemps restées très abstraites pour beaucoup de gens. Il n’était question que de parcs solaires ou éoliens, de réseau électrique et de fermeture de centrales au charbon. Alors que l’Union européenne vacille au bord d’une crise énergétique, il est devenu tristement évident à quel point nous sommes dépendants de l’électricité, du gaz et du pétrole dans notre vie quotidienne.
Dans toute l’Europe, cela se traduit par des factures énergétiques élevées, tant pour les ménages que pour les entreprises. Le problème est soudain très tangible.
Par conséquent, plus personne ne doute des avantages, de la nécessité et de l’urgence de la transition énergétique. Pour mettre cette conviction en pratique, il faut avoir des connaissances spécifiques sur les questions énergétiques et savoir où les investissements ont le plus d’impact. Et les investisseurs peuvent aussi faire une grande différence.
Les factures d’énergie pourraient être multipliées par cinq
La transition énergétique concerne trois grands enjeux : l’électricité, la chaleur et la mobilité. La transition thermique joue un rôle essentiel dans la réussite de la transition énergétique.
La hausse des coûts de chauffage et d’électricité ponctionne le portefeuille de chacun. Cette évolution risque de créer une nouvelle inégalité sociale entre les personnes qui ont les moyens de rendre leur maison et leur voiture plus durables et les autres qui vivent en situation de pauvreté énergétique. Il ne suffit pas de remplacer le gaz par l’électricité.
Pour les 1.200 mètres cubes de gaz qu’un ménage moyen consomme chaque année, il faudrait environ 12.000 kilowattheures d’électricité si l’on voulait remplacer le chauffage au gaz par des chaudières ou un chauffage électriques. Les factures d’énergie seraient alors multipliées par cinq. Les pompes à chaleur sont alors une solution idéale car elles sont beaucoup plus efficaces que les chaudières électriques. On verrait ainsi apparaître une image totalement différente.
Des solutions de chauffage durables sont nécessaires
Aujourd’hui, dans les investissements, l’accent peut être mis sur les entreprises qui proposent des solutions à la demande de chaleur par le biais de pompes à chaleur et de leur utilisation. Il s’agit parfois de projets collectifs mais aussi souvent de projets individuels. Les défis sont importants car le parc immobilier présente des valeurs de construction et d’isolation différentes et se compose d’un mélange de logements sociaux, de propriétés privées et de locations du secteur privé. Les propriétaires bailleurs particuliers ne sont toujours pas incités à proposer des solutions durables.
Le savoir-faire juridique et technique ainsi qu’une bonne vue d’ensemble du marché des pompes à chaleur et des entreprises proposant des solutions font aussi partie du puzzle. Il faut alors développer une expertise dans ce marché.
Aux Pays-Bas, depuis 2019, les nouveaux bâtiments ne peuvent plus être raccordés au gaz de ville. Des réglementations plus strictes sont en préparation en Allemagne, et le gaz est également en perte de vitesse au Royaume-Uni. Il y a d’énormes possibilités dans une poursuite énergique de la transition thermique. Mais les progrès réalisés et le potentiel d’investissement varient considérablement d’un pays à l’autre.
A la redécouverte des actions européennes
Par Olgerd Eichler, gérant de portefeuille chez MainFirst
Le 6 février 2023
De nombreux investisseurs s’intéressent à l’Amérique du Nord. Mais ils ne doivent pas oublier l’ Europe ! Dans l’ombre des autres marchés, les cours des actions ont récemment enregistré de bonnes performances et généré d’excellentes opportunités d’achat et ce, notamment pour les stock pickers.
Actions européennes : le retour
Tel un phénix renaissant de ses cendres, le marché européen des actions a fait un retour éclatant au dernier trimestre de 2022. Les perspectives restent prometteuses car l’Europe a également pris un bon départ cette année et a gagné du terrain sur le marché américain.
La valorisation des marchés boursiers plaide également en faveur du continent européen. En raison de leurs performances à long terme moins bonnes que celles des États-Unis, de nombreuses entreprises européennes semblent être de véritables aubaines en ce moment.
Mesurée par le ratio cours/bénéfice (P/E), par exemple, la décote est encore légèrement inférieure à 30 %. Pour de nombreux investisseurs qui sont encore sur la touche, cela pourrait constituer une raison suffisante pour examiner de plus près les actions européennes et profiter des opportunités de prix qui se présentent.
Un vent favorable
Par ailleurs, les taux d’intérêt en Europe sont toujours à des niveaux inférieurs, de sorte que les actions constituent probablement le choix le plus judicieux du point de vue du rendement par rapport aux autres classes d’actifs. En revanche, le ratio semble moins intéressant aux États-Unis où la forte hausse des taux d’intérêt offre désormais aux investisseurs obligataires une véritable alternative aux actions américaines plus fortement valorisées.
En raison de la faiblesse de l’euro, les sociétés orientées vers l’exportation sont plus compétitives. En effet, grâce à cet effet devise, elles peuvent plus facilement répercuter les hausses de prix sur les clients étrangers. Cela leur permet de compenser les augmentations de coûts liées à l’inflation.
En 2022, les coûts énergétiques ont été l’une des principales préoccupations. La dépendance à l’égard de la Russie a notamment conduit l’Allemagne au bord d’une crise énergétique. Mais l’Europe a fait preuve de la détermination nécessaire et a réduit successivement sa dépendance à l’égard du gaz russe. Par ailleurs, des réserves d’énergie bien fournies et l’hiver doux ont contribué à alléger la situation. Les prix du gaz ayant récemment baissé de manière significative, le poids de cette charge pour les entreprises et les consommateurs en 2023 ne devrait pas être aussi lourd que ce que l’on craignait en automne.
Un potentiel de hausse
L’année écoulée l’a démontré : dans un contexte difficile, l’Europe a une fois de plus prouvé sa capacité à faire face aux crises de manière proactive et à ne pas rester les bras croisés. Cela se reflète dans les mesures prises par les gouvernements qu’il s’agisse des sanctions contre la Russie, du soutien conjoint à l’Ukraine ou des programmes mis en place pour stabiliser la situation des consommateurs et des entreprises.
La perception des actions européennes étant encore faible en comparaison internationale et le pessimisme prévalant toujours chez de nombreux acteurs du marché, la surperformance de l’Europe pourrait se poursuivre. Même si toutes les entreprises européennes ne sont pas bien positionnées, l’environnement de marché est prometteur, en particulier pour les « stock pickers ». En effet, l’Europe compte de nombreuses entreprises dotées d’excellents modèles économiques, bien gérées et présentant des opportunités de croissance prometteuses. Les faibles valorisations sur les marchés offrent de bonnes opportunités d’acheter ces entreprises à des prix attractifs. Cela crée des opportunités de prix intéressantes dont les investisseurs peuvent profiter grâce à une exposition adéquate aux actions européennes.
La disruption est le plus puissant des moteurs de croissance
Par Dave Bujnowski, partenaire chez Baillie Gifford
Le 9 janvier 2023
Treize années de surperformance des valeurs de croissance ont pris fin de façon brutale en raison de la guerre en Europe, du choc post-pandémique des chaînes d’approvisionnement, des pénuries de main-d’œuvre et de la forte hausse de l’inflation. Quelles sont alors les opportunités actuelles pour les investisseurs de croissance ? La question clé pour les investisseurs en valeurs de croissance n’est pas « qu’est-ce qui croît », mais « qu’est-ce qui change ? »
Quels sont alors les moteurs de croissance ? Il y a croissance lorsque l’offre d’un produit ou d’un service correspond à la demande. Mais ni la demande ni l’offre ne sont statiques. Ils sont mus par trois « moteurs » différents : l’expansion, la perturbation et la substitution. Lequel de ces trois moteurs a tiré la croissance au cours de la dernière décennie ? Et où nous mèneront-ils à l’avenir ?
La croissance par l’expansion
Le moteur de croissance expansive se met en marche lorsque la demande d’un produit ou d’un service augmente. Cette demande supplémentaire peut résulter de causes macroéconomiques telles que des taux d’intérêt bas ou d’innovations telles que les applications mobiles. Certains moteurs de croissance expansifs s’essoufflent à mesure que les conditions macroéconomiques se détériorent et que l’excitation initiale de la « nouveauté » s’estompe.
Mais d’autres moteurs de croissance ayant une force similaire sont encore en train d’émerger et offrent de nouvelles opportunités. Par exemple, les nouvelles méthodes de collecte et d’analyse des données dans le domaine des soins de santé constituent un moteur de croissance potentiel.
La croissance par la disruption
Le deuxième moteur, la croissance disruptive, entre en jeu lorsque la demande n’augmente pas mais que l’offre y répond mieux. Le commerce électronique américain, qui a plus que doublé au cours de la dernière décennie, et les dépenses liées aux infrastructures du cloud, qui dépassent les investissements dans les centres de données traditionnels, en sont de bons exemples. Avec ce type de disruption, il n’est pas nécessaire d’avoir une économie en croissance pour faire naître des entreprises en croissance.
La croissance par le remplacement
La croissance de remplacement, le troisième moteur, provient d’une demande qui n’est pas en croissance mais en évolution. Prenons, par exemple, la sensibilisation au climat et la demande d’énergie propre. Aucun des deux n’existait il y a 20 ans. Maintenant, ils le sont.
Abondance et pénurie
Lorsqu’un système change, ses problèmes changent aussi. Mais les nouveaux problèmes sont aussi synonymes de nouvelles opportunités. Les périodes difficiles n’excluent donc pas les possibilités de croissance. Il suffit d’examiner les changements récents en matière d’abondance et de rareté. L’abondance est ce que les 10 à 15 dernières années de technologie nous ont apporté. Les gens peuvent se connecter instantanément avec n’importe qui dans le monde, se faire livrer presque tout en deux jours et regarder la télévision sans fin. Les annonceurs disposent d’un véritable vivier de données pour les aider à atteindre les consommateurs.
Mais au cours des deux dernières années, les entreprises ont eu moins accès aux données. Les annonceurs et les autorités réglementaires ont restreint la disponibilité de certains types de données. Apple a aussi limité la capacité des applications tierces à suivre les activités en ligne des utilisateurs. Les données ne sont peut-être pas rares, mais elles sont de moins en moins accessibles librement. La main-d’œuvre est rare et l’inflation augmente le coût des affaires. C’est important car, lorsque l’abondance se transforme en pénurie, les problèmes à résoudre changent également. Ceux qui contrôlent la source de la rareté ou qui peuvent fournir des alternatives en tireront profit.
Transformation digitale
Les entreprises qui collectent, possèdent et peuvent exploiter les données des clients sont dans une bonne position de départ. Il en va de même pour les entreprises qui améliorent la productivité et l’automatisation. Et, surtout, si la croissance systémique et expansive devient plus difficile à atteindre, alors la transformation numérique en bénéficiera : le cloud, la science des données, le développement logiciel agile, etc. Si le gâteau global n’augmente pas, les entreprises augmenteront leur part en étant plus compétitives sur la transformation numérique.
Si ce phénomène est déjà bien compris par les investisseurs en valeurs de croissance, son potentiel et sa durée sont encore sous-estimés, car le terme « transformation numérique » implique que le passage d’un point A analogique à un point B numérique signifie que la transformation est terminée. Mais le point B n’est pas un état final. Ce n’est que le début. Le monde numérique contient de nouveaux outils (logiciels, données, puissance de calcul) qui peuvent être utilisés de manière infiniment évolutive. Non seulement l’infrastructure installée au cours des dernières décennies est extensible à l’infini, mais la ressource qui en fait le meilleur usage l’est aussi : l’ingéniosité humaine et la capacité à résoudre les problèmes de demain. Il s’agit là du plus puissant moteur de croissance.
Investir comme un entraîneur de football !
Par Hans Oudshoorn, formateur d’investisseurs chez Saxo
Le 5 décembre 2022
Comment une équipe de titres peut-elle prétendre au titre de champion ? Dans le domaine de l’investissement, comme dans celui du sport, il faut investir du temps, du dévouement et de l’argent pour finir par en récolter les fruits. Et, bien sûr, il faut avoir un peu de chance.
Avec la Coupe du monde 2022, il faut aussi un peu de temps pour s’habituer au début d’un grand tournoi de football à la fin de l’année plutôt qu’en été. Comme cette période de l’année est souvent l’occasion de regarder en arrière et de se projeter dans l’avenir, également en termes de gestion financière, on peut profiter de la Coupe du monde pour jeter un « regard sportif » sur la structure de son portefeuille.
Comme le sport
Après tout, le sport et l’investissement ont beaucoup en commun. Ils exigent tous deux que l’on investisse du temps, du dévouement et de l’argent pour finalement en récolter les fruits. Et, bien sûr, il faut avoir un peu de chance.
Il existe d’ailleurs un autre parallélisme. Lorsqu’il s’agit de constituer et de gérer un portefeuille d’investissement, il peut être utile de penser comme un coach, un entraîneur de football, par exemple. Un coach n’envoie pas dix gardiens de but et un attaquant sur le terrain, mais veille à ce que l’équipe soit équilibrée. Il en va de même pour les investissements. Il est important de réfléchir à la répartition optimale de ses actifs, que ce soit sur le terrain ou dans un portefeuille. Et lorsqu’il s’agit d’investir, cela peut représenter un véritable défi, car pour la plupart des investisseurs, la constitution et la gestion d’un portefeuille ne font pas partie de leur travail quotidien.
Répartition entre les catégories d’actifs : une combinaison appropriée de joueurs
Pour commencer, par souci de simplicité, outre les liquidités, on se limitera aux deux principales classes d’actifs : les actions et les obligations. Ensuite, la règle empirique suivante peut aider : investir son âge en pourcentage dans des obligations. Si l’on a 40 ans, on peut investir 40 % en obligations. Si l’on conserve 5 % de liquidités, par exemple, il reste 55 % à investir dans des actions. Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’une règle empirique et non d’une règle absolue. Bien entendu, la répartition finale entre les classes d’actifs dépend de son profil de risque.
Investissement de cycle de vie : garder un œil sur le chronomètre du match
En appliquant cette règle empirique, le risque du portefeuille se déplace, au fil du temps, des actions (risque plus élevé) vers les obligations (risque plus faible). En termes techniques, on parle également d’investissement de cycle de vie. On prend de moins en moins de risques avec ses investissements à mesure que l’on se rapproche de sa date cible. Par exemple, lorsque l’on souhaite utiliser (le produit de) ses investissements pour rembourser un crédit hypothécaire, pour payer les frais de scolarité ou d’études de ses (petits-)enfants ou pour couvrir des frais de subsistance pendant la retraite. Dans la pratique, cette règle empirique permet non seulement aux investisseurs d’avoir un point d’appui, mais aussi d’avoir l’esprit tranquille. Et c’est précisément la tranquillité d’esprit qui profite souvent aux rendements à long terme.
Quelle forme d’analyse utiliser ? Analyse des joueurs
Une fois les grandes lignes d’une équipe équilibrée et les règles du jeu connues, comment sélectionner les bons joueurs ou les bons investissements ? Avant d’acheter une action ou une obligation, il est important de justifier sa décision par une certaine forme d’analyse. Les types les plus connus sont l’analyse fondamentale et l’analyse technique, appelées AF et AT en abrégé. L’analyse fondamentale consiste à rassembler des connaissances et à comprendre les secteurs d’activité et les entreprises individuelles. Elle répond à la question « Que dois-je acheter ? ». Cette forme d’analyse, qui porte notamment sur la solvabilité (santé financière), la rentabilité (profitabilité), les perspectives de croissance et le niveau des dividendes, convient parfaitement à la défense et au milieu de terrain.
L’analyse technique – qui consiste à étudier les graphiques de prix ou à effectuer des calculs statistiques sur les prix – tourne autour de la question « Quand acheter ou vendre ? » et est une question de timing. La nature plus volatile de la ligne d’attaque est mieux « abordée » avec l’AT.
Importance des dividendes et des coupons : sélectionner des joueurs expérimentés et puissants
Si une société cotée en bourse réalise un bénéfice net, elle peut choisir de distribuer une partie de ce bénéfice net aux actionnaires. Une telle distribution du bénéfice s’appelle un dividende et a lieu au moins une fois par an. À long terme, le rendement total des actions (au sein du portefeuille ou d’un indice) est déterminé à hauteur de 85 % par les dividendes. Quoi qu’il en soit, une leçon importante à retenir est que l’investissement ne se résume certainement pas à un gain de cours.
Par ailleurs, il en va de même pour les coupons des obligations. Ces flux de trésorerie apportent également une contribution importante à long terme aux rendements totaux. L’effet est amplifié si les coupons sont réinvestis.
Qui joue où ? Construire une équipe de champions efficace
Maintenant que les acteurs et leurs rôles sont connus, il est important de les mettre dans la bonne position pour marquer des points sur le marché financier. Un compte d’épargne, comme l’argent liquide, « est assis sur le banc de touche » et « se tient sur la cible » pour les sauvetages financiers lorsque la voiture ou la machine à laver tombe en panne. Sur une ligne avant les liquidités, on trouve les défenseurs : des obligations relativement sûres qui réduisent la volatilité de l’équipe des titres, mais apportent une contribution financière sous la forme de rendements généralement un peu plus faibles (mais plus stables).
Plus en avant, on trouve des milieux de terrain. Les milieux défensifs sont des titres à large spectre qui mettent l’accent sur les marques fortes ainsi que sur les dividendes. Ce sont les joueurs expérimentés de l’équipe, qui ont fait leurs preuves et sur lesquels on peut compter en tant que coach. Les milieux plus offensifs sont des investissements thématiques et sectoriels. On pense ici aux joueurs des secteurs de croissance tels que la cybersécurité et la robotisation, mais aussi à des thèmes tels que la durabilité ou la rareté (comme l’eau). Ce sont les « petits nouveaux » au sein du portefeuille qui ont encore un avenir devant eux, mais qui, en raison de leur expérience limitée et de leurs actions inattendues, représentent parfois un risque plus important au sein de l’équipe.
Les actions individuelles, joueurs vedettes personnels, sont les attaquants suspendus.
Ceux-ci peuvent marquer un but (opportunité de rendements intéressants). Mais, quelle que soit la qualité de l’analyse, ils ont souvent un risque plus élevé de se blesser (plus grande volatilité, chute brutale). Les options, les « attaquants centraux et les joueurs de flanc », peuvent fournir des rendements supplémentaires si elles sont utilisées intelligemment. Ainsi, la vente d’options d’achat – sur une action individuelle ou un indice autour d’un niveau de résistance (c’est là que l’AT entre en jeu) – peut générer des revenus supplémentaires sur un portefeuille.
Suivi et repondération. Déployer des remplaçants en temps opportun
En répartissant les actifs à investir entre différentes classes d’actifs, on peut donc adapter le portefeuille au niveau de risque que l’on accepte (profil de risque).
Quel que soit son profil, l’investisseur sera confronté aux fluctuations des prix sur le marché boursier. Et les chutes en font partie. Quelle que soit la qualité de la diversification, il n’est pas vrai qu’un portefeuille d’investissement « se porte toujours bien ». En revanche, ce qui est vrai, c’est qu’un portefeuille offensif évolue davantage avec les marchés boursiers qu’un portefeuille défensif. Si l’on commence par un portefeuille offensif à la trentaine et qu’au fil du temps, à mesure que l’horizon d’investissement se raccourcit, on passe à un portefeuille neutre, puis défensif, on élimine le risque (actions). Comme on a toujours une exposition aux actions avec le profil défensif, on reste partiellement sensible aux baisses de prix.
Si l’investisseur a plus de 60 ans, mais qu’il a remboursé sa maison (dans une large mesure), qu’il dispose toujours d’un bon revenu et qu’il n’a pas tendance à dépenser sans compter, il pourra bien être un peu plus à risque avec un profil neutre ou même offensif s’il le souhaite.
L’un des points d’attention est la repondération. Les portefeuilles ont souvent une position de départ pour les pondérations des différentes classes d’actifs, mais que se passe-t-il en cas de forte hausse des marchés d’actions ? On obtient alors une distorsion : le poids des actions dans un portefeuille augmente (considérablement). Un peu ce n’est pas grave, mais si on est un investisseur défensif et que la pondération des actions est passée, disons, de 30 à 50 %, il est logique de réduire une partie du risque lié aux actions et de répartir les actifs libérés sur les catégories dont la pondération a diminué (obligations). Il ne faut pas oublier que même un entraîneur de football remplace parfois un ou plusieurs attaquants par des défenseurs pour permettre à son équipe de s’imposer. Jeter donc un coup d’œil à son portefeuille au moins tous les trimestres pour voir comment se comportent les pondérations, faire des ajustements et les modifier si nécessaire est un bon comportement.
Résumé
En résumé, il peut être judicieux de penser comme un entraîneur de football lors de la constitution et de la gestion d’un portefeuille. Car même en bourse, il faut occuper toutes les lignes pour marquer des points et éventuellement devenir champion. Lorsqu’on sélectionne des joueurs pour la défense et le milieu de terrain, on peut utiliser l’analyse fondamentale. Pour la ligne d’attaque, il vaut mieux penser à l’analyse technique. Il ne faut pas sous-estimer l’importance des dividendes et des coupons, il convient de faire des échanges entre eux si nécessaire en cas de fortes variations du cours des actions et de réduire l’exposition aux actions à mesure que l’horizon d’investissement se raccourcit.
Objectifs de Développement Durable : des progrès au point mort
Par M&G
Le 10 novembre 2022
On constate que les progrès vers l’atteinte des 17 Objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies (ONU) ont été au point mort au cours des 12 derniers mois.
C’est ainsi que 15 des 17 Objectifs de développement durable (ODD) n’ont témoigné d’aucun progrès au cours de l’année écoulée et seuls 7 ODD sont en passe de respecter l’échéance de 2030. Les investissements du secteur privé sont plus impératifs que jamais pour contribuer à de nouveaux progrès au niveau mondial vers ces objectifs
Constat
Cette troisième édition du « Barème ODD » réalisé par M&G (« SDG Reckoning ») dresse un bilan des progrès mondiaux accomplis d’une année sur l’autre vers la réalisation des 17 ODD de l’ONU et permet de mieux comprendre comment les investissements du secteur privé peuvent œuvrer en faveur de l’atteinte des ODD.
Les principales conclusions du rapport sont les suivantes :
- Une absence totale d’avancée pour la majorité des ODD. Sur un an, 13 des 17 objectifs n’ont aucunement progressé, deux ont marqué le pas et deux ont révélé une accélération.
- Une légère amélioration pour deux ODD : l’ODD 3 (« Bonne santé et bien-être ») a vu une amélioration grâce au développement efficace de vaccins pendant la pandémie de Covid-19 et à d’autres avancées dans le domaine de la santé et du bien-être. Celui de l’ODD 9 (« Industrie, innovation et infrastructure ») a bénéficié de la poursuite des progrès sur le front de l’accès au numérique à travers le monde.
- Un coup de frein pour « Énergie propre et d’un coût abordable ». L’ODD 7 (« Énergie propre et d’un coût abordable ») a marqué le pas dans la mesure où l’invasion de l’Ukraine par la Russie a sévèrement perturbé le marché mondial de l’énergie en portant un coup d’arrêt aux progrès accomplis et en provoquant la plus forte envolée des prix de l’énergie depuis les années 70.
- Un creusement des inégalités : l’ODD 10 (« Inégalités réduites ») a été aggravé par la pandémie de Covid-19, tandis que la crise du coût de la vie va avoir un impact disproportionné sur les économies en développement, susceptible d’avoir des répercussions sur de nombreux ODD.
Découragement
Ce troisième Barème annuel des ODD offre une lecture décourageante de la situation. La majorité des ODD attestent de peu de signes de progrès ou accusent encore davantage de retard sur les objectifs de 2030. L’invasion de l’Ukraine par la Russie, la crise énergétique et l’intensification de la crise du coût de la vie ont considérablement entravé la capacité des pays les plus riches à pérenniser ou accroître leurs capitaux destinés à faire face à ces défis mondiaux.
Mais, l’heure n’est pas au défaitisme. Compte tenu des fortes pressions exercées sur les finances publiques, les investissements du secteur privé sont plus impératifs que jamais pour aider à la concrétisation de progrès à l’échelle mondiale vers ces objectifs. Les investisseurs ont un rôle crucial à jouer dans le financement d’opportunités d’investissement durables, impactantes et à même de s’avérer financièrement rentables et bénéfiques pour l’ensemble de la société.
La prochaine COP27 qui se tiendra ce mois-ci en Égypte est l’occasion pour les responsables politiques et le secteur privé de réfléchir à la nécessité toujours aussi impérieuse d’une étroite collaboration afin d’aider à s’attaquer aux enjeux les plus urgents de notre génération.
Cliquez ici pour télécharger le rapport intégral
L’hiver approche : quelles sont les perspectives pour le quatrième trimestre ?
Par Saxo
Le 20 octobre 2022
L’hiver revient une fois de plus sur les marchés mondiaux. Nous approchons à grands pas d’un point de rupture pour l’économie mondiale, un point qui sera atteint vers le prochain trimestre à cause du « fauconisme » des décideurs politiques.
Trois facteurs
L’inflation est profondément enracinée et perdurera. Mais trois facteurs conduiront au point de rupture inflationniste. La question qui se pose réellement aux investisseurs est la suivante : si le « fauconisme » arrive à son comble au quatrième trimestre, que se passera-t-il ensuite ?
Premièrement, les banques centrales se rendent compte qu’il est préférable pour elles de pécher par excès de fauconisme plutôt que de continuer à répandre l’idée que l’inflation est transitoire et restera ancrée.
Deuxièmement, le dollar américain est incroyablement fort et réduit la liquidité mondiale par l’augmentation des prix à l’importation des matières premières et des marchandises, diminuant ainsi la croissance réelle.
Troisièmement, la Fed devrait enfin atteindre le plein régime de son plan QT, ce qui réduira son bilan gonflé de jusque 95 milliards de dollars par mois.
Sous l’effet de ces trois facteurs adverses, au quatrième trimestre, nous devrions au minimum voir la volatilité augmenter et, potentiellement, les marchés obligataires et boursiers rencontrer de grandes difficultés.
Et après ?
Que se passera-t-il après ? Le marché va peut-être commencer à valoriser l’anticipation d’une récession plutôt que de simplement ajuster les multiples de valorisation en raison de rendements plus élevés. Ce tournant dans la valorisation d’une récession à venir pourrait se produire en décembre, lorsque les prix de l’énergie atteindront un sommet à cause des trois facteurs cités plus haut.
On estime que la part totale de l’énergie dans l’économie mondiale est passée de 6,5 % à plus de 13 %, soit une perte nette de 6,5 % du PIB. Cette perte doit être compensée par une augmentation de la productivité ou par une baisse des taux réels. Et des taux réels plus bas devront être maintenus pour éviter de gripper nos économies saturées de dettes.
Autrement dit, il y a en fait deux possibilités : soit l’inflation élevée reste bien supérieure aux taux directeurs, soit les rendements chutent encore plus vite que l’inflation. Laquelle se produira ? Ce sera la question cruciale.
Le bon côté des choses : les crises boostent l’innovation
Cette crise de l’énergie accélérera la transition écologique en Europe et entraînera une renaissance potentielle de l’Afrique. Mais, surtout, elle activera la démondialisation, avec une division en deux de l’économie mondiale, l’Inde étant le principal point d’interrogation. Pour le marché mondial des actions, il y a encore du chemin à parcourir cet hiver avant de toucher le fond, mais les jours les plus radieux sont encore devant nous.
La crise énergétique mondiale fait les gros titres, or le véritable hiver qui nous attend est le courant de démondialisation qui s’est intensifié. On a l’impression que le monde se divise en deux systèmes de valeurs.
La mondialisation a été le principal moteur de la faible inflation de ces 30 dernières années et a été déterminante pour les marchés émergents et leurs marchés d’actions. La démondialisation provoquera des troubles dans les pays à excédent commercial, exercera une pression à la hausse sur l’inflation et menacera le dollar américain en tant que monnaie de réserve.
La crise énergétique fera de l’Europe le leader mondial des technologies énergétiques mais, en attendant, la volonté du continent de devenir indépendant de la Russie en matière de ressources signifie que l’Afrique doit combler le vide, ce qui place l’Europe en concurrence directe à plus long terme avec la Chine. Au milieu de tout cela se trouve l’Inde. Le pays le plus peuplé du monde peut-il adopter une position véritablement neutre ou sera-t-il contraint de faire des choix difficiles ?
Situation moins dramatique pour les matières premières au quatrième trimestre
Les nombreuses incertitudes continueront de créer un environnement volatil pour la plupart des matières premières jusqu’à la fin de l’année. Il est peu probable que le secteur subisse un revers majeur avant de reprendre de la vitesse en 2023. Cette prévision de prix stables, voire plus élevés, sera alimentée par des poches de force dans les matières premières de base dans les trois secteurs de l’énergie, des métaux et de l’agriculture.
La demande mondiale de denrées alimentaires étant relativement constante, l’offre continuera de dicter l’évolution générale des prix. Les stocks mondiaux des principaux produits alimentaires, du blé au riz en passant par le soja et le maïs, étant déjà sous pression en raison des conditions météorologiques et des restrictions à l’exportation, le risque de nouvelles flambées demeure clairement un danger critique.
Les négociants et les investisseurs en métaux précieux continueront à se concentrer sur l’orientation du dollar et des rendements obligataires américains. L’or est actuellement coincé dans une large fourchette, mais avec le risque d’une récession aux États-Unis en 2023 et d’une inflation restant longtemps élevée, l’or devrait afficher de beaux résultats dans un tel scénario.
Les majors pétrolières, qui croulent sous les liquidités, de même que les investisseurs en général, qui se montrent peu enclins à investir dans les nouvelles découvertes, laissent entendre que les prix de l’énergie devraient rester élevés pendant des années encore.
Et le dollar ?
À moins d’une reprise soudaine de l’approvisionnement en gaz naturel russe au quatrième trimestre, un hiver économique s’annonce pour l’Europe et l’euro, ainsi que pour les monnaies satellites que sont la livre sterling et la couronne suédoise. Bien que la BCE et d’autres banques centrales, à l’exception notable de la Banque du Japon (BoJ), aient rattrapé leur retard en resserrant leur politique au troisième trimestre, la Fed reste la banque centrale qui « les gouverne toutes ». Il faudra que la Fed assouplisse à nouveau sa politique avant que nous puissions être sûrs que le dollar américain est enfin prêt à opérer un retournement.
Les élections américaines de mi-mandat sont un événement déclencheur de risque important pour le dollar au quatrième trimestre. Les États-Unis ne sont en mesure d’adopter une politique financière marginale que lorsque les deux chambres du Congrès et la présidence ne sont pas contrôlées par un parti. Si les Démocrates créent la surprise et conservent le contrôle de la Chambre des représentants, ils pourraient complètement renverser le scénario de la politique budgétaire.
Macroéconomie : la crise énergétique européenne va s’aggraver avant une amélioration
L’hiver sera rude, cela ne fait aucun doute. Toutefois, une répétition de la ‘Panique de 1837’ et des révolutions qui ont frappé l’Europe l’année suivante n’est pas inévitable en 2023. Il est possible de créer un terrain solide pour la transition énergétique en Europe si nous nous concentrons sur des solutions éprouvées en matière d’efficacité énergétique, d’énergie nucléaire et d’infrastructures industrielles. C’est maintenant aux décideurs politiques de faire le bon choix.
L’histoire ne se répète pas, mais elle rime souvent. La période économique actuelle fait écho à celle du milieu du 19e siècle, mais avec deux différences majeures : le capital est abondant et la main-d’œuvre rare.
L’efficacité énergétique est l’angle mort de la politique énergétique européenne. Nous devons investir dans les innovations technologiques, notamment l’intelligence artificielle (IA), qui pourraient apporter des bénéfices rapides et concrets aux usagers et faire baisser la consommation dès cet hiver.
Par exemple, l’opérateur du métro de Barcelone a installé un système de climatisation ‘intelligent’. La consommation d’énergie a diminué d’un remarquable 25 % en moyenne et la satisfaction des usagers a progressé de 10 %. Cette technologie permettra de réduire considérablement la consommation d’énergie, non pas dans quelques années, mais quelques semaines après son déploiement.
Que cela nous plaise ou non, le nucléaire fait partie intégrante de la solution. Alors que la plupart des pays européens sont réticents à aller de l’avant, l’Asie l’adopte massivement. L’idée dominante selon laquelle les déchets nucléaires sont uniquement dangereux et l’industrie ne sait pas quoi en faire est fausse. Le nucléaire doit absolument faire partie intégrante de la transition énergétique si nous voulons un jour atteindre une économie à faible émission de carbone.
L’Europe a investi massivement dans la transition écologique, mais il y a une pièce manquante, à savoir son manque d’infrastructures industrielles et son incapacité à contrôler la chaîne d’approvisionnement nécessaire à cette transition. À partir de 2035, on pourra seulement vendre des voitures et des camionnettes neuves dans l’Union européenne si elles n’émettent aucun CO2. Mais qui contrôle l’extraction et le traitement des minerais critiques nécessaires aux batteries des véhicules électriques et à la transition écologique ? La Chine. Il ne sera pas facile de diversifier l’approvisionnement vis-à-vis de la Chine et cela ne se fera pas du jour au lendemain. Nous sommes en train de répéter exactement la même erreur qu’avec la Russie (pour l’énergie fossile) et la Chine (pour les masques et des médicaments vitaux pendant la pandémie de Covid).
L’intégralité des prévisions de Saxo pour le quatrième trimestre de 2022, assorties d’articles plus détaillés signés par ses analystes et stratégistes, est disponible ici : https://www.home.saxo/insights/news-and-research/thought-leadership/quarterly-outlook
La Suède : un ‘smörgåsbord’ d’innovations de pointe
Par Stephen Paice, responsable des actions européennes chez Baillie Gifford
Le 8 septembre 2022
La Suède, pays de 10 millions d’habitants, est un champion de la commercialisation des innovations, de la fermeture éclair aux emballages Tetra Pak. Les entreprises familiales et celles dirigées par leurs fondateurs ont formé des pôles d’innovation de premier plan. Les technologies vertes, développées et perfectionnées en Suède, se répandent dans le monde entier. Analyse.
Valeurs exceptionnelles
Un dicton suédois dit : « Si vous regardez la Suède depuis l’espace, vous voyez deux choses : la social-démocratie et les Wallenberg ». Ce dernier indique l’importance considérable de l’une des plus puissantes dynasties d’affaires d’Europe. Les Wallenberg sont, entre autres, actionnaires majoritaires d’Atlas Copco, un leader mondial des compresseurs, pompes et autres outils électriques, dont les origines remontent à 1873. L’entreprise reflète une caractéristique suédoise : une capacité à générer des rendements extrêmes sur de longues périodes.
Pourquoi la Suède produit-elle autant de ces « valeurs exceptionelles »? Il y a dans ce pays une force culturelle suédoise : le pays se situe en tête ou dans le haut du tableau des indices mondiaux d’innovation et de compétitivité. La fermeture éclair zip, la clé à molette, la ceinture de securité à trois points, le Tetra Pak et le pacemaker… Les Suédois peuvent à juste titre prétendre les avoir tous commercialisés.
Une affaire de famille
Il y a un facteur important qui contribue à la gestion à long terme de ces entreprises, si propice à de solides rendements futurs. Elles sont toujours dirigées par leurs fondateurs, ou par les générations suivantes de la même famille fondatrice. Atlas Copco en est un excellent exemple. Il s’agit de l’une des meilleures sociétés d’ingénierie au monde, si ce n’est la meilleure. Depuis 20 ans, Atlas Copco supplémente la croissance de son chiffre d’affaires par l’acquisition d’autres entreprises. Grâce à un service clientèle et un service après-vente fantastiques, elle a pu croitre et améliorer sa rentabilité.
Mais c’est la culture au sein de l’entreprise qui est la plus appréciée. Il ne s’agit pas seulement d’innovation, mais la culture a été affinée avec le temps et est axée sur la décentralisation. En d’autres termes, chaque entreprise sous l’égide d’Atlas Copco a le pouvoir de prendre des décisions qui ont un impact sur ses résultats. Il y a, au sein de cette entreprise, une mentalité à long terme, avec un accent sur le service à la clientèle et le soin des employés.
En visite chez les Wallenberg
Sur le mur de cette société holding des Wallenberg, il y a des portraits des cinq générations de la famille. On a alors ce sentiment d’histoire et d’héritage. La famille est là pour protéger et maintenir ces entreprises. Elle veut les transmettre à la génération suivante dans un meilleur état qu’elle les a trouvés. Cet état d’esprit se prête à une vision à plus long terme et à la prise de décisions à valeur ajoutée. Lorsqu’on lui pose la question, Jacob Wallenberg, l’ancien vice-président, répond : « Les investissements à long terme portent sur 50 ans et plus ».
Parmi les autres entreprises suédoises détenues par la famille fondatrice figurent Hexagon, Sandvik, Volvo, Handelsbanken et Assa Abloy. Chacune de ces entreprises compte un membre de la famille dans son conseil d’administration. Cela signifie qu’ils ont un propriétaire à long terme qui influence les décisions d’allocation du capital.
Pôles d’innovation
On peut cependant remarquer un changement de génération. Les entreprises dirigées par plusieurs générations d’une même famille sont rejointes par des entreprises de première génération, comme Spotify. Ces entreprises bénéficient de la culture suédoise de l’innovation qui soutient les start-up. Des gens comme Daniel Ek, fondateur de Spotify, ont donné aux start-ups un rôle modèle et l’ambition de voir ce qu’elles peuvent réaliser.
La politique gouvernementale y contribue. Dans les années 1990, le gouvernement a offert aux résidents suédois un allégement fiscal pour l’achat d’ordinateurs personnels, dans le but d’installer un PC dans chaque foyer. Cela a permis aux Suédois de devenir des adeptes précoces de la technologie. Quelques années plus tard, Stockholm a construit le plus grand réseau ouvert en fibre optique et 100 % des entreprises et la plupart des foyers y sont raccordés. Cela a été un énorme avantage pour ces entreprises. Stockholm, en particulier, s’est faite une réputation d‘usine à licornes’ (une ‘licorne’ est une start-up privée dont la valeur dépasse le milliard de dollars) grâce à une culture de la collaboration, à la mentalité à long terme de ses fondateurs, au soutien offert aux entrepreneurs et à une main-d’œuvre encouragée à innover.
À un moment donné, la capitale suédoise produisait le plus grand nombre de ‘licornes’ par habitant que toute autre région du monde. Les noms de certaines de ces entreprises, comme King et Mojang, ne vous disent peut-être rien, mais ce qu’elles ont produit, Candy Crush et Minecraft, est connu dans le monde entier. Il existe également des clusters technologiques et de jeux, par exemple dans le quartier de Södermalm à Stockholm. On peut aussi citer les entreprises de fintech Klarna et iZettle ou encore la plateforme musicale Spotify. Avec toute l’innovation que nous voyons, l’avenir des entreprises suédoises est brillant.
Technologies à faible émission de carbone
Bon nombre des technologies vertes qui ont vu le jour en Suède se répandent aujourd’hui dans le monde entier. La Suède est un leader mondial en matière de décarbonisation. Non seulement elle a été l’une des premières à se fixer une ambition de zéro émission nette – l’objectif est de zéro émission nette de CO2 d’ici 2045 – mais elle prévoit également de réduire ses émissions de CO2 de près de 60 % d’ici 2030.
La société suédoise Northvolt est un exemple de cette nouvelle génération d’entreprises européennes : Il s’agit d’une plateforme de production de batteries vertes et durables. Bien qu’elle n’ait été fondée qu’en 2016, elle sera probablement bientôt l’entreprise la plus précieuse de Suède. Il est important que l’entreprise soit basée en Suède. Le pays produit la majeure partie de son électricité à partir de l’énergie hydraulique. Northvolt utilise cette énergie hydroélectrique pour réduire les coûts de production de ces batteries, mais elle a également placé leur durabilité en tête de liste des priorités.
S’inscrire dans le long terme
On peut espérer que, d’ici la fin de la décennie, ce ‘champion européen en devenir’ aura conquis une part considérable du marché en pleine expansion des batteries électriques, ainsi qu’une position importante dans le stockage de l’énergie et une série d’autres applications industrielles. Northvolt est dans une position fantastique pour fournir l’Europe en batteries durables. Elle dispose des bonnes personnes et de la mentalité à long terme pour réussir.
Le gaz : une épée de Damoclès pour l’économie
Par le Dr Volker Schmidt, gestionnaire de portefeuille senior chez Ethenea Independent Investors S.A.
Le 24 août 2022
La menace de pénurie de gaz plane actuellement comme une épée de Damoclès au-dessus de tous les pronostics économiques. Analysons l’impact de la réduction du gaz sur l’économie, l’évolution de l’inflation et des taux d’intérêt et la menace d’une récession.
Des prévisions de croissance chancelantes
La zone euro, en tant qu’importateur majeur de gaz, est certainement particulièrement touchée par la pénurie et l’explosion des prix. Il est donc très surprenant que les prévisions du FMI, publiées récemment fin juillet, prévoient une croissance légèrement plus élevée dans la zone euro qu’aux États-Unis, tant en 2022 qu’en 2023.
Toutefois, les prévisions de la zone euro reposent certainement sur des bases plus fragiles. Le risque d’un arrêt des livraisons de la Russie est omniprésent.
Le mot récession a été récemment plus souvent mentionné en rapport avec l’évolution économique. Cela est d’autant plus surprenant si l’on considère que l’économie américaine a récemment créé plus de 400.000 emplois par mois. Il en va de même pour la zone euro.
Même si l’économie américaine, avec deux trimestres consécutifs de croissance négative, devait tomber dans une récession technique, on peut s’attendre à un marché du travail robuste en 2023. Ce n’est qu’en 2024 qu’un atterrissage brutal pourrait avoir lieu, avec un taux de chômage supérieur à 5%. Mais cela n’a actuellement que peu de pertinence pour les marchés financiers.
Le prix du gaz pousse l’inflation
Un autre aspect important pour les investisseurs est l’influence du prix du gaz sur l’inflation. Là encore, la zone euro et les États-Unis ne sont pas très éloignés, avec des taux d’inflation qui se situent actuellement autour de 9%. La hausse spectaculaire du taux d’inflation a commencé plus tôt aux Etats-Unis et s’est entretemps nettement généralisée.
En revanche, la hausse dans la zone euro est arrivée plus tard et est très largement due aux prix élevés de l’énergie.
Le FMI verrait une accalmie plus rapide aux Etats-Unis avec un taux d’inflation de 3% en 2023, alors que la zone euro devrait encore se situer à 3,9%. Les courbes des taux des bons du Trésor américain et des obligations d’État allemandes reflètent en partie cette situation. La courbe américaine est déjà nettement inversée, avec des rendements à 2 ans nettement supérieurs aux rendements à 10 ans, alors que la courbe des taux allemande continue d’avoir une forme classique à la hausse.
La Réserve Fédérale américaine est déjà plus avancée dans ses hausses de taux, notamment en raison de l’inflation déjà avancée. Il ne faut pas s’attendre à une nouvelle baisse des taux avant fin 2023. En revanche, la BCE vient tout juste de commencer à augmenter ses taux. Si les prévisions du FMI se confirment et que l’approvisionnement en gaz de la Russie reste relativement stable, la BCE ne devrait pas envisager de baisser les taux avant la Fed. C’est pourquoi les rendements des emprunts fédéraux à 10 ans, inférieurs à 1%, semblent nettement trop bas. Les investisseurs qui ne croient pas encore à une récession notable dans la zone euro, devraient surveiller l’évolution des prix des emprunts fédéraux à 10 ans, car les prix pourraient à nouveau baisser et les rendements augmenter
Action de sauvetage pour les fournisseurs d’énergie
Au printemps déjà, on avait souligné qu’un investissement dans les fournisseurs d’énergie était lié à des risques élevés. Électricité de France (EDF) sera probablement nationalisée et Uniper sera sauvée par l’État allemand, de sorte que les détenteurs d’obligations et de reconnaissances de dettes récupéreront leur argent, mais la prudence était certainement correcte. Pour les actionnaires d’EDF, la nationalisation signifie qu’ils bénéficieront à nouveau d’un prix attractif pour leur investissement, tandis que les actionnaires d’Uniper devront digérer une perte importante.
Les informations contenues dans cet article ne constituent en aucun cas une sollicitation, une offre ou une recommandation en vue de l’achat ou de la vente de parts de fonds ou de la réalisation d’une quelconque transaction.
Est-ce le bon moment pour acheter des obligations ?
Par Jim Leaviss, CIO Taux chez M&G Investments
Le 4 juillet 2022
Dans un contexte de hausse de l’inflation et des taux, certaines classes d’actifs obligataires peuvent devenir plus intéressantes.
Depuis le début de l’année 2022, l’ensemble des classes d’actifs obligataires a connu une forte réévaluation de leurs valorisations, initialement provoquée par les inquiétudes liées à la hausse de l’inflation, et plus récemment par les inquiétudes liées à la croissance mondiale. Malgré le maintien de la volatilité à court terme, la forte baisse des marchés a toutefois créé des opportunités sur les marchés de taux, avec des spreads de crédit plus larges qui offrent un amortisseur contre toute nouvelle hausse des taux d’intérêt.
Certains compartiments du marché obligataire peuvent garantir une source de revenu au sein d’un portefeuille et participer à se protéger contre l’inflation. Les obligations peuvent également contribuer à assurer une bonne diversification du portefeuille, en particulier en période d’incertitude. Toutefois, celles-ci sont très sensibles à la hausse de l’inflation et à un resserrement de la politique monétaire, comme l’a montré le premier semestre de l’année.
Privilégier les stratégies crédit à court terme et les obligations à taux variable
Parmi le large éventail d’instruments disponibles sur les marchés de taux, les obligations à court terme et les obligations à taux variable (FRN) sont à privilégier pour affronter les conditions actuelles du marché.
Pour les investisseurs qui pensent que les taux vont continuer à augmenter et que les entreprises sont en bonne santé, une stratégie crédit à court terme gérée activement prend tout son sens. Ces fonds ont la latitude d’investir dans une variété d’actifs plus complexes, tels que les ABS, qui peuvent offrir une prime de risque attrayante bien supérieure à celle des obligations d’entreprise ordinaires.
Certains fonds exposés aux FRN offrent non seulement une protection, mais aussi un moyen de bénéficier potentiellement d’une éventuelle augmentation des taux d’intérêt.
Les FRN à haut rendement ont également une sensibilité proche de zéro, qui s’est avérée particulièrement utile lors de la récente chute brutale des marchés des obligations souveraines. Leur faible sensibilité aux taux a été l’un des principaux moteurs de la récente surperformance de la classe d’actifs par rapport à la dette à haut rendement traditionnelle, dans un contexte où les investisseurs ont cherché à protéger leurs portefeuilles des hausses de taux d’intérêt anticipées. En plus d’offrir une protection contre la hausse des taux, les spreads compensent désormais de manière nette le risque de défaut.
Les opportunités à ne pas négliger dans la Chine de Xi Jinping
Par Terrence Gray, Gérant de portefeuille chez Lazard Asset Management
Le 9 juin 2022
L’aspiration de la Chine à une « prospérité commune » renforce tout particulièrement les perspectives des catégories à faible revenu. Elle pourrait permettre au pays d’atteindre une croissance plus durable et de créer de nouvelles opportunités d’investissement sur le long terme.
Au cours de l’année écoulée, la « Prospérité commune » est devenue le nouveau mantra du gouvernement chinois. Celui-ci a adopté une série de réglementations en ce sens, ciblant les segments d’activité à forte croissance de la technologie aux jeux d’argent, en passant par l’éducation, la santé ou encore l’immobilier.
Réglementations et réformes
Pour comprendre les motivations de la Chine, remettons dans leur contexte les dernières réglementations et réformes. Depuis que la Chine a entamé en 1978 l’ère des réformes actuelle, sous Deng Xiaoping, elle est devenue la deuxième économie mondiale. L’extrême pauvreté a connu un recul spectaculaire de 66 % en 1990 à 0,3 % en 2019, selon la Banque mondiale. Quatre décennies de forte croissance ont toutefois créé des problèmes structurels inattendus, notamment la hausse des inégalités de revenus. Malgré le succès de la Chine dans l’élimination de l’extrême pauvreté, près de 70 % de la population demeure dans le segment des faibles revenus. Seulement 8,5 millions de personnes sont considérées comme ayant des revenus élevés, tandis que 400 millions se trouvent entre-deux.
Les dirigeants chinois sont bien conscients de cette disparité et prennent des mesures pour la réduire. En mai 2020, le Premier ministre chinois Li Keqiang a évoqué le nouvel objectif du pays de compter 700 millions de personnes dans la classe moyenne d’ici 2035. Ce but ambitieux consiste en substance à faire entrer en 15 ans dans cette catégorie 300 millions de personnes, ce qui équivaut à la quasi-totalité de la population étasunienne.
Le piège du revenu intermédiaire
L’expansion de la classe moyenne est une étape cruciale sur la longue route menant au statut d’économie développée. Aujourd’hui premier exportateur mondial, la Chine doit diversifier et étoffer la demande nationale pour éviter ce que la Banque mondiale appelle le « piège du revenu intermédiaire », c’est-à-dire lorsqu’un pays émergent ne parvient pas à développer de nouveaux marchés d’exportation et à faire croître sa propre économie intérieure.
En d’autres termes, elle cesse d’innover et se retrouve dans un cycle de croissance faible dont il lui est difficile de s’échapper. De fait, des dizaines d’économies émergentes ont été prises dans ce piège au fil des ans, à l’exception notable de Hong Kong et du Japon.
Réglementation : Les opportunités
L’ambitieux objectif de la Chine nécessite des mesures radicales. Les réformes et réglementations adoptées l’année dernière ont essentiellement eu pour vocation de diffuser la richesse ou tout du moins de niveler les règles du jeu, par exemple dans les domaines de l’éducation, du logement, du commerce et de la santé.
Lorsqu’on examine l’évolution réglementaire de la Chine sous l’angle des opportunités, on cherche à identifier les secteurs et les entreprises qui pourraient en bénéficier.
À l’heure actuelle, on peut ainsi déceler des pistes intéressantes dans trois segments.
- Produits de consommation
Dans l’ensemble, la consommation chinoise devrait fortement augmenter dans les années à venir. À l’heure actuelle, le taux d’épargne de la Chine est d’environ 40 % du PIB, le plus élevé au monde. Les principales raisons en sont l’absence de filet de sécurité et les prix prohibitifs de l’immobilier. Dans la mesure où la réglementation et les réformes peuvent améliorer ce filet de sécurité, les consommateurs chinois prendront suffisamment confiance pour augmenter leurs dépenses. Un modèle de croissance économique basé sur la consommation nécessite beaucoup moins d’effet de levier que le modèle d’investissement qui a prévalu au cours des dernières décennies en Chine, ce qui devrait le rendre plus durable. En outre, des prix du logement plus abordables devraient libérer les ressources financières des ménages au profit de catégories en forte croissance, notamment les produits laitiers, la restauration rapide, les assurances, les appareils électroménagers, les médias et les cosmétiques.
- Santé
Le gouvernement s’est attaché à réduire les prix des soins de santé pour les rendre plus abordables. Un système d’approvisionnement basé sur les volumes géré par l’Administration de la sécurité des soins de santé permet d’effectuer des achats à grande échelle pour tous les hôpitaux par le biais d’un processus d’appels d’offres. Les fabricants de dispositifs médicaux proposant des produits de qualité devraient bénéficier de volumes accrus, car les hôpitaux opèrent en synergie et les coûts élevés de distribution (qui ont fait augmenter de près de 300 % le prix d’usine de certains articles) ont été éliminés.
- Technologie
Les réglementations antitrust imposées aux géants de la technologie profiteront certainement aux petites entreprises technologiques. Bien que nous n’en soyons qu’à l’aube de cette évolution, on a déjà constaté une augmentation significative des nouveaux commerçants sur une plateforme d’e-commerce plus modeste ciblant les clients des villes des catégories inférieures. La technologie joue un rôle essentiel dans l’amélioration de la productivité et la croissance durable des revenus pour ceux qui se trouvent en bas de la pyramide. Par exemple, les commerçants de petite et moyenne taille, qui n’ont qu’une faible capacité d’acquisition de clients, devaient s’acquitter de frais élevés auprès des grandes plateformes monopolistiques de commerce électronique. Les changements réglementaires permettront à ces commerçants d’acquérir une meilleure maîtrise sur leurs partenariats et d’un plus grand nombre d’options dans ce domaine. Les outils de gestion de la relation client (CRM) qui aident ces commerçants à acquérir directement des clients, et donc d’économiser sur les coûts marketing et autres frais associés, constituent un domaine de croissance potentiel.
Focus sur la transformation de la Chine
Les inquiétudes concernant les dernières mesures réglementaires dépassent largement le monde de l’investissement. Le gouvernement intervient-il trop dans la vie privée des citoyens et dans la prise de décision des entreprises ? Les réformes en Chine vont-elles être repoussées ? En définitive, la Chine est-elle toujours favorable à la croissance ?
Même s’il convient de surveiller l’action de ce gouvernement, la volonté de la Chine en faveur d’une prospérité commune, ou de la diffusion de la richesse, est favorable à la croissance. Les succès de la Chine au cours des 30 à 40 dernières années sont redevables à son économie de marché. Certaines mesures récentes peuvent sembler trop rapides et brutales, mais l’objectif sous-jacent de Xi Jinping et de son administration est d’accroître le revenu de la population, en développant ainsi la classe moyenne et en créant une croissance plus durable pour l’économie sur le long terme. S’ils se concentrent sur cette transformation, les investisseurs peuvent déceler des opportunités intéressantes en Chine au cours des dix prochaines années.
Investir dans les armes n’est pas durable !
Par Hans Stegeman, économiste et chief strategist chez Triodos Investment Management
Le 5 mai 2022
L’invasion russe de l’Ukraine a ramené au centre du débat le financement de l’industrie de l’armement par les institutions financières. S’il y a un critère d’exclusion que la plupart des banques responsables et éthiques ont en commun, c’est une position claire contre les armes. L’industrie de la défense elle-même aurait fait pression pendant un certain temps pour que l’Union européenne déclare les investissements dans les armes comme durables dans sa taxonomie sociale. Mais les armes sont tout sauf durables.
Vers une normalisation du financement des armes
Les valeurs boursières des fabricants d’armes ont grimpé en flèche à la suite de l’annonce par plusieurs pays européens de l’augmentation de leurs dépenses de défense. Plusieurs institutions financières ont alors fait part de leur volonté de reconsidérer et de renforcer leur implication dans le secteur. Alors que la guerre en Ukraine a mis la sécurité au centre du débat en Europe, financer la fabrication et le commerce d’armes signifie financer la guerre, non seulement aujourd’hui mais aussi à l’avenir.
Les banques qui commencent à financer la production et le commerce d’armes aujourd’hui continueront à le faire une fois le conflit ukrainien terminé. Cela signifie normaliser ce type d’activités de financement et détourner les fonds (et l’attention) non seulement de la prévention des conflits, du renforcement des capacités et de la reconstruction, mais aussi, et c’est important, d’autres activités économiques réelles qui peuvent réellement contribuer au progrès de la société.
Manque de transparence
Il convient également de souligner que le financement de l’industrie de l’armement est en fait loin de ce que signifie investir dans la sécurité et la défense. Le commerce des armes manque structurellement de transparence. Ce secteur est mal contrôlé et est très sensible à la corruption[1]. Les gouvernements fournissent rarement des listes complètes de pays exclus des activités commerciales. Lorsqu’ils interdisent explicitement la vente d’armes à des zones de conflit, ces critères sont fréquemment mis à mal par le manque de transparence. Même lorsque des armes et des équipements militaires sont vendus et échangés à des fins de défense et de sécurité, il est impossible de déterminer à l’avance comment, où et par qui ils seront utilisés. Même les armes obsolètes peuvent trouver de nouveaux marchés « d’occasion ». En fin de compte, les banques et les institutions financières qui canalisent l’argent vers les producteurs d’armes n’ont aucun contrôle formel, ou un contrôle limité, sur les destinataires des armes.
En fait, cela ne préoccupe guère les institutions financières qui s’engagent dans cette activité, tant que les rendements sont intéressants (ce qui a été le cas au cours des dix dernières années[2]).
Des effets néfastes
Les effets plus larges du commerce des armes s’ajoutent à la foi mal placée dans la manière dont le commerce des armes pourrait contribuer à la sécurité collective dans diverses parties du monde, sans parler du coût physique, matériel et aussi psychologique que les conflits armés imposent aux gens (et à la nature [5]).
Une étude intéressante du Transnational Institute (TNI), par exemple, a documenté la manière dont l’industrie de l’armement, par le déploiement d’armes dans les zones de conflit, non seulement contribue aux déplacements forcés, mais en tire également profit en augmentant la militarisation des frontières qui vise à contenir les migrations. L’étude se concentre sur les exportations d’armes de l’Union européenne et du Royaume-Uni, mais les conclusions peuvent facilement être étendues à d’autres pays exportateurs.
La production d’armes n’est jamais durable
Dès lors, en regardant simplement les faits, il n’y a pas de place pour que les armes et les produits connexes soient considérés comme durables dans le cadre de la future taxonomie sociale de l’Union européenne.
L’intention déclarée de la taxonomie de l’Union européenne est d’établir un langage commun et des définitions claires de ce qui est « durable », en créant « un système de classification commun pour les activités économiques durables »[3]. Si les armes et les équipements militaires peuvent être jugés importants par les gouvernements nationaux pour des raisons de sécurité, cela ne suffit pas pour qualifier la production et le commerce d’armes de durables, pour toutes les raisons mentionnées ci-dessus.
Un appel !
La guerre en Ukraine a rouvert une page de l’histoire européenne et mondiale que beaucoup d’entre nous pensaient fermée. Les images de mort et de destruction semblent désormais plus proches que ce que beaucoup d’Européens ont pu percevoir au cours de leur vie. Par un tour tragique de l’esprit, nous pouvons ressentir la douleur qui irradie de la dévastation de Mariupol et de Bucha avec une intensité qui ne nous permet pas de détourner le regard, et pourtant nous savons que des actes de violence similaires et un profond mépris de la vie humaine sont une réalité quotidienne dans d’autres parties du monde également. Cette guerre doit cesser. Mais peut-être plus important encore, la guerre doit cesser.
[1] https://ti-defence.org/dci/
[2] https://www.msci.com/documents/10199/3675869d-f312-4d1f-8ca8-aa59b8220330
[3] https://ec.europa.eu/info/business-economy-euro/banking-and-finance/sustainable-finance/eu-taxonomy-sustainable-activities_en#why
Ne pas sous-estimer l’importance des matières premières !
Par Peter Garnry, Head of Equity Strategy chez Saxo Bank
Le 5 avril 2022
Au cours des 15 derniers mois, les actions mondiales ont subi une forte correction par rapport aux matières premières et, sauf erreur, nous devrions nous retrouver dans un nouveau super cycle des matières premières au cours de la prochaine décennie.
Les investisseurs doivent alors comprendre l’allocation des actifs et surpondérer leur exposition aux matières premières. Il est facile de se laisser entraîner par les turbulences à court terme suscitées par les guerres, les publications de bénéfices et les mouvements de prix, mais la situation générale suggère que, dans les années à venir, les actions connaîtront une réévaluation spectaculaire par rapport à l’inflation et aux matières premières.
Des actions sans matières premières : un jeu dangereux pour les investisseurs
Les investisseurs se laissent souvent piéger par les turbulences à court terme, et oublient la perspective globale. Avant même le début de la guerre en Ukraine, le monde est rentré dans le mur en ce sens que le monde physique était trop exigu pour soutenir l’énorme demande créée pendant la pandémie.
Des années de sous-investissement dans l’énergie et les métaux avaient fini par se résorber. La guerre en Ukraine a amplifié la demande de matières premières, mais le rallye des actions de ces dernières semaines et leur réaction à une paix potentielle ne correspondent pas à la réalité.
En février 2022, les actions mondiales affichaient un retard de 15 mois par rapport aux matières premières, avec une sous-performance de 24 % des premières par rapport aux secondes. Il s’agit de la plus grande réévaluation relative des actions depuis 2008. Mais, plus important encore : si nous considérons les actions par rapport aux matières premières dans une perspective plus large depuis 1969, nous avons connu deux périodes où les actions ont été réévaluées de manière spectaculaire par rapport au monde physique, à savoir les périodes des années 1970 et 2000, qui ont toutes deux englobé les deux super cycles précédents des matières premières.
La période de surperformance épique des actions par rapport aux matières premières comprise entre 2009 et 2020 a été une période historique au cours de laquelle les plus grands moteurs de profit du monde ont réalisé des bénéfices avec peu de matières premières. L’excès de création de richesse a privé le monde d’investissements dans le monde physique, préparant l’économie à un choc massif de contraintes d’approvisionnement.
Durant les dix prochaines années, tout tournera autour du prochain super cycle des matières premières et de la sous-performance des actions par rapport au monde physique. L’évolution des actions pourrait être stable ou en légère hausse comme dans les années 1970, mais par rapport à l’inflation ou aux matières premières, les actions seront sous-performantes.
S’intéresser aux matières premières
Il est donc primordial que les investisseurs qui étaient intégralement investis en actions ces 12 dernières années commencent à s’intéresser aux matières premières et à l’allocation des actifs s’ils ne veulent pas perdre toute une décennie.
Les principaux thèmes à surpondérer dans le régime actuel restent la logistique, la cybersécurité, le secteur des matières premières, la défense et la transition verte. Au niveau macroéconomique, les valeurs liées à l’inflation, tels que les obligations protégées contre l’inflation et les matières premières, surperformeront les obligations à rendement nominal et les actions.
Les ETF : désormais éloignés de leur idée d’origine !
Par Christof Schürmann, Flossbach von Storch
Le 7 mars 2022
Les fonds négociés en bourse ont une longue histoire, mais ils n’ont atteint des dimensions pertinentes qu’au cours de ce siècle. Entre-temps, la forte commercialisation a donné lieu à une avalanche de produits qui, toutefois, ne suivent plus l’idée d’origine.
A l’âge de 37 ans, John Bogle est licencié par son employeur de l’époque, Wellington Management, après un mauvais investissement. Il a alors fondé le Vanguard Group en 1975. Un an plus tard, il propose un produit qui va révolutionner le monde financier : un fonds indiciel (Exchange Traded Fund/ETF) en actions. Avec le Vanguard 500 Index Fund, il vendait pour la première fois aux investisseurs un portefeuille sur actions qui ne sélectionnait pas les titres, mais représentait un marché entier et qui, en raison de la large diversification, était censé bien refléter le paysage des entreprises dans le portefeuille d’un investisseur et ouvrir des opportunités boursières équilibrées. Au lieu de chercher l’aiguille dans la botte de foin, Bogle a simplement visé l’ensemble de la botte de foin.
Une longue course vers les sommets
Cependant, il a fallu du temps avant que le concept n’attire l’attention du monde financier. Au début, les fonds indiciels n’existaient que dans une niche. En 1990, le premier fonds négocié en bourse a été lancé sur le marché boursier. Mais même en 2005, les fournisseurs du monde entier ne géraient que 417 milliards de dollars dans 453 produits. Aujourd’hui, cependant, il est difficile d’imaginer un produit d’investissement sans ETF. Leur essor s’est poursuivi même pendant la pandémie. Aujourd’hui, l’idée de Bogle alimente une industrie de plusieurs milliards de dollars, avec des actifs sous gestion de plus de dix mille milliards de dollars au dernier décompte.
Forte concentration des fournisseurs « l’investissement indiciel » est très évolutif et permet aux fournisseurs de réaliser d’énormes économies d’échelle. Cela favorise la concentration. Seuls dix fournisseurs représentent les deux tiers des capitaux sous gestion. Le pionnier Vanguard est toujours en tête, mais il a depuis été dépassé par iShares, une filiale du gestionnaire d’actifs américain Blackrock. Avec State Street, basé à New York, les trois premiers gèrent plus de la moitié de tous les actifs des ETF.
Peu de grands et beaucoup de petits ETF
Les indices américains, en particulier, ont un effet d’attraction sur les ETF d’actions. Trois des quatre plus grands ETF du monde font référence au S&P 500 et rassemblent 1,04 trillion de dollars d’actifs sous gestion, soit environ dix pour cent du total des actifs des ETF. Les produits d’actions américaines sont également numéro trois et numéro cinq en termes d’actifs. Le Vanguard US Total Stock Market ETF gère un peu plus de 292 milliards de dollars, tandis que le Invesco QQQ Trust Series 1, qui a pour référence le Nasdaq 100, gère un peu plus de 204 milliards de dollars. Plus d’un dollar sur sept investi dans des FNB dans le monde est placé dans ces cinq produits.
En dehors de ces poids lourds, les investisseurs sont aujourd’hui confrontés à une multitude d’ETF. Grâce à une forte commercialisation, le nombre d’ETF dépasse aujourd’hui 11 000 produits, soit 24 fois plus qu’il y a 17 ans. Rien qu’en 2021, l’augmentation nette du nombre de produits a été de 12,6 %. Les flux entrants ne progressent pas aussi fortement – les investisseurs répartissent leur argent sur davantage de produits. Au cours des trois dernières années, les ETF ont reçu 2,55 trillions de dollars, toutes classes d’actifs confondues, soit une augmentation de 33,9 pour cent, ou une moyenne de 10,2 pour cent par an.
Les produits en actions ont attiré la majeure partie des fonds frais avec un bon 1,6 trillion de dollars. Les ETF obligataires ont enregistré un afflux de fonds d’un bon 787 milliards de dollars sur les trois années considérées. Les ETF d’actions dominent également de loin le portefeuille avec près de huit mille milliards de dollars.
Les investisseurs concentrent donc de plus en plus leurs placements en actions dans les ETF.
Grandes aiguilles avec peu de foin
Contrairement à l’intention initiale, les investisseurs dans des fonds indiciels censés être largement diversifiés ne parviennent plus à diversifier leurs investissements comme cela était prévu. Au contraire, les fonds les plus populaires sont désormais concentrés sur les valeurs technologiques. Par exemple, la part de ces valeurs dans les ETF du S&P 500 est légèrement inférieure à 30 %, alors que leur part a augmenté de moitié environ au cours des dix dernières années.
Dans le MSCI World, qui est censé englober l’univers d’investissement mondial, la part des valeurs technologiques était également proche de 28 pour cent à la fin de 2021. Par conséquent, les courbes de prix d’un ETF sur le MSCI World et d’un ETF sur le S&P 500 ont été presque parallèles au cours des cinq dernières années, l’indice américain surpassant l’indice mondial de cinq points de pourcentage par an, avec une augmentation annuelle de 17,2 % contre 12,2 %.
Les « Sept Glorieuses »
Si l’on se penche encore davantage sur les indices sous-jacents aux ETF, on découvre des concentrations encore plus étonnantes. Sept entreprises dominent le monde des indices : Apple, Microsoft, Amazon, Tesla, Alphabet – classe A et classe C -, Meta et Nvidia. Dans l’ensemble du S&P 500, avec ses 505 dernières actions, les « Sept Glorieuses » représentent 26 % du plus grand indice boursier américain en termes de capitalisation boursière. Dans l’ensemble du marché boursier américain, qui est censé être encore plus large que le S&P 500, leur concentration est de 22,2 %, à peine moins élevée. Dans le Nasdaq 100 et les ETF basés sur celui-ci, leur poids a récemment atteint près de 49 %.
Les observateurs attentifs pourraient maintenant noter d’un œil critique que les cinq premiers poids lourds susmentionnés parmi tous les produits ETF font référence à des indices américains. Cela est vrai. Mais un regard sur des indices beaucoup plus larges ne dilue guère cette concentration. Le fournisseur d’indices MSCI, par exemple, suit 85% de la capitalisation du marché mondial avec son indice mondial sur 23 bourses des pays développés avec un total de 1546 actions. Malgré sa prétendue largeur, l’indice, dont la capitalisation boursière atteindra 62 000 milliards de dollars à la fin de 2021, contient 69 % d’actions américaines. Les « Sept Glorieuses », en revanche, ont depuis longtemps pris le contrôle du MSCI World, avec une pondération de 17,6 %.
Même dans le MSCI ACWI, qui a été élargi par le MSCI World pour inclure 25 marchés émergents et donc 1420 actions supplémentaires, le poids des sept dominants est toujours de 15,6 %. Les 2958 autres actions se partagent le reste et ont un poids moyen de moins de 0,03%. Le poids médian de toutes les actions d’un ETF iShares sur le MSCI ACWI est d’un maigre 0,01 pour cent. Ceux qui pensent que cela inclut les petites entreprises des niches du marché boursier se trompent : une pondération aussi faible inclut une entreprise du Dax comme le fabricant de cosmétiques Beiersdorf ou la compagnie pétrolière russe Rosneft, qui a récemment été classée 194e dans la liste Fortune Global 500.
Une aggravation supplémentaire par le biais du « smart beta ».
Bien qu’ils contredisent en principe l’idée même « d’investissement passif », les ETF dits « smart-beta » restent également en hausse. Avec 192 milliards de dollars, près d’un dollar sur six nouvellement investi dans des ETF en 2021 appartenait à la catégorie smart beta – un afflux record.
Avec un bon 1 600 milliards de dollars, les ETF smart beta représentent désormais environ 16 % du marché total des ETF. Pour les ETF liés aux actions, la part est même d’environ un cinquième de tous les ETF d’actions.
Les ETF smart beta vont à l’encontre de l’idée originale de Bogle : ils sélectionnent des titres dans la population d’un marché en fonction de facteurs fondamentaux tels que la volatilité du cours des actions ou les paiements de dividendes des entreprises. Le résultat peut être observé dans l’exemple du Vanguard Growth ETF, 80 milliards de dollars, le deuxième plus grand ETF de l’univers smart beta. Au lieu de « seulement » 17,6 % comme dans le MSCI World, les Sept Glorieuses ont ici une pondération de 45,4 % dans le portefeuille.
Les fonds ESG, réduits à des « investissements durables », ne constituent pas toujours une catégorie à part, mais on les trouve parfois dans l’univers des smart beta, parfois dans celui des eco-ETF. Là aussi, la demande croît énormément. Alors qu’un peu moins de onze milliards de dollars seulement ont afflué vers les ETF ESG en 2018, ce chiffre a déjà atteint un bon 156 milliards de dollars en 2021.
Les gestionnaires d’ETF d’actions ESG détenaient récemment près de 375 milliards de dollars d’actifs, soit près de 5 % de tous les ETF d’actions.
Mais même avec le label protection du climat, bonne gouvernance d’entreprise et production sociale, la diversification du portefeuille ne s’améliore pas vraiment. À 23 %, par exemple, la part des Sept Glorieuses dans le plus grand ETF ESG en termes d’actifs sous gestion, le iShares ESG Aware MSCI USA ETF de 23,5 milliards de dollars, est simplement inférieure d’environ trois points de pourcentage à celle d’un ETF S&P 500 classique ou d’un peu moins d’un point de pourcentage à celle du troisième plus grand ETF global (US Total Stock Market ETF). L’ETF « durable » n’est donc qu’une petite variation de son grand frère, qui se passe de critères climatiques et sociaux. Et ceux qui veulent se différencier régionalement des États-Unis ou d’un investissement mondial de type américain achètent à nouveau principalement dans la technologie. Dans l’ETF MSCI EM iShares ESG Aware de 6,2 milliards de dollars, par exemple, la part d’une entreprise de semi-conducteurs représente à elle seule un bon 7,9 %. Les six premières positions sont détenues par des sociétés technologiques asiatiques, pour un poids total de 22,1 %.
Le passif redevient actif
« Ne jamais être complètement dedans, mais aussi ne jamais être complètement hors du marché » – ce conseil a été donné par John Bogle à l’âge de 89 ans dans l’une de ses dernières interviews en septembre 2018. Chaque investisseur devrait s’exposer aux actions en fonction de son quota de bien-être, et ne pas y renoncer même en cas de fortes fluctuations des cours. Cependant, son idée originale d’utiliser un fonds négocié en bourse pour investir dans un univers large, et donc éventuellement moins volatil ou risqué, ne peut plus guère être réalisée. L’univers des ETF est dominé par un nombre presque impossible à gérer de produits axés sur des thèmes ou des domaines particuliers. Et ceux qui veulent acheter « l’ensemble du marché boursier », par exemple, s’égarent souvent.
Car même dans les ETF d’actions censés représenter le marché mondial, quelques actions individuelles ont désormais une forte pondération. Il y a deux raisons principales à cela : Premièrement, l’industrie des ETF a réussi à séduire les clients pour qu’ils reviennent à l’investissement « actif ». Pour cette gestion « active », la facture des frais est naturellement plus élevée. Deuxièmement, la politique prolongée des banques centrales en matière de taux d’intérêt bas a déplacé la capitalisation boursière vers les entreprises technologiques sensibles aux taux d’intérêt bas. Ceux qui sont considérés comme des investisseurs « passifs » aujourd’hui achètent quelques grosses aiguilles dans une botte de foin assez petite.
Pourquoi investir dans le thème « Women in Leadership » ?
Par Peter Garnry, Responsable de la stratégie actions chez Saxo Bank
Le 17 février 2022
L’ESG est une priorité pour les entreprises et les investisseurs. Souvent, l’accent est mis uniquement sur le E, car l’environnement est une préoccupation majeure des décideurs politiques en raison du changement climatique. Mais on peut se concentrer aussi sur le S (social) à travers le leadership des femmes.
Il est alors possible de sélectionner des entreprises ayant un pourcentage élevé de femmes dans leur équipe dirigeante et représentant une valeur de marché de 1,1 billion de dollars. Des recherches récentes suggèrent que les entreprises dont l’équipe dirigeante présente un degré élevé d’égalité entre les sexes obtiennent de meilleurs résultats tant sur le plan des fondamentaux que sur le marché des actions.
Pourquoi le leadership féminin ?
Le pourcentage de femmes dans l’équipe de direction des entreprises fait partie de l’aspect social des entreprises. Des recherches récentes (ici et ici) montrent également que le fait d’avoir une équipe de direction plus diversifiée en termes de genre a un impact positif sur la performance des entreprises. Une recherche de S&P Global montre également que les entreprises cotées en bourse ayant plus de femmes dans l’équipe dirigeante sont plus performantes.
L’histogramme ci-dessous montre la répartition des femmes en pourcentage des équipes dirigeantes parmi 2.600 entreprises dont la valeur marchande est supérieure à 5 milliards de dollars en Amérique du Nord, en Europe et en Asie.
Le pourcentage médian de femmes n’est que de 14,3 % et très peu d’entreprises présentent une égalité des sexes. Ce chiffre est sans doute très bas et montre le grand changement qui se produira sans aucun doute au cours des prochaines décennies. Cependant, dans l’intervalle, plusieurs entreprises ont déjà atteint l’égalité des sexes dans leur équipe de direction, et ces entreprises peuvent constituer la base d’un panier d’actions d’entreprises axées sur le leadership féminin.
Quelques exemples
Parmi les entreprises répondant à ce critère de leadership au féminin, on retrouve des entreprises comme JPMorgan Chase mais aussi quelques noms surprenants comme le géant minier BHP Group et la société d’exploration pétrolière et gazière Woodside Petroleum. Sur base d’un panier de 30 actions sélectionnées selon ce critère, on constate que la croissance médiane des revenus de ces 30 sociétés est de 12,8 %, ce qui est supérieur à la moyenne du marché, et le ROIC/ROE médian est de 13,6 %, ce qui est légèrement supérieur à la moyenne mondiale. A noter cependant que les performances historiques ne sont pas un indicateur des performances futures.
La nouvelle Silicon Valley : les actions asiatiques
Par Frank Schwarz, Portfolio Manager chez MainFirst
Le 17 janvier 2022
Tout investisseur qui se penche aujourd’hui sur la question des ETF ne peut ignorer l’indice MSCI World. Mais quel degré de diversification le MSCI World offre-t-il réellement ? Présenté comme un investissement de portée mondiale comprenant environ 1.600 sociétés, il est composé à 65 % d’actions américaines, suivies par l’Europe avec environ 30 %. Le reste, relativement minime, réplique des sociétés asiatiques. Cependant, l’équilibre mondial des forces a considérablement évolué ces dernières années.
Corée du Sud et Chine
Une étude réalisée par Global Fortune a révélé qu’au total, 203 des 500 entreprises ayant le chiffre d’affaires le plus élevé sont basées en Asie. La Chine et le Japon représentent à eux seuls 188 de ces entreprises. Compte tenu de la vitesse des innovations en Asie, négliger le continent serait une grave erreur. Au cours des huit dernières années, l’entreprise moyenne du MSCI World a augmenté ses revenus de seulement 4 % par an. Les principales économies développées reprises dans l’indice, avec les États-Unis en tête, devraient être confrontées à une décennie de croissance ralentie. Au lieu de cela, nous voyons des pays comme la Corée du Sud et la Chine investir massivement dans la recherche et le développement afin de concurrencer avec succès la position dominante du monde occidental, comme l’on a déjà pu le constater ces dernières années.
Si l’on souhaite profiter des tendances du secteur technologique au cours des 10 prochaines années, on ne peut pas passer à côté du continent asiatique pour l’allocation d’actifs. On peut y voir la Silicon Valley de demain, du moins en partie. En parallèle, la vitesse à laquelle les nouveaux modèles économiques en Asie progressent et sont soutenus par l’État ne cesse d’augmenter. Ainsi, en 2020, la Chine a dépassé les États-Unis en termes de dépenses de recherche et de développement et, d’ici 2025, la République populaire devrait déjà y investir près de 900 milliards de dollars par an.
Quelles opportunités ?
Les plus grandes opportunités en Asie se concentrent dans les domaines technologiques fondamentaux tels que les semi-conducteurs, les véhicules électriques, l’intelligence artificielle, la robotique et l’automatisation. Les épicentres technologiques sont les pays de la Corée du Sud, du Japon, de la Chine et de Taïwan. L’impact de l’avancée économique et de la prospérité accrue se reflétera inévitablement sur les marchés des biens de consommation. S’il n’est pas exclu que les groupes de marques européennes profitent également de la dynamique asiatique, le gouvernement chinois se concentre désormais de plus en plus sur la promotion des producteurs de marques locales.
Investir de manière durable en Asie ?
Lorsqu’il s’agit d’intégrer des critères ESG dans leur processus d’investissement, dans le cadre d’une comparaison intercontinentale, les investisseurs asiatiques sont fortement à la traîne. Si les fonds axés sur les investissements européens bénéficient du fait que les grandes entreprises publient des chiffres sur la durabilité depuis des années et sont couvertes par les analyses des agences de notation, cela s’avère être un véritable défi pour un fonds investissant en Asie.Les 10 principes du Pacte Mondial des Nations Unies couvrent les domaines des droits de l’homme, des droits du travail, de l’environnement et de la corruption. Par conséquent, certains modèles commerciaux prometteurs doivent souvent être écartés de la liste des investissements au terme d’une analyse ESG approfondie. C’est le cas, par exemple, de Hon Hai Precision, le plus grand fabricant contractuel au monde d’appareils électroniques grand public, de produits de communication et de matériel informatique. Il s’agit du plus grand fournisseur d’Apple, et ses activités avec Apple représentent 50 % du chiffre d’affaires total de l’entreprise. En mars 2020, un rapport de l’Australian Strategic Policy Institute (ASPI) a révélé que plusieurs entreprises, dont Hon Hai Precision Industry, également connue sous le nom de Foxconn, pourraient avoir employé des travailleurs forcés du Xinjiang, en Chine, ou fabriqué des matériaux ou des produits en recourant à des travailleurs forcés du Xinjiang. L’ASPI affirme qu’entre 2017 et 2019, au moins 80.000 Ouïghours du Xinjiang ont été utilisés dans des usines à travers le pays.
Cibler l’ESG
Avec des investissements ciblés dans différents domaines de la chaîne d’approvisionnement de l’e-mobilité et dans le domaine des énergies renouvelables, on peut toutefois contribuer directement à la réduction des émissions de CO2. Les entreprises d’automatisation japonaises, en particulier, offrent la possibilité de rendre la production de machines plus efficace sur le plan énergétique. Par exemple, l’entreprise spécialisée Keyence, basée à Osaka, qui, outre d’excellentes perspectives économiques, pourrait également porter la sécurité et les conditions de travail dans les usines du monde entier à un niveau supérieur en utilisant la technologie des capteurs.
Réglementation des plateformes technologiques chinoises
Au quatrième trimestre 2020, l’intervention du gouvernement a interrompu l’introduction en bourse de la société chinoise de technologie financière ANT Group. Depuis, l’intervention réglementaire a suscité des incertitudes au sein de différents secteurs. Les grandes plateformes technologiques, en particulier, ont été impactées. Toutefois, les intentions du gouvernement chinois semblent suivre un certain schéma. Les décideurs politiques cherchent inévitablement à obtenir un meilleur accès aux données. En outre, la tentative de démanteler les grands quasi-monopoles crée davantage de concurrence.
Malgré les nombreuses craintes, ces mesures pourraient même entraîner une augmentation de la prospérité économique à moyen terme en stimulant la concurrence entre les différentes plateformes. Tant que l’ampleur de ces interventions artificielles n’a pas encore été clarifiée de manière concluante, les investissements dans les grandes plateformes chinoises ont tendance à être prudents. Il ne faut pas non plus sous-estimer la véhémence politique qui entoure actuellement les priorités d’investissement. En particulier, les véhicules électriques, les batteries au lithium-ion, les énergies renouvelables et l’expansion de la prospérité au sein de la population sont des impulsions qui offrent des opportunités à long terme et qui, d’autre part, ont un impact notable sur la société.
Et si la Chine naviguait vers une inflation plus élevée ?
Par Agnieszka Gehringer, du Flossbach von Storch Research Institute
Le 27 décembre 2021
La plupart des pays développés, mais aussi certaines parties du monde en développement, ont récemment connu une flambée de l’inflation. En Chine, l’inflation est encore modérée, mais les récents développements suggèrent que cela pourrait bientôt changer. Quelles sont alors les options politiques dont dispose le gouvernement chinois pour stabiliser les pressions inflationnistes ?
Évolution récente de l’inflation dans le monde
Alors que le monde se remet de la pandémie de Covid 19 et que l’offre de monnaie dans le système est largement excédentaire en raison de mesures de relance budgétaire et monétaire sans précédent, les économies du monde entier tournent à plein régime. Cette croissance élevée et inattendue a entraîné une hausse de l’inflation jamais vue depuis plus de dix ans.
Cette situation a déjà donné lieu à des mesures concrètes de politique monétaire visant à endiguer les pressions croissantes sur les prix. Le Federal Reserve Bank of New Zealand ainsi que les banques centrales du Brésil, de la Pologne et de la République tchèque ont toutes récemment relevé leurs taux d’intérêt. La Fed américaine a annoncé lors de sa réunion de novembre qu’elle allait réduire ses achats d’obligations. D’autres grandes banques centrales envisagent des mesures similaires.
Le cas de la Chine est différent
Au contraire, l’inflation des prix à la consommation en Chine est restée faible jusqu’à présent, bien qu’elle ait temporairement augmenté à 5,4 % au début de la pandémie en janvier 2020. Toutefois, un examen plus approfondi de l’évolution récente des prix en Chine dans les principales catégories de consommation de l’IPC révèle une image différenciée. Depuis le milieu de l’année 2020, une certaine pression inflationniste s’est accumulée dans les prix du logement (loyer et logement), qui contribuent à hauteur de 25 % à l’IPC global. Une tendance similaire se manifeste dans certaines catégories de l’IPC de moindre importance, telles que les transports et les communications (poids de l’IPC de 15,4 %), les loisirs et l’éducation (poids de l’IPC de 8 %), les chaussures et les vêtements (poids de l’IPC de 6,3 %) et les installations, articles et services ménagers (5,2 %).
En même temps, la tendance de l’inflation dans la catégorie la plus importante de l’IPC, à savoir les prix des produits alimentaires (pondération de l’IPC de 29%), n’a pas montré jusqu’à présent de tendance aiguë à la hausse. Toutefois, cette situation pourrait bientôt s’inverser pour au moins deux raisons. Premièrement, au niveau global, l’inflation des prix à la production en Chine est passée d’un minimum de -3,6 % en juin 2020 à un maximum récent de 10,7 % en septembre 2021. À quelques exceptions près, les prix à la production et à la consommation ont historiquement eu tendance à évoluer en tandem, ce qui implique qu’une hausse des prix à la production pourrait finalement entraîner une hausse des prix à la consommation.
Produits alimentaires en Chine
Deuxièmement, à un niveau plus désagrégé, il y a des raisons de penser que la dynamique des prix s’accélère déjà, en particulier pour certaines catégories de produits alimentaires. Il existe des preuves anecdotiques de hausses de prix significatives pour des catégories d’aliments telles que les concombres, les épinards et les brocolis, mais aussi pour la sauce soja, la levure et la bière.
Cette situation pourrait être exacerbée par la récente directive du gouvernement chinois demandant aux ménages de constituer des stocks de produits alimentaires quotidiens en cas d’urgence. Cela a déjà incité les consommateurs à augmenter leur demande non seulement de biscuits et de nouilles instantanées, mais aussi d’appareils ménagers, notamment de radios et de torches. Ces mesures risquent d’exacerber les difficultés déjà aiguës de la chaîne d’approvisionnement, ce qui pourrait avoir des répercussions sur d’autres secteurs et, en fin de compte, enclencher un cercle vicieux de hausse des prix et d’aggravation des pénuries d’approvisionnement, qui entraîneront à leur tour de nouvelles augmentations de prix.
En cas de poussée de l’inflation
Dans la plupart des pays développés, les banques centrales ont pour mandat explicite de maintenir l’inflation à un niveau bas et stable. À cette fin, elles utilisent divers instruments de politique monétaire conventionnels (taux d’intérêt) et non conventionnels (achats d’actifs, par exemple).
L’autorité de politique monétaire de la Chine, la Banque populaire de Chine, a également pour objectif officiel de « maintenir la stabilité de la valeur de la monnaie ». Toutefois, le Parti communiste a toujours le dernier mot sur les décisions de politique économique pertinentes, par exemple sur le contrôle de l’évolution des prix.
Ce cadre de politique économique particulier présente l’avantage que les décisions administratives, par exemple pour lutter contre la hausse des prix, peuvent être prises, mises en œuvre et devenir effectives avec beaucoup moins de retard que ce n’est normalement le cas dans un cadre de politique monétaire normal avec des canaux de transmission longs et complexes. En effet, les prix administrés, tels que les plafonds de prix, peuvent être introduits par un règlement et prendre effet immédiatement. De même, les mesures politiques qui prescrivent des étapes concrètes de mise en œuvre, comme la récente demande du ministère chinois du Commerce aux autorités locales d’acheter et de stocker des légumes, peuvent en principe être appliquées immédiatement.
En même temps, il y a aussi des inconvénients, car toute intervention publique interfère avec le mécanisme du marché libre et entraîne des inefficacités et des pertes de bien-être. Ces pertes peuvent être ressenties avec un certain décalage ou même seulement après le retrait de l’intervention politique sous-jacente. Ce fut le cas lors des derniers pics d’inflation en Chine dans les années 1980, lorsque le processus d’ajustement des prix et de libéralisation a eu lieu. Après que les autorités aient baissé les prix administrés, l’inflation a bondi, car les prix administrés étaient inférieurs aux prix de compensation du marché.
Perspectives
La dynamique récente des prix dans certains secteurs pertinents de l’économie chinoise suggère que l’inflation des prix à la consommation pourrait s’accélérer au cours des prochains mois. Si la hausse de l’inflation devait nécessiter une intervention politique décisive pour la combattre, le cadre de politique économique en Chine semble offrir une certaine souplesse supplémentaire dans la prise de décision et la mise en œuvre. Cependant, la gestion de l’inflation a toujours été un exercice d’équilibre difficile, et cette fois-ci ne sera pas différente en Chine.
Les énergies renouvelables sont-elles la réponse à la pénurie de gaz en Europe ?
Par Randeep Somel, gérant du fonds M&G (Lux) Climate Solutions Fund
Le 18 novembre 2021
Les prix ont fortement augmenté dans un contexte de réouverture des économies suite aux confinements liés au Covid-19. Cette augmentation a été particulièrement visible dans les prix des carburants, à savoir le pétrole et le gaz. Elle a contribué à la hausse de l’inflation en Europe. Les gouvernements anticipent la possibilité d’une nouvelle hausse des prix du gaz pendant la période hivernale.
Comment en est-on arrivé là ?
Au cours des dernières décennies, les pays européens ont réduit leur capacité de production d’électricité à partir du charbon et du nucléaire, tout en augmentant leur capacité de production d’énergies renouvelables. Cela a accru la dépendance à l’égard du gaz naturel et des énergies renouvelables. En raison de leur caractère intermittent, les énergies photovoltaïque et éolienne ne sont actuellement pas en mesure de fournir une charge de base, c’est-à-dire un flux d’électricité régulier et garanti. La dépendance au gaz s’est donc accrue et la dynamique de l’offre et de la demande a contribué à la flambée des prix que nous observons actuellement.
Quelles sont les forces politiques en jeu ?
Le nouveau gazoduc Nord Stream 2, qui transportera du gaz de la Russie vers l’Europe, a suscité des controverses. Les États-Unis se sont opposés à l’approbation de ce gazoduc, car il signifierait une forte dépendance énergétique de l’Europe vis-à-vis de la Russie. Cette dernière a, de son côté, affirmé que c’était la seule façon de faire baisser les prix du gaz. L’augmentation actuelle du prix du gaz a accru l’intérêt pour ce gazoduc et coïncide également avec les élections en Allemagne, pays de destination du gazoduc.
Les énergies renouvelables peuvent-elles être une composante de la solution ?
Le gaz n’a pas toujours été une source d’énergie de base. Cependant, les installations de stockage du gaz ont été intégrées aux infrastructures énergétiques. Cela signifie qu’il peut être une source fiable. La nécessité aujourd’hui serait une augmentation des investissements dans les infrastructures d’énergie renouvelable afin que les installations de stockage telles que les batteries deviennent une composante de la solution à long terme. La production d’énergie photovoltaïque et éolienne est inutile si elle n’est pas utilisée immédiatement. Si des batteries de stockage sont incorporées, il est alors possible de capturer l’énergie quand elle n’est pas nécessaire pour la restituer quand elle le devient.
Compte tenu de la baisse continue du coût des batteries, l’adoption de cette technologie devrait se généraliser. La réserve d’énergie de Hornsdale en Australie-Méridionale, qui était en 2017 la plus grande installation de batteries lithium-ion au monde, a montré que la production d’énergie renouvelable avec le stockage par batterie peut fournir une charge de base. Elle fait suite à un projet à beaucoup plus petite échelle en Californie.
Le plus grand stockage par batterie d’Europe est devenu pleinement opérationnel cette année, le projet Minety de Shell dans le sud-ouest de l’Angleterre. La centrale de stockage d’énergie de Ruien, en Belgique, devrait également être opérationnelle cette année. L’Union européenne, par le biais du fonds d’innovation qu’elle vient de lancer, ciblera le financement de projets de stockage par batterie afin d’encourager le déploiement de projets plus nombreux.
Alors même que nous essayons de satisfaire nos besoins à long terme en matière d’énergie à faible coût, de sécurité énergétique et de respect de nos engagements climatiques, l’augmentation des investissements dans les énergies renouvelables et les infrastructures renouvelables est la seule solution durable. Nous devons accélérer le rythme de la transition énergétique.
Une étape au-delà des énergies photovoltaïque et éolienne
Le passage aux sources d’énergie renouvelables pour la production d’électricité permettra de réduire considérablement les émissions mondiales. Mais cela ne suffira pas, étant donné qu’il existe des activités à forte intensité de carbone pour lesquelles le passage à l’électrification n’a pas de sens pratique ou économique. Certains pans du secteur industriel, tels que la production d’acier et de ciment, sont responsables d’environ 16% des émissions mondiales. Rien ne leur permet d’envisager un passage viable vers l’électrification. C’est pourquoi, parallèlement aux sources d’énergie renouvelables, l’avènement d’un hydrogène propre – un carburant non fossile à haute densité – est nécessaire pour prendre le relais de l’énergie fondée sur les combustibles fossiles.
Nous disposons désormais de la technologie permettant de produire de l’hydrogène à partir de sources d’énergie renouvelables sans carbone, telles que les énergie éolienne et photovoltaïque. Les électrolyseurs, qui transforment l’énergie renouvelable en hydrogène, ont atteint un niveau de développement tel qu’ils sont capables de monter et de descendre rapidement en puissance, en tenant compte du caractère intermittent des sources d’énergie renouvelables, afin de capter l’énergie produite. L’autre facette de cette technologie est la pile à combustible. C’est là que l’hydrogène est ensuite reconverti en une forme d’énergie utilisable, comme l’électricité.
Si l’électrolyseur et la pile à combustible sont des éléments essentiels de la production et de la conversion de l’hydrogène, toute une chaîne d’approvisionnement doit être en place pour que ce processus fonctionne et devienne économiquement viable. Cela va des producteurs d’énergie renouvelable aux fabricants de produits en aval, en passant par les gazoducs industriels et les moyens de transport du gaz, qui utiliseront désormais l’hydrogène pour remplacer les combustibles fossiles.
COP26 : l’avenir du changement climatique mondial
Pour la suite du sommet de la COP26, le thème de la tarification du carbone sera très important. Aucun pays ou région n’acceptera de fixer un prix pour les émissions de CO2 et de se placer en situation de désavantage commercial. Le débat sur la tarification du carbone est donc décisif.
Le monde d’après: Quels sont les points d’attention ?
Par Saxo Bank
Le 12 octobre 2021
Dans un monde post-pandémie, voici quelques points sur lesquels l’attention des investisseurs pourrait être portée.
Inflation et ESG
La transformation ESG et verte est le plus grand pari politique jamais lancé. Les principales conséquences en seront l’inflation et des taux réels toujours plus bas. Dans ce cas, l’inflation sera liée à l’incapacité du monde physique à fournir l’offre proportionnelle à la quantité d’argent et à la demande. Les taux réels négatifs nous indiquent que l’avenir sera marqué par une faible croissance réelle due à une faible hausse de la productivité.
Deux grandes catégories d’actifs se porteront bien dans un tel contexte : les actifs avalisés par le gouvernement et ceux bénéficiant de prix de marché. Cela signifie que les actifs verts et, ironiquement, les matières premières ont les meilleures chances de produire des rendements excédentaires à long terme.
Le plus grand risque menaçant les économies, les marchés financiers et les actions, c’est l’inflation. Elle est capable de bouleverser toute la structure mise en place depuis 2008. Des politiques sont déployées au niveau mondial comme si nous étions confrontés à un choc de la demande, alors que nous faisons actuellement face à un choc de l’offre en raison de la pandémie, du manque d’investissements dans le monde physique et d’une décarbonisation accélérée par l’électrification et les énergies renouvelables. Ces forces exercent une pression énorme sur les prix des matières premières, et la transformation verte combinée à la trajectoire politique actuelle fera le lit d’un supercycle des matières premières, qui durera toute une décennie.
Inflation et marchés d’actions
Les actions sont évaluées en fonction de la perfection et d’un monde qui ne changera pas, prolongeant ainsi les tendances des dix dernières années. Mais si cette fois-ci, c’est différent, les investisseurs en actions sont sur le point de connaître des résultats inédits depuis des décennies. Bien que les actions soient chères, il n’existe pas d’alternatives intéressantes pour l’investisseur à long terme. L’inflation et les taux d’intérêt sont aujourd’hui les vrais risques pour les investisseurs en actions.
Inflation et obligations
Ce qui a joué en faveur des écarts de rendement des obligations d’entreprises cette année est la reprise économique, où on a vu les bénéfices s’améliorer sur fond de réouverture de l’économie. Toutefois, la tendance pourrait rapidement s’inverser si les pressions inflationnistes deviennent persistantes et si les banques centrales doivent réduire leurs taux plus agressivement que ne le prévoit le marché. Actuellement, le marché n’anticipe pas du tout des politiques monétaires agressives et soutient largement toutes les entreprises, y compris celles dont le bilan est faible.
Si l’on s’attend à ce que l’inflation reste soutenue et que la courbe des taux s’accentue dans un contexte de stabilité monétaire, le secteur bancaire et financier pourrait offrir des opportunités intéressantes. Les banques empruntent de l’argent à court terme pour en prêter à long terme. Dès lors, une courbe des taux plus pentue améliorerait leurs marges d’intérêt nettes. Par ailleurs, les banques continueront de bénéficier de l’environnement de reflation à mesure que l’économie rouvre et que la demande de prêts et d’investissements augmente. Les courtiers financiers et les assureurs en profiteront également, car une économie saine accroît l’activité d’investissement.
Les industries cycliques peuvent également prester dans un tel environnement, et il est important de choisir celles qui peuvent facilement répercuter la hausse des coûts sur leurs clients. Jusqu’à présent, les producteurs de matériaux de base et de matières premières ont pu le faire dans un contexte de flambée des prix des matières premières.
Matières premières : les rendements réels sont une aubaine pour les marchés en plein resserrement
Après une période déjà propice pour les matières premières, on peut être optimistes pour le 4e trimestre et au-delà. Le rallye vigoureux observé cette année sur de nombreux produits de base essentiels a été alimenté par l’envolée des dépenses de consommation après le repli économique inédit lié à la crise sanitaire. L’impact des dépenses publiques et des aides des gouvernements en Europe, en Chine et aux États-Unis s’estompant progressivement, le marché a commencé à se calmer. Toutefois, les contraintes de l’offre continueront à soutenir les prix malgré une trajectoire de croissance plus lente.
La hausse de tous les coûts maintiendra l’inflation à un niveau élevé pendant plus longtemps et, le pic de croissance étant peut-être déjà derrière nous, les perspectives pour les actions semblent plus hasardeuses. Si l’on y ajoute la perspective d’une intervention moins agressive des banques centrales, les bases d’une nouvelle période de demande de valeurs refuges et de diversification pourraient être posées. L’or doit franchir la barre des 1.835 dollars pour renouer avec les investisseurs, et une fois que cela sera fait, le signal d’un retour à un sommet historique aura été donné.
Marchés émergents
Les taux réels négatifs semblent accompagner les marchés développés qui ont perdu la capacité d’avoir des prix de marché corrects et sont plutôt influencés par une fixation artificielle des prix due à la croissance extraordinaire du crédit.
Aux États-Unis, l’inflation a plus que doublé, passant de +2,3 % en décembre 2019 à +5,3 % en août 2021. Sur la même période, le taux de la Fed est revenu de 1,50 % à 0,00 %, parallèlement à la plus grande expansion de la politique monétaire et fiscale jamais enregistrée.
Pendant ce temps, en Chine, en Indonésie et en Inde, l’inflation a diminué depuis les niveaux d’avant la crise sanitaire. Quant à la banque centrale chinoise, elle n’a jamais baissé ses taux pendant cette crise.
Les marchés émergents asiatiques comptent certains des plus grands marchés obligataires offrant des taux réels. Il s’agit notamment de l’Indonésie (+4,5 %), de la Chine (+2,1 %) et de la Malaisie (+1,1 %), ce qui contraste avec les taux négatifs que l’on trouve aux États-Unis (-4,0 %) et dans la zone euro (-3,7 %).
Les banques centrales sont sur la corde raide
Par Bert Flossbach, cofondateur de Flossbach von Storch.
Le 3 septembre 2021
Les banques centrales ont probablement compris qu’un redressement des taux d’intérêt vraiment digne de ce nom n’est plus guère probable. Les dommages collatéraux seraient tout simplement trop importants. Une hausse significative des taux d’intérêt provoquerait l’effondrement des prix de l’immobilier, des obligations et des actions. Cela mettrait en péril la solvabilité des entreprises et des gouvernements. Une telle action finirait par ébranler l’ensemble du système bancaire. Aucun banquier central ne veut prendre ce risque. Étant donné qu’il n’existe aucun exemple historique de taux d’intérêt aussi bas, sans parler des taux négatifs, les banques centrales marchent sur une corde raide en territoire inconnu. Elles veulent éviter un effondrement des marchés financiers sans risquer une perte de confiance dans la valeur de la monnaie.
Prudence de la Fed
Cette corde raide se reflète également dans les déclarations extrêmement prudentes du président de la Fed, Jerome Powell. Une réponse évasive a été donnée à la question la plus intéressante, à savoir la durée d’une période d’inflation inférieure à la barre des 2% que la Fed considérerait comme pertinente. Elle aurait permis de déterminer le « crédit d’inflation », ou la tolérance à l’inflation pour les années à venir. Toutefois, Powell ne souhaitant pas dévoiler ses cartes à ce point, il s’est contenté d’évoquer la marge de manœuvre discrétionnaire de la Fed. Il a souligné que le marché devait se préparer avec prudence à la fin des achats d’obligations et à d’éventuelles hausses des taux directeurs plus tard dans le futur.
Marché du travail
Une nouvelle reprise du marché du travail américain est nécessaire avant que la Fed n’envisage même de s’écarter de sa politique monétaire ultra-libérale. Malgré un nombre record de 9,2 millions d’offres d’emploi, le nombre de personnes employées est toujours inférieur d’environ 6,8 millions à celui d’avant la pandémie. L’une des raisons en est que les généreux programmes de soutien du gouvernement américain découragent encore de nombreuses personnes de chercher du travail. Mais cela pourrait changer lorsqu’ils arriveront à échéance à l’automne.
En outre, le recours à une politique budgétaire expansive, avec un niveau record attendu de nouvelles dettes d’environ 15 % du produit intérieur brut (PIB), crée un boom économique qui vise à augmenter l’emploi et les salaires. Il ne faut pas s’attendre à un retournement des dépenses. Selon les plans de l’administration Biden, le déficit budgétaire ne repassera pas sous la barre des 5% du PIB avant l’exercice 2027.
Aides et déficits
Sans l’aide du gouvernement et l’argent bon marché, l’économie n’aurait pas pu se remettre sur les rails et reprendre sa vitesse de croisière aussi rapidement. Cependant, une fois que l’économie est remise sur les rails, elle devrait être capable de continuer par elle-même sans stimulus fiscal.. Cela vaut également pour les pays européens, où il est très peu probable que les déficits passent à nouveau sous la barre des 3% maximum exigés par le traité de Maastricht dans les années à venir.
Pour éviter que ces importants déficits ne deviennent une charge trop lourde pour le trésor public, les banques centrales doivent aider les gouvernements en leur fournissant de l’argent bon marché.
La politique budgétaire fournit le bois nécessaire pour entretenir le feu de l’économie. Les banques centrales fournissent l’oxygène. Le montant fourni dans la zone euro était en fait limité. Le programme d’achat initial de la BCE, le programme d’achat du secteur public (PSPP), par exemple, était limité à 33 % des obligations d’État éligibles d’un pays de la zone euro. Cette limite supérieure a toutefois été supprimée lorsque la BCE a mis en œuvre son programme d’achat d’urgence en cas de pandémie (PEPP).
Sur la base de la dette nationale totale de la zone euro, c’est-à-dire incluant la dette des États fédérés et des municipalités, la BCE (ou les banques centrales de l’eurosystème) détient près de 21 % de l’encours de la dette nationale. Ce pourcentage continuera d’augmenter si les achats d’obligations se poursuivent comme prévu.
Comme les Japonais ?
Nous nous rapprochons donc lentement de la situation du Japon, où 39 % de la dette nationale totale est déjà détenue par la banque centrale et, par conséquent, appartient en définitive à l’État. Ce mode de financement, qui fait penser à une pyramide de Ponzi, où les gains perçus par les anciens participants au jeu sont payés par les nouveaux venus, est habilement dissimulé en utilisant les banques centrales comme intermédiaire. Une telle machine à mouvement perpétuel ne peut fonctionner que si les gens ne remettent pas en question la valeur future de l’argent. Après des décennies de soutien de la part de la banque centrale, le Japon peut aujourd’hui financer une dette nationale d’environ 260 % du PIB à un coût pratiquement nul. Il n’a, jusqu’à présent, subi aucune perte de confiance sérieuse dans la valeur de la monnaie. Il est remarquable que cette forme de financement indirect de l’État, qui n’est en définitive qu’une facture que les générations futures devront payer, semble aujourd’hui si naturelle et inoffensive.
Les discussions actuelles sur l’équité et la durabilité intergénérationnelles ne devraient donc pas se limiter au débat sur le climat et aux perspectives environnementales des jeunes générations.Elles devraient également porter sur les perspectives économiques de ces générations. Aujourd’hui, les personnes âgées de moins de 45 ans doivent continuer à cotiser à un contrat intergénérationnel pendant plus de 20 ans avant de pouvoir recevoir moins que ce que leurs parents et grands-parents auront reçu.
Les champions cachés allemands : Petits mais performants !
Par Alexander Lippert, Gérant de Portefeuille des fonds MainFirst Germany Fund et MainFirst Top European Ideas Fund
Le 30 août 2021
La pandémie de coronavirus et ses répercussions économiques ont montré à nouveau qu’en période de crise, les personnalités se révèlent. Cela vaut également sur le marché financier. Dans un contexte de marché extrême et face aux défis considérables que les entreprises ont connus et continuent à affronter, les gagnants secrets se révèlent une fois de plus : les champions cachés du marché sont petits et performants, et en particulier les sociétés allemandes.
Deutsche Mittelstand
Chaque pays européen compte de nombreuses entreprises de petite et moyenne capitalisation très intéressantes. L’Allemagne, en particulier, offre un nombre considérable de sociétés exceptionnelles issues de ce que l’on appelle le » Deutsche Mittelstand » (petites et moyennes entreprises allemandes). Ces entreprises sont souvent des acteurs de niche de premier plan dans leurs secteurs respectifs. Une orientation à long terme associée à divers avantages concurrentiels dans leur domaine leur permet d’être extrêmement rentables. La conjoncture économique générale en Allemagne est très positive par rapport aux autres pays européens qui ont souffert de la crise du coronavirus. Le soutien à court terme que le gouvernement a apporté au marché du travail a permis à l’économie de surmonter rapidement la situation précaire et de se préparer à une reprise rapide par la suite.
Si discrètes
En général, il est beaucoup plus difficile et plus coûteux d’investir dans les petites capitalisations que dans les sociétés bien établies (dites « blue-chip »). Les difficultés liées à l’investissement dans les premières tiennent notamment au manque d’informations accessibles au public. Étant donné la faible attention portée à ces actions, il existe peu d’informations et encore moins d’avis d’experts quant au futur de ces entreprises. Sans compter le manque d’intermédiaires, tels que des analystes ou des journalistes. En règle générale, ceux-ci sont chargés d’expliquer de diverses manières ce qui se passe dans les entreprises. Le manque d’informations de la part de ces intermédiaires entraîne un traitement tardif des informations, qui à leur tour tardent à être transmises aux investisseurs.
Exploiter les dysfonctionnements
Étant donné que ces entreprises, figurant au second rang du marché boursier, reçoivent moins d’attention et d’intérêt de la part des investisseurs, il en résulte des marchés moins liquides. Les petites capitalisations ne conviennent donc pas à tous les types d’investisseurs. La liquidité est souvent très limitée et les coûts de transaction sont généralement élevés, en raison des écarts entre les cours acheteur et vendeur. Il y a tout simplement moins d’acheteurs et de vendeurs pour ces actions. Cela entraîne une plus grande volatilité lorsque des transactions importantes sur l’action coïncident avec une liquidité comparativement faible. Ces fluctuations de prix temporaires peuvent également être exploitées par les investisseurs patients et informés.
Une concurrence moindre
L’existence même de dysfonctionnements sur le marché est une raison suffisante pour que les investisseurs s’intéressent aux opportunités offertes par les petites capitalisations. Néanmoins, les grands investisseurs institutionnels en particulier éprouvent des difficultés à pénétrer sur ce marché plutôt restreint et dont les titres sont moins liquides. Pour nombre de ces investisseurs, les petites capitalisations sont tout simplement trop petites pour qu’ils puissent y investir sans influencer le marché ou prendre trop de risques idiosyncratiques. Les principaux fournisseurs d’indices ou d’ETF actuels ont également du mal à intégrer ce segment au sein de leurs produits et à en répliquer avec précision la performance.
Un investisseur potentiel dans les petites capitalisations doit déployer beaucoup d’efforts afin d’identifier les entreprises exceptionnelles de ce segment sous-estimé du marché actions et pour lequel les renseignements sont limitées. En effet, les informations sur les sociétés très médiatisées comme Tesla ou Apple sont disponibles en continu, alors que les petites capitalisations sont souvent très discrètes et réservées. Ainsi, les grands acteurs attirent l’attention de millions d’investisseurs 24h/24, tandis que certaines petites capitalisations prometteuses restent longtemps dans l’ombre.
Des opportunités pour tous
L’une des plus grandes opportunités offertes par les investissements dans les petites capitalisations provient de leur potentiel de croissance supérieur à celui des grandes entreprises souvent matures, saturées et bureaucratiques. Investir dans une société à forte croissance dans une niche très rentable avec peu de concurrence peut être extrêmement lucratif à long terme. Ceux qui trouvent ces perles avant les autres peuvent en tirer un double profit. En effet, une expansion fiable de la base de profit s’accompagne généralement d’une expansion significative du multiple payé pour celle-ci sur le marché. L’appréciation plus élevée des perspectives de bénéfices d’une société est donc une excellente source de rendement supplémentaire. Compte tenu de toutes ces caractéristiques, les petites capitalisations offrent de belles opportunités non seulement aux investisseurs particuliers intéressés et ambitieux, mais aussi aux investisseurs spécialisés.
Devises de matières premières : Entre risque et rendement
Par Andrea Siviero, Investment Strategist chez ETHENEA
Le 12 juillet 2021
La montée des prix des matières premières entraîne actuellement une hausse des marchés des changes. Les devises des pays les plus riches en matières premières, comme la Norvège, l’Afrique du Sud et le Canada, en sont les bénéficiaires. Les taux de change augmentent, tout comme le cours du pétrole, du cuivre et du fer. Du côté des investisseurs, la question qui se pose est de savoir comment cet élan peut se poursuivre. Quelles devises sont susceptibles d’offrir des rendements intéressants dans un tel scénario ?
Qu’est-ce que les devises de matières premières ?
Les devises des pays dont les exportations, et donc la croissance économique, sont particulièrement dépendantes des ressources naturelles ou d’une matière première spécifique sont généralement appelées « devises de matières premières ». Les devises de ces pays sont souvent fortement corrélées aux performances de l’industrie extractive nationale ou au cours de la matière première en question. Les devises généralement considérées comme devises de matières premières sont la couronne norvégienne, le rand sud-africain, le rouble russe, le peso chilien, et les dollars canadien, néo-zélandais et australien. Pour les investisseurs, investir dans ces monnaies ou dans d’autres monnaies étrangères signifie toujours prendre un certain risque de change qui devrait être envisagé avec une certaine vigilance.
Lien avec le cours des matières premières
Alors que les matières premières elles-mêmes sont généralement cotées en dollars américains, les devises de matières premières fluctuent généralement en fonction du cours international des ressources naturelles, étant donné qu’une grande partie de l’économie du pays se base sur la production et l’exportation de cette matière première. Une augmentation du prix de la matière première concernée se traduit à la fois par une hausse des revenus et des taux de croissance dans le pays exportateur et, de ce fait, entraîne généralement une amélioration de la balance courante du pays.
Les devises de matières premières offrent généralement des taux d’intérêt plus élevés, car les exportateurs de matières premières affichent souvent des taux de croissance plus élevés que les pays dont la monnaie constitue une valeur refuge. Cela est particulièrement pertinent pour les économies émergentes. Investir dans des devises de matières premières peut être particulièrement intéressant si cette dernière devait s’apprécier face à la monnaie nationale. C’est notamment le cas en période de croissance économique et de forte demande de matières premières, car le prix des matières premières augmente et les devises de matières premières respectives s’apprécient face aux devises refuges traditionnelles.
Les pièges de la décision d’investissement
La phase actuelle de reflation économique, associée à une forte reprise économique et à une hausse de la demande de matières premières, pourrait donc sembler favorable aux investissements dans les devises de matières premières. Toutefois, il existe certains pièges dont il faut être conscient et qu’il faut éviter. Si les devises de matières premières des marchés émergents offrent, en principe, des taux d’intérêt plus élevés, leur performance globale peut souffrir de taux d’inflation plus élevés et de problèmes sociaux et géopolitiques. De plus, investir dans ces devises comporte parfois des risques opérationnels et des coûts plus élevés.
Enfin, les devises de matières premières ont tendance à afficher une volatilité supérieure à la moyenne. Il est difficile d’évaluer leur prix, car celui-ci est déterminé non seulement par la dynamique de l’offre et de la demande physique, mais aussi par le prix des actifs financiers liés à ces matières premières.
Prudence de mise
La prudence est également de mise lorsque l’on évalue des situations d’investissement en apparence favorables. Investir dans des devises de matières premières dans le contexte actuel de taux d’intérêt bas, de croissance économique élevée et de marchés favorables au risque peut être attrayant pour le moment. Mais la conjoncture macroéconomique actuelle peut changer à tout moment. Un durcissement de la politique monétaire dans les économies avancées, la répression par la Chine sur la spéculation des matières premières ou un ralentissement économique pourraient déclencher une correction des prix des devises de matières premières.
Des alternatives d’investissement avec des profils de risque différents
Il faut tenir compte de plusieurs facteurs avant d’investir dans des devises de matières premières. Une analyse solide du contexte macroéconomique et géopolitique de l’exportateur de matières premières est essentielle avant de constituer une position dans des devises de matières premières. La hausse des prix des matières premières ne garantit pas en soi que la devise correspondante continuera à s’apprécier, ni même qu’elle maintiendra sa valeur actuelle. Si le profil de risque des devises de matières premières des économies émergentes est trop prononcé, une alternative pourrait être d’investir dans les devises de matières premières des économies avancées. Celles-ci offriront probablement des taux d’intérêt plus bas, mais elles sont probablement moins volatiles. En termes de profils de risque, un juste milieu est également possible. Si investir directement dans des devises de matières premières semble trop risqué ou compliqué d’un point de vue opérationnel, des investissements en actions dans des sociétés internationales qui produisent et exportent ces matières premières peuvent être réalisés afin de s’exposer au marché des matières premières. Mais, au final, toutes les stratégies d’investissement ont une chose en commun : un bon timing reste crucial.
IPO : Rester vigilant avant d’investir dans les nouveaux entrants !
Par Alexander Dominicus, gestionnaire des fonds MainFirst Top European Ideas Fund et MainFirst Germany Fund
Le 22 juin 2021
Un grand nombre d’entreprises sont introduites en bourse en ce moment. Cette frénésie inonde également le marché d’une abondance d’entreprises de qualité très variable.
Les introductions en bourse (IPO) sont réputées pour les opportunités d’investissement intéressantes qu’elles offrent aux acteurs du marché. Les entreprises se présentent souvent pour la première fois à de nouveaux investisseurs potentiels dans le cadre d’une introduction en bourse.
Ces entreprises sont encore peu connues à ce moment-là et leurs opportunités et risques ne sont pas suffisamment explorés. C’est pourquoi il est important de ne pas se précipiter aveuglément sur les entreprises dites à la mode !
Des sujets tels que la technologie, l’e-mobilité ou les énergies renouvelables font l’objet d’une telle demande que les modèles d’entreprises médiocres sont parfois ignorés et que les valorisations bondissent de record en record. Il est possible que nombre d’entreprises arrivent sur le marché boursier alors qu’elles sont déjà très valorisées. Cependant, elles opèrent sur une base à faible marge et non rentable. Les valorisations sont souvent fondées uniquement sur les ventes. Dans ce cas, une prudence particulière est de mise et l’on peut se demander à quel moment les investisseurs récupéreront leur capital investi sous forme de flux de trésorerie et de dividendes.
Les investisseurs doivent faire leurs devoirs
Les investisseurs devraient examiner de plus près les IPO. Il est alors important de regarder au-delà d’une présentation marketing bien ficelée. Des argumentaires d’investissement portant principalement sur les mégatendances et le potentiel du marché peuvent être une indication d’un modèle d’entreprise médiocre. Un potentiel de marché ne devient intéressant que si l’entreprise peut démontrer de manière convaincante sa capacité à convertir la taille du marché en bénéfices durables. Il s’agit notamment d’offrir des solutions qu’un concurrent ne peut pas fournir ou un avantage client qui apporte une valeur ajoutée par rapport aux produits précédents.
Les entreprises qui réussissent proposent à leurs clients des solutions optimales à leurs problèmes, ces dernières se démarquent par leur qualité et leur prix. Ce sont généralement les acteurs de niche qui présentent les meilleurs modèles d’entreprise et génèrent des rendements supérieurs à long terme pour les investisseurs.
Les modèles d’entreprise solides sont décisifs
Dans l’ensemble, il est crucial pour les investisseurs d’identifier les bons modèles d’entreprise. En effet, de nombreuses sociétés présentant un potentiel de croissance ont également fait leur entrée sur le marché ces derniers mois. Si les sociétés opèrent sur un marché où les critères d’entrée sont élevés, qu’elles sont très rentables et en forte croissance, il peut s’avérer judicieux pour un investisseur d’accepter des multiples de valorisation plus élevés.
De tels investissements peuvent sans aucun doute offrir un potentiel d’alpha. En tant qu’investisseur, on a alors la possibilité de trouver de bonnes entreprises au cours de cette phase, avant que d’autres ne les découvrent. On peut ainsi profiter d’entreprises qui se forgent une bonne réputation et un potentiel de croissance au fil du temps sur le marché boursier.
Consultez aussi le corner Billet d’humeur
Quelles opportunités sur les obligations des marchés émergents ?
Par Claudia Calich, gestionnaire du fonds M&G (Lux) Emerging Markets Bond Fund
Le 17 mai 2021
Où trouver des opportunités au sein des obligations des marchés émergents ? Y en a-t-il en Chine ? Et comment évaluer les critères ESG pour ces obligations ? Au début de l’année 2020, alors que la crise du COVID-19 s’installait, les spreads se sont élargis de manière très significative tant sur les segments Investment Grade (IG) que sur ceux du High Yield (HY) dans les pays émergents. Depuis lors, les spreads IG se sont entièrement réduits et sont revenus aux niveaux pré-pandémiques, malgré l’augmentation généralisée de la dette. Les spreads sur le segment HY du marché restent sensiblement plus larges qu’avant la crise COVID-19 et offrent de bonnes opportunités.
Devises et valorisations
Il y a également des opportunités sur les obligations en monnaie locale. Les valorisations restent bon marché, environ 30% moins élevées qu’avant le taper tantrum en 2013, et davantage encore après leur sous-performance du premier trimestre. En termes de pays, il existe de bonnes opportunités au Mexique, qui devrait bénéficier de la forte croissance aux États-Unis. Les taux y restent attractifs car la Banque centrale a été moins agressive que d’autres en 2020, et certaines obligations d’entreprises semblent intéressantes.
Chine
La Chine a été le premier pays à connaître une reprise post-pandémique. Elle a progressivement augmenté son exposition aux obligations d’entreprises en dollar US sur 2020. On peut investir, en particulier, dans certains noms du secteur technologique, ainsi que dans un panier diversifié de promoteurs immobiliers – qui devraient bénéficier de la reprise économique relativement rapide dans la région et où l’on trouve des spreads attractifs. On peut également être légèrement exposé aux obligations souveraines chinoises en monnaie locale mais avec une certaine sous-pondération. Ces obligations sont désormais incluses dans les indices JP Morgan. Cependant, il existe de meilleures opportunités sur d’autres segments du marché qui devraient également bénéficier de la reprise globale et offrir des rendements plus attrayants.
Critères ESG
L’intégration des facteurs ESG et durables dans l’analyse crédit et dans les décisions d’investissement devient de plus en plus importante. Il s’agit d’une composante essentielle de la réalisation de nombreux investissements obligataires. Les considérations ESG financièrement significatives alimentent directement la recherche de crédit. Ces évaluations donnent une information du degré de prise en compte par le marché des risques liés aux facteurs ESG et peuvent avoir un impact sur l’opinion lorsqu’on évalue globalement tous les risques de crédit. En définitive, elles peuvent influencer la décision d’investir ou non dans un émetteur particulier. Il faut également surveiller les entreprises et les organisations qui émettent des obligations et mènent des activités d’engagement ESG si nécessaire, afin de permettre de mieux comprendre et gérer les risques liés aux facteurs ESG.
100 jours depuis le Brexit : les impacts négatifs pour le Royaume-Uni sont en hausse
Par Volker Schmidt, Senior Portfolio Manager, Ethenea
Le 9 avril 2021
Début janvier, le Royaume-Uni a quitté l’Union européenne pour de bon. Aujourd’hui, environ 100 jours après le Brexit, on peut faire le point sur la situation. Il est devenu évident que le Brexit provoque déjà des changements économiques de grande ampleur. Et il ne semble pas y avoir de fin en vue.
Selon les derniers calculs de la Commission européenne, le Brexit s’avérera coûteux pour le Royaume-Uni, les dommages causés à l’économie britannique d’ici à la fin de 2022 étant estimés à plus de 40 milliards de livres sterling. Avec un produit intérieur brut (PIB) d’environ 2.000 milliards de livres sterling, cela correspond à environ 2,25 %. À titre de comparaison, une perte moyenne d’environ 0,5 % est attendue pour les États de l’Union européenne. Les conditions commerciales plus difficiles, en particulier, pèsent sur l’économie. Bien que le Royaume-Uni et l’Union européenne aient pu se mettre d’accord sur un accord de libre-échange, ce qui signifie que les échanges resteront exempts de droits de douane, dans le même temps, la charge bureaucratique augmente. Par exemple, les entreprises britanniques doivent prouver que les biens exportés vers l’Union européenne ont été principalement produits dans leur propre pays. Dans une économie mondialisée où les chaînes d’approvisionnement sont parfois complexes, ce n’est pas une tâche facile.
D’autres obstacles
À cela s’ajoutent les contrôles de santé et de sécurité, la TVA sur les importations, ainsi que d’autres obstacles fastidieux qui restreignent les échanges. De nombreuses entreprises, en particulier les petites et moyennes entreprises, ne se sentent pas capables de faire face aux défis bureaucratiques. Elles ont temporairement cessé toute activité d’exportation. Selon le New York Times, le volume des exportations qui ont traversé le canal en janvier a chuté de plus de deux tiers par rapport à l’année précédente. Les producteurs de poisson, de viande et de produits laitiers ont été particulièrement touchés. Dans certains cas, on rapporte que des tonnes de nourriture pourrie n’ont pas réussi à traverser le champ de mines bureaucratique jusqu’aux ports français et néerlandais.
Londres continue de perdre du terrain en tant que centre financier
Même l’industrie financière britannique, qui a longtemps été le plus important et le plus grand centre de négociation de titres en Europe, ressent les conséquences du Brexit. Pratiquement du jour au lendemain, le négoce des actions s’est déplacé vers l’Europe continentale, en particulier vers Amsterdam et Paris, tandis que le négoce des produits dérivés a largement migré vers New York. Le géant du règlement, Euroclear, a récemment achevé le transfert à Bruxelles d’une cinquantaine de titres irlandais d’une valeur équivalente à environ 100 milliards d’euros. Ceux-ci étaient auparavant réglés à Londres. Jusqu’à présent, l’Irlande s’appuyait sur la succursale d’Euroclear « Crest », basée au Royaume-Uni, pour régler les transactions sur titres.
Le cas irlandais
Les changements induits par le Brexit sont profonds et n’en sont qu’à leurs débuts. Les règles autour des futures relations commerciales sont encore en cours de négociation. Les premiers points de discorde concernant les dispositions spéciales pour l’Irlande du Nord montrent que le chapitre du Brexit est loin d’être terminé. Afin d’éviter les contrôles aux frontières entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande, l’accord de retrait de l’Union européenne prévoit que les règles du marché unique de l’Union européenne continueront de s’appliquer à l’Irlande du Nord. À cette fin, une frontière commerciale entre l’Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni devait être introduite à la fin de la période de transition, mais au plus tard à partir de début avril. Or, le gouvernement britannique a unilatéralement prolongé cette période de grâce, ce que l’Union européenne considère comme une violation de l’accord. Comme le gouvernement britannique n’est pas encore revenu sur son annonce, l’Union européenne porte l’affaire devant la Cour européenne de justice. Si la Cour se prononce en faveur de l’Union européenne, des sanctions financières pourraient être imposées. En conséquence, l’ambiance entre Londres et Bruxelles est de plus en plus tendue.
La livre sterling loin des niveaux d’avant le Brexit malgré la reprise
Malgré les difficultés initiales, la livre britannique a nettement progressé par rapport à l’euro depuis que le Royaume-Uni a quitté l’Union européenne. Alors que la monnaie britannique tournait autour de 1,10 en décembre, aujourd’hui, une livre vaut déjà 1,16 euro. Cette évolution est certainement due en partie à la campagne de vaccination beaucoup plus réussie au Royaume-Uni. Non seulement le groupe à risque des plus de 70 ans a été vacciné, mais un adulte britannique sur quatre a également reçu son vaccin. En outre, la monnaie est soutenue par le fait que l’incertitude entourant le Brexit a pratiquement disparu.
Désormais, selon l’opinion répandue de nombreux partisans du Brexit, Londres est à nouveau maître de sa politique étrangère et de son destin économique. Cela se traduit non seulement par le succès de la campagne de vaccination, mais aussi, à l’avenir, par des relations commerciales revigorées en dehors de l’Europe, par exemple avec la Chine et les États-Unis. Toutefois, il est également vrai que la reprise de la livre est partie d’un niveau extrêmement bas en termes historiques. Elle est encore loin des niveaux d’avant le Brexit, à savoir plus de 1,40 euro. À court terme, la force de la livre pourrait certainement gagner encore du terrain. Mais à long terme, il reste à voir si Londres peut tirer un avantage économique durable de sa souveraineté ostensiblement retrouvée et de son avantage vaccinal.
À court terme, la pression à la vente des Gilts pourrait se poursuivre
Depuis le début de l’année, les obligations souveraines britanniques à 10 ans (ou Gilts) ont connu leur pire trimestre depuis des années. La progression de la vaccination, l’amélioration des perspectives économiques et la disparition des incertitudes liées au Brexit ont exercé une pression à la hausse sur les rendements. Les investissements réalisés auparavant par les investisseurs se fondaient sur l’hypothèse que la Banque d’Angleterre pourrait avoir besoin de réduire les taux d’intérêt en dessous de zéro pour aider à stimuler l’économie. Mais à mesure que la confiance dans les perspectives économiques s’est renforcée, le récit a changé, déclenchant une pression de vente sur les obligations britanniques. Cela a conduit à un élargissement du spread entre les Gilts britanniques et les Bunds. Les perspectives en Allemagne et dans l’Union européenne de manière générale sont beaucoup plus sombres et la BCE a non seulement poursuivi ses achats d’obligations, mais cette dernière a même annoncé qu’elle les augmenterait pour maintenir les rendements à un bas niveau. On s’attend à ce que la tendance à la vente de la dette britannique se poursuive à court terme et à ce que les obligations souveraines de l’Union européenne sous-performent. À moyen terme, cette tendance pourrait se stabiliser, notamment lorsque l’Europe rattrapera son retard en matière de vaccination et que la BCE commencera à suivre la stratégie de la Fed et de la Banque d’Angleterre en laissant les rendements repartir légèrement à la hausse.
En conclusion, la livre sterling devrait continuer à s’apprécier face à l’euro à court terme, compte tenu de ses niveaux toujours historiquement bas et des meilleures perspectives économiques. De même, la pression à la vente des Gilts pourrait se prolonger. La demande d’actifs refuges britanniques est moins forte et les investisseurs étrangers reconsidèrent leurs investissements dans les Gilts. À moyen terme, cependant, l’Union européenne devrait rattraper son retard. Les questions liées au Brexit reviendront alors au-devant de la scène.
Cinq bonnes raisons pour s’intéresser aux « small caps »
Par James Ogilvy, Annabelle Vinatier et Jean-François Cardinet, analystes-gestionnaires chez Lazard Frères Gestion
Le 17 mars 2021
Les actions de petites et moyennes entreprises (« small caps ») présentent d’intéressants atouts pour les investisseurs. Attention toutefois à bien sélectionner les valeurs et construire une diversification efficace.
Investir sur le segment des small caps nécessite une très bonne maîtrise des risques. Les petites capitalisations ne sont, dans l’ensemble, pas plus volatiles que les grandes capitalisations. Cependant, individuellement, leur cours de bourse peut être soumis à d’importantes fluctuations de court terme. En cause : une moindre liquidité et des activités plus spécifiques que celles des grandes entreprises. La diversification est donc essentielle pour investir sur ce segment de marché et limiter les éventuelles pertes liées à la volatilité de certains titres.
Investir dans un fonds spécialisé sur ce segment de marché peut être une bonne manière d’assurer cette diversification et de profiter ainsi des intérêts spécifiques offerts par les petites et moyennes valeurs. En voici les cinq principaux.
Activités plus ciblées
Les petites capitalisations ont tendance à développer des activités plus ciblées que les grandes entreprises. En tant qu’investisseur, il est donc possible de savoir exactement dans quoi l’on investit. Pour les investisseurs fondamentaux, cela permet surtout d’analyser en détail les produits, le marché et l’environnement concurrentiel dans lequel évoluent ces sociétés. Plus une entreprise est grande et complexe, plus cela devient difficile.
Croissance des bénéfices
Comme elles sont à un stade précoce de leur développement, les petites capitalisations ont tendance à afficher une croissance des bénéfices plus élevée que les grandes entreprises. Au fil du temps, cette croissance dynamique se traduit par une meilleure performance. A titre d’exemple, l’indice EMIX Smaller Europe Euroland a dégagé un rendement annualisé de 12,25% depuis le 31/12/2011, contre 9,79% pour l’Eurostoxx. Cette performance reste également assez peu corrélée à celle des grandes capitalisations, ce qui permet de diversifier le risque dans l’allocation d’un investisseur.
Moins suivies
Contrairement au marché très efficient des grandes capitalisations, suivies par de nombreux analystes, les petites capitalisations ont tendance à être moins suivies par le marché. Il peut donc arriver que le cours d’une action ne reflète pas avec précision la véritable valeur économique de l’entreprise. Ceci entraîne une éventuelle sous-évaluation ou surévaluation, qu’un investisseur peut exploiter dans l’optique d’un retour ultérieur à la normale.
Souvent familiales
L’univers des petites capitalisations contient de nombreuses sociétés gérées et contrôlées par leurs fondateurs, ou par la famille des fondateurs. Ces entreprises ont tendance à être gérées de manière plus prudente, avec une vision stratégique à très long terme qui vient limiter les risques.
Plus réactives
L’influence du management est également plus directe et moins diluée que dans les grands groupes, ce qui permet aux petites et moyennes entreprises d’être plus réactives face aux évolutions de la conjoncture. Il s’agit naturellement d’une opportunité mais aussi d’un risque, car un mauvais choix stratégique peut être lourd de conséquences. D’où l’importance de bien analyser les intentions de la direction avant d’investir.
Attention aux idées reçues
Notons enfin que contrairement aux idées reçues, l’activité des petites et moyennes capitalisations ne se cantonne pas à l’échelle nationale ou locale. Ces entreprises, suffisamment grandes pour être cotées en bourse et valoir généralement plusieurs centaines de millions d’euros, écoulent souvent leur production dans plusieurs pays du monde, et bâtissent pour cela des stratégies commerciales ambitieuses.
En somme, investir sur le segment des small caps permet d’apporter du dynamisme au sein d’une allocation d’actifs plus globale sur les marchés actions. En contrepartie, cet investissement est naturellement plus risqué, ce qui nécessite un important travail de suivi des entreprises et de gestion active pour construire un portefeuille optimal.
Attention aux risques
Il y a bien sûr des risques liés aux small caps. En voici quelqu’uns : risque de perte en capital, risque action, risque lié à la capitalisation, risque de liquidité, risque de contrepartie. Dans le cadre d’une gestion de fonds, s’ajoute un risque lié à la gestion discrétionnaire, un risque lié aux instruments financiers dérivés et un risque de durabilité pour les fonds tenant compte de critères ESG.
Tendances pronostiquées en 2000, non réalisées en 2020
Le 25 février 2021
La crise sanitaire l’a, si besoin était, démontré : même la plus belle des boules de cristal ne peut tout prédire. Des événements viennent souvent contrecarrer les prévisions. Quiconque aurait évoqué, au tournant du siècle, des taux hypothécaires inférieurs à 1 %, aurait sans doute déclenché des rires moqueurs. Une troisième guerre mondiale, la fermeture des frontières chinoises pour cause d’épidémie de virus SARS, une pénurie de pétrole ou une panne informatique généralisée, auraient sans doute été jugées nettement plus vraisemblables. Or, que reste-t-il aujourd’hui des mutations à long terme pronostiquées en 2000 ? Quatre observateurs de tendances ont plongé dans leurs archives, en quête d’orientations et de prédictions qui ne se sont pas concrétisées.
Retour sur deux décennies
« Au vu d’un certain nombre d’études scientifiques, la conviction générale était que le monde allait subir une pénurie de pétrole », rappelle Johan Van Geeteruyen, chez Degroof Petercam Asset Management. Lorsqu’il est apparu que ce ne serait pas le cas, le débat s’est détourné de la question des réserves massives pour s’intéresser à celle de la production massive. Mais il se trouve que les États-Unis ont commencé à exporter du pétrole, limitant de facto la puissance de l’OPEP. Le prix de l’or noir est même tombé de 144 dollars à 20 dollars le baril. « De nombreux experts misaient sur un épuisement des réserves de pétrole ou sur une pénurie d’électricité, renchérit Frank Schwarz (MainFirst). Mais la chose ne s’est donc pas produite. Des technologies plus efficaces sur le plan énergétique et une meilleure conception des activités capables de contrer les changements climatiques incitent désormais à penser qu’une grande part des réserves mondiales d’or noir ne sera jamais extraite. Maints pays considéraient à l’époque le nucléaire comme la source de production énergétique du futur. Jusqu’en 2011 et la catastrophe de Fukushima.».
Lente reprise des activités touristiques
Une autre prévision qui ne s’est pas vérifiée est celle de la lenteur de la reprise du tourisme mondial après les attentats du 11 septembre 2001 et l’épidémie de SARS, en 2003. « Aucune de ces craintes ne s’est réellement confirmée », constate Frank Schwarz (Mainfirst).
Crise financière
Qui, à la veille de l’année 2000, aurait prédit qu’une bulle financière allait succéder à celle des dotcom ? « Les courbes de taux d’intérêt et les courbes de croissance réelle escomptées étaient à l’époque nettement plus marquées, affirme Hans Stegeman, chez Triodos IM. Beaucoup de gens ont par ailleurs cru, à tort, que l’innovation technologique allait déboucher sur une économie nouvelle, au sein de laquelle les pénuries n’auraient plus d’importance. Le développement durable était quant à lui à peine évoqué».
Brillant avenir des entreprises télécoms
Au début du siècle, les entreprises de télécommunications avaient le monde à leurs pieds. «Toutes les possibilités leur semblaient ouvertes, affirme Johan Van Geeteruyen (DPAM). Mais le resserrement constant des réglementations et l’importance des investissements indispensables au maintien de leur compétitivité technologique dans un marché extrêmement concurrentiel ont pesé sur leurs performances boursières ».
Europe unifiée
Au lendemain de l’introduction de l’euro, le 1er janvier 1999, la collaboration et même, l’unification, européennes, paraissaient généralement certaines. « Pour un large pan de la classe politique, l’introduction de l’euro allait être à la fois un levier et un préambule à la fusion des économies nationales en une économie unique », relate Bert Flossbach (Flossbach von Storch AG). Or depuis, l’Europe a cédé beaucoup de terrain, en particulier face aux États-Unis et à la Chine. « De surcroît, l’euro est actuellement plutôt une entrave pour les États membres économiquement plus faibles et fortement endettés, qui ne peuvent dévaluer leur monnaie pour accroître leur compétitivité». Pour Bert Flossbach, les marchés vont rester tributaires longtemps encore de la problématique de l’endettement. « Loin de s’alléger, la dette est reportée sur le futur. C’est une épée de Damoclès qui finira par s’abattre. Mais pas nécessairement demain, le mois prochain ou l’an prochain ».
Une chose est en tout cas certaine pour ces quatre observateurs : l’investisseur qui mise sur une seule tendance ou sur des tendances à long terme sans opter pour un suivi actif, fait rarement de bonnes affaires. Seuls un portefeuille activement géré, un suivi régulier et des recherches approfondies permettent de rectifier promptement le tir. Car des événements venant contrarier les prévisions seront tout aussi inévitables dans les 20 prochaines années.
Quel avenir pour l’investissement d’impact ?
Par Randeep Somel et John William Olsen, gestionnaires de portefeuille chez M&G Investments.
Le 11 janvier 2021
L’investissement d’impact a connu une croissance rapide. Historiquement réservé aux investisseurs institutionnels et aux investisseurs fortunés, l’émergence des fonds d’actions cotés en bourse a très largement ouvert la voie au grand public, pour les personnes qui souhaitent utiliser leur argent autrement.
Avancée des grands pays
L’année 2020 a été témoin de grandes avancées pour l’action climatique. On a constaté des progrès majeurs à mesure que les pays définissent leurs objectifs environnementaux. Le gouvernement britannique a présenté un plan global, comme l’a fait l’Union européenne avec le « Green Deal ». Les pays européens ont toujours été à l’avant-garde en termes de développement durable. Cela s’est confirmé cette année avec le plan de relance de l’Union européenne largement associé à des dépenses en faveur de projets durables. Par ailleurs, la Chine a annoncé qu’elle intégrerait la politique climatique dans son plan national. De plus, Joe Biden a indiqué que les États-Unis réintégreraient l’accord de Paris sur le climat. Dès lors que les États-Unis, la Chine et l’UE prennent de tels engagements, il semble difficile pour les autres plus petits pays de ne pas suivre le mouvement.
Des bulles « durables » ?
La croissance des investissements d’impact ne peut que se poursuivre, car de plus en plus de personnes réalisent qu’il est possible d’obtenir un rendement financier tout en contribuant positivement à la société et à l’environnement.
Le Global Impact Investing Network estime la taille du marché de l’impact à 715 milliards de dollars d’actifs sous gestion, contre 114 milliards de dollars en 2017. L’une des explications à cette croissance serait que les stratégies d’impact sont considérées comme plus tangibles et plus faciles à comprendre que les investissements environnementaux, sociaux et de gouvernance.
Certains évoquent cependant des « bulles durables ». Il est vrai que le potentiel de croissance future et la promesse d’un produit facile à comprendre peuvent entraîner une ruée des investisseurs. Raison pour laquelle les véhicules électriques et les introductions en bourse de nouveaux produits technologiques peuvent s’apparenter à des bulles. Certains investisseurs sont prêts à payer un titre plus cher en raison de critères extra financiers difficiles à évaluer avec un modèle financier. Cependant, il existe aussi de nombreuses entreprises moins « en vogue » qui proposent pourtant des produits et des services à fort impact, qu’il s’agisse de microcrédits dans les pays en développement, d’organismes d’enseignement ou d’entreprises de santé.
L’une des tendances à surveiller est le passage à la numérisation. La technologie n’a pas été créée pour rendre le monde plus vert et plus propre, mais elle y contribue en permettant de réduire notre empreinte carbone. Si le comportement est l’un des aspects les plus difficiles à modifier, la pandémie a obligé beaucoup d’entre nous à transformer nos modes de vie et de travail. Le débat autour des émissions carbone et de l’empreinte environnementale devenant de plus en plus central, il sera difficile pour les particuliers et les entreprises de revenir à la situation antérieure.
Il est temps de prioriser les mesures sociales
Après une année particulièrement troublée, des investissements mondiaux à grande échelle sont nécessaires pour soutenir une reprise post-pandémique robuste. Il ne reste que dix ans pour atteindre les objectifs de développement durable (ODD) des Nations unies. Des mesures urgentes sont nécessaires pour respecter l’échéance de 2030. La crise du COVID-19 a détourné l’attention et les ressources d’une multitude de questions sociétales qui ont sérieusement besoin de financement. Réduire les inégalités, soulager la pauvreté, stimuler l’éducation et améliorer les systèmes de santé, 2021 doit être une année décisive pour le développement durable. Les gouvernements, les ONG et les entreprises ont tous un rôle énorme à jouer, mais, aujourd’hui plus que jamais, l’investissement d’impact doit être déterminant pour soutenir ces solutions.
La pandémie actuelle n’a pas seulement été une crise sanitaire majeure, mais aussi une crise socio-économique importante. La propagation du coronavirus a exacerbé les inégalités existantes, creusant le fossé entre les populations défavorisées et les régions plus développées du monde.
L’éducation reste fondamentale pour relever la plupart des défis mondiaux couverts par les ODD. Elle confère les compétences qui permettent de comprendre et de contribuer à la société et aux générations futures. Il est inquiétant de constater qu’il s’agit de l’un des domaines les plus affectés en raison de la fermeture des écoles pendant la pandémie.
La plus grande inquiétude c’est que les défis sociaux soient négligés au profit des objectifs de neutralité carbone. L’attention croissante portée à une reprise post-pandémique verte est extrêmement bienvenue. Cependant, elle ne doit pas se faire au détriment des questions sociales et ce, particulièrement après une année au cours de laquelle les inégalités se sont aggravées de manière encore plus brutale ».
Le COVID-19 a été un catalyseur de changement, avec une vague d' »accords verts » et une volonté des gouvernements de consacrer les ressources à des mesures durables. Mais la pandémie a également dévoilé des situations problématiques, notamment sur le plan social. Les gouvernements sont conscients de la situation mais, après un ralentissement, il est sans doute plus facile de relancer l’économie en se concentrant sur les questions environnementales. Malgré tout, on s’attend à une deuxième vague d’actions gouvernementales sur les problématiques sociales au cours de l’année prochaine.
Actions gaming : hauts potentiels en bourse
Par Adrian Daniel, gestionnaire de portefeuille chez MainFirst
Le 1er décembre 2020
Le secteur du gaming est en plein essor sur le marché boursier. Les investisseurs qui veulent en tirer profit sur le long terme doivent diversifier leurs risques. Les entreprises qui proposent une large gamme de jeux avec des coûts de développement raisonnables représentent un investissement rentable.
Valeurs vedettes de la bourse, les actions du secteur du gaming font preuve de résistance face au coronavirus. Les actions des principaux producteurs de jeux, Activision et Take-Two Interactive, ont chacune augmenté de plus de 30 % cette année. Pour les investisseurs, la question est de savoir comment ils peuvent bénéficier de la tendance croissante des jeux en ligne.
Evolution démographique
Le confinement a éveillé de nouveaux segments de la population aux avantages des tournois sportifs en ligne et a accéléré de manière décisive la croissance du secteur. Ce ne sont plus seulement les initiés et les « nerds » qui sont impliqués dans le gaming. La F1 Esports Series, par exemple, qui vaut des milliards, a su tirer parti du confinement pour alimenter l’enthousiasme envers les courses. Le secteur s’est développé et représente aujourd’hui un marché de plusieurs milliards de dollars.
Le groupe des joueurs virtuels connaît également une évolution démographique importante. Un nombre croissant de pères de famille des générations Commodore et Atari se mêlent désormais aux adolescents, qui sont toujours majoritaires sur la scène. De ce fait, de plus en plus de joueurs en costume sont repérés en ligne. Avec l’évolution démographique, le revenu moyen du secteur des jeux vidéos est lui aussi en augmentation et avec lui le TAM (Total Addressable Market ou Marché Total Disponible en français).
Newzoo, l’une des principales sociétés d’analyse, prévoit que le marché mondial du gaming augmentera de 9 % en 2020. Les 2,7 milliards de joueurs actuels devraient porter les ventes à un niveau record d’environ 159 milliards de dollars. Cela signifie que le secteur du gaming sera nettement plus performant que celui du cinéma. La Chine est le plus grand marché avec environ 725 millions d’utilisateurs et un chiffre d’affaires estimé à plus de 24,5 milliards d’euros.
Les actions AAA comportent des risques
Le marché est très concurrentiel, comme le montre la guerre ouverte autour de Fortnite. Lancé en 2017, le jeu compte aujourd’hui plus de 350 millions de joueurs inscrits. Fort de ce succès, son développeur Epic Games fait preuve d’audace et propose le jeu en téléchargement gratuit. En parallèle, l’entreprise a demandé à Apple et à Google de réduire la marge de 30 % dans leur boutique d’applications. En réponse, Apple et Google ont banni Fortnite de leurs stores. L’issue de la lutte en faveur du jeu gratuit, qui est principalement financé par les ventes effectuées au sein du jeu lui-même, devrait permettre de clarifier la question du montant de la commission sur les ventes pour le téléchargement d’un jeu à l’avenir. Fortnite fait partie des jeux classés AAA. Son succès considérable éclipse les autres jeux AAA dont les coûts de développement sont élevés et peut même conduire à leur échec, car ils ne sont pas immédiatement rentables.
Diversification et analyse des titres
Le réseau mondial de la communauté du gaming entraîne une concentration de la demande de jeux électroniques sur quelques titres seulement. Cela modifie également le profil de risque et d’opportunité du développement. Le mot magique est ici la diversification. Tout d’abord, une orientation mondiale est absolument essentielle lorsque l’on investit dans ce thème d’investissement particulier. Dans ce cas, il est utile soit de s’appuyer sur un plus grand nombre d’entreprises, soit de laisser la sélection entre les mains d’un gestionnaire de fonds avec une approche active, soit de s’appuyer sur des modèles économique qui limitent de manière préventive le risque de concentration des actions individuelles à haut potentiel.
Un exemple intéressant est celui d’Embracer Group, un studio de développement suédois, qui ne se concentre pas stratégiquement sur le développement de titres AAA. Il se focalise sur une large gamme de jeux dont les coûts de développement sont raisonnables, créant ainsi une base solide favorisant une croissance régulière. Le Keyword Studio entre également dans cette catégorie, car il est prestataire de services en programmation de voix et d’effets sonores pour le secteur du gaming et ne dépend pas des nouvelles sorties individuelles.
En tant que premier acteur mondial du secteur, Tencent a acquis des participations dans des studios de développement, ainsi que dans des superproductions telles que « Clash of Clans ». Elle détient notamment des parts dans Epic Games, le développeur de Fortnite. Il est également conseillé d’investir dans des fournisseurs de matériel informatique concerné tout au long de la chaîne de valeur. Avec Nvidia, le principal concepteur de puces graphiques, les investisseurs ont déjà pu plus que doubler leur investissement cette année. Enfin et surtout, les investisseurs doivent également examiner les actions en fonction de la durabilité de leur modèle d’entreprise. Flutter Entertainment, avec sa gamme de jeux de hasard en ligne, est exposée à un risque réglementaire accru. Dans l’ensemble, les investisseurs avec une vision à long terme ont encore un large éventail de possibilités pour profiter de tendances structurelles de croissance.
Les obligations offrent des opportunités, même sans intérêt
Par Frank Lipowski, gestionnaire de fonds chez Flossbach von Storch AG.
Le 5 novembre 2020
La pandémie de corona touche presque tout ce qui fait notre vie quotidienne. Nous travaillons dans notre propre salon, nous annulons des fêtes, nous portons des masques et nous gardons nos distances lorsque nous allons au restaurant. En ce qui concerne les marchés financiers, les changements sont encore plus graves. Ici, le Covid-19 est un turbocompresseur pour les tendances à long terme. Les programmes d’aide (nécessaires) des États laissent la dette nationale s’envoler rapidement. À long terme, ils ne peuvent être financés qu’avec des taux d’intérêt bas. Cette connaissance a également permis aux banques centrales de s’en rendre compte. Un revirement à la hausse des taux d’intérêt semble incroyable et ce, depuis très longtemps.
Pour les investisseurs qui veulent toujours obtenir des rendements adéquats sur le marché des taux d’intérêt, cela signifie qu’il ne suffit plus d’acheter des obligations sûres et de les conserver jusqu’à l’échéance. Les rendements des coupons sont beaucoup trop faibles, s’il en reste. En Allemagne, les investisseurs doivent payer quelque chose pour prêter de l’argent à leur gouvernement. En Italie, le rendement des obligations d’État à dix ans à la fin du mois d’octobre est inférieur à 0,8 % par an. Ce n’est pas suffisant pour constituer et maintenir la valeur des actifs à long terme.
Toutefois, des taux d’intérêt nuls et négatifs ne signifient pas qu’il n’est plus judicieux d’investir son argent dans des obligations. L’afflux d’argent des gouvernements et le programme d’achat de la BCE ont même récemment entraîné une hausse de la demande sur le marché obligataire. Et les obligations peuvent encore être très attrayantes si les investisseurs profitent des nombreuses possibilités qu’offre le marché.
Les investisseurs doivent simplement être très flexibles et exploiter activement tout le potentiel de gains qui existe. Ils peuvent investir si, par exemple, les courbes de rendement changent ou si la tarification des risques de crédit sur le marché (comme au premier pic de la pandémie au printemps) offre des opportunités. En période sans intérêt, la flexibilité et une forte activité sont cruciales. Le marché qui était autrefois appelé à juste titre « Fixed Income » devrait probablement être rebaptisé « Active Income ».
Récemment, les taux d’intérêt dans la zone euro ont légèrement baissé, alors qu’ils sont restés constants aux États-Unis. Cette évolution est particulièrement évidente dans le cas des échéances longues. La différence de rendement entre les obligations du gouvernement américain à 30 ans et les obligations du gouvernement fédéral allemand s’est récemment élevée à plus de 1,8 point de pourcentage. Des opportunités sont également apparues récemment dans les obligations à haut rendement, qui ont été sanctionnées par le marché.
Une bulle Internet 2.0 menace-t-elle d’éclater ?
Par Adrian Daniel, Portfolio Manager Chez MainFirst AM
Le 24 septembre 2020
L’année 2020 pourrait être une année de tous les superlatifs. En mars, au moment des ventes rapides, presque personne n’aurait parié sur de nouveaux sommets boursiers. Cependant, les cours des actions ont plus que compensé la baisse. Dans certains cas, ils ont même atteint de nouveaux sommets. Le principal moteur de cette évolution est le marché boursier américain, en particulier le secteur technologique. Les investisseurs se grattent la tête avec stupéfaction. Parfois, ils se souviennent de la bulle Internet au tournant du millénaire. Une bulle 2.0 menace-t-elle maintenant d’éclater ? Il y a plusieurs bonnes raisons de penser que ce ne sera pas le cas. Même le dernier recul en date, qui a vu le Nasdaq corriger de quelques points de pourcentage en deux jours de bourse, n’y a rien changé.
Août 2020 a été un mois exceptionnellement fort pour le Nasdaq 100, le baromètre boursier dominé par les géants technologiques comme Alphabet, Amazon, Apple, Facebook et Microsoft. L’indice a fonctionné comme une horloge, atteignant un sommet historique de 12 420 points le 2 septembre. Bien sûr, cela suscite aussi des sceptiques et des voix de prudence qui voient la fin de ce rallye proche. Il n’en est absolument pas question. Parce que la théorie d’une bulle Internet 2.0 est incorrecte pour plusieurs raisons.
Quiconque analyse l’évolution des bénéfices de nombreuses entreprises technologiques en arrivera à la conclusion que les bénéfices sont réels et non une illusion, comme ce fut le cas avec la bulle Internet au tournant du millénaire. Le Nasdaq sous-jacent, par exemple, a connu la meilleure évolution des bénéfices depuis 2008, avec un gain cumulé de plus de 280 % (en juillet 2020). À titre de comparaison, l’indice allemand leader ne pouvait afficher qu’un « zéro noir » en termes de performance des bénéfices pendant cette période (2008 – 2020). La question se pose maintenant de savoir dans quelle mesure les bénéfices sont durables.
La société devient de plus en plus numérique et moderne
Alors que la numérisation de notre société progresse sans cesse et entraîne de nombreux bouleversements, il est non seulement concevable, mais même probable que les bénéfices des entreprises technologiques dominantes et des principales sociétés de croissance continuent à augmenter. À cet égard, la pandémie de coronavirus est un catalyseur. « Comme le Covid-19 a un impact sur tous les aspects de notre travail et de notre vie, nous avons assisté à deux ans de transformation numérique en deux mois« , a récemment souligné Satya Nadella, PDG de Microsoft. Et, bien sûr, le nombre d’applications a encore augmenté, car les mesures de verrouillage ont accru la nécessité de faire des achats et de travailler à domicile et/ou virtuellement.
L’ère de l’économie de plate-forme
Un autre aspect connexe plaide contre une nouvelle bulle 2.0. Contrairement à la situation au début du millénaire, les géants de la croissance d’aujourd’hui ont des barrières très élevées à l’entrée sur le marché. À l’époque, les « premiers arrivés » n’avaient aucune garantie quant au succès à long terme de leur modèle d’entreprise. Aujourd’hui, la situation est différente. Il est presque impensable de défier Apple, Amazon ou Microsoft en tant que plate-forme viable. L’essor des processus commerciaux numériques, en particulier, permet de réaliser de grandes économies d’échelle grâce à la technologie sous-jacente. En d’autres termes : les plateformes savent à l’avance ce dont l’acheteur a réellement besoin. Par conséquent, ces plates-formes sont en mesure de prendre une position dominante sur le marché et d’exploiter pleinement leurs avantages concurrentiels par rapport aux entreprises linéaires traditionnelles. Cela conduit à une meilleure rentabilité et à une forte croissance des bénéfices. Et ce, aussi grâce aux investissements réalisés dans la recherche et le développement.
Le vert, symbole d’espoir
Et ce n’est pas tout. Rétrospectivement, il y a quelques années à peine, l’utilisation de critères ESG dans les investissements en capital était un sujet exotique. Aujourd’hui, des aspects tels que la menace du changement climatique, l’égalité sociale et les questions de gouvernance d’entreprise ont accéléré l’intégration des critères ESG dans les processus d’investissement des investisseurs. Les entreprises doivent être durables si elles veulent être attrayantes pour le nombre croissant d’investisseurs orientés vers ce développement durable. D’autant plus que les entreprises ayant une meilleure notation ESG sont certainement (plus) performantes en bourse. Et la pression réglementaire est énorme. La Commission européenne est déterminée à transformer l’économie européenne en l’économie la plus durable du monde (Green Deal).
Ceux qui traitent les questions ESG avec professionnalisme sont les bénéficiaires évidents de cette évolution et continueront de l’être dans un avenir prévisible. Et, à ce stade également, le pendule penche en faveur des actions « de croissance » qui agissent activement. À partir de 2022, par exemple, des matériaux recyclés devraient être intégrés dans tous les produits « Made by Google ». Et le groupe investit considérablement dans les énergies renouvelables. D’autres suivent cet exemple. Dans l’ensemble, la réglementation ESG en cours conduit à une concentration des portefeuilles avec de nombreuses actions de croissance/technologie au premier plan.
Augmentation justifiée des prix
Il est incontestable que les cours des actions des grandes entreprises technologiques, en particulier, ont également bénéficié d’un marché haussier axé sur la liquidité, car le contexte actuel de faibles taux d’intérêt a entraîné une explosion générale des valorisations. Toutefois, un examen plus approfondi révèle que la hausse des prix dans le secteur technologique est fondamentalement justifiée. En outre, il n’y a aucune preuve d’une cupidité généralisée, comme au tournant du millénaire. Au lieu de cela, nous constatons une évolution dans la concentration sur quelques entreprises (dominant le marché) qui, compte tenu de leurs modèles commerciaux durables (moteurs des tendances structurelles), ont encore des évaluations appropriées. À cet égard, la situation actuelle a relativement peu de points communs avec celle du début du millénaire.
L’or, c’est de l’argent
Par Bert Flossbach, Flossbach von Storch
Le 13 août 2020
Après tout, le très grand crash de la crise du Corona n’a pas encore eu lieu. Les programmes d’aide et de relance économique des gouvernements ont empêché l’économie de s’effondrer. Mais le prix à payer pour cela est gigantesque. Dans le monde entier, les mesures fiscales affectant le budget s’élèvent à plus de cinq mille milliards de dollars, qui sont complétés par des garanties d’État s’élevant à environ 3 700 milliards de dollars.
Si nécessaire, les États fourniront des fonds supplémentaires, qui peuvent être financés à coût zéro compte tenu du faible niveau des taux d’intérêt. La conséquence est une augmentation rapide de la dette publique qui atteint des niveaux records. Les banques centrales sont donc prisonnières de leur politique de taux d’intérêt ultra-libre. Elles sont condamnées à fournir à l’infini de l’argent bon marché au monde et à intervenir en cas d’urgence pour apporter leur soutien.
Les taux d’intérêt ? Cette époque est révolue…
De plus en plus d’investisseurs reconnaissent que le taux d’intérêt zéro sera permanent et réfléchissent à des alternatives d’investissement possibles. La politique monétaire expansive et l’escalade des dépenses publiques devraient entraîner un retour de l’inflation à moyen terme. Les investisseurs auront probablement un besoin accru de protéger leurs actifs contre ce danger qui n’a plus été connu depuis longtemps. La classe d’actifs avec laquelle cela peut être sans doute le mieux réalisé est celle des actions de sociétés plus résistantes aux bénéfices et en croissance.
L’or (calculé à la fois en euros et en dollars) a récemment atteint un nouveau sommet historique. Toutefois, la raison fréquemment citée pour laquelle l’or est un gagnant dans la crise n’explique pas entièrement le phénomène. Ce sont plutôt les conséquences attendues de la crise, en particulier le niveau durablement bas des taux d’intérêt et l’afflux de liquidités des banques centrales, qui ont ramené la question de l’inflation à l’horizon.
Une demande en hausse
En tant qu’actif liquide, l’or est une protection adéquate contre l’inflation. Rien qu’au cours du premier semestre 2020, selon le World Gold Council, 734 tonnes d’or ont été achetées, soit plus que pendant toute l’année record 2009. Cela reflète une demande successivement croissante des investisseurs, qui a probablement moins à voir avec la crise du cornona elle-même qu’avec ses conséquences.
L’augmentation extrême de la dette publique, la faiblesse permanente des taux d’intérêt et le retour de l’inflation, qui ne peut être exclu, font de l’or une « valeur refuge » attrayante pour de nombreux investisseurs. Il est remarquable, mais pas surprenant, que les avoirs des ETF sur l’or aient fortement augmenté, en particulier aux États-Unis. La faiblesse record des taux d’intérêt américains et la dette publique record ont incité non seulement les investisseurs privés mais aussi les investisseurs institutionnels à augmenter leurs avoirs en or d’investissement malgré la récente reprise du marché boursier.
Cependant, l’or est une protection contre l’inflation et les éventuelles crises du système financier. À long terme, il ne faut pas attendre de l’or plus que la préservation réelle des actifs, mais pas moins. Et c’est un mot donné en période de taux d’intérêt bas.
USA vs UE : laquelle des deux régions économiques se redressera le plus rapidement ?
Par Michael Blümke, Senior Portfolio Manager chez ETHENEA Independent Investors.
Le 16 juillet 2020
Le confinement imposé par les États en raison de la pandémie généralisée de Covid-19, a entraîné un ralentissement économique majeur de toutes les zones économiques mondiales. Alors que certains États de l’Union européenne ont déjà connu plusieurs récessions techniques ces dernières années, aux États-Unis, le premier trimestre de 2020 a marqué la fin brutale de la plus longue expansion économique, qui durait depuis plus de dix ans. Toutefois, l’ampleur du ralentissement actuel de la croissance est à peu près comparable dans les deux régions. Pourtant, il existe une réponse très claire à la question qui est de savoir quelle région économique se redressera le plus rapidement : il s’agit des États-Unis.
Les raisons de cette situation sont complexes. Ce sont surtout les forces des États-Unis, d’une part, et les faiblesses de l’Union européenne, d’autre part, qui amènent à faire cette affirmation, qui semble peut-être évidente. Mais la monnaie et les différentes pondérations sectorielles jouent également un rôle important.
Etats-Unis : politique fondamentalement très favorable au marché
Malgré un système bipartite souvent conflictuel, les États-Unis ont un processus décisionnel plus simple et plus direct en matière de politique monétaire et fiscale. Ce système est également axé sur des autorités fortement centralisées. En termes relatifs, les entreprises américaines bénéficient d’un système fiscal favorable, d’une réglementation plus souple et d’un marché du travail très libéral. Malgré la réduction massive de l’impôt sur les bénéfices des entreprises qui est entrée en vigueur au début du mandat de l’actuel président américain, on examine actuellement la possibilité de nouvelles réductions d’impôt plutôt que de renoncer à ce cadeau électoral généreux. Et même si les démocrates devaient prendre le contrôle du Bureau ovale et des deux chambres législatives lors de l’élection de cette année, peu de choses changeraient dans cette politique fondamentalement très favorable au marché.
Europe : « cafouillage »
En Europe, en revanche, il existe une union économique et monétaire (mais pas de véritable union politique), qui se caractérise par des cycles économiques différents, en partie asynchrones, et des fondamentaux macroéconomiques très différents. Les intérêts différents (et dans certains cas divergents) des États membres qui en découlent compliquent essentiellement toute décision et, même pendant cette crise, rendent pratiquement impossible la mise en œuvre d’une politique fiscale et monétaire adéquate, et en temps utile. En Europe, le consensus politique est toujours synonyme de perte de temps et de qualité et se termine généralement dans un « cafouillage » que l’on connaît bien. Le budget actuel de l’UE est loin d’être suffisant pour relever les défis engendrés par la crise COVID-19. Bien que le package fiscal proposé pour la zone euro représente un premier pas vers une union fiscale et une plus grande solidarité entre les membres, il reste à voir si et à quelle vitesse il deviendra réalité. Si ce package est mis en application, il ne fera que retarder davantage les réformes structurelles nationales qui sont nécessaires depuis longtemps. Il constituera également un test décisif pour les représentants élus des pays contributeurs nets. Après tout, lors des prochaines élections, ces derniers seront tenus responsables des mesures prises. Cette thématique pourrait, par exemple, être examinée lors des élections fédérales allemandes de 2021. Bien entendu, outre les mesures paneuropéennes, il ne faudrait pas oublier les plans de relance adoptés par les différents États, et qui sont relativement importants. Toutefois, ces mesures ne sont pas coordonnées au niveau paneuropéen et ne servent pas non plus des intérêts qui dépassent les frontières des différents pays. En raison de leurs différentes envergures, cela risque d’entraîner des divergences encore plus importantes entre les États.
Ce qui donne aux États-Unis un avantage supplémentaire est le statut du dollar américain en tant que monnaie de réserve mondiale. La poursuite mondiale de valeurs refuges signifie que les États-Unis peuvent financer plus facilement leur déficit sans avoir à accepter un risque élevé de décote. Les coûts de financement resteront ainsi faibles, tant pour le secteur public que pour le secteur privé. Le « vieux continent », en revanche, a toujours le problème de sa monnaie trop forte pour certains pays et trop faible pour d’autres. La monnaie unique ne peut pas remplir sa fonction d’équilibrage pour tous les États.
Enfin, la suprématie des États-Unis dans le secteur technologique est également déterminante quant à la rapidité de la reprise économique. À cet égard, il convient de noter qu’un grand nombre d’entreprises ont été beaucoup moins vulnérables que d’autres pendant la crise et ont même pu en profiter. Le cloud computing et les services de paiement, par exemple, ont bénéficié d’un essor accru à l’ère de la distanciation sociale.
En résumé, les États-Unis disposent d’un avantage structurel qui leur permettra très probablement de surmonter la crise actuelle plus rapidement que la zone économique européenne. Toutefois, la prudence est recommandée lorsqu’il s’agit d’en tirer des conclusions sur l’évolution future des cours des actions. À long terme, et cela signifie un horizon temporel bien au-delà d’un an, ces avantages de croissance fondamentaux se traduiront certainement par des indices boursiers plus performants. À court terme, cependant, il faut tenir compte de la part de cette croissance future qui a déjà été anticipée et de la manière dont celle-ci se reflète dans les prix actuels du marché. En d’autres termes, une estimation globale basée uniquement sur les facteurs susmentionnés, sans tenir compte de la valorisation actuelle, serait trop unilatérale.
Comment investir sur le long terme et avec profit ?
Par Adrian Daniel, gestionnaire de portefeuille chez Mainfirst Asset Management
Le 25 juin 2020
Après plusieurs semaines de restrictions nécessaires pour lutter contre la pandémie de coronavirus, certains pays de l’Union européenne assouplissent à présent leurs mesures. Toutefois, il existe un consensus général sur le fait que les pertes économiques réelles dues au blocage du deuxième trimestre dépasseront de loin la contraction du PIB des récessions passées.
D’autre part, l’intervention coordonnée et massive de toutes les banques centrales internationales d’un soutien « coûte que coûte» (par exemple, la Fed a élargi son soutien aux obligations d’entreprises américaines), associée à des programmes de relance gouvernementaux jusque-là inimaginables, est un contraste saisissant. L’issue est incertaine. Il reste à voir si la politique monétaire et fiscale sera vraiment un substitut viable aux activités économiques qui ne se réaliseront pas. Pour l’instant, les décisions qui ont été prises peuvent être interprétées comme une bonne nouvelle pour les marchés des capitaux et les investisseurs, car ces mesures inédites ont au moins permis d’atténuer la volatilité mondiale.
Diversification et réduction des risques
Quelles sont les stratégies d’investissement qui fonctionnent en situation de crise et celles qui ne fonctionnent pas ? Et lesquelles de ces stratégies ont une chance réelle de réussir dans une situation aussi difficile ? Une stratégie d’actions toujours investies est vouée à s’effondrer avec l’affaiblissement du marché. La situation est différente pour les stratégies multi-actifs. Il est vrai que toutes les catégories d’actifs ont parfois perdu du terrain simultanément au cours de l’épidémie de coronavirus : les actions, les obligations et l’or. Bien sûr, cela a (durablement) affecté l’effet de diversification sous-jacent prévu de l’approche multi-actifs. Cependant, cela a été relativisé assez rapidement. Dans l’intervalle, les marchés boursiers ont de nouveau progressé et, dans le segment des obligations également, il pourrait y avoir des opportunités inattendues, en particulier dans certaines obligations d’entreprises en raison de leur profil d’attractivité accru, également par rapport aux titres de participation.
Néanmoins, le défi fondamental des solutions multi-actifs est toujours d’obtenir des rendements adéquats dans un environnement difficile sans perdre de vue le risque. En effet, compte tenu des difficultés du marché, les investisseurs se tournent de plus en plus vers le risque. C’est pourquoi la gestion des risques est au premier plan. Dans l’ensemble, les solutions diversifiées sont une façon de survivre, même sur une situation de mer agitée. Et la situation actuelle en fournit la preuve. De nombreuses stratégies multi-actifs ont relativement bien résisté à la crise du coronavirus jusqu’à présent, même en comparaison avec d’autres catégories d’actifs. L’une des raisons en est qu’un portefeuille de plusieurs actifs peut être réajusté relativement rapidement. C’est une flexibilité qui paie. Et une autre chose est frappante en ces temps. Aujourd’hui, plus que jamais, il est possible de se concentrer davantage sur les tendances structurelles qui sont déjà apparues au cours des derniers mois et des dernières années et qui deviendront encore plus importantes à l’avenir.
Focus sur les tendances structurelles
Se concentrer sur les tendances structurelles de croissance permet en fin de compte d’être moins exposé aux hauts et aux bas cycliques. Un bon exemple de tendances durables est la numérisation. Cette démarche devrait être associée à une analyse ascendante des modèles d’entreprise afin de déterminer dans quelle mesure ils peuvent bénéficier des tendances structurelles sous-jacentes. La stratégie devrait également prévoir la possibilité de couvrir la quote-part des actions et des devises. En conséquence, la création d’alpha pourrait devenir le principal facteur de performance en période d’incertitude économique. La politique monétaire a contribué à atténuer les effets de la première phase de la crise du Covid-19.
Dans le même temps, les entreprises ont été sceptiques quant au passage de leur infrastructure informatique au « cloud ». Au cours des derniers mois, le volume de données a augmenté massivement lorsque le personnel travaillait à domicile. Les entreprises ont donc été contraintes de passer au cloud computing et constatent à quel point cela est plus avantageux en termes de coûts, de sécurité et de capacité de traitement. L’entreprise AWS vient de mentionner lors de son assemblée annuelle que la consommation de services de streaming a augmenté de plus de 40% par rapport à l’année précédente. En conséquence, l’importance du déploiement des réseaux va devenir plus importante. Les nouvelles technologies telles que la 5G ou OpenRAN (réseau d’accès radio ouvert) deviennent de plus en plus essentielles pour que les entreprises restent compétitives. Ce type de changements perturbateurs est encore largement sous-estimé et offre des opportunités aux investisseurs à long terme.
Quelles perspectives pour les actions des marchés émergents?
Par James Donald, Head of Emerging Markets, Lazard Asset Management
Le 4 mai 2020
Pour l’avenir, les marchés émergents sont confrontés à plusieurs risques clés, dont chacun pourrait entraîner une volatilité encore plus grande dans la classe d’actifs.
– Les investisseurs pourraient s’enfuir, inversant les 310 milliards de dollars d’entrées dont bénéficiait cette classe d’actifs en 2018.
– Les chaînes d’approvisionnement mondiales pourraient s’effondrer, entraînant une incertitude commerciale continue et plus étendue que celle causée par la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine.
– Le choc pétrolier pourrait se poursuivre pendant une période prolongée. Cela exercerait une lourde pression fiscale sur les exportateurs de matières premières.
– Une forte dépréciation de la monnaie pourrait commencer à peser sur les pays ayant une dette importante libellée en dollars américains.
– Le virus pourrait s’avérer difficile à contrôler et mettre à rude épreuve les systèmes de santé de certains ou de tous les pays des marchés émergents. Cela pourrait avoir des conséquences politiques pour les gouvernements en place.
Un peu d’optimisme
Cependant, il y a aussi quelques raisons d’être modérément optimiste à ce stade. Bien que chaque pays aborde la crise différemment, nous pouvons nous tourner vers la Chine, le pays qui est confronté à COVID-19 depuis le plus longtemps, pour obtenir des indices sur ce qui pourrait se passer. Si la Chine peut reprendre le travail sans connaître une résurgence majeure des contaminations, cela sera de bon augure pour l’état du reste du monde dans quelques mois. Ce sera probablement positif pour les actions des marchés émergents. Les investisseurs doivent toutefois comprendre que la reprise économique peut être lente, même si la Chine est de retour au travail, ce qui n’est pas le cas du reste du monde, et que la demande de produits chinois ne reprendra peut-être pas immédiatement. La rapidité de la reprise en Chine est importante dans la mesure où elle indique à quelle vitesse le monde peut se redresser.
Prix du pétrole
Les marchés émergents sont à la fois les gagnants (importateurs) et les perdants (exportateurs) d’une guerre des prix du pétrole. Une baisse du prix du pétrole serait un défi pour la Russie, la Colombie, le Mexique et le Brésil. Le budget du Brésil pour 2020 prévoyait un prix du pétrole de 60 dollars le baril, et celui du Mexique de 49 dollars, de sorte que ces deux pays risquent d’avoir un manque à gagner. Si la baisse du prix du pétrole pourrait être plus bénéfique pour les importateurs tels que l’Inde, l’Indonésie, les Philippines, la Corée du Sud, la Turquie et l’Europe centrale et orientale, il sera crucial de surveiller les entrées d’investissements pour combler les déficits des comptes courants. La Colombie, l’Afrique du Sud, le Chili et l’Indonésie semblent avoir les soldes de base les moins favorables – solde des comptes courants plus investissements directs étrangers nets – et dépendent le plus des flux d’investissements pour se financer. Il sera très important de prêter attention à la capacité d’un pays à assurer le service de sa dette alors que le dollar américain continue de se renforcer.
Dépendance
Le commerce devrait réapparaître comme un problème dans les prochains trimestres. Le COVID-19 a montré de façon douloureuse à quel point les chaînes d’approvisionnement mondiales sont dépendantes de la Chine pour des produits essentiels tels que les médicaments et les masques faciaux. Cela pourrait exacerber le sentiment anti-mondialisation en Europe et aux États-Unis avec des appels renouvelés pour la relocalisation des usines et des chaînes d’approvisionnement.
Dans un contexte de volatilité incroyablement élevée, il est plus important que jamais de se concentrer sur des entreprises saines et de qualité, avec des bilans solides. Les entreprises dont les bilans sont faibles – et en particulier celles qui ont un besoin immédiat de financement – ont peu de chances de s’en sortir dans l’environnement actuel, qui devrait être incertain pendant un certain temps encore.
Opportunités sur les marchés émergents : les actions chinoises
Par Robert Secker, Investment Director dans l’équipe actions de M&G
Le 8 avril 2020
Le marché chinois a étonnamment bien résisté depuis le début de cette crise, c’est même l’un des marchés actions les plus performants au monde, ce qui est surprenant dans la mesure où le virus y a pris naissance et que l’économie chinoise a toujours été perçue comme un indicateur indirect de la croissance économique mondiale.
Le marché national (indice CSI 300) a enregistré de bien meilleures performances en valeur relative depuis son pic de janvier. L’indice MSCI China, qui est peut-être plus représentatif de ce à quoi les investisseurs internationaux peuvent accéder, a chuté d’environ 20 %, surperformant ainsi aisément l’univers plus large des marchés émergents (indice MSCI Emerging Markets), ainsi que l’Asie (indice MSCI Asia Pacific ex Japan) et le Japon (indice TOPIX).
Explications
Pour quelle raison ? Premièrement, le marché chinois est l’un des marchés actions les plus tournés vers le marché intérieur au monde avec environ 90 % des chiffres d’affaires générés par des entreprises nationales. Deuxièmement, les indices chinois (à l’exclusion des actions de catégorie « A »/de l’indice CSI 300) sont très fortement influencés par deux sociétés, Tencent et Alibaba (cotées à Hong Kong et aux États-Unis). Elles représentent environ un tiers de l’indice et se sont très bien comportées. Toutefois, si l’on regarde au-delà de ces deux valeurs, la plupart des entreprises et des secteurs en Chine se sont mieux comportés que leurs homologues des pays développés, et ce, grâce aux rapides mesures correctrices prises pendant la crise et à un facteur technique : le marché des actions de catégorie « A » n’est réellement accessible qu’aux investisseurs nationaux. Les investisseurs nationaux chinois ont peu d’endroits où placer leur argent et ne peuvent pas le sortir du pays. Aussi, compte tenu du coup de pouce budgétaire qu’ils ont reçu, il y a de fortes chances qu’une grande partie de cet argent ait fini par être placé sur le marché actions.
Nous pouvons également voir l’évolution de la composition du marché chinois avec le temps. Il est beaucoup moins « cyclique » que par le passé au regard des pondérations minimes des secteurs de l’énergie ou des matériaux. Cela explique, une fois de plus, sa résistance durant cette correction des marchés.
Valorisation bien supérieure aux points bas précédents
La Chine reste à des niveaux de valorisation bien supérieurs aux points bas précédents – cependant, les entreprises sur le marché chinois sont aujourd’hui très différentes de celles du passé. Si l’on examine l’indice MSCI China sur la base du ratio cours/bénéfice (PER) à 12 mois, le marché s’établit à un niveau supérieur de 32 % à celui qui était le sien lorsque la bulle technologique a éclaté et de 40 % à celui qui était le sien à son point bas après la crise financière mondiale. Ce faisant, dans l’ensemble, il présente actuellement un PER prévisionnel de 34 % supérieur à sa valorisation moyenne la plus basse [1].
Compte tenu de la résistance de la Chine au cours de cette période, les investisseurs sur les marchés émergents attentifs aux niveaux de valorisation pourraient chercher à prendre une partie de leurs bénéfices sur ces actions plus résistantes et réinvestir le produit dans d’autres segments de l’univers des marchés émergents ayant été victimes de lourdes chutes des cours. Comme toujours, une judicieuse sélection de valeurs demeure cruciale.
[1] Source : IBES, MSCI, RIMES, Morgan Stanley Research. Données au 12 mars 2020
Lorsque les marchés boursiers sont infectés
Par Dr Bert Flossbach
Le 16 mars 2020
Le nouveau coronavirus provoque des turbulences sur les marchés boursiers. L’indice boursier américain S&P 500 a perdu plus de 20 % en quelques semaines. Quelle est la gravité de la situation ? Et à quoi les investisseurs doivent-ils se préparer maintenant ?
Le nouveau coronavirus se répand de plus en plus, et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) parle désormais de pandémie. Sur les marchés financiers, la crainte des conséquences économiques de Covid-19 provoque des fluctuations erratiques et une chute des cours des actions. Jusqu’à présent, ni les mesures prises par les gouvernements, ni celles des banques centrales n’ont pu calmer les marchés.
Les pensées vont aux personnes touchées par l’épidémie. Mais en tant qu’investisseurs, il faut essayer de ne pas prendre de décisions sur une base émotionnelle. Pour les investisseurs, ce sont désormais moins les chiffres de l’infection qui sont pertinents que les mesures prises par les autorités et les entreprises pour contenir l’épidémie. Les voyagistes et les compagnies aériennes, par exemple, devraient connaître des effondrements. Dans des régions isolées de Chine ou d’Italie, même les petites entreprises connaissent des ravages du jour au lendemain. De nombreuses industries sont donc touchées, mais l’ampleur de l’impact n’est pas encore prévisible. Cependant, il est probable que la croissance se ralentira dans le monde entier. Aux premier et deuxième trimestres, il pourrait y avoir une récession. Il est douteux qu’une reprise puisse alors être attendue dès le second semestre de l’année. Il ne s’agit pas d’un rhume de courte durée, dont on se remet rapidement.
Le temps après le coronavirus
Mais investir de l’argent est un projet à moyen et long terme. Les investisseurs doivent donc investir sur les marchés boursiers pendant au moins cinq ans, voire plus de sept ans. Et, un jour, le nombre de personnes infectées diminuera, et l’ère post-virus commencera. Ce ne sera pas en 2025 et le problème ne touchera probablement, en fin de compte, que temporairement les marchés financiers.
Néanmoins, la période pourrait être difficile pour les entreprises qui ont un système immunitaire faible, c’est-à-dire qui sont mal financées ou qui, comme l’industrie hôtelière et touristique, sont susceptibles d’être gravement touchées par le déclin. Elle pourrait également être désagréable pour les entreprises qui entretiennent des relations commerciales plus étroites avec ces entreprises. En termes politiques, nous pourrions également assister à une évolution similaire à celle qui a suivi l’accident du réacteur de Fukushima. À l’époque, le gouvernement allemand a décidé de se retirer du nucléaire, ce qui a eu des conséquences massives pour les fournisseurs d’énergie. Aujourd’hui, les chaînes d’approvisionnement pourraient être renationalisées à nouveau, par exemple pour garantir une plus grande sécurité des produits pharmaceutiques. Les entreprises devraient alors s’installer dans les pays où elles vendent leurs produits, également pour éviter les droits de douane. Les flux internationaux de marchandises en souffriraient.
Phase difficile pour les banques
Même les banques, dont les marges sont de toute façon devenues minces dans la phase de taux d’intérêt bas, pourraient être mises sous pression si les prêts devaient faire défaut maintenant. Mais les banques centrales sont prêtes à intervenir. La Fed dispose d’une plus grande marge de manœuvre que la Banque centrale européenne (BCE) et a déjà fait le premier pas en matière de taux d’intérêt. La BCE va également augmenter son programme d’achat d’obligations et mettre plus d’argent à disposition pour les prêts.
Au cours des turbulences des marchés de ces dernières semaines, les actions de nombreuses entreprises de premier ordre, comme l’or, ont également chuté par moments. Car certains acteurs du marché ont maintenant besoin de liquidités et vendent. Mais dès que la tempête se calmera, ils commenceront à se différencier à nouveau : Quelles sont les entreprises qui sont particulièrement touchées et celles qui ne le sont pas ? Où les bénéfices vont-ils s’effondrer ? Où les périodes de sécheresse pourraient-elles même conduire à des crises existentielles ? Après de telles attaques de panique, la marée ne soulève souvent plus tous les navires.
Le retour de la valeur !
Par Olgerd Eichler, gestionnaire de fonds chez MainFirst
Le 11 février 2020
Le vent tourne sur le marché des capitaux. Les actions de valeur, qui ont été rejetées à de nombreuses reprises au cours de la dernière décennie, pourraient retrouver le chemin du succès dans un avenir proche.
Les actions de valeur offrent la possibilité d’obtenir des rendements intéressants avec un risque limité. Les entreprises particulièrement sous-évaluées, mais rentables et dotées d’un modèle commercial éprouvé sont intéressantes. En revanche, les actions de croissance sont actuellement surévaluées par le marché.
Plusieurs facteurs plaident en faveur d’un passage des actions de croissance aux actions de valeur. Le premier est le facteur géopolitique. L’accord partiel dans la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, ainsi que la plus grande clarté autour d’une Brexit ordonné, soutiennent une rotation du marché en faveur des actions de valeur particulièrement favorisées. Les craintes de récession et l’incertitude politique omniprésente en 2019 se sont atténuées. Les taux d’intérêt ont atteint leur niveau le plus bas.
À cela s’ajoutent la force et la solidité fondamentales des valeurs. Ces dernières années, les actions de croissance ont clairement été au centre de l’intérêt des investisseurs. Dans certains cas, ils ont réalisé des gains exorbitants. Dans l’ensemble, les marchés fortement animés par la dynamique ont conduit à des erreurs de prix importantes et à des écarts d’évaluation (fondamentalement) incompréhensibles. Les primes versées pour la croissance par rapport aux actions de valeur sont étonnamment élevées.
Les investisseurs devraient maintenant se demander si les attentes élevées sont toujours rationnellement justifiées par rapport au prix de l’action respective et s’il n’existe pas des catégories d’investissement plus attrayantes pour l’avenir. Après tout, même dans un environnement où les intérêts sont aussi faibles, les aspects liés à l’évaluation ne doivent pas être complètement ignorés. Trop souvent, le marché n’approuve que des évaluations très basses pour des actions de valeur. Cela reflète l’attitude négative à l’égard des développements attendus des entreprises. Les phases au cours desquelles le prix du marché d’une action s’écarte très fortement de sa valeur réelle constituent des opportunités d’entrée idéales.
C’est pourquoi il vaut la peine d’examiner de nouveau de manière sélective la catégorie des investissements de valeur. Tout ce qui semble bon marché n’est pas bon marché. Une analyse approfondie de l’entreprise est la clé du succès.
Il existe encore des possibilités d’investissement prometteuses dans des entreprises exceptionnelles, en particulier dans le segment des petites et moyennes capitalisations allemandes. Bien trop souvent, les acteurs du marché sont guidés par des évolutions temporaires tout en perdant de vue les perspectives à long terme. Grâce à de bonnes positions sur des marchés de niche, souvent largement indépendants de l’environnement macroéconomique, ces entreprises prometteuses peuvent généralement atteindre une croissance durable et en même temps rentable. Des facteurs tels que la qualité de la gestion, des rendements de dividendes attrayants et de solides ressources en capitaux propres parlent d’eux-mêmes. Les investisseurs devraient donc toujours se concentrer sur les investissements qui offrent le meilleur potentiel de rendement avec un risque limité. Cette combinaison prometteuse se retrouve actuellement plus que jamais dans de nombreuses bonnes actions de valeur inexploitées !
Dettes émergentes : quels sont les risques en 2020 ?
Par Charles de Quinsonas, gérant du fonds M&G (Lux) Emerging Markets
Le 20 janvier 2020
Voici les cinq principaux risques identifiés pour les économies en développement.
- Les tensions dans le Golfe persique. Les élections en Iran prévues en février 2020 dans un contexte de forte récession économique après deux années de sanctions unilatérales imposées par les États-Unis pourraient bien raviver les tensions cette année et leur escalade au Moyen-Orient pourrait avoir un impact significatif sur le prix des actifs de la région, car la prime de risque reste relativement faible dans certains pays bien notés comme l’Arabie saoudite, le Qatar, le Koweït ou les Émirats Arabes Unis. Les tensions entre les États-Unis et l’Iran ont peu de chances de disparaître en 2020.
- Guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis.Il s’agit de l’un des plus grands risques pour les pays émergents dont les économies continuent de dépendre largement du commerce mondial. Ses effets pourraient se propager à cause du fléchissement de l’activité en Chine, qui pourrait réduire la demande de matières premières.
- Élections à Taïwan, situations à Hong Kong, en Corée du Nord et en Mer de Chine Méridionale. La présidente sortante Tsai (Parti démocratique progressiste) a été réélue à l’occasion des élections présidentielles à Taïwan le 11 janvier. Son parti a bénéficié de chiffres économiques bien orientés au cours des derniers mois. La guerre commerciale sino-américaine a permis de rediriger un surcroît d’activité manufacturière au profit de l’île. Les manifestations à Hong Kong ont également permis au parti favorable à l’indépendance de distancer une opposition plus proche de la Chine. Les autorités chinoises sont jusqu’à présent restées relativement en retrait, mais cela pourrait changer après les élections taïwanaises. Ailleurs en Asie, la fin d’année 2019 a aussi été marquée par des tensions géopolitiques. La Corée du Nord a déclaré qu’elle envisageait de nouveaux tests de missiles, en violation des engagements pris en matière de dénucléarisation de la péninsule coréenne. La Malaisie a récemment rejoint le Vietnam et les Philippines dans leur position ferme face à la Chine qui revendique la possession de l’intégralité de la Mer de Chine Méridionale.
- Élections aux États-Unis.La plupart des investisseurs s’attendent à un décalage des marchés actions en cas de victoire démocrate. Cela pourrait conduire à un assouplissement de la part de la Fed et à un affaiblissement du dollar. Même si théoriquement favorable aux devises émergentes, une baisse du dollar pourrait aussi refléter une détérioration de l’économie américaine. Cela aurait un impact négatif sur la demande américaine de matières premières, et fragiliserait les actifs risqués à travers le monde. Dans ce scénario, la dette émergente dans son ensemble pourrait souffrir. La situation pourrait gagner en clarté en mars/avril prochain, une fois le candidat démocrate connu.
- Turquie – Risque de sanctions par les États-Unis. L’achat par la Turquie du système russe de défense antimissile (S-400) conjugué à l’opération militaire menée en octobre dans le nord de la Syrie par les forces d’Erdogan ont eu pour conséquence d’augmenter significativement le risque de sanctions à l’encontre d’Ankara par le Congrès américain. Cependant, l’implosion de la Turquie ne serait une bonne nouvelle ni pour l’Union européenne (accord passé avec Erdogan sur les réfugiés syriens), ni pour les États-Unis (la Russie accentuerait probablement son influence dans la région).
D’autres risques sont à considérer en 2020, notamment « la plus grande crise dont personne ne parle » à savoir le stress hydrique qui constitue un risque structurel de nature à créer des problèmes économiques, politiques et sociaux, mais les risques liés à la situation en Inde et au Pakistan, le conflit entre l’Ukraine et la Russie et les troubles sociaux à travers le monde.
Placements en 2020 : Bâtir des châteaux en Espagne
Par Hans Stegeman, Head of Research & Investment Strategy, et Joeri de Wilde, Investment Strategist, Triodos Investment Management
Le 24 décembre 2019
La décennie de croissance économique mondiale élevée qui a commencé après la Grande Crise Financière (GFC) touche à sa fin. Le produit intérieur brut mondial a connu une croissance inférieure à la tendance en 2019, ce qui indique que nous sommes entrés dans la dernière phase du cycle économique. Pour 2020, on s’attend à une croissance mondiale faible, les risques restant orientés à la baisse. Les politiques monétaires et les mesures de relance budgétaire répondent aux attentes des investisseurs, empêchant ainsi la chute des marchés financiers.
En ce qui concerne les économies développées, cette croissance paraît simplement fabriquée pour permettre aux investisseurs de continuer à vivre dans leurs châteaux en Espagne. Ces «bastions» sont maintenus à flot par des mesures qui visent à stimuler la croissance économique, mais qui, en fin de compte, ne font que soutenir l’inflation continue des prix des actifs et la financiarisation de l’économie. La croissance est de moins en moins basée sur des activités réelles et « terrestres ». Cette tendance devrait se poursuivre en 2020.
Cette situation, conjuguée à la politique monétaire très accommodante des principales banques centrales du monde et aux niveaux élevés de la dette mondiale, place l’économie mondiale dans un état fragile. Il n’est pas improbable que ce statu quo insoutenable se maintienne pendant un certain temps. Observation inquiétante car, à court terme, cela pourrait ne laisser qu’une marge de manœuvre limitée pour relever les grands défis auxquels sont confrontées les générations actuelles et futures : l’inclusion sociale et le changement climatique.
Perspectives d’investissement
Jusqu’à présent, l’année 2019 a été caractérisée par une reprise des marchés obligataires et boursiers. Le sentiment haussier des investisseurs, l’abondance de liquidités et les rachats d’actions d’entreprises en cours ont fait grimper les cours boursiers, tandis que l’appétit pour les placements refuges a fait baisser les rendements obligataires. Comme le monde connaît un ralentissement économique synchronisé qui s’accompagne de graves incertitudes géopolitiques, on aurait pu s’attendre à au moins une certaine forme de correction des marchés. L’absence de cette correction et le manque général de volatilité montrent que les investisseurs comptent sur les banques centrales pour faire le nécessaire afin de soutenir la croissance économique. Pour 2020, les politiques monétaires et les mesures de relance budgétaire répondront aux attentes des investisseurs, empêchant ainsi les marchés financiers de s’effondrer.
Néanmoins, dans l’environnement actuel où les risques ne sont pas correctement évalués et où les cours des actions s’écartent de leurs fondamentaux économiques, les conséquences d’un retournement soudain de l’humeur des marchés sont potentiellement énormes. La prudence est donc de mise.
Marchés obligataires
Les perspectives de baisse des taux d’intérêt et d’achat d’obligations par les banques centrales en 2020 impliqueraient une nouvelle baisse des rendements des obligations de sociétés. Bien que l’augmentation de la liquidité des banques centrales rende les défaillances moins probables, le ralentissement de la croissance incite à privilégier les crédits de grande qualité et les bilans solides.
Marchés d’actions
Le marché boursier américain reste relativement cher, tant par rapport aux autres régions que d’un point de vue historique. Les valorisations élevées actuelles ne reflètent pas les fondamentaux sous-jacents.
Le ralentissement de la croissance économique dans la zone euro a presque atteint son point le plus bas et il ne devrait pas diminuer davantage l’année prochaine. Les actions européennes pourraient donc bénéficier de politiques monétaires et budgétaires accommodantes. Les actions européennes sont également relativement bon marché par rapport à leurs homologues américains (bien qu’elles restent chères en termes absolus).
Les actions japonaises sont relativement bon marché par rapport à leurs homologues américains et européens. La Banque de Japon continuera à soutenir le marché des actions par le biais de son programme de QE et ce programme devrait prendre fin dans un avenir proche. En combinaison avec des valorisations attrayantes, cela permet de rester positifs à l’égard des actions japonaises.
La tendance mondiale vers l’assouplissement monétaire et le relâchement des tensions géopolitiques majeures pourrait profiter aux marchés émergents d’ici 2020. Une liquidité accrue et des taux d’intérêt plus bas pourraient inciter les investisseurs à se tourner vers des actifs financiers plus risqués, et une réduction des tensions commerciales pourrait stimuler la confiance des investisseurs.
Ces deux facteurs se traduiraient par une augmentation des entrées de capitaux pour les pays émergents. En 2019, l’Argentine, l’Iran, la Turquie et le Venezuela ont tous connu ou connaissent encore de graves difficultés économiques. Les problèmes de ces pays pourraient s’atténuer un peu en 2020. La stabilité politique sera essentielle. La croissance économique au Brésil, au Mexique, en Russie et en Arabie saoudite devrait s’accélérer quelque peu en 2020. Le ralentissement modéré de la Chine ne devrait pas se traduire pas par un ralentissement important des marchés financiers. Les mesures de relance budgétaire et d’assouplissement de la banque centrale de l’Inde devraient stimuler la croissance économique. En combinaison avec des valorisations globales relativement abordables pour les marchés émergents, ces éléments rendent prudemment optimistes quant à la performance des actions des marchés émergents en 2020. Toutefois, tout dépend en grande partie de la diminution des risques propres à chaque pays, de la réduction des tensions géopolitiques et de la poursuite des mesures d’assouplissement monétaire à l’échelle mondiale.
A suivre dans les FinTechs : les activateurs d’écosystèmes
Par Robeco
Le 14 novembre 2019
Le boom des FinTechs et des paiements électroniques ne s’essouffle pas. Lorsqu’il s’agit d’adopter de nouveaux modes de paiements (basés sur la biométrie ou la reconnaissance faciale, par exemple), les marchés émergents se posent en champions. Les économies développées sont également en train de passer aux paiements dématérialisés, mais pas pour les mêmes raisons. Les entreprises B2B qui fournissent des solutions de paiement aux professionnels seront le prochain segment de croissance de ce marché.
Activités multiples
Le marché des FinTechs continue de croître rapidement. Outre le secteur des paiements électroniques qui est en plein essor, ce marché s’empare également d’activités bancaires classiques telles que les prêts. Cette évolution est logique, car les fournisseurs de solutions de paiement connaissent généralement bien leurs clients, et sont donc tout à fait à même de leur proposer des prêts. Et ce, contrairement aux banques qui, le plus souvent, n’ont jamais vu les futurs emprunteurs qui se présentent à elles. Les FinTechs s’imposent petit à petit dans de nombreuses activités lucratives des banques, notamment dans les opérations de change (FX), de prêts et de dépôts.
Disparités géographiques
Les moteurs de cette croissance explosive ne sont pas les mêmes dans toutes les régions du monde. Dans les marchés développés, l’essor des FinTechs est stimulé par l’abandon des espèces au profit des cartes bancaires puis des paiements électroniques. Mais certains pays sont encore loin de passer au tout numérique, notamment en Europe. En Italie, par exemple, 80 % des achats s’effectuent toujours en espèces.
Cette transition n’est pas liée à la croissance du PIB en tant que telle, mais à la consommation en ligne qui favorise à son tour les paiements électroniques. Dans les pays développés, le PIB n’augmente pas très rapidement, mais les paiements dématérialisés, oui.
Dans les marchés émergents, en revanche, c’est la croissance économique sous-jacente qui est le moteur. Il y a aussi le fait que les pays à revenu faible atteignent le statut de pays à revenu intermédiaire. Surfant sur la vague de l’inclusion financière, de nouveaux modes de paiements se sont développés très tôt en Asie. Les infrastructures liées aux paiements en espèces (DAB par exemple), disparaissent petit à petit. Il est ainsi devenu pratiquement impossible de payer en liquide dans des pays comme la Chine. Les paiements mobiles se sont tellement généralisés que la pire chose qui peut vous arriver en Chine est que votre téléphone rende l’âme.
Vague de fusions-acquisitions dans le monde des FinTechs
La nécessité d’accroître le volume de paiements et de renforcer l’infrastructure informatique explique la vague actuelle d’acquisitions dans les marchés développés comme émergents. Les fusions-acquisitions offrent un avantage d’échelle aux entreprises. En 2019, le grand groupe américain de solutions de paiements FIS a acquis son homologue Worldpay, tandis que Fiserv s’est offert un autre acteur important du marché, First Data. Global Payment a, quant à lui, racheté Total System Services. Ces acquisitions vont se poursuivre et la prochaine vague aura lieu en Europe, ce qui devrait consolider des marchés européens encore fragmentés.
Dans les marchés émergents, des conglomérats sont déjà apparus. Quelques acteurs majeurs dominent le secteur des paiements électroniques. Les entreprises de moindre taille ont du mal à rivaliser avec les systèmes de paiement public tels que l’UPI. L’UPI (interface de paiement unifié) est un système de paiement instantané qui a été développé en Inde pour faciliter les transactions bancaires. Il existe aussi sous forme d’application. En Chine, les entreprises leaders acquièrent activement des participations dans d’autres sociétés asiatiques de paiements, afin de pouvoir servir leurs clients chinois et non-chinois.
Prochain thème de croissance : le B2B
Les prochaines opportunités de croissance dans le secteur des FinTechs viendront du segment B2B,. Sont concernés tous les acteurs ou activateurs qui fournissent les outils et infrastructures aux sociétés de paiements numériques (logiciels, terminaux de paiement, services de cybersécurité, etc.). Dans la mesure où le marché des FinTechs croît très rapidement et dépend de ces fournisseurs B2B, ceux-ci ne sont pas affectés par la conjoncture macroéconomique. Ils sont généralement hermétiques à la récession car leurs clients ne peuvent se permettre de repousser encore leurs investissements.
Ces activateurs d’écosystème servent les banques, les compagnies d’assurances et les gérants d’actifs. Elles servent aussi les sociétés FinTechs qui font leur arrivée sur le marché. Tout cela favorise les rapprochements avec les grands acteurs financiers. Par exemple, la société japonaise de services financiers et de gestion d’actifs SBI Holdings détient une participation dans le prestataire de paiements transfrontaliers Ripple.
Sur le marché des FinTechs, les activateurs d’écosystème en sont encore à leurs balbutiements et suivront le développement du segment des paiements dématérialisés. Les sociétés de paiements numériques offriront toujours d’importantes opportunités de croissance et d’investissement dans les cinq à dix prochaines années. L’objectif dans ce secteur est d’identifier dans les deux ou trois ans à venir les grands gagnants B2B qui fourniront des opportunités d’investissement nouvelles et supplémentaires.
A quoi peut-on s’attendre comme rendements à l’horizon de 2024 ?
Par Robeco
Le 11 octobre 2019
Dans son rapport annuel « Expected Returns 2020-2024 » Robeco donne un aperçu des performances prévisionnelles auxquelles les investisseurs peuvent aspirer au cours des cinq prochaines années. Une récession dans les cinq prochaines années semble inévitable. Pour de nombreux actifs cela se traduira par des rendements inférieurs aux moyennes historiques. Néanmoins, la prochaine récession ne sera pas un phénomène du type « fin du monde » comme le fut la crise financière mondiale. Il s’agira plutôt davantage d’une récession « patchwork » caractérisée par de petites poches dans l’économie mondiale, qui deviendront suffisamment importantes pour entraver la croissance mondiale.
Patience
Les prix des actifs ayant augmenté durant l’année, la patience s’avère un atout pour le moment. Sur un horizon de cinq ans, les prévisions de performances ont été revues à la baisse pour la plupart des classes d’actifs. Concernant les obligations d’État, les perspectives sont partagées pour les cinq ans à venir. Les Bunds allemands sont nettement survalorisés et, lorsque l’inflation augmentera, les rendements devraient rester bien inférieurs à ceux des liquidités. A contrario, les bons du Trésor américain s’en sortiront mieux lorsque la récession se déclenchera. Ils surperformeront confortablement les liquidités.
Valorisation
La valorisation est également un facteur pénalisant pour les actions des marchés développés. Cependant, les rendements pourraient rester relativement solides durant la première partie de la période considérée. Toutefois, dans la mesure où une récession est anticipée dans la deuxième moitié de la période, ces rendements finiront à des niveaux plutôt bas à la fin de cette période. Les actions émergentes sont globalement bon marché, mais la prévision de rendement n’a pas été modifiée par rapport à celle des marchés développés. Compte tenu des politiques de protectionnisme qui perdurent, une prime de seulement 50 points de base est prévue par rapport aux marchés d’actions développés.
Obligations d’entreprises
L’environnement macroéconomique devient moins favorable aux crédits Investment Grade et au High Yield, et des surperformances inférieures aux niveaux moyens historiques sont prévues, et ce, malgré des valorisations neutres. Un secteur se démarque en termes de rendements relatifs, à savoir les matières premières.
Prévisions annuelles de rendements pour la période 2020-2024* | |
Actions marchés développés | 3,25 % |
Actions marchés émergents | 3,75 % |
Obligations d’État allemandes | -1,75 % |
Obligations d’État mondiales (pays développés) | -0,375 % |
Dette souveraine émergente (locale) | 2,75 % |
Crédits Investment Grade | 0,25 % |
High Yield | 0,75 % |
Matières premières | 4,00 % |
Liquidités | -0,50 % |
* Rendements libellés en euros. Les rendements des obligations et des liquidités sont couverts en euros, à l’exception de la dette émergente libellée en devise locale. Source : Robeco.
Le thème de cette année est « S’échapper de la galerie des glaces », en référence à un scénario décrit par l’ancien président de la Réserve fédérale Ben Bernanke, qui a mis en garde contre une trop grande concentration des banques centrales à satisfaire les attentes des marchés.
Comment expliquer le ralentissement de milieu de cycle ?
Par Peter van der Welle, stratège chez Robeco
Le 13 septembre 2019
La croissance économique est à la peine, mais devrait reprendre des couleurs.Les marchés sont confrontés à un ralentissement de milieu de cycle plutôt qu’à un marasme de fin de cycle susceptible d’engendrer une récession aux États-Unis ou dans d’autres pays occidentaux.
L’activité mondiale est confrontée à un ralentissement persistant qui touche essentiellement le secteur manufacturier, dans un contexte d’incertitude généralisée entourant les politiques économiques. En août, l’indice ISM, baromètre de la confiance du secteur manufacturier, a reculé à 49,1, dénotant une contraction qui n’a guère rassuré les investisseurs.
Faut-il y voir un signe annonciateur d’un marasme de fin de cycle ? L’économie subit un ralentissement de milieu de cycle, mais devrait reprendre des couleurs en fin d’année 2019. L’essoufflement du secteur manufacturier (notamment dans l’automobile) entrave la croissance mondiale, mais ne l’anéantira pas.
Le déstockage comme baromètre
Un ralentissement de milieu de cycle se caractérise généralement par une réduction du stock de produits détenus par les entreprises. En effet, elles estiment que la demande va baisser ce qui perturbe le cycle des stocks. Actuellement on assiste à une tendance qui ressemble à un ralentissement de milieu de cycle. La production industrielle se contracte et le ratio stocks/ventes se situe à 1,45 aux États-Unis, un niveau proche des points hauts de 1995 (1,44) et 2016 (1,47).
Cette similitude est de nature rassurante. Cependant, le ralentissement du cycle des stocks a aussi coïncidé historiquement avec un ralentissement plus général qui a fini par mettre fin à l’expansion, comme cela a été le cas en 2001, par exemple. L’essoufflement du cycle des stocks est donc une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour établir si nous sommes confrontés à un ralentissement de milieu de cycle ou un marasme de fin de cycle.
Décalage par rapport à l’inversion de la courbe des taux
Cependant, selon certains indicateurs, le pire reste à venir. C’est notamment ce que semble annoncer l’inversion de la courbe de rendement des bons du Trésor américain. C’est un signe avant-coureur classique d’une récession. Mais, le temps qui s’écoule entre l’inversion de la courbe et l’entrée effective en récession n’est pas toujours le même.
De l’avis général, l’économie entre en récession 18 mois après l’inversion de la courbe des taux. Cela signifierait donc que nous sommes en fin de cycle. Or, des travaux menés par le FMI révèlent que la probabilité de prédire une récession très en amont est infime : les économistes n’y sont parvenus que cinq fois sur 153 !
Les deux cycles économiques qui ont précédé le cycle actuel ont d’ailleurs apporté la preuve de cet allongement du délai entre inversion et récession : la récession est survenue 29 mois après l’inversion de 2005, et 33 mois après celle de 1998.
Décalage par rapport à l’indice manufacturier
Des indices tendent également à montrer que le délai entre le point haut de l’indice ISM manufacturier américain et le début de la récession s’allonge. Ce décalage a très largement dépassé la moyenne historique de 36 mois lors des trois derniers cycles, puisqu’il a atteint 80, 78 et 44 mois.
L’allongement des délais entre inversion des courbes, baisse de moral des producteurs et récessions suggère que, même si elle dure depuis un certain temps, l’expansion actuelle a encore de beaux jours devant elle.
Le poids de moins en moins important du secteur manufacturier dans le cycle économique mondial constitue l’explication la plus plausible à cet allongement des délais au cours des dernières décennies. Dans le même temps, le secteur des services est monté en puissance et représente aujourd’hui 45 % du PIB américain.
Le secteur manufacturier se trouve d’ores et déjà en phase de contraction, alors que les services résistent. L’indice ISM non manufacturier annonce toujours une expansion dans le secteur tertiaire américain. Il est difficile d’envisager une récession aux États-Unis tant que le secteur des services ne montre pas de signes de contraction.
Des taux directeurs réels favorables
Par ailleurs, les taux directeurs réels actuels sont très différents de ceux que l’on observe généralement en fin de cycle de resserrement de la Fed. Aux États-Unis, les taux directeurs réels sont inférieurs à 1 % voire négatifs (ils ressortent à -1 % en zone euro), alors que les taux d’intérêt réels sont, historiquement, nettement supérieurs à 2 % en fin de cycle de durcissement monétaire.
Sauf à penser que le taux d’intérêt neutre (c’est-à-dire le taux qui ne freine pas et n’accélère pas l’activité économique) est inférieur aux taux directeurs réels qui prévalent aujourd’hui dans les économies avancées, la faiblesse actuelle des taux directeurs devrait donc prolonger l’expansion économique, et non la raccourcir.
Les États-Unis n’ont jamais connu de récession sans que les taux d’intérêt réels ne dépassent leur tendance à long terme d’au moins 2 %, et ils se situent aujourd’hui à 0,96 %. En bref, les taux d’intérêt réels qui résultent du cycle de resserrement amorcé par la Fed en décembre 2015 ne sont probablement pas suffisamment punitifs pour porter un coup d’arrêt à l’économie américaine.
Le rôle de l’investissement
L’investissement semble, pour sa part, influencer les cycles économiques. En prenant un peu de recul, on s’aperçoit que la dynamique d’investissement des entreprises américaines est toujours positive, alors qu’elle marque généralement le pas avant une récession.
Par conséquent, si la tendance actuelle est bel et bien à un ralentissement de milieu de cycle, le risque est réduit pour les actions. Il convient de rester toutefois prudents, car ce passage à vide pourrait encore durer un certain temps.
Pourquoi peut-on investir dans les nouvelles solutions de paiement?
Par Frank Schwarz, Fund Manager of MainFirst Global Equities Fund and MainFirst Global Equities Unconstrained Fund
Le 21 août 2019
L’évolution vers les paiements mobiles va certainement s’accélérer et constituer une tendance structurelle significative. Les investisseurs peuvent donc s’attendre à des rendements attrayants dans ce segment.
Dans un monde numérique et mobile, les paiements devraient, en toute logique, pouvoir se faire en un seul clic. Telle est l’idée derrière la tendance croissante des paiements électroniques et mobiles. La nouvelle génération des « natifs du numérique » n’a jamais connu un monde sans smartphones et internet mobile. Ce changement va certainement s’accélérer et constituer une tendance structurelle significative. Le phénomène ne fera que prendre de l’ampleur à mesure que les paiements via des applications mobiles deviendront la norme et que les systèmes de paiement s’adapteront à la nouvelle tendance du facile, rapide et orienté clients.
Des sociétés pionnières
- Paypal fut l’un des pionniers dans ce domaine, en cherchant de nouvelles façons de rendre possible les paiements en ligne entre les particuliers et les commerçants. Cette sociétéreste actuellement à la tête du marché. Elle compte plus de 246 millions d’utilisateurs dans plus de 200 pays à travers le monde. Cette tendance est à la hausse. Sa capitalisation boursière se porte à 131 milliards USD. Son service permettant d’envoyer et de recevoir facilement de l’argent ainsi que d’acheter des biens a été le moteur de la croissance des solutions de paiement faciles. Les solutions de paiement en ligne et mobiles ont suivi.
- Fondée un an plus tard, en 1999, Wirecard fournit des solutions de paiement plus complexes. Elle crée ainsi des systèmes sur mesure pour les entreprises. Elle est aujourd’hui l’une des plateformes numériques les plus florissantes au monde dans le domaine du commerce financier (d’après son site Internet). Elle offre tout un écosystème de services de paiement numérique. La société est actuellement évaluée à 18,7 milliards d’euros (22 milliards de dollars). Elle est active dans toute l’Europe et les marchés émergents, en particulier en Asie où elle collabore avec les compagnies chinoises Alipay et WeChatpay.
- Square est la troisième entreprise à innover dans le domaine des paiements numériques. Elle a révolutionné les transactions financières en 2009 en permettant aux commerçants non enregistrés d’accepter des paiements par carte de crédit à faible coût. Elle a ainsi facilité la croissance des petits commerces. Il est désormais facile pour quiconque de mettre en place un tel système acceptant les cartes. C’est aussi disponible n’importe où dans le monde. Il suffit de disposer d’une connexion et d’un lecteur de cartes portable pour créer un point de vente nouvelle génération. Square a renforcé sa crédibilité et a pris de l’élan grâce à des partenariats avec des leaders de l’industrie. Elle a reçu des éloges tant de la part des utilisateurs que d’évaluateurs. Aujourd’hui, sa capitalisation boursière est de 34,6 milliards USD et devrait continuer à croître.
Ouvrir la voie à un monde sans espèces
La tendance aux paiements numériques et mobiles signifie également que notre société de plus en plus digitalisée se dirige rapidement vers un monde sans espèces. Ce développement n’est pas seulement le fait d’une nouvelle génération de « natifs du numérique ». Ils préfèrent les moyens faciles et instantanés d’interagir avec le monde à l’aide de leurs appareils portables. Ils veulent également avoir leurs comptes et solutions de paiement à portée de doigts. Au fur et à mesure de l’entrée de la génération Z sur le marché du travail, cette dernière s’attend probablement à ce que les prêts hypothécaires, plans de pension et crédits soient disponibles de manière digitale. Et de préférence sur téléphone portable ! La tendance aux paiements mobiles est également grandissante parmi les tranches plus âgées de la population. Selon Accenture, 64 % des consommateurs prévoient d’utiliser un portefeuille mobile en 2020. Cela se ferait idéalement avec une vue globale des données relatives à leurs comptes personnels et aux fonds disponibles correspondants.
En outre, certains pays encouragent activement les transactions sans espèces. Dans la plupart des pays nordiques, l’argent liquide est en voie de disparition. La Suède a ainsi déclaré qu’elle sera sans espèces d’ici 2023. Au même moment, de nombreux marchés émergents font un bond en avant vers les paiements mobiles. La Chine a pris une longueur d’avance dans l’exploitation des applications pour smartphones comme outils de paiement. Le taux d’acceptation des portefeuilles électroniques est élevé et continue d’augmenter. L’Inde a fait de l’absence d’argent liquide une initiative phare du gouvernement. Elle a stratégiquement encouragé et mis en œuvre, en parallèle des systèmes de cartes bancaires plus traditionnels, des solutions de paiement innovantes telles que les portefeuilles mobiles. Certains pays africains comme le Kenya utilisent les téléphones portables pour effectuer des paiements.
Tous ces développements s’accompagnent d’un fort potentiel de croissance. Les solutions de paiement innovantes continueront à prospérer et les investisseurs peuvent donc s’attendre à des rendements attrayants. Mais pour cela, il convient de disposer de l’expertise nécessaire en matière d’investissement.
La Libra n’est pas une alternative aux grandes monnaies !
Par Florent Delorme, macro analyste chez M&G Investments
Le 8 juillet 2019
Facebook va lancer prochainement sa monnaie, la Libra, en collaboration avec 28 partenaires réunis dans une association. Visa, MasterCard, Paypal, Iliad, les VTC Uber et Lyft, Booking, Ebay et Spotify font notamment partie de l’aventure. L’ambition est de permettre aux utilisateurs des réseaux de payer leurs achats et de réaliser des virements vers d’autres utilisateurs sans intermédiaire financier et donc avec des frais de transaction très faibles. Pour Facebook et ses partenaires il s’agit d’augmenter l’attractivité de la communauté virtuelle afin d’augmenter les transactions et les revenus publicitaires. Cette nouvelle devise est décrite en détail sur le site libra.org . Elle reposera sur la technologie blockchain et sera adossée à une réserve constituée de bons du trésor d’Etats dont les monnaies sont parmi les plus solides au monde.
Basée sur la blockchain
La technologie blockchain permet de réaliser des transactions sécurisées entre membres d’une communauté sans recourir à un intermédiaire. Les serveurs de la blockchain Libra seront pilotés par les membres du projet. La monnaie pourra être achetée par les utilisateurs de leurs réseaux. Il y aura création de Libras lorsque les achats de Libras seront supérieurs aux cessions de Libras et réciproquement destruction de Libras lorsque la demande pour la devise sera inférieure aux cessions. Les sommes collectées en monnaies classiques à l’occasion de la création de Libras constitueront une réserve qui sera placée en titres gouvernementaux de court terme de banques centrales réputées. La valeur de cette réserve permettra à tout moment de définir le cours de la Libra dans différentes devises. La Libra ne sera donc pas toujours convertie au même montant dans une devise locale donnée. Cet adossement de la Libra à une réserve de monnaies fiduciaires la distinguera de cryptomonnaies comme le Bitcoin dont la valeur résulte du rapport entre l’offre et de la demande. A noter que les intérêts perçus sur les actifs de la réserve serviront à couvrir les coûts du système et à verser des dividendes aux investisseurs qui ont fourni des capitaux pour lancer le dispositif.
Pas une monnaie
La Libra n’a pas les caractéristiques d’une monnaie moderne. En effet une devise présente notamment deux propriétés importantes. Premièrement elle est créée ex-nihilo à l’occasion des opérations de crédit aux agents économiques. Ensuite, ces agents économiques sont au quotidien rémunérés dans cette monnaie pour leur travail, ce qui leur permet de rembourser les prêts qui leur ont été octroyés. Le premier mécanisme permet l’expansion de la masse monétaire et donc la croissance économique. Le deuxième mécanisme permet que cet accroissement de la masse monétaire s’accompagne d’une création de richesse et évite une inflation trop forte.
Plutôt des coupons
La Libra ne présente aucun des deux attributs mentionnés ci-dessus. Elle s’apparente plus à ces coupons qu’on achète à l’entrée d’un lieu de loisirs et qui vous permettent ensuite de payer tous les produits et services proposés sur place. En l’état, la monnaie numérique de Facebook ne peut supplanter le dollar ou l’euro.
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Comment les investisseurs ESG doivent-ils envisager les emprunts d’État ?
Par Maria Municchi, manager of the M&G (Lux) Sustainable Allocation Fund
Le 7 juin 2019
Il est souvent plus facile de conceptualiser les critères ESG en matière d’investissements dans des entreprises. En revanche, investir dans des emprunts d’État soulève des questions qui peuvent être relativement complexes.
Les activités d’une entreprise sont souvent relativement restreintes. Etablir un lien direct entre l’entreprise et les activités que nous ne cautionnons pas (la pollution, les jeux, le tabac, les boissons alcoolisées, etc.) ou celles que nous défendons (la santé, l’éducation, les ressources renouvelables) est généralement relativement aisé.
En revanche, investir dans des emprunts d’État soulève des questions qui peuvent être relativement complexes. Lorsque Goldman Sachs a acheté des emprunts d’État vénézuéliens en 2017, la société a été condamnée pour avoir soutenu un régime mal vu. En revanche, durant d’autres crises, les investisseurs ayant vendu des emprunts d’État (les « bond vigilantes » originaux) ont parfois été considérés comme punissant la population locale et portant atteinte au droit à l’autodétermination.
Toutefois, une telle complexité n’est pas une raison pour éviter tout investissement dans les emprunts d’État. D’une part, il est clair que les États ont un rôle considérable à jouer de manière à influer sur ces mêmes forces qui préoccupent le plus les investisseurs ESG. D’un point de vue financier, il s’agit également d’une classe d’actifs qui peut jouer un rôle clé en matière de génération de performance et de gestion du risque de portefeuille, que ce soit par le biais de positions à duration longue ou courte. Cela est particulièrement important pour les fonds diversifiés qui cherchent à offrir des caractéristiques de performance et de volatilité spécifiques et stables dans divers environnements.
Est-ce que l’impact final des dépenses publiques est bénéfique ?
Compte tenu de la multiplicité de leurs activités, aucun État ne sera jamais irréprochable du point de vue le plus strict des enjeux ESG. Les dépenses de défense en sont un exemple évident. C’est aussi le cas des pays qui dépendent grandement de la production de combustibles fossiles.
Dans le même temps, de nombreuses dépenses publiques sont consacrées à l’amélioration du niveau de vie. Si l’on prend l’exemple des États-Unis, bien qu’ils aient les dépenses de défense les plus importantes connues de tous les pays, la plupart de leurs dépenses (selon les estimations approximativesactuelles) sont encore consacrées aux services sociaux.
A cette seule lumière, il semble inapproprié d’exclure les emprunts d’État américains simplement parce qu’un gouvernement exerce une activité qui peut ne pas concorder avec les objectifs ESG, de la même manière que nous le ferions avec une entreprise.
Nous devons plutôt nous demander si l’impact finaldes dépenses publiques est bénéfique. Cela peut être difficile, mais cela ne doit pas pour autant servir d’excuse pour faire l’impasse dessus.
Agnosticisme politique
Comme l’illustre l’exemple vénézuélien, investir dans des emprunts d’État risque d’être perçu comme un aval donné à un point de vue politique ou un soutien à un régime en place. Cela ne doit pas être vu comme tel. En premier lieu, il est important de toujours chercher à respecter les différences d’opinion et de se montrer humbles quant à sa capacité à « connaître la réponse » à la façon dont les sociétés doivent être dirigées.
L’évaluation des institutions au regard de la corruption, de l’état de droit et des droits de l’homme est une partie importante du « G dans les critères ESG ».
Toutefois, tout comme la décision d’investissement doit être exempte de biais, ces évaluations de la gouvernance doivent également être aussi exemptes que possible de convictions politiques. Il semble que des opinions politiques polarisées peuvent être une source de biaisdans la prise de décision d’investissement, comme c’est le cas dans tout autre domaine. Les réactions émotionnelles à des questions spécifiquesou à des individus particuliers ne sont d’aucune utilité et adopter une position politique à l’égard d’un investissement peut être préjudiciable aux performances. Même si la distinction peut être floue, nous devons nous efforcer d’éviter de laisser des opinions politiques influencer les évaluations des structures de gouvernance et institutionnelles.
Trois études de cas
Comment appliquer certaines de ces réflexions ? L’environnement actuel fournit quelques exemples utiles. Il peut être difficile de se forger des jugements dans des pays où les données disponibles sont plus rares et où la transparence est en général médiocre.
La Colombie a été l’un des principaux acteurs de la durabilité sur la scène internationale et a prêté son concours à l’élaboration des Objectifs de Développement Durable des Nations Unies.
A l’inverse, l’Indonésie ait reçu une note ESG globale de BB par MSCI. Et ce, en dépit de l’attractivité de ses fondamentaux, le pays semble manquer à la fois de politiques environnementales suffisamment fermes concernant l’huile de palme et d’autres contrôles environnementaux aux niveaux national et international.
L’Egypte est, quant à elle, confrontée à des problèmes du point de vue de la gouvernance sociale. Indépendamment de toute opinion sur le régime en place, les structures institutionnelles existantes sont telles que des organisations comme Freedom House (une organisation indépendante qui mesure et analyse des indicateurs de liberté dans le monde) considèrent la nation comme l’une des moins libres au monde.
Chaque État va de pair avec ses propres forces qui doivent être prises en compte en plus des forces traditionnelles telles que les influences inflationniste, monétaire et de change.
Quels critères ?
Les agences de notation comme MSCI (qui fournissent des notations ESG distinctes des notations de crédit traditionnelles) peuvent aider à évaluer ces facteurs. Toutefois, il convient de les compléter par des considérations qualitatives et d’autres données. Fait important, il existera également de nombreux éléments communs entre les facteurs ESG et financiers. De nombreuses forces liées à la gouvernance auront une influence sur la capacité et la volonté des États de rembourser leur dette ou sur les niveaux d’inflation prévus dans une économie. Le niveau de vie, la santé et l’éducation auront d’énormes répercussions sur la productivité, et donc sur le rythme de la croissance, d’une économie sur le long terme.
Il pourrait être facile de ne voir dans les enjeux environnementaux qu’un problème trop éloigné. Il pourrait être facile de ne voir dans les enjeux environnementaux qu’un problème trop éloigné. Mais le changement climatique et les conditions météorologiques extrêmes sont susceptibles d’avoir des conséquences très réelles sur la croissance. De plus, des pays comme le Mexique ont récemment émis des obligations à 100 ans. Dès lors, une telle opinion devient beaucoup moins courante.
Evaluer des emprunts d’État au regard des enjeux ESG peut certes s’avérer plus difficile que pour des entreprises. Mais le rôle que ces critères jouent est en définitive trop crucial pour être ignoré. Il faut les considérer à la fois en termes d’opportunités d’investissement et, surtout, au niveau de leur contribution au visage qui sera celui du monde de demain.
Les grandes tendances de consommation en 2019 : santé et bien-être
Par Jack Neele, gérant de portefeuille chez Robeco
Le 17 mai 2019
C’est un fait, les jeunes consommateurs se préoccupent de leur santé, et cela se reflète dans leurs choix (alimentation, sport, bien-être et loisirs, travail, transport et même habillement).
Les jeunes des générations Y et Z utilisent des trackers d’activité et des montres connectées pour obtenir des données sur leurs performances sportives et leur santé. Ils sont prêts à dépenser plus dans des articles de sport et des marques de loisirs sportifs, tels que l’application Strava pour les coureurs et les cyclistes, les chaussures Allbirds fabriquées en matériaux naturels, ou la montre Apple, pour n’en citer que quelques-uns. Ils consomment aussi davantage d’aliments naturels, bio et plus sains, ainsi que des plantes aromatiques et des épices.
Pour les jeunes générations, le bien-être est un engagement permanent. Leur attitude en matière de consommation est particulièrement notable puisqu’elle est devenue une forme d’expression de l’identité individuelle et une question d’éthique.
Cet univers « healthy » est très diversifié et se compose de thèmes allant du fitness aux aliments, en passant par le bien-être au travail, la beauté, le sommeil, les soins sur mesure, les équipements sportifs, la nutrition personnalisée, les voyages et l’hébergement, ainsi que la santé mentale.
Au sein de ce vaste univers, l’industrie de l’alimentation saine et biologique est celle qui croît le plus. Ainsi, les édulcorants peu caloriques et les snacks de légumes sont de plus en plus plébiscités, tandis que la demande de protéines végétales (sushis, plats à emporter végétariens, etc.), continue d’augmenter. Nombre d’entreprises agroalimentaires investissent dans cet univers, par exemple General Mills (Beyond Meat), Nestlé (Impossible Foods) ou Unilever (De Vegetarische Slager).
Les moteurs de l’industrie du bio sont multiples
Cette industrie compte quelques moteurs sous-jacents, le premier d’entre eux étant la forte croissance des petites marques locales, en particulier dans les marchés émergents. Mais on peut également citer la tendance santé et bien-être, qui stimule la demande d’aliments de meilleure qualité, ou la recherche accrue de praticité, à savoir des plats prêts à consommer ou la réduction du temps de préparation des repas.
La tendance du « consommer sain » est dans son ensemble stimulée par Internet, qui a abaissé les barrières à l’entrée du marché. Cela s’est produit dans tous les domaines de cette filière (fabrication, commercialisation et distribution).
De plus, cette tendance a été dopée par la prolifération des start-up, qui a permis l’émergence de nouvelles façons innovantes de produire des aliments. L’ère des réseaux sociaux a également joué un rôle, car les plateformes comme Instagram et Snapchat permettent de faire de la publicité de manière ciblée. Enfin, grâce à l’e-commerce et à la logistique, n’importe quelle firme peut à présent livrer ses produits directement chez le consommateur.
Les groupes agroalimentaires traditionnels sont sous pression
À l’heure actuelle, les jeunes consommateurs mangent de manière réfléchie et utilisent Internet pour trouver les aliments les plus sains. Résultat, les producteurs d’aliments préemballés et transformés doivent se réinventer, car les vendeurs d’aliments frais et bio, les services de livraison de repas et les modèles économiques des épiceries en ligne répondent mieux à la demande de ces jeunes.
En outre, la progression d’Internet et du e-commerce a abaissé les barrières à l’entrée du marché pour les start-up opérant dans ce domaine. Il n’a jamais été aussi facile de lancer une marque et d’en faire la promotion sur les réseaux comme Instagram. Tous ces facteurs ont révolutionné la production alimentaire traditionnelle. Depuis des années, les fabricants se concentrent sur la productivité et la réduction des prix, souvent aux dépens de la qualité et des bienfaits pour la santé.
Or, les consommateurs sont beaucoup plus avertis aujourd’hui et choisissent des marques et des produits différents. Il n’est donc pas surprenant que les résultats de la plupart des sociétés agroalimentaires basées aux États-Unis baissent depuis au moins 2017 par rapport à l’indice S&P 500. Nombre de ces entreprises cherchent à réorienter leurs portefeuilles en procédant à des acquisitions.
Quelles sont les conséquences pour les investisseurs ?
Les investisseurs ayant une bonne compréhension de l’univers du manger sain peuvent en tirer des bénéfices. Les gagnants structurels dans cette tendance pourraient être soit les nouveaux venus capables d’en tirer parti, soit les fabricants traditionnels disposant d’un portefeuille de produits complet.
Nous pensons que dans cet univers, le marché des ingrédients spécialisés enregistre une croissance significative et constitue une importante opportunité d’investissement. La production des enzymes nécessaires à la fabrication des yaourts probiotiques en est un exemple. Le marché des ingrédients spécialisés vaut actuellement environ 75 milliards de dollars et il en est toujours à ses balbutiements par rapport à la vaste industrie des aliments préemballés. Mais il croît de plus en plus rapidement et génère des marges et des performances élevées.
Quel impact l’évolution de la Chine a-t-elle sur les investisseurs européens ?
ParFrank Schwarz, gérant du MainFirst Global Equities Fund et du MainFirst Global Equities Unconstrained Fund
Pendant plus de 4000 ans, la Chine a été le pays le plus développé au monde. En revanche, cette position s’est transformée au cours des 400 dernières années. Mais, durant ces 40 dernières années, la Chine a rattrapé son retard et a déjà dépassé le monde occidental dans de nombreux domaines. La question que se posent de nombreux investisseurs est donc de savoir comment ils peuvent tirer profit de cette évolution. En d’autres termes, comment les investisseurs peuvent-ils juger les changements qui offrent aujourd’hui le plus grand potentiel de croissance et comment peuvent-ils les utiliser pour générer des rendements ?
Stratégie, innovation et énergie
On connait le penchant de l’Empire du Milieu pour la planification à long terme. Son objectif stratégique à l’horizon 2025 est de renforcer l’industrie chinoise, d’améliorer la qualité de ses produits et de faire progresser l’automatisation et la numérisation. Pour atteindre ses objectifs stratégiques, l’État chinois investit chaque année plus de 2 % de son produit intérieur brut dans l’innovation afin de devenir le leader mondial de la production d’énergie électrique. Par exemple, l’État chinois investit massivement dans les énergies alternatives. C’est par le prisme de cette vision stratégique qu’il faut considérer la multiplication par dix du nombre de demandes de brevets déposées par la Chine au cours des dix dernières années. C’est en effet un indicateur fort de la capacité d’innovation et du positionnement stratégique que la Chine a développé pour atteindre ses objectifs à long terme.
Source: WIPO, Morgan Stanley Research.
Graphique 1 : Demandes internationales de brevet entre 2001 et 2017
Tendances structurelles de la production d’énergie
Le délai entre l’invention, la demande de brevet et son déploiement commercial peut prendre du temps. Par exemple, le stockage d’énergie par batterie lithium-ion a été inventé il y a presque 80 ans. Mais ce n’est qu’en 2005 que d’importants progrès ont été faits, de sorte que les batteries puissent être produites à un prix suffisamment bas et ainsi être utilisées de plus en plus largement. Dès lors, les réductions des coûts de production ont été rapides : rien qu’entre 2005 et 2017, le prix a été divisé par 6 (passant d’environ 1300 à 209 dollars), permettant aux entreprises d’utiliser les batteries lithium-ion d’une manière nouvelle et différente.
Source: BloombergNEF, au 19 décembre 2018.
Graphique 2 : Réduction du prix des batteries entre 2010 et 2018.
Tesla est l’une des sociétés emblématiques qui profite de ce développement. L’entreprise utilise non seulement la technologie pour ses moteurs électriques mais aussi pour stocker l’énergie générée au sein du parc éolien Hornsdale en Australie, avec une capacité de décharge de 100 MW et une capacité de stockage de 129 MW, ce qui en fait la plus grande installation de stockage en batterie au monde. Les conséquences qui découlent de cette tendance sont importantes, car les énergies renouvelables engendrent des coûts de production énergétique proches de zéro.
Consommation énergétique et consommation générale en Chine
La Chine emboîte le pas et commence à développer et exploiter une grande variété d’utilisations des batteries lithium-ion. Des sites de production de batteries pour automobiles électriques sont en cours de construction, de sorte qu’à l’horizon 2021, la Chine soit responsable de 70% de la production mondiale de batteries pour véhicules électriques. En 2019, la construction de la première « Gigafactory » a débuté en Chine. Compte tenu de la croissance continue de la Chine, le développement de nouveaux moyens de production d’énergie s’impose de manière urgente, notamment pour satisfaire la demande croissante d’électricité. En 2030, on estime qu’environ 9 des 15 plus grandes villes du monde seront chinoises. Cette évolution nécessite d’énormes investissements dans la production d’électricité.
Le pouvoir d’achat des ménages chinois va également continuer de croître. Les actifs privés devraient ainsi augmenter de 180 % au cours des dix prochaines années, pour atteindre près de 70 trillons de dollars, se positionnant juste derrière les États-Unis, qui devraient eux atteindre 75 trillons de dollars.
Une évolution qui stimulera la croissance dans le secteur de l’énergie, mais aussi dans d’autres domaines tels que les transactions financières ou les produits de luxe. Parmi les entreprises susceptibles de bénéficier de cette croissance, nous pouvons citer des géants chinois tels Alibaba et Tencent, mais aussi des producteurs internationaux de produits de luxe tels LVMH, Kering ou Canada Goose.
Quelles sont les opportunités d’investissement dans les infrastructures ?
Par Alex Araujo, gérant du fonds M&G (Lux) Global Listed Infrastructure, M&G
Le 12 mars 2019
Les infrastructures jouent un rôle central dans l’économie mondiale, c’est pourquoiles investissements dans les sociétés d’infrastructure cotées représentent des opportunités pour les investisseurs qui recherchent des rendements stables à long terme.
Combler l’insuffisance des dépenses publiques
Dans le monde développé, les dépenses consacrées à l’entretien, à la maintenance et au développement des infrastructures existantes ont été bien en deçà des besoins réels, laissant nombre de ces actifs dans un état proche du délabrement. Les pressions subies par les finances publiques couplées à l’expertise limitée du secteur public poussent le secteur privé à jouer un rôle clé dans la remise à niveau et la modernisation des infrastructures.
Les marchés émergentsreprésentent près des deux tiers de la demande – dont un tiers pour la Chine – du fait de l’urbanisation fulgurante de ces pays et de la croissance rapide de la population. Depuis la Chine ou l’Inde jusqu’à l’Amérique Latine, en passant par l’Afrique, la construction des infrastructures nécessaires à l’amélioration des niveaux de vie et à la croissance économique continue de battre son plein.
Cependant, dans un monde où le populisme augmente, l’infrastructure devient un enjeu de plus en plus politique. Les déclarations faites par les hommes politiques, notamment dans le cadre du projet » One Belt, One Road » en Chine et du programme d’infrastructure proposé par Donald Trump, font qu’il devient difficile pour les investisseurs d’identifier les véritables opportunités.
Bénéficier de tendances structurelles
Les infrastructures bénéficient de tendances structurelles qui ont une influence profonde sur les conditions de vie dans le monde entier, comme par exemple les énergies renouvelables, les transports du futur, l’urbanisation, la connectivité universelle, la gestion des déchets et de l’eau, les changements sociaux et démographiques. Ces tendances structurelles présentent non seulement des opportunités de croissance à long terme, mais ont aussi la capacité de survivre aux cycles électoraux et aux promesses des hommes politiques.
Les développements technologiques, comme par exemple, le déploiement des réseaux 5G, la fibre optique à très haut débit, les infrastructures à hydrogène et la lévitation magnétique ne sont plus des concepts. Chaque développement technologique devra s’appuyer sur un réseau physique qui permettra aux entreprises et aux ménages d’accéder aux services essentiels de demain.
Elargir les infrastructures traditionnelles aux infrastructures « évolutives »»
Pour tirer pleinement profit de la classe d’actifs, nous sommes convaincus que les investisseurs doivent élargir leurs horizons au-delà des infrastructures économiques traditionnelles, tels que les services aux collectivités, les pipelines énergétiques et les transports. Les infrastructures sociales, dont les établissements de santé et scolaires, présentent des caractéristiques défensives similaires, mais avec des actifs qui offrent des avantages en matière de diversification. Les infrastructures évolutives, liées à l’adaptation au numérique, offrent des opportunités de croissance sans égal grâce aux réseaux de communication et transactionnels, ainsi qu’aux entreprises fonctionnant sur le système de redevances.
Cette approche novatrice et diversifiée à l’égard des infrastructures offre une combinaison favorable de caractéristiques défensives et de croissance à long terme qui fournit des avantages de diversification pour un portefeuille plus large.La classe d’actifs a l’avantage de générer un rendement supérieur à celui des actions internationales avec une moindre volatilité, ce qui aide à protéger le capital en cas de baisse des marchés.
Chine : Quelles opportunités sur les obligations d’entreprises à haut rendement ?
Le 18 février 2019
Par Thomas Rutz, expert des marchés émergents chez Mainfirst Asset Management
Le marché des obligations d’entreprises à haut rendement présente des opportunités intéressantes grâce à la forte baisse des valorisations.
Les chiffres économiques actuels montrent que l’économie chinoise ralentit. Cela peut être attribué à des éléments cycliques liés à l’économie intérieure, mais aussi à la guerre commerciale en cours entre les États-Unis et la Chine, qui a vraiment nui au climat des investissements. Le gouvernement chinois a déjà pris des mesures appropriées pour stimuler l’économie en assouplissant la politique monétaire, en stimulant les prêts bancaires et en réduisant l’impôt sur le revenu. Même si les mesures de stimulation du crédit sont de moins en moins efficaces, la Chine dispose d’outils politiques nécessaires pour contrôler son économie et un scénario d’atterrissage brutal est peu probable.
Les attentes du marché concernant l’avenir de l’économie chinoise sont trop pessimistes. Le différend commercial entre les États-Unis et la Chine devrait finalement être résolu et la levée de cette incertitude, tout comme les politiques du gouvernement chinois, devraient être suffisantes pour soutenir la croissance. Une croissance de l’ordre de 5 à 6 % au cours des deux prochaines années devrait être atteinte. Dès lors, les secteurs cycliques et les actifs risqués se comporteront mieux. Le principal risque est un atterrissage brutal de l’économie chinoise, la croissance tombant rapidement en dessous de 5%. Toutefois, une guerre commerciale croissante avec les États-Unis augmentera la probabilité d’un tel scénario, mais le gouvernement chinois a encore la possibilité d’accroître ses mesures de stimulation et d’autres réductions d’impôt sont probablement déjà en cours pour soutenir l’économie.
Opportunités
Il y aurait donc de belles opportunités dans les obligations d’entreprises chinoises à haut rendement. Les valorisations sont devenues nettement moins chères au cours de l’année écoulée et de nombreuses obligations ont permis de dégager des rendements à deux chiffres. Bien sûr, une partie de la baisse de la valorisation peut être attribuée aux perspectives macroéconomiques plus faibles, mais dans cet univers, même les entreprises de qualité ayant des plans d’affaires solides et des sources de revenus diversifiées ont été sévèrement pénalisées. Il y aurait donc des possibilités dans les secteurs de la consommation et des services publics. En ce qui concerne la forte performance positive des actions chinoises, il est indispensable que la monnaie ne soit plus dévaluée. Du côté positif, tant le marché des obligations à haut rendement que celui des actions sont fortement sous-évalués, car de nombreux participants au marché sont extrêmement baissiers. L’univers est généralement sous-exploité et sous-développé et offre des opportunités uniques aux gérants obligataires.
Privilégier l’économie circulaire : quand les déchets valent de l’or!
Par Carola van Lamoen, responsable de l’actionnariat actif chez Robeco
Le 11 janvier 2019
Les progrès économiques qui ont été réalisés par le passé ont un coût que les résultats et les bilans des entreprises ne reflètent pas encore : il s’agit d’un coût externe.
Avec l’augmentation de la population mondiale, dont le niveau de vie augmente, l’ancien modèle de consommation linéaire (produire, utiliser, jeter) n’est plus tenable. Dans les prochaines décennies, la consommation d’énergie, d’acier, de céréales et d’eau devrait connaître une croissance encore forte, et probablement sous-estimée. La question est de savoir si cela sera possible.
Une chose est sûre : la pression sur l’environnement ira en s’accroissant. Aux taux actuels d’urbanisation et de croissance démographique, la production mondiale de déchets devrait atteindre 2,2 milliards de tonnes par an d’ici 2025, soit 1,42 kg d’ordures par jour et par personne.
Les mentalités doivent impérativement changer. L’économie doit devenir circulaire. L’analyse du cycle de vie du produit doit faire partie intégrante de sa conception. Intégrer les principes de l’économie circulaire au processus de production permettrait de réduire la consommation de matières premières, d’améliorer l’efficacité des ressources et de diminuer le coût de la gestion des déchets : une excellente nouvelle pour les bénéfices des entreprises.
Les Objectifs de Développement Durable (ODD) des Nations unies traduisent eux aussi l’importance de cet enjeu. L’ODD numéro 12 porte sur les modes de consommation et de production responsables, et son point 12.5 cible plus spécifiquement une réduction considérable de la production de déchets grâce à la prévention, la réduction, le recyclage et la réutilisation.
Les objets jetables en plastique notamment sont une préoccupation majeure, comme en témoigne le nombre croissant de propositions des actionnaires sur le sujet (en 2018, les actionnaires de McDonald’s ont, par exemple, proposé la suppression des pailles en plastique).Sans renier son importance, la réduction des déchets plastiques n’a cependant pas forcément d’impact direct sur les résultats financiers.
Pourtant, dans le secteur agroalimentaire, un certain nombre d’entreprises passent à l’action. Conscient des problèmes liés aux objets en plastique à usage unique, Coca-Cola s’est ainsi engagé en faveur d’un « Monde sans déchets » d’ici 2030. Mais le plastique peut aussi être une opportunité pour les entreprises innovantes ou qui travaillent sur des matériaux alternatifs, à l’instar de Tetra Pak, qui planche actuellement sur des pailles en papier très résistantes.
Toutefois, parce qu’elles sont complexes d’un point de vue technique, ces innovations sont parfois difficiles à déployer à grande échelle. En outre, les bioplastiques et autres solutions novatrices sont toujours plus coûteux que les emballages traditionnels. Ce n’est donc pas pour réduire leurs coûts (et augmenter leurs bénéfices) que les entreprises s’intéressent à ce problème.
Dans ce cas, pourquoi décident-elles d’agir ? Et pourquoi, en tant qu’investisseurs, ce sujet est-il important ? Parce qu’il existe un lien direct avec l’image de marque. Les grands groupes agroalimentaires craignent que leur image de marque ne finisse par être ternie. Les déchets plastiques sont d’ores et déjà un problème colossal, qui ne fera qu’empirer si rien n’est fait. Un jour, les entreprises en seront tenues pour responsables. Des réglementations plus dures seront adoptées et les comportements des consommateurs évolueront. Ces coûts externes deviendront alors des coûts internes pour les entreprises et les investisseurs, parce qu’ils dégraderont la valeur (et l’image de marque).
Quels sont les changements qui interviennent sur les marchés obligataires ?
Par Didier Le Menestrel, Président, La Financière de l’Echiquier
Le 13 décembre 2018
Le dicton « le pouvoir de dire Oui» reprenant un célèbre slogan des années 90, devise du Crédit Lyonnais, illustrait parfaitement le développement à tout crin du crédit aux entreprises par les obligations privées, un financement par le marché plutôt que par les traditionnels prêts bancaires.
Aujourd’hui, la situation s’inverse et le financement par les marchés devient plus sélectif. La fin programmée des politiques de Quantitative Easingà travers le monde marque le début d’une nouvelle ère, où le robinet du « crédit facile », généreusement ouvert par les banques centrales, se tarit. L’horizon s’obscurcit pour les investisseurs qui, fin novembre, avaient déjà retiré la somme record de 65,3 milliards de dollars des fonds obligataires spécialisés dans les obligations à haut rendement (high yield) et 25 milliards1 des fonds investis dans les obligations d’entreprises de meilleure signature (investment grade). Enfin, c’est en territoire négatif que les indices de crédit termineront probablement l’année2, avec une ampleur inédite depuis 2008.
Les raisons de la fin du « crédit facile » sont nombreuses. La vigueur de l’économie Outre-Atlantique, couplée à une nette hausse des salaires, milite pour un ajustement des taux. La remontée logique des taux à court terme de la Réserve fédérale américaine – de 0 à 2% – et celle du taux à 10 ans – de 1,4 à plus de 3% – expliquent largement la mauvaise passe des actifs libellés en dollars.
En zone euro, même si le niveau des taux sans risque n’a que peu varié en 2018, l’écartement des primes de risque a provoqué un renchérissement des coûts de financement des entreprises. Le ralentissement de l’économie, les peurs suscitées par le Brexit et la confrontation budgétaire italienne entrent en collision avec l’annonce de l’arrêt du programme de rachat par la Banque centrale européenne (BCE). Un programme qui jusque-là était un soutien d’importance pour le marché, la BCE achetant plus d’un milliard d’euros d’obligations d’entreprises par semaine, participant activement au marché primaire notamment. Ses coffres sont aujourd’hui remplis de près de 180 milliards d’euros d’obligations d’entreprises.
Côté valeurs, bon nombre d’entreprises ont vu le rendement de leurs obligations s’envoler au gré de publications décevantes, violemment sanctionnées lorsque les résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes. Inquiets de la capacité de remboursement de ces entreprises, les investisseurs exigent alors des primes de risque beaucoup plus rémunératrices qu’auparavant. La volatilité du baril de pétrole et la génération décevante de liquidités ont ainsi porté le rendement d’une obligation VALLOUREC 2023 à plus de 13%.
A l’approche d’une fin de cycle, il est classique d’observer la hausse des défaillances d’entreprises. Les économistes de la COFACE le confirment pour 2019, estimant le rebond des taux de défaut à 0,8% ; une hausse, certes modeste, mais en lien avec la décélération du PIB français, vers 1,5%, un facteur traditionnel d’augmentation des défaillances.
Alors plus de doute, le marché du crédit survitaminé est derrière nous, et la période de sevrage est déjà bien commencée. Si le retour à la normale est difficile pour des acteurs qui avaient fini par oublier la volatilité et les incohérences ponctuelles des marchés, portons un regard positif sur ce retour à une normalité nécessaire qui redonne à la connaissance des entreprises une valeur qui n’aurait jamais dû être occultée.
1 Données d’EPFR
2 Bank of America Merrill Lynch bond indices – Bloomberg
La guerre commerciale : risque ou opportunité en portefeuille ?
Par Léon Cornelissen, économiste en chef chez Robeco.
Le 21 novembre 2018
L’escalade des tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine n’offre guère d’opportunités aux investisseurs. Le président américain est monté d’un cran en annonçant l’imposition de droits de douane sur des milliards de dollars d’importations en provenance de Chine, tandis que la Chine a répondu par des mesures similaires. Si les investisseurs n’ont jusqu’à présent pas vraiment réagi, c’est sous-estimer le risque véritable d’une guerre commerciale mondiale.
Dans les études récentes, les investisseurs citent souvent, voire toujours, les guerres commerciales comme le plus grand risque pour les marchés financiers. Visiblement, ils ne partagent pas le point de vue du président américain, selon lequel « les guerres commerciales sont faciles à gagner ». Mais à présent que Donald Trump souhaite augmenter les droits de douane sur la moitié des exportations chinoises vers son pays, les marchés semblent rester indifférents. Comment expliquer ce paradoxe ?
Les guerres commerciales ont des répercussions réelles
La méfiance des investisseurs est compréhensible. Le monde n’a pas oublié les leçons de la Grande Dépression, durant laquelle le renforcement progressif des mesures de protectionnisme avait contribué à prolonger et aggraver le ralentissement économique. C’est la raison pour laquelle, suite à la faillite de Lehman Brothers, les pays du G20 ont décidé d’éviter les mesures protectionnistes, et ils y sont parvenus.
Les récentes simulations de modèles réalisées par la Banque centrale européenne (BCE) suggèrent que les guerres commerciales ont des répercussions bien réelles. L’institution a ainsi présenté un scénario hypothétique dans lequel les États-Unis augmentent les droits de douane de 10 % sur toutes leurs importations, tandis que leurs partenaires commerciaux rétorquent en imposant également 10% sur les importations d’origine américaine. La BCE tente de capter les effets de confiance indirects : les primes obligataires augmentent de 50 points de base et les marchés boursiers baissent de deux écarts-types dans tous les pays. Pour les États-Unis, cela représente un repli de 16 % du marché.
Pour les États-Unis et la Chine, les effets de confiance sont inférieurs à l’effet commercial direct, qui pourrait être sous-estimé. Il en résulte que l’activité économique américaine réelle est inférieure de 2 % au niveau de référence dès la première année. Il est intéressant de noter que la Chine y gagne en partie, car la baisse de ses exportations vers les États-Unis est compensée par une réorientation des flux vers des pays tiers où les exportateurs chinois peuvent gagner des parts de marché aux dépens des États-Unis.
Conséquences sur le commerce mondial
La conclusion de la BCE fait écho aux précédentes simulations de la Banque d’Angleterre (BoE), qui suggéraient que dans un scénario similaire, la production américaine pourrait être réduite de 2,5 % et la production mondiale de 1 % par les seuls canaux commerciaux. La BoE a indiqué que l’impact sur le PIB mondial serait nettement plus important si chaque pays augmentait les tarifs de douane sur les produits de l’autre.
La Chine n’est pas la seule cible de la guerre commerciale menée par Donald Trump. Le président américain a également menacé l’Union européenne, se plaignant notamment des BMW allemandes qui roulent dans Manhattan. Malgré le succès apparent de la visite du président de la Commission européenne en vue d’apaiser les tensions commerciales, Donald Trump a déclaré durant un meeting de campagne en Virginie-Occidentale (fin août) qu’il imposerait des taxes de 25 % sur toutes les voitures européennes arrivant aux États-Unis.
Des chiffres vertigineux
Dernier épisode en date : l’entrée en vigueur d’une taxe de 10 % sur 200 milliards de dollars de biens chinois, en septembre, suite à celle imposée sur 50 milliards de dollars fin août. Malgré ces chiffres impressionnants, les produits concernés jusqu’à présent ne représentent qu’une petite partie du commerce mondial.
On comprend donc pourquoi ces droits de douane n’ont pas encore beaucoup pesé sur le moral des fabricants et des consommateurs. Cela explique aussi en grande partie la réaction très modérée du marché financier.
Toutefois, une nouvelle escalade des tensions est à craindre. Les États-Unis ont menacé de relever de 10 % à 25 % les tarifs douaniers sur les 200 milliards de dollars de produits chinois en début d’année prochaine si la Chine ne change pas de comportement – bien que l’objectif de négociation des États-Unis vis-à-vis de la Chine ne soit pas entièrement clair.
Élections américaines
À l’approche des élections présidentielles de 2020, Donald Trump pourrait choisir de maintenir des pressions politiques élevées avec la Chine, dans l’espoir d’accroître ses chances de réélection.
L’augmentation des tarifs douaniers deviendra donc un élément récurrent dans les années à venir. Pour les investisseurs, l’escalade des tensions commerciales n’offre guère d’opportunités. Il ne leur reste plus qu’à espérer qu’elles ne s’aggravent pas davantage qu’elles ne le sont déjà.
Marchés européens: Naviguer dans des mers agitées
Par Capital Group
Le 18 octobre 2018
Qu’en est-il de l’enthousiasme pour les actions européennes en 2017? L’élection du président français Emmanuel Macron, favorable aux réformes, la persistance de la chancelière Angela Merkel en Allemagne et les signes d’amélioration de la croissance économique dans la zone euro ont favorisé une progression à deux chiffres des actions européennes. Les marchés européens semblaient enfin vouloir renverser une longue période de retard sur un puissant marché haussier américain.
Cette année, ces espoirs se sont estompés. Au milieu des inquiétudes des investisseurs concernant les accrochages commerciaux mondiaux, l’économie européenne axée sur le commerce a sensiblement ralenti. La scène politique dans plusieurs pays clés a sombré dans la tourmente. Et les marchés boursiers européens ont reflété cette tournure regrettable des événements, ne parvenant pas encore à suivre le rythme des actions américaines.
Voici trois problèmes sous-jacents contribuant à la dislocation sur les marchés internationaux :
- Les différends commerciaux mondiaux nuisent davantage à l’Europe qu’à toute autre grande région économique.
L’Europe est particulièrement vulnérable aux perturbations des échanges. Les gros titres ont tendance à mettre l’accent sur les conflits entre les États-Unis et la Chine, mais c’est l’Europe qui a le plus à perdre dans une guerre commerciale. Il s’agit d’une raison essentielle du faible rendement des actions européennes cette année.
Jusqu’à la fin du troisième trimestre, l’indice MSCI Europe était en baisse d’environ 2% en dollars américains. Cela se compare à un rendement d’environ 11% pour les actions américaines, qui ont atteint à plusieurs reprises de nouveaux sommets au cours de la période de neuf mois. Sur les marchés des changes, l’euro a glissé de 3% par rapport au dollar cette année, la hausse des taux d’intérêt américains, la vigueur de l’économie américaine et la tendance à la fuite des capitaux ont favorisé les flux d’actifs américains.
- Des politiques conflictuelles remettent en question la stabilité de l’UE.
En plus des craintes commerciales, la politique a constitué un obstacle. La reprise du marché boursier européen qui a débuté avec les élections françaises de mai 2017 s’est progressivement estompée et il est devenu évident que les réformes économiques de Macron feraient face à une vive opposition interne. En Allemagne, Merkel a été critiquée lorsque son parti démocrate-chrétien a perdu beaucoup de terrain lors des élections législatives, même si elle a réussi de justesse à exercer les fonctions de chancelière.
De l’autre côté de la Manche, les négociations sur le Brexit se poursuivent et il est possible que le Royaume-Uni quitte l’Union européenne sans un accord commercial, ce qui pourrait être très problématique pour les deux parties.
Parallèlement, à la suite des dernières élections en Italie, un nouveau gouvernement de coalition populiste a ravivé les craintes concernant les politiques budgétaires de la troisième économie européenne et son désir à long terme de rester dans l’Union européenne et dans la zone euro, qui compte 19 membres.
La politique européenne continue de se fragmenter. Les mouvements populistes, nationalistes et marginaux réaffirment leur influence sur le continent. Ils ne disparaissent pas. Au contraire, ils gagnent du terrain dans des pays comme l’Allemagne, l’Italie et la Norvège, entre autres.
Le calendrier des événements pour 2019 n’inspire guère d’optimisme. Nous pourrions assister à un changement de direction en Allemagne, à un « hard Brexit » au Royaume-Uni et aux troubles politiques et financiers en Italie. De plus, le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, devrait quitter ses fonctions en octobre 2019.
Par ailleurs, la BCE devrait mettre fin à son programme de stimulation des achats d’obligations d’ici décembre et envisager de relever ses taux d’intérêt à la fin de 2019. La BCE maintient son taux directeur en territoire négatif depuis 2014 dans le but de relancer l’économie européenne.
Tout ça fait beaucoup d’incertitude sur une période relativement courte. C’est la recette idéale pour une plus grande volatilité du marché.
- Les sociétés de croissance séculaire plus répandues aux États-Unis.
Une autre raison de la disparité des rendements entre les actions américaines et européennes est l’absence relative en Europe de sociétés à forte croissance axées sur la technologie. Les secteurs de la technologie et de la consommation discrétionnaire, qui dominent le marché haussier américain depuis 2009, représentent un pourcentage beaucoup moins important du marché européen.
Ce n’est un secret pour personne que d’extraordinaires leaders sur le marché, tels que Amazon, Apple, Facebook, Google, Microsoft et Netflix, sont tous basés aux États-Unis. À titre de comparaison, seules deux sociétés, l’allemand SAP et l’ASML néerlandais, représentent près de la moitié de la capitalisation boursière du marché technologique européen. La pénurie de sociétés innovantes dans les domaines de la technologie et de la consommation grand public en Europe a laissé la région en retard sur un rallye à long terme centré sur la technologie.
Démographie et différences générationnelles : Un défi pour les gestionnaires !
Par Mathieu Chabran et Thomas Friedberger, Tikehau Capital
Le 13 septembre 2018
En gestion, les prévisions à court terme doivent idéalement être complétées par une analyse des grandes tendances qui influenceront la performance à long terme d’une organisation, d’un secteur ou d’une zone géographique. Dans cette perspective, la démographie a un impact sur les dynamiques macroéconomiques mais aussi sur l’organisation des entreprises. L’angle économique appliqué à la lecture démographique montre que, pour un pays, la phase d’accélération du PIB par habitant intervient après la chute violente du taux de mortalité. Lorsque la mortalité chute, sous l’effet conjugué des progrès scientifiques, de l’éducation des jeunes et de la fin des famines, le taux de natalité ne tarde pas à suivre, les parents se focalisant sur le bien-être de leurs plus rares enfants. La génération suivante commence alors à grimper l’échelle de l’éducation, qui aboutit à la croissance de la richesse par habitant.
Au niveau macroéconomique, un pic de population en âge de travailler entraîne un surplus d’épargne et un creux d’investissement, c’est-à-dire, pour une zone géographique donnée, une exportation de capital. Une population vieillissante consomme plus et importe du capital pour ses besoins d’investissement. Un surplus d’épargne doit s’investir et a ainsi un impact sur le niveau des taux d’intérêt et des rendements espérés de l’épargne.
Il n’est donc pas surprenant que les pics de population en âge de travailler correspondent à des périodes de taux d’intérêt bas… or la classe d’âge 15-64 ans a probablement atteint un pic dans les pays développés (États-Unis, Europe et Japon) dans les années 1970 et au niveau mondial en 2012 avec l’arrivée sur le marché du travail des jeunes issus du baby-boom chinois de la fin des années 1980. On peut probablement mieux comprendre pourquoi le gigantesque cycle baissier des taux d’intérêt a commencé au début des années 1980 et est vraisemblablement en train de s’achever sous nos yeux.
Cette analyse permet également de déceler dans quelles régions les taux de croissance à venir les plus spectaculaires seront observés : dans les pays ayant connu une chute de mortalité plus récente et dont les classes de population en âge de travailler sont en expansion importante, à savoir l’Inde et l’Afrique (le Nigeria sera, en 2050, le troisième pays le plus peuplé au monde, avec 800 millions d’habitants et une classe moyenne qui commence déjà à se dessiner).
Il est également possible d’en tirer certaines hypothèses sectorielles. En Chine, la population vieillit, les femmes travaillent plus et, du fait du vieillissement des parents, les enfants sont également plus âgés et quittent le foyer. Les deux cent millions de foyers chinois concernés par le départ des enfants ont plus de revenu disponible et moins de coûts. Ils sont donc a priori moins sensibles aux prix, et consomment des biens et services de qualité supérieure. Dans les vingt prochaines années, 70% de l’épargne additionnelle dans le monde viendra de Chine. Les secteurs comme la gestion d’actifs, les loisirs ou les services à domicile, et le segment premium des biens de consommation devraient profiter de ces tendances.
Mais les dynamiques démographiques ont aussi des effets puissants sur les sociétés. Tout comme l’arrivée des baby-boomers à l’âge adulte dans les pays développés avait engendré une vague de mouvements contestataires et révolutionnaires dans les années 1970, celle des « millenials » modifie actuellement en profondeur à la fois les tendances sociales et la structure des entreprises. Les baby-boomers, issus de l’éducation formelle, fermée et codifiée d’après-guerre avaient forgé des mouvements contestataires à leur image: hiérarchisés, structurés et incarnés par un chef et une idéologie. Les « millenials » issus d’une éducation ouverte, exposée au monde par l’accès aux médias se retrouvent dans des mouvements comme les Printemps Arabes, sans structure, sans idéologie et sans chef charismatique.
L’effet de l’arrivée de cette génération sur la structure des entreprises est cataclysmique. La génération du baby-boom a façonné les grandes entreprises traditionnelles telles que nous les connaissons aujourd’hui. Elle a structuré les entreprises d’après-guerre, a écrit leurs règles et a construit leur culture. Le baby-boomer a fait toute sa carrière dans une entreprise sur la base de valeurs de loyauté et d’obéissance. Ces valeurs lui ont permis d’être promu de poste en poste. La «génération X » (enfants nés entre 1960 et 1980), qui accède aujourd’hui aux postes de direction des entreprises, aura fait toute sa carrière dans un même secteur ou domaine de compétence, mais en changeant régulièrement d’entreprise. Cette génération se méfie plus de l’entreprise que la précédente. C’est une génération pragmatique, qui conçoit le travail comme un contrat moral sur un mode donnant-donnant : travail contre salaire. Les « Millenials » auront plusieurs vies professionnelles et sont capables d’abandonner un secteur pour changer radicalement de direction, avec le travail comme étant l’un des aspects de la vie ni plus ni moins important qu’un autre. Ils recherchent le fun et le sens. De manière logique, ces Millenials ont du mal à s’adapter à un modèle d’organisation des entreprises fait par et pour une génération très différente de la leur. Ils challengent les codes et les règles de ces organisations trop rigides et, par là même, provoquent des remous qui font évoluer la structure des entreprises.
Qu’est-ce que cela change pour une entreprise ? Tout. Avant Internet, l’apprentissage d’un métier était impossible sans l’enseignement d’un « maître ». La transmission du savoir par le supérieur hiérarchique était le seul moyen d’apprendre. Avec Internet, les Millenials peuvent prétendre, à tort ou à raison, qu’ils n’ont plus besoin de passer par la hiérarchie pour apprendre. Il en résulte une plus grande défiance envers la hiérarchie, qui représente le passé, l’obsolescence. L’accès à la technologie implique que tout le monde peut parler à tout le monde, en dehors et à l’intérieur de l’organisation. Le changement est naturel et la hiérarchie un obstacle.
La structure des grandes entreprises traditionnelles n’est plus adaptée aux aspirations de la jeune génération. Les entreprises plus jeunes, comme celles du secteur technologique, ont des structures plates, ouvertes et plus informelles. Elles sont construites autour de la notion de qualité de vie au travail, qui maximise la créativité et la productivité. Mais, en contrepartie de l’abolition de la hiérarchie, de cette flexibilité et de cette liberté, ces nouvelles sociétés sont dirigées par des «gourous» hyper charismatiques (Elon Musk, Jeff Bezos), qui dirigent l’organisation en mode quasi féodal. Un management autoritaire et incarné par un leader visionnaire qui a tous les droits est la condition pour que la créativité s’exprime à l’intérieur de l’entreprise sans que l’organisation soit un capharnaüm ingérable. L’enthousiasme est une force pour l’organisation, mais à condition d’être canalisée, sinon l’organisation risque d’imploser.
Le niveau de disruption engendré par les impacts générationnels est considérable et brouille les limites entre les secteurs. Combien de sociétés telles que nous les connaissons aujourd’hui existeront encore dans dix ans ?
Quelles sont les régions qui présentent le plus de potentiel pour le second semestre ?
Par Thomas Herbert, Head of Portfolio Management chez ETHENEA Independent Investors
Le 2 août 2018
L’idée d’une croissance mondiale synchronisée perd peu à peu de son charme et la mer pourrait être plus plus agitée sur les marchés des capitaux dans un avenir proche. Bien que ni bouleversements majeurs ni récession ne soient anticipés au second semestre, le temps passera de « principalement ensoleillé » à « changeant avec des averses occasionnelles ». C’est particulièrement vrai au sein de la zone euro. L’administration du président Trump contribue de manière significative à cette situation et ne cache pas sa volonté d’avoir un impact négatif sur le reste du monde si cela profite aux États-Unis – ou du moins à la popularité du président auprès de ses principaux électeurs. Dans sa phase initiale, cela s’est fait ressentir non seulement en Chine, mais aussi au Canada et au Mexique.
Cependant, la zone euro, et l’Allemagne en particulier, s’est également retrouvée récemment dans la ligne de mire présidentielle. Pour l’Europe, cette évolution intervient à un moment inopportun. Le Brexit, le gouvernement populiste en Italie, des querelles politiques en Allemagne et un récent ralentissement modéré de la croissance économique pèsent déjà sur l’union monétaire. Et une politique monétaire moins accommodante de la BCE n’est pas non plus susceptible d’améliorer la situation. Cette incertitude accrue, dont l’évolution en Italie qui est plutôt préoccupante, devrait bientôt se refléter dans le comportement d’investissement des entreprises européennes. L’incertitude politique au sein de la zone euro et la volatilité qui en découle sur les marchés boursiers et obligataires vont augmenter considérablement avant qu’une solution constructive aux conflits d’intérêts ne soit trouvée et que nous assistions à un apaisement continu des marchés.
La Chine connaît un ralentissement de sa croissance depuis un certain temps maintenant. Toutefois, les incertitudes quant à son ampleur ont un impact particulièrement fort sur les marchés des capitaux. A la mi-2015, après un rebond massif au premier semestre, l’indice leader de la Bourse de Shanghai a perdu plus de 40 % de sa valeur en quelques semaines face à une incertitude croissante.
La situation aux États-Unis est tout à fait différente. Le sentiment des consommateurs est très positif et le chômage est à des niveaux historiquement bas. Les bénéfices des entreprises augmentent et les dépenses en capital augmentent. Une croissance annualisée du PIB de 4% est attendue pour le deuxième trimestre. Les perspectives sont optimistes envers l’économie américaine pour la deuxième moitié de l’année. Les réductions d’impôt mises en œuvre par le président Trump, les dépenses d’infrastructure et la réduction de la charge réglementaire auront un impact à court terme et compenseront de façon significative un conflit commercial limité. Cela s’explique par le fait que, contrairement à l’Allemagne ou au Japon, la croissance américaine, par exemple, est principalement tirée par la consommation privée. Les exportations ne représentent qu’environ 14 % du PIB.
Gestion active ou passive : le meilleur choix est une combinaison des deux
Par Lyxor Asset Management
Le 11 mai 2018
En complément de l’allocation d’actifs, la combinaison entre gestion active et passive est essentielle pour générer de la performance sur le long terme. Telle est la conclusion d’une récente étude réalisée par Lyxor Asset Management. Lyxor Asset Management (« Lyxor ») a publié les conclusions de sa cinquième étude annuelle comparant la performance des fonds actifs domiciliés en Europe à celle de leurs indices de référence. L’analyse de la recherche ETF de Lyxor, s’est considérablement étoffée par rapport aux études précédentes. Elle couvre désormais près de 6.000 fonds actifs domiciliés en Europe et les compare à leurs indices de référence dans 23 univers différents représentant un montant total de 1.400 milliards d’euros d’actifs sous gestion.
Les recherches académiques concluent depuis le début des années 90 que l’allocation d’actifs constitue le principal moteur de performance d’un portefeuille sur le long terme. La recherche de Lyxor va plus loin en démontrant que, outre l’allocation d’actifs, une combinaison adéquate entre gestion active et passive est un élément clé permettant aux investisseurs d’améliorer la performance de leurs portefeuilles.
L’étude révèle que 44% des fonds actifs en Europe ont surperformé leurs indices de référence en 2017, soit une hausse de 16% par rapport à l’année précédente.
Les gérants actions ont enregistré les meilleurs résultats : 47% d’entre eux surperforment les indices de référence, contre 26% en 2017. Les fonds actions actifs qui ont surperformé sont ceux qui ont surpondéré les facteurs de qualité et/ou de croissance, au détriment du facteur value qui a soutenu la performance en 2016, ce qui reflète une plus grande visibilité et une meilleure liquidité sur les marchés. Malgré une meilleure performance en 2017, seuls 39% des gérants obligataires actifs ont surperformé leurs indices de référence, contre 32% l’année précédente.
Bien qu’un nombre plus important de fonds actifs aient surperformé leurs indices de référence, bénéficiant notamment d’une baisse de la volatilité et du repli des corrélations en 2017, la dispersion des résultats est finalement faible. La génération d’alpha s’est limitée à quelques univers, soulignant l’importance de la sélection de fonds pour identifier les bons gérants actifs.
Dans l’univers actions, les meilleurs résultats ont été obtenus au sein des marchés moins efficients ou plus spécifiques comme l’Italie et l’Allemagne, ainsi que par les petites capitalisations européennes. Les plus mauvais résultats portent sur les grandes capitalisations aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Chine. Pour les obligations, les gérants actifs privilégiant les marchés liquides et diversifiés comme les obligations mondiales, les obligations américaines de qualité investment grade et les obligations d’entreprises à haut rendement, ont généré les meilleures performances. Les plus mauvaises performances proviennent des segments plus étroits du marché obligataire comme le haut rendement en euros et les titres indexés sur l’inflation en euros.
L’année 2018 s’annonce toutefois plus difficile pour les gérants actifs, en raison des incertitudes géopolitiques, de l’abandon graduel des politiques d’assouplissement quantitatif et de la hausse de la volatilité. Dans ce contexte, il est plus important que jamais de prendre les bonnes décisions d’allocation d’actifs et de faire les bons choix entre véhicules de gestion active et passive.
L’enjeu pour les investisseurs consiste à identifier les avantages spécifiques à chaque outil d’investissement pour trouver le bon équilibre entre gestion active et passive au sein de leurs portefeuilles. D’après cette étude, 34% (sur une moyenne annelle) des fonds actifs ont surperformé au sein des univers retenus au cours des dix dernières années. Ce résultat suggère qu’au sein d’un portefeuille mondial, la valeur ajoutée de la gestion active peut être obtenue en grande partie en allouant 30% à 40% à des fonds actifs et en investissant les 60% à 70% restants dans des fonds passifs ou smart beta.
Le suivi de la dispersion de la performance des gérants actifs par rapport aux indices de référence en 2017 a été introduit dans cette étude. La faible dispersion observée cette année souligne combien il est difficile de sélectionner les gérants permettant de surperformer leur indice de référence et rappelle le rôle essentiel d’une sélection de fonds de qualité pour atteindre les objectifs de rendement à long terme.
Lien vers l’étude de Lyxor ici
La retraite, vous y pensez ?
Didier Le Menestrel, président du Conseil d’administration de La Financière de l’Echiquier
Le 19 avril 2018
Ce slogan a animé quelques saisons de publicités télévisées de La Financière de l’Echiquier et retrouve une actualité brûlante avec le train de réformes qui s’annonce. Après plus de 20 ans de tergiversations, les pouvoirs publics français commencent par le plus dur : transformer et adapter les régimes spéciaux, en particulier celui de la SNCF et de ses cheminots… De quoi animer les rues et les conversations au cours des semaines à venir.
Ce phénomène de mobilisation populaire autour du thème de la retraite n’est pas réservé à l’Hexagone, il touche régulièrement les pays du sud de l’Europe, au gré d’élections comme récemment en Italie, ou de prises de conscience comme celles de ces retraités espagnols, grecs ou italiens qui ne cessent de réclamer plus de pouvoir d’achat à des Etats qui n’ont plus les moyens de les satisfaire.
En clair, la retraite, tout le monde y pense, mais sans plus y voir la clé d’une vie meilleure telle que l’envisageaient les bâtisseurs de notre système de solidarité intergénérationnelle. La retraite est source d’inquiétude et non plus une promesse de bonheur.
En anglais, dans le cadre de la vie professionnelle, « retraite » se traduit par retirement, une sorte de mise à l’écart. En français, le mot « retraite » recouvre des concepts plus flous puisqu’il peut aussi bien évoquer un repli stratégique (retreat), un recueillement spirituel ou encore un refuge protecteur. Chacun, selon son éducation et son parcours, choisira sa traduction. L’enjeu qui nous occupe aujourd’hui est l’effort de la communautédestiné à nous aider à vivre notre vie après le travail.
Ne devrions-nous pas avant tout clarifier ce dernier point plutôt que de réformer par petites touches… ? Quels sont les fondements de notre système de retraite ?
Notre système s’appuie encore aujourd’hui sur des principes établis au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. L’ordonnance du 4 octobre 1945 stipule qu’il faut « débarrasser les travailleurs de l’incertitude du lendemain qui crée chez eux un sentiment d’infériorité qui est la base réelle et profonde de la distinction des classes », tandis que la Constitution de 1946 précise dans son préambule : « tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence ». De généreuses ambitions traduisant les espoirs d’une génération qui a survécu à un conflit dévastateur et qui vivra pendant quelques décennies entre deux systèmes économico-politiques frontalement différents.
Cette générosité humaniste, qui se heurte depuis plus de 30 ans à l’évolution démographique et au chômage de masse, n’a pas été revisitée au nom de ces principes politiques d’après-guerre que jamais une équipe au pouvoir n’a eu le courage d’affronter. La France est donc, avec la Grèce, le seul pays d’Europe à n’avoir adopté aucune réforme structurelle ces vingt dernières années…
« Il ne sert à rien de dire « nous avons fait de notre mieux », il faut réussir à faire ce qui est nécessaire ». Gageons que la sagesse pragmatique de Sir Winston Churchill inspire enfin notre communauté. Battre en retraite n’est plus permis, il est urgent de remettre en cause « l’exception française » qui, seule, justifie encore qu’on n’ouvre pas ce sujet de la réforme de l’Etat-Providence.
Et si la retraite devenait l’affaire de chacun ? [1] La seule voie viable est celle de la responsabilisation individuelle, a fortiori pour les jeunes générations qui se demandent déjà comment elles pourraient vivre sur la planète Mars… Acceptons de prendre en main nos responsabilités, avec un système d’épargne retraite alternatif, un plan individuel de retraite accessible au plus grand nombre… Affaire à suivre.
Quel rôle joue la diversité dans la performance et l’accélération des entreprises ?
Par Heidrick & Struggles
Le 8 mars 2018
Le dernier Forum Économique Mondial de Davos avait pour thème « créer un avenir partagé dans un monde fracturé ». Face à une société mondiale en proie aux crises identitaires et au repli sur soi, le monde des affaires a ouvert le débat sur le rôle de la diversité dans la performance et l’accélération des entreprises. Qu’en est-il réellement de la diversité au sein des équipes dirigeantes et des conseils d’administration ?
Entreprise et diversité : entre ultra-conservatisme et ouverture timide ?
Renforcer la diversité au sein des postes de direction exige pour les entreprises d’ériger la diversité en priorité stratégique et de démontrer ses avantages en termes de résultats dans la performance de l’organisation. Or, cela est encore loin d’être une évidence pour une partie des fonctions dirigeantes en place.
C’est ce que met en évidence une étude récemment menée par PwC[1] : plus de 40 % des administrateurs pensent que la diversité au sein de leur conseil n’améliore pas les résultats de l’entreprise et plus de la moitié juge le conseil déjà suffisamment diversifié. Près d’une personne interrogée sur six (16 %) pense que la diversité au sein du conseil n’a présenté aucun avantage pour l’organisation.
Aujourd’hui, on constate que, lorsqu’il s’agit de nommer de nouveaux membres dans les conseils d’administration, ils sont souvent désignés parmi d’anciens administrateurs, PDG ou directeurs financiers — ce qui tend à limiter l’accès à ces postes aux femmes et aux étrangers. Ainsi, PDG et directeurs financiers confondus ont représenté près de 66 % des nominations d’administrateurs en 2016[2], et, pour la première fois en sept ans, le pourcentage de femmes nommées aux conseils d’administration du Fortune 500 a reculé (27,8 % de nouvelles nominations d’administratrices ; 117 sièges ouverts). De fait, les projections indiquent désormais que la parité chez la nouvelle génération d’administrateurs ne sera pas atteinte avant 2032. Avec 421 sièges vacants ou nouvellement créés pourvus au sein des sociétés du Fortune 500 en 2016, les entreprises ont raté l’occasion de prendre à bras le corps la problématique de la diversité.
Et il n’y a pas que dans les boards que la question fâche : les femmes PDG se font toujours rares à l’échelle mondiale.
Aux États-Unis, en France, au Royaume-Uni et en Allemagne, les femmes continuent d’être sous-représentées à des postes de direction. Aux Etats-Unis en 2016, les femmes représentaient 8 % du nombre total de PDG des 100 premières entreprises du Fortune 500. Au Royaume-Uni, elle est passée à 6%, mais la part totale reste mince. Sans parler de la France et de l’Allemagne, où la part de femmes PDG est respectivement de 2 et 1 %.[3]
Cela n’empêche pas un léger frémissement. Les lignes commencent à bouger. Malgré des pourcentages faibles, les États-Unis comptent en 2017 un nombre record de 32 femmes PDG au sein du Fortune 500. Parmi celles-ci, Geisha Williams, latino-américaine à la tête de PG&E, et Indra Nooyi, indo-américaine, PDG de PepsiCo.
Voici une belle transition vers la problématique des minorités ethniques, également largement sous-représentées au niveau du top-management. C’est une véritable erreur étant donné leur poids croissant dans de la population active. Aux Etats-Unis, au sein du Fortune 500, 73 % des cadres dirigeants, hommes et femmes confondus, sont caucasiens. 21 % sont asiatiques, 3 % latino-américains, 2 % noirs… (Fortune, juin 2017)
La diversité va bien au-delà du bon sens social : il en va de la survie des entreprises !
On l’a vu, la diversité n’est pas acquise au sein des entreprises mondiales. Loin s’en faut. Mais il ne faut pas se contenter de ce constat. Il faut au contraire réveiller les mentalités et vite. Car la diversité, ce n’est pas qu’une question de bon sens et de responsabilité. C’est l’un des fondamentaux de la performance et de la survie des organisations dans un monde en pleine mutation.
Selon une étude d’Ernst & Young, les entreprises comprenant au moins 30 % de dirigeantes ont vu leurs bénéfices nets progresser de 6 points par rapport aux entreprises n’ayant recruté aucune femme à des postes de direction (Fortune, février 2016). Dans la même lignée, un rapport de Crédit Suisse a mis en évidence une corrélation entre diversité hommes-femmes, rendements boursiers et rentabilité de l’entreprise. Les investisseurs ayant ciblé les entreprises où la diversité est une dimension stratégique connaissent des rendements excédentaires avec une croissance annuelle de 3,5 %. Par ailleurs, les entreprises où les femmes représentent plus de 15 % des cadres dirigeants ont été 50 % plus rentables que celles où les femmes en représentent moins de 10 %[4].
Selon des données transmises par Catalyst, les entreprises qui maintiennent une forte proportion de femmes au sein de leur conseil d’administration – cette proportion étant définie comme au moins trois femmes siégeant au conseil durant au moins quatre ans sur cinq – affichent des résultats largement supérieurs aux autres : 84 % en termes de bénéfices sur les ventes, 60 % en rendements du capital-investissement et 46 % en rentabilité fonds propres.
Ainsi, la diversité, sur tous les plans, est un gage essentiel de performance des organisations. Il est temps que les dirigeants aillent chercher, pour constituer leurs conseils d’administration par exemple, des profils en dehors des fonctions de direction : cadres supérieurs, universitaires, entrepreneurs… nul besoin d’être PDG ou directeur financier pour apporter de la valeur à un conseil ! De même, les conseils d’administration principalement composés d’hommes ont tout particulièrement intérêt à développer et à entretenir dès à présent un réseau actif de candidates, et à élargir leur vivier.
En France, la Loi Copé-Zimmermann oblige, depuis le 1er janvier 2017, les conseils d’administration à recruter 40 % de femmes. Ce coup de pouce réglementaire, au-delà d’une recherche d’égalité, montre par ailleurs que la consanguinité des équipes qui décident de la stratégie de l’entreprise ne favorisera jamais l’amélioration des performances.
Beaucoup reste encore à faire pour améliorer la diversité auprès des cadres dirigeants. Les entreprises tournées vers l’avenir doivent veiller à inclure dans leurs plans de succession des femmes comme des hommes, en s’assurant tout particulièrement que ceux-ci acquièrent l’expérience déterminante et nécessaire à la fonction de PDG. A l’heure où le harcèlement moral et sexuel, notamment des femmes, est au cœur des débats sociétaux à l’échelle mondiale, la considération du statut des femmes, au sein des entreprises, que ce soit dans l’accès aux postes de direction ou dans l’égalité salariale, est en passe d’évoluer.
[1] PwC, 2017 Annual Corporate Directors Survey
[2] Board Monitor 2017, Heidrick & Struggles
[3] Route to the Top 2017, Heidrick & Struggles
[4] Credit Suisse, The CS Gender 3000: The Reward for Change, septembre 2016
Comment les marchés émergents transforment le commerce mondial
Par Kim Catechis, Responsable marchés émergents chez Martin Currie (une filiale de Legg Mason)
Le 23 février 2018
À la différence des mesures protectionnistes de plus en plus nombreuses dans beaucoup de pays développés, les pays émergents cultivent et développent activement leurs partenariats commerciaux.
Comme le tableau ci-après le démontre, la plupart des échanges internationaux se font désormais entre les économies avancées et émergentes. Or, il y a vingt ans, la majorité des échanges commerciaux internationaux se déroulaient entre les économies avancées. Il est à noter que les exportations entre les économies émergentes ont augmenté le plus rapidement. Nous estimons que ces échanges intra-régionaux entre entreprises des pays émergents façonneront les flux commerciaux internationaux dans les décennies à venir.
Voici un aperçu des principales raisons pour lesquelles les marchés émergents transforment le commerce mondial :
Déplacement de l’axe du commerce mondial
Le retrait américain du Partenariat trans-pacifique (TPP) plus tôt dans l’année a généralement été perçu comme une aubaine géopolitique et économique pour la Chine, car il lui donne la possibilité de combler le vide laissé au niveau commercial en Asie de l’Est. Bien que beaucoup redoutent que le TPP se désagrège sans la participation des États-Unis, ses 11 membres cherchent à le maintenir en vie. Cela devrait libéraliser les échanges commerciaux entre plusieurs pays émergents, notamment le Chili, le Pérou et la Malaisie, et – en cas d’accord – il s’agirait de l’un des accords commerciaux multilatéraux les plus importants au monde.
En outre, en raison du retrait des États-Unis du TPP, le Partenariat économique régional global (RCEP), fort de 16 États et soutenu par la Chine, revient sur le devant de la scène. Le RCEP englobe tant la Chine que l’Inde et représente un quart du PIB mondial. Cet accord intègre également le Japon et l’Australie, mais pas les USA…
Tandis que les renégociations de l’Accord de libre-échange nord-américain pourraient nuire au Mexique, plusieurs accords commerciaux bilatéraux renforcent les relations entre les pays émergents. La Chine, en particulier, cherche depuis quelques temps à consolider ses relations commerciales avec de nombreux pays d’Amérique centrale et du Sud, ce qui laisse entrevoir une intensification de l’activité diplomatique et économique entre les régions en dehors de la sphère d’influence des marchés développés.
L’importance croissante du commerce intra-régional
De plus en plus, les principaux partenaires à l’import et à l’export des marchés émergents sont d’autres pays en développement. La Chine, par exemple, est de loin la principale destination d’exportation pour les produits brésiliens. Alors que le principal exportateur vers l’Afrique du Sud, l’Inde et la Russie n’est autre que la Chine. Ce commerce intra-régional est amené à continuer avec les blocs commerciaux, comme la Zone de libre-échange de l’ASEAN (qui englobe la Thaïlande, le Vietnam, l’Indonésie, la Malaisie, les Philippines, Singapour, le Myanmar, le Cambodge et le Laos) en imprimant une dynamique robuste d’échanges internes, en dehors des relations commerciales avec les pays développés. Comme le graphique ci-dessous l’indique, la grande majorité des importations pour la région de l’ASEAN, en termes de valeur, proviennent de ses membres ainsi que de la Chine.
La Nouvelle Route de la Soie
La Nouvelle Route de la Soie ou l’initiative « Une ceinture, une route » de la Chine est un projet audacieux qui engendrera de grandes retombées en facilitant les échanges commerciaux entre la Chine, l’Asie et des contrées plus lointaines. Selon les estimations, 2 000 à 4 000 milliards de dollars américains seront dépensés dans 68 pays pour construire des infrastructures comme des ports, des aéroports, des autoroutes, des chemins de fer, des centrales électriques et des pipelines. Grâce à ces améliorations transformatives des infrastructures de transport, il est facile d’imaginer les avantages potentiels qui s’offriront aux pays émergents et aux entreprises dont les marchés s’étendront en conséquence.
Source : Martin Currie
Des marchés en expansion
Les pays émergents pèsent également de plus en plus lourd dans le commerce international car ils s’enrichissent et leur demande intérieure augmente. Une croissance rapide est alimentée par des tendances à long terme marquées : l’amélioration de la situation démographique fournit une main-d’œuvre en plein essor, jeune et de mieux en mieux instruite ; tandis qu’en parallèle, une classe moyenne en ascension, principalement dans les zones urbaines, continuera d’alimenter une forte croissance de la consommation sur de nombreux marchés.
Prenez le secteur automobile mondial, par exemple. La Chine est déjà le principal marché automobile au monde. En 2016, 28 millions de nouvelles immatriculations ont été dénombrées, plus que les immatriculations aux États-Unis, au Canada et au Mexique combinées. Néanmoins, quand on connaît également l’engouement de la Chine pour les véhicules électriques (une hausse de 381 % entre 2014 et 2016 dans les nouvelles immatriculations de VE en Chine1), il apparaît évident que les pays émergents joueront un rôle crucial dans ces marchés tant en qualité de consommateurs que de producteurs.
Plus d’offres
Alors que la demande et la consommation augmentent dans les pays émergents, la combinaison de réformes de l’offre, d’améliorations de l’efficacité et de l’innovation ouvre également la voie à une consolidation des capacités d’exportation. Ainsi, bon nombre d’entreprises issues des marchés émergents sont devenues des chefs de file dans des domaines tels que les technologies de l’Internet et le commerce en ligne. Les entreprises de commerce en ligne en Chine ont une présence interne monumentale, tandis que leurs rivaux américains respectifs restent des acteurs secondaires. Entre-temps, d’autres entreprises de haute technologie en provenance des pays émergents sont devenues des acteurs clés dans les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Avantage aux marchés émergents
Les marchés émergents jouent aujourd’hui un rôle dans le commerce international plus important que jamais. La forte croissance à long terme dans les pays émergents a encouragé une réponse vigoureuse de l’offre grâce à l’innovation, à des réformes et à une amélioration de l’utilisation des capacités. Dans le même temps, les récents tournants dans les politiques commerciales des pays développés vers davantage de protectionnisme contrastent avec l’approche générale plus favorable au libre-échange des marchés émergents. Pour ces raisons, de nombreuses entreprises des pays émergents ont un avantage net sur leurs concurrents des marchés développés et cela continuera à alimenter leur croissance pour de nombreuses années à venir.
1 Source : Statista. Source de Statista : Agence internationale de l’énergie
Est-il toujours intéressant d’acheter des actions ?
Par Thomas Mayer, Flossbach von Storch Research Institute
Le 18 janvier 2018
Les bourses battent record sur record. Les cours sont-ils montés trop haut ? Le prochain grand repli est-il imminent ? Les banques centrales prendront-elles le contrôle de la situation ? Ce n’est pas un contexte facile pour les investisseurs.
Les épargnants allemands sont inquiets. Certains se plaignent de la baisse du pouvoir d’achat de leur épargne sous l’effet des taux d’intérêt qui sont à zéro et de l’inflation. Si votre argent se trouve à la banque, la valeur réelle de votre patrimoine baissera continuellement à l’avenir ainsi que la valeur des produits que vous achetez. Par ailleurs, les gens sont réticents à délaisser les comptes d’épargne et les dépôts à vue pour investir dans des actifs matériels. Cette frilosité est compréhensible dans le secteur immobilier, où les biens rentables sont généralement surcotés et les biens abordables sont dans l’ensemble inintéressants. On peut cependant se poser la même question pour les actions. Est-il toujours intéressant d’acheter des actions, même si les cours n’ont cessé d’augmenter depuis huit ans ?
À première vue, deux raisons principales ne plaident pas en faveur d’une entrée tardive sur le marché si vous avez raté le début du mouvement haussier. Premièrement, l’accélération de la croissance mondiale ne date pas d’hier. Si l’on reprend la classification utilisée par l’US Bureau of National Research, l’embellie économique aux États-Unis, qui reste le principal facteur qui tire la croissance mondiale, a commencé il y a huit ans, ce qui en fait la deuxième plus longue période depuis la fin des années 1950. Il serait hasardeux de croire, comme le pensaient certains dans les années 1990, que l’art subtil de la politique monétaire permettrait de prolonger cette embellie indéfiniment. Si la croissance rechutait, les marchés d’actions seraient les premiers à en subir les effets.
Deuxièmement, les cours des actions ne sont plus bas si on les compare à leurs niveaux historiques. Un indicateur très prisé et conservateur des actions américaines, le ratio cours/bénéfice ajusté du cycle (CAPE) calculé par Robert Shiller, affiche actuellement une valeur supérieure à 30 points, un niveau bien supérieur à la moyenne historique de 17 points, et supérieur à tous les sommets atteints depuis 1920, à l’exception de 1999. Le niveau élevé des cours des actions individuelles américaines a bien entendu un impact sur tous les autres marchés d’actions.
Cependant, deux raisons plaident en faveur d’une poursuite des investissements dans les actions. Il est d’abord impossible de prédire quand la prochaine crise économique éclatera et quel sera le meilleur moment pour entrer sur le marché des actions. L’embellie économique actuelle pourrait durer encore quelques années. Lorsque la récession arrivera, personne ne sait combien elle durera et les remous qu’elle provoquera sur les marchés financiers. Le CAPE de Shiller pourrait alors chuter sous les 10 points, comme ce fut le cas au début des années 1980, mais la peur que cela pourrait provoquer pourrait inciter les épargnants à rater une fois encore l’occasion d’entrer sur le marché des actions.
Deuxièmement, il convient de rappeler que les cours des actions dépendent des taux d’intérêt. Si vous prenez l’inverse de l’indicateur de Shiller, vous obtenez le rendement réel correspondant, qui est actuellement de 3 ¼ %. Le rendement réel des bons du Trésor à 10 ans est presque nul. La prime de risque pour les investissements en actions désigne l’écart entre le rendement réel des actions individuelles et celui des obligations individuelles. Comme celui des obligations est nul, la prime de risque est aussi de 3 ¼ %, soit un niveau juste inférieur à la moyenne de 3 ½ % pour l’embellie actuelle. Comme la prime de risque diminue généralement vers la fin d’une période faste, son niveau actuel est relativement élevé. Cela s’explique par le niveau faible des taux d’intérêt.
Depuis qu’ils sont publiés, les taux d’intérêt n’ont jamais été aussi bas qu’aujourd’hui. La manipulation des taux d’intérêt par le cartel mondial des banques centrales est également exceptionnelle. Grâce à la politique des taux faibles des banques centrales, il n’a jamais été possible d’accumuler une telle montagne de dettes. Les banques centrales peuvent même devenir prisonnières de leur propre politique monétaire, et pourraient ne pas être en mesure de relever les taux d’intérêt lorsque l’inflation repartira à la hausse. Les taux d’intérêt nominaux faibles et la hausse de l’inflation devraient toutefois maintenir les cours à un niveau élevé, et ce malgré une croissance économique réelle atone. Cela s’explique par le fait que les bénéfices nominaux gonflés par les effets de l’inflation resteront pénalisés par des taux d’intérêt nominaux faibles.
Si ces arguments suffisent à vous convaincre d’entrer sur le marché des actions, vous devriez toutefois prendre les trois points suivants en considération. Premièrement, vous devrez avoir une volonté forte et un horizon d’investissement long. La valeur de votre portefeuille diminuera en cas de nouvelle récession. Les ventes faites dans l’urgence ou dans la panique pourraient être lourdes de conséquences. Les investisseurs doivent pouvoir laisser le temps à leur portefeuille de récupérer le terrain perdu dans les périodes de croissance. Deuxièmement, vous devez construire votre portefeuille en privilégiant les actions d’entreprises qui disposent d’un pouvoir de marché et qui peuvent renouer avec leur série de bons résultats dans les périodes d’embellie qui font suite à une récession. Les entreprises peu endettées avec des business models stables et une direction compétente ont des chances de durer. Et troisièmement, vous devez garder assez de liquidités pour couvrir vos dépenses à moyen terme. Les placements en actions mettent du temps à arriver à maturité et les investisseurs ne peuvent y puiser à souhait chaque fois qu’il a un besoin urgent de liquidités.
Intelligence artificielle: un alignement de planètes
Par Didier Le Menestrel, Président-directeur général, La Financière de l’Echiquier
Le 26 décembre 2017
Une machine peut-elle imiter une conversation humaine ? A cette question posée il y a plus de 60 ans par Alan Turing, père de l’informatique1, notre époque est en passe d’apporter une réponse positive.
L’irruption de l’intelligence artificielle (IA) dans nos vies est récente, elle va les transformer radicalement. 2017 marque un tournant décisif et restera dans la mémoire des hommes comme « l’année zéro » de l’IA. L’ampleur de la révolution en jeu est inédite dans notre Histoire, et dépasse celle déclenchée par Gutenberg (15e siècle) ou le moteur à vapeur (fin du 18e siècle). Le vocabulaire – machine learning, deep learning, big data, hyperscaler… – s’est déjà immiscé dans toutes les conversations, et les utopies d’hier vont devenir réalité. Une révolution donc, favorisée par un alignement de planètes exceptionnel.
La première planète à s’aligner est celle de la donnée, une matière première que nous produisons en quantités phénoménales. Une étude d’IBM parue en 2016 estime que 90% des données générées par l’humanité l’ont été au cours des deux années précédentes.
Deuxième moteur de cette révolution : les data centers, qui sont les véritables laboratoires d’apprentissage des algorithmes d’IA. Portés par Amazon, Microsoft ou Alibaba, ces entrepôts géants qui stockent nos données mettent à la disposition des entreprises une puissance de calcul vertigineuse qui permet de développer des applications d’IA à une vitesse fulgurante. Enfin, les processeurs de calcul graphique sont le 3e outil indispensable au décollage de l’IA. Grâce à eux, les algorithmes peuvent s’éduquer pour être appliqués ensuite en temps réel.
Ces vagues d’innovation technologique qui déferlent ouvrent le champ des possibles. Les applications qui en découlent sont infinies. La voiture autonome, par exemple, bouleversera les transports. Les géants d’Internet (Google, Apple, Baidu), des startups (Uber, Drive.Ai), et bien sûr les constructeurs automobiles (Tesla, BMW, Nissan) y investissent massivement. Waymo, filiale de Google, propose déjà un service de taxi autonome gratuit dans la ville de Phoenix, en Arizona. Au-delà de ces applications de confort, de prodigieux progrès sont accomplis, notamment dans la médecine. Watson, par exemple, un système développé par IBM, est capable de détecter certains cancers avec un taux de réussite bien supérieur à celui des meilleurs oncologistes2.
A court ou moyen terme, tous les secteurs seront touchés, et l’écosystème financier n’y échappera pas. Le chinois Ping An, deuxième assureur mondial, optimise déjà le prix de ses produits d’assurance et le temps passé pour accorder un crédit grâce aux données dont il dispose sur près de… 900 millions d’utilisateurs.
Année zéro ou pas pour l’IA, une chose est certaine, les enfants nés en 2017 n’auront plus besoin d’apprendre à conduire ni d’acheter un ordinateur (tout se fera sur le cloud), et auront tout intérêt à apprendre un langage de programmation plutôt qu’une langue étrangère : la traduction en temps réel arrive en 2018. N’ayons pas peur de ces mutations… même si l’innovation va transformer profondément le rôle de l’individu.
1 Auteur du test de Turing, censé déterminer si un ordinateur est capable de reproduire la pensée humaine.
2 IBM, American Society of Clinical Oncology meeting, juin 2017.
Une devise faible : un gage de bonne santé
par Kurt von Storch, Flossbach von Storch Invest
le 9 novembre 2017
Penchons-nous sur la principale préoccupation boursière de ces dernières semaines : l’euro. La monnaie commune a franchi il y a peu la barre des 1,20 dollar US pour la première fois depuis bien longtemps. Une monnaie forte est généralement synonyme d’une économie vigoureuse et robuste. En d’autres termes, on pourrait dire qu’il s’agit d’un label de qualité. Et nous n’en étions pas peu fiers dans le passé. Prenons le Deutsche Mark. Il nous a accompagnés pendant une bonne cinquantaine d’années. C’était un pilier de notre prospérité. Le Mark était un symbole de stabilité et de fiabilité.
Aujourd’hui, tout a changé. Avoir une monnaie forte, un euro fort, ça n’est pas vraiment une fierté. C’est même quelque chose que nous craignons, du moins de nombreuses figures politiques et banquiers centraux, car leur perspective est complètement différente : une devise forte engendre une augmentation du prix des produits des entreprises locales sur le marché mondial, ce qui les rend moins compétitives face à leurs concurrents en Asie et en Amérique. Et à long terme, l’économie nationale en souffre. Voilà ce qui est préoccupant. Ce n’est pas pour rien que le président de la BCE, Mario Draghi, a souligné à plusieurs reprises le risque que pose un euro (trop) fort à la suite de la dernière réunion de la BCE.
L’affaiblissement de la monnaie est un moyen relativement simple de relancer l’économie. On pourrait même appeler cela un plan de relance économique gratuit (qui, au final et pour faire simple, permettrait sans doute de payer les contribuables et les épargnants). Aucun banquier central au monde ne l’admettrait. Au lieu de cela, l’accent est mis sur le fait que les efforts considérables déployés par les banques centrales (des taux d’intérêt historiquement bas et des acquisitions d’obligations à grande échelle) concordent avec l’accomplissement des missions les plus fondamentales de la banque centrale, à savoir la stabilité des prix.
La BCE définit la stabilité des prix avec un objectif d’inflation de 2 %. Cela peut porter à sourire : en quoi un prix est-il « stable » s’il augmente de deux pour cent par année ? N’y réfléchissons pas trop longtemps.
La BCE n’est pas la seule concernée. En effet, l’équation « monnaie faible = monnaie en bonne santé » s’applique dans le monde entier. Prenons l’exemple américain. Lors de la campagne électorale de l’année dernière, Donald Trump n’avait pas grand-chose à dire de positif à l’égard de la Réserve fédérale des États-Unis et de sa présidente, Janet Yellen. À peine au pouvoir, il a loué la politique monétaire de cette dernière : à long terme, un dollar faible est bénéfique pour l’économie américaine.
Ce qui est problématique, c’est qu’apparemment, tout le monde semble participer à cette course mondiale à la dépréciation : les Européens, les Américains, les Asiatiques. Et si toutes les monnaies sont faibles, laquelle est forte ? Probablement celle qui ne semble pas si faible pour le moment, pour faire simple.
Cela expliquerait au moins l’appréciation de l’euro par rapport au billet vert à 1,20 dollar américain. En réalité, il n’y a pas de justification tangible pour cette appréciation significative en un laps de temps aussi court. Les problèmes de la zone euro subsistent. La communauté monétaire est et demeure une entité très hétérogène et donc vulnérable, uniquement soutenue par la politique monétaire ultra-souple de la BCE. Il est tout à fait possible que le dollar américain soit bientôt de nouveau considéré comme la plus forte de ces deux monnaies faibles.
Allons-nous au devant d’une récession ?
Jeff Schulze, CFA, Directeur, Stratégie d’investissement, ClearBridge Investments (une filiale de Legg Mason)
Le 10 octobre 2017
Depuis 1926, en l’espace de 91 ans, la bourse américaine a rapporté 20 % ou plus à 33 occasions (36 %) et a perdu plus de 20 % à six reprises seulement (7 %). Quand les marchés sont si clairement favorables, la crainte de quelques années de vaches maigres est irrationnelle. Mais elle est néanmoins bien enracinée.
Nous n’avons pas connu de mouvements de vente massifs et le S&P 500 a perdu 15 % depuis quatre ans environ. L’optimisme est flagrant dans les enquêtes de confiance, ce qui est normalement un bon début pour entrevoir le bout du tunnel. Mais au lieu de se figer et d’attendre que la sagesse apaise les esprits, de nombreux investisseurs ont tendance à céder à la peur et à vendre au pire moment possible, voire à se retirer des marchés.
La panique fait prendre de mauvaises décisions : les investissements n’étant pas constants, au cours des 30 dernières années de rendements annualisés, chaque classe d’actifs majeure a offert de meilleurs profits que l’investissement moyen, dont les rendements annualisés s’élèvent à 2,5 % seulement. Cela ne couvre pas l’inflation.
Pour maîtriser le marché à long terme, les investisseurs doivent apprendre à distinguer le bruit des signaux. Les « crises de panique », les replis soudains des marchés, ne sont souvent que du bruit. Pourtant, savoir quand nous allons entrer en récession est un signal, car c’est là que les marchés s’effondrent.
Un krach boursier se définit comme un recul de 20 % ou plus de l’indice Standard & Poor’s 500 durant plus de 12 mois. Trois krachs boursiers se sont produits au cours des 36 dernières années, ainsi qu’un presque-krach. Chacun coïncide avec les quatre dernières récessions.
Nous croyons que la probabilité d’une récession dans les 12 mois à venir est de 20 %.
11 points de données historiquement annonciateurs d’une récession imminente ont été identifiés :
- Salaires horaires moyens
- Nouvelles commandes selon l’indice de l’Institute for Supply Management’s Purchasing Managers (M-PMI)
- Indice des prix de l’énergie et du pétrole
- Spread des bons du Trésor américain sur 10 ans et sur 3 mois
- Taux d’impayés non hypothécaires parmi les consommateurs
- Bénéfices des sociétés (financières et non-financières) en pourcentage du PIB
- Spread des obligations à haut rendement
- Permis de construire
- Force du dollar américain
- Tendance du travail temporaire
- Moyenne sur quatre semaines des demandes initiales d’assurance-chômage
Seul un point de données est alarmant : les bénéfices des entreprises.
Les marges bénéficiaires des sociétés ont atteint leur dernier pic en 2014. Historiquement, un tel pic précède une récession. Un rétrécissement des marges bénéficiaires des sociétés peut conduire à une baisse de l’investissement en capital et de l’embauche, à l’origine d’une hausse du chômage, d’une baisse de la consommation courante et d’un ralentissement de la croissance économique. La croissance du chiffre d’affaires des entreprises a été solide cette année et nous pensons qu’elle se maintiendra. Les marges bénéficiaires devraient également rester stables, à un minimum, malgré un coût du travail en possible augmentation.
Tous les autres signes sont positifs.
À l’image des salaires horaires moyens, le coût du travail a augmenté. Une augmentation des salaires horaires est un bon indicateur d’une récession à venir : en moyenne, quand les salaires affichent une croissance égale ou supérieure à 4 %, une récession survient deux ans plus tard. Nous sommes bien en deçà de ce niveau.
Les permis de construire affichent une tendance nettement à la hausse.
Des pics de cours du pétrole précèdent presque toutes les récessions. Très volatil, le prix du pétrole est passé sous les 100 dollars en 2014. Bien que les cours soient en augmentation depuis 2016, ils n’ont pas atteint de niveaux critiques.
Les chiffres du chômage nous montrent seulement d’où nous venons mais pas où nous allons, si bien que la tendance du travail temporaire est un meilleur indicateur de mesure que le chômage : il est en baisse avant un début de récession et remonte quand on en sort. La tendance du travail temporaire demeure à la hausse.
Le M-PMI affiche un encourageant niveau de 58,8 % en août. Au-dessus de 50 %, on parle de croissance, ce qui signifie que les revenus devraient continuer à prendre de l’ampleur.
Les taux obligataires sont en recul mais le taux des bons du Trésor à 10 ans est susceptible d’augmenter.
La valeur du dollar américain continuera de diminuer ou, probablement, de stagner au cours de l’année prochaine ; il a perdu 18 % de sa valeur, en moyenne, après la première hausse des taux directeurs durant les trois derniers cycles de hausse des taux. La faiblesse du dollar est généralement bonne pour l’économie mondiale et pour les actions américaines.
Allons-nous au-devant d’une autre récession ? Peut-être, mais les signes annoncent le contraire.
Foot à lier ?
Le 21 septembre 2017
Didier Le Menestrel, Président-directeur général, La Financière de l’Echiquier
La tranquillité relative qui a régné sur la Bourse ces dernières semaines a permis au plus grand nombre de suivre un marché bien plus agité : celui des transferts de joueurs de foot. Le ballon rond s’est installé tout l’été à la une des médias, actualité financière incluse, grâce à l’impressionnante envolée du prix des footballeurs. Nous savons tous aujourd’hui que le PSG a racheté au FC Barcelone, pour la somme folle de 222 millions d’euros, le désormais très célèbre Neymar da Silva Santos Júnior, dit « Neymar ». Au total, la somme déboursée par le PSG pour s’attacher ce jeune attaquant brésilien s’élève à 572 millions sur 5 ans, un « transfert du siècle » qui a logiquement enflammé nos esprits et nos conversations estivales.
Ce n’est pas tant le prix de Neymar qui interpelle que ses conséquences sur les autres transactions. Ce nouveau standard établi, les flux financiers des transferts s’envolent. L’attaquant français Ousmane Dembélé, 20 ans et un total de 6 buts en 32 matches l’an dernier, vient ainsi d’être transféré du Borussia Dortmund au FC Barcelone pour 105 millions d’euros. Au total, les clubs européens auront déboursé plus de 5 milliards au cours de ce mercato 1, soit près de deux fois plus qu’en 2015. Le transfert mirobolant de Neymar efface des tablettes le précédent record de 105 millions payés en 2016 par Manchester United pour s’offrir les services du Français Paul Pogba, loin devant notre Zizou national, 75 millions en 2001, un record qui avait tenu 8 ans.
Combien valent vraiment les joueurs de foot ? Quelques repères pour tenter de répondre à la question de l’été : un Neymar (3,26 millions d’euros au kilo) = deux Pogba, cinq Olympique de Marseille ou encore deux A320. Est-il raisonnable de valoriser un joueur plus de 200 millions d’euros ? « Bien sûr », diront les uns : Neymar est une marque planétaire visible jusqu’aux confins de la Chine qui dopera l’audience du club et la vente de maillots. « Pas si sûr », répondent les néophytes qui feront remarquer à juste titre que ces montants pour un seul homme sont sans équivalent dans l’économie réelle.
Ceux qui ont de la mémoire auront une troisième lecture. L’inflation des investissements, l’anticipation d’une forte hausse des droits audiovisuels, un peu de créativité comptable – le transfert envisagé du Français Kylian Mbappé sous forme de prêt avec option d’achat obligatoire pour 145 millions d’euros (plus 35 de bonus) –, l’absence de régulation, une pression médiatique intense… : voilà tous les ingrédients d’une bulle dorénavant réunis ! La fin des années 1990 n’est pas si lointaine et de tels comportements sont bien connus des boursiers.
Certains en profitent d’ailleurs pour relever que les valorisations des GAFA 2 enregistrent elles aussi d’étourdissants records, à l’image d’Apple qui progresse de +54% sur un an glissant, atteignant une capitalisation de près de 850 milliards de dollars. Mais un seul chiffre suffit pour illustrer la création réelle de valeur générée par l’économie numérique : au deuxième trimestre 2017, le résultat de Facebook a progressé de 70% pour atteindre 4 milliards de dollars. En un seul trimestre, l’entreprise a généré plus de résultats que pour toute son année 2015 (3,6 milliards de dollars). En comparaison, pour tenir le même rythme de progression que Facebook, Neymar devrait marquer cette saison au minimum 156 buts, soit quatre fois plus qu’en 2014/2015 (39 buts).
La quatrième révolution industrielle est en marche et elle est durable, bien au-delà de l’horizon de la carrière d’une icône du foot.
1 Les Echos, 29 août 2017
2 L’acronyme désignant les géants de la tech :
GOOGLE (ALPHABET), AMAZON, FACEBOOK, APPLE
Les biotechnologies bien placées pour réaliser de meilleures performances
Le 22 août 2017
Par Margaret Vitrano, gestionnaire de portefeuille, et Nicholas Wu, PhD, Analyste en chef – Soins de santé, Clearbridge Investments ( filiale de Legg Mason)
Les soins de santé sont l’un des domaines les plus impopulaires sur le marché depuis plus de deux ans, surtout les actions de sociétés biotechnologiques. Et pourtant, ce secteur peut encore être considéré comme une source incontournable de performance durable dans une stratégie de croissance grande capitalisation.
Les entreprises biotechnologiques sont des moteurs potentiels de croissance des bénéfices supérieure à la moyenne à long terme et peuvent être intégrées dans le groupe « privilégié » d’actions de croissance. Pour mieux comprendre le malaise régnant dans le secteur biotechnologique et ce que l’avenir proche nous réserve, il est bon de se pencher sur les hausses et les baisses que ce groupe a connues au cours des six dernières années.
De 2011 à l’été 2015, les actions des entreprises biotechnologiques et pharmaceutiques ont eu un rendement nettement meilleur que celui du reste du marché. Ce marché haussier était sous l’effet de quatre tendances : la fin de l’expiration des brevets des médicaments de marque, l’optimisme accru suscité par les traitements et les technologies médicamenteux innovants, un environnement réglementaire plus favorable pour les nouvelles autorisations de médicaments et le pouvoir d’établissement des prix des médicaments sur prescription.
Les premiers tweets d’Hillary Clinton lors de la campagne présidentielle sur le prix élevé de certains médicaments de marque ont coïncidé avec la fin de cette période haussière. Depuis lors, les actions biopharmaceutiques ont présenté une volatilité supérieure à la normale, avec un pessimisme ambiant qui a terni les bons fondamentaux. Entre le premier juillet 2015 et le 31 mai 2017, l’indice NASDAQ Biotechnology des actions biotechnologiques à grande capitalisation a perdu plus de 22 % tandis que l’Indice S&P 500 affichait une hausse de 15,5 %.
En dépit des récentes faiblesses, trois des quatre tendances qui ont alimenté la hausse des cours des entreprises biopharmaceutiques restent présentes à l’heure actuelle. La perte des brevets ne pose toujours pas problème, étant donné qu’aucune expiration majeure n’est prévue avant la moitié de la prochaine décennie. Les autorités de réglementation continuent à soutenir de nouveaux traitements médicamenteux (Graphique 1) et nous pensons que l’environnement réglementaire continuera à être favorable pour les nouveaux médicaments innovants sous l’administration Trump.
Graphique 1 : Le nombre d’autorisations de médicaments devrait augmenter
Tandis que le nombre de nouvelles autorisations de médicaments délivrées par la Food and Drug Administration des États-Unis (FDA) a chuté en 2016, nous estimons qu’il s’agit d’une aberration et d’un effet de calendrier. En effet, de nombreuses autorisations ont été octroyées à la fin de 2015 et au début de 2017. Les chiffres de 2017 portent jusqu’au 31 mai 2017. Source : FDA.
Le plus important peut-être est que l’innovation se porte très bien. Sur la base de nos recherches fondamentales et de notre méthode de gestion active, nous continuons à investir dans les sociétés de biotechnologie qui mettent au point des traitements innovants pour les maladies rares et les maladies inflammatoires où les besoins non satisfaits sont nombreux. Les traitements dans ces domaines sont confrontés à une concurrence moindre et devraient être moins vulnérables à la pression des prix.
Celgene[1], par exemple, tire pour le moment la majeure partie de ses revenus du Revlimid, un médicament contre le cancer, qui n’a pas de concurrent direct. La société teste également deux médicaments qui sont en phase trois des essais cliniques pour le traitement de la colite ulcéreuse et de maladie de Crohn, deux maladies inflammatoires des intestins où les besoins non satisfaits sont nombreux. Eylea de Regeneron Pharmaceuticals est le meilleur produit contre la dégénérescence maculaire liée à l’âge et les maladies oculaires y étant associées. En outre, Dupixent de Regeneron et Sanofi vient d’être approuvé aux États-Unis pour traiter l’eczéma sévère ; encore une maladie inflammatoire aux nombreux besoins non satisfaits. Le bon départ de Dupixent démontre l’importance de ce marché.
Biogen s’étend au-delà de ses activités de base dans le secteur de la sclérose en plaques avec la récente autorisation de Spinraza pour le traitement de l’atrophie musculaire spinale, une maladie génétique ultra orpheline souvent fatale pour laquelle il n’existe aucun autre médicament autorisé. L’aducanumab de Biogen et d’Eisai est en phase III des essais pour le traitement de la maladie d’Alzheimer. Alors que d’autres traitements d’Alzheimer présentaient un potentiel de départ qui n’a finalement pas été à la hauteur des espoirs, l’aducanumab est l’un des médicaments en développement les plus prometteurs pour cette maladie terrible. Alexion Pharmaceuticals est une entreprise qui se concentre uniquement sur les maladies rares. Cette entreprise active dans les biotechnologies propose trois produits sur le marché qui apportent un bénéfice clinique important et devraient favoriser la croissance durable et à long terme de l’entreprise. En outre, Alexion met au point un nouveau traitement qui devrait lui permettre de prolonger son produit phare Soliris jusqu’à la fin des années 2020.
Peu de ces facteurs positifs sont reconnus par les investisseurs. En effet, les cours des actions doivent encore rattraper les fondamentaux pour ces activités. Les actions rentables des entreprises biotechnologiques s’échangent au cours le plus intéressant depuis plus de 20 ans, par rapport aux autres actions. Les valorisations actuelles n’attribuent que peu ou pas de valeur à des entreprises qui portent pourtant des projets de recherche et de développement intéressants.
Compte tenu de l’intérêt politique porté aux fabricants de médicaments, les positions en biotechnologiques ont connu une grande volatilité au cours des deux dernières années. Il y a des actions plus stables dans le domaine des soins de santé, notamment, UnitedHealth Group, l’un des principaux acteurs de la gestion des soins de santé, et Johnson & Johnson, une entreprise de soins de santé diversifiée proposant des médicaments sur prescription, des appareils médicaux et des activités de vente au grand public.
Certes, la tarification des médicaments entrave toujours le secteur, cependant, l’innovation devrait encore être récompensée. À long terme, nous estimons que la valeur des actifs biotechnologiques de qualité sera réalisée par le biais d’une remise à niveau du cours des actions ou d’une importante vague de consolidation dans ce secteur. Johnson & Johnson a annoncé sa plus grande acquisition en janvier, à savoir l’achat pour 30 milliards de dollars de la société biotechnologique suisse Actelion ; une opération qui pourrait faire des émules dans les secteurs pharmaceutique et biotechnologique.
[1] Les sociétés en gras sont reprises dans la Large Cap Growth Strategy de ClearBridge, au 19 juin 2017.
Populisme, un an après le Brexit où en est-on ?
Par Talha Khan, Économiste politique chez Capital Group.
Le 1er août 2017
Après avoir fait les grands titres il y a un an lors de la victoire du Brexit, le populisme a jeté une ombre sur de nombreux rendez-vous politiques. Dans cet article, nous analysons la suite du scénario pour l’Europe, les effets du populisme aux États-Unis, les facteurs profonds à l’origine de son essor et les conséquences pour les investisseurs.
Le populisme momentanément jugulé en Europe
Le résultat du référendum britannique a fait craindre un effet domino dans le reste de l’UE, comme en témoigne l’appel des partis populistes de France, des Pays-Bas, d’Italie, de Suède, d’Autriche et du Danemark à organiser un référendum sur l’appartenance de leur nation à l’UE. À l’instar du Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni qui a persuadé la population de quitter l’Union européenne, les forces populistes parviennent avec peu de représentants élus à influencer les partis dominants et les décisions politiques.
La possibilité que l’économie britannique prospère hors de l’Union pourrait galvaniser les forces populistes de la région, au point d’entraver, voire d’inverser l’intégration européenne. L’élection en 2016 de l’outsider Donald Trump à la tête de la plus grande démocratie occidentale a fait craindre la montée en puissance d’autres populistes en Europe.
Or, c’est peut-être l’inverse qui s’est produit, avec la démonstration récente des dangers du vote protestataire et de l’excès de confiance. Ainsi, selon YouGov, lors des dernières élections législatives britanniques, 57 % des 18-19 ans et 59 % des 20-24 ans ont voté (contre 43 % au même scrutin de 2015). Et dans de nombreux pays ces derniers mois (notamment en France, aux Pays-Bas et en Autriche), les partis populistes n’ont pas atteint les résultats attendus. L’élan proeuropéen engendré par la victoire d’Emmanuel Macron en France a notamment soulagé les partis dominants, qui tentent de freiner la montée de ce mouvement.
Les causes du populisme demeurent (chômage élevé, forte immigration) et le sentiment europhile recule depuis la crise financière de 2008. Pourtant, la popularité de la zone euro reste stable. En outre, les instances européennes recueillent plus de confiance que les gouvernements nationaux. Ainsi, malgré l’insatisfaction générale due à l’orientation de l’UE, personne n’est (encore) prêt à quitter le navire. Les électeurs demandent un changement de cap économique et politique, quitte à recourir au vote sanction pour parvenir à leurs fins. Soulignons toutefois que selon les sondages, la majorité préfère toujours le maintien dans l’UE (et la zone euro, le cas échéant). Et s’il est extrêmement difficile de prévoir les catalyseurs de la désintégration d’une union monétaire, celle-ci résulte généralement d’une décision de ses principaux membres. Dans le cas de l’UE, il faut donc surveiller la situation en Allemagne, en France et en Italie.
Aux États-Unis, le flou persiste
Depuis la victoire de Donald Trump, les investisseurs cherchent à savoir quelles promesses électorales seront honorées, avec quelles conséquences sur la croissance et l’économie en général. Dépenses en infrastructure, assouplissement de la réglementation et réforme fiscale sont toutes des mesures souhaitables. À l’inverse, un durcissement des politiques commerciales et migratoires pourrait freiner la croissance. Pour l’heure, l’incertitude demeure sur tous ces sujets. Le budget 2018 de l’administration Trump prévoit des dépenses d’infrastructure assez modestes, et pas de baisse d’impôt.
En parallèle, M. Trump a signé plusieurs décrets ordonnant un réexamen, voire une limitation de la réglementation en vigueur, mais aucune loi de simplification administrative n’a été proposée. Les restrictions envisagées pour l’immigration se heurtent quant à elles à des contraintes légales, et aucune mesure de politique commerciale n’a encore été prise. On voit donc clairement qu’une fois au pouvoir, les populistes peinent à appliquer leur programme et doivent généralement faire des concessions.
L’insécurité économique et culturelle, un vecteur de populisme
La vague populiste actuelle trouve son origine dans l’insécurité économique et culturelle. Depuis la crise financière mondiale, le chômage européen résiste et les salaires américains stagnent. Les classes populaires voient leurs emplois menacés par la mondialisation et les technologies, et leur identité culturelle, remise en cause par l’immigration.
En Europe, l’afflux de migrants et le terrorisme contribuent à nourrir leur ressentiment, et ils perçoivent leurs gouvernements comme des élites cupides qui ont ignoré la crise financière avant de porter secours à ses responsables, au prix de lourds sacrifices pour les populations.
Selon une étude sur les inégalités de revenu publiée par McKinsey Global Institute1, les revenus des ménages dans les pays développés (États-Unis, Europe occidentale, etc.) ont stagné ou reculé pour la plupart des segments entre
2005 et 2014. Pendant les 12 années précédentes, une progression avait au contraire été constatée pour presque tous les segments.
Progrès sans regrets !
Par Didier Le Menestrel, Président-directeur général, La Financière de l’Echiquier
Le 3 juillet 2017
Nous ne l’utilisons pas encore mais sa valeur a doublé depuis le début de l’année et son utilisation se répand peu à peu dans l’économie : la monnaie numérique Bitcoin a franchi le mois dernier la barre des 2 000 dollars alors qu’elle valait 0,001 cent lors de sa création fin 2008. Pourquoi un tel engouement pour cette devise qui nourrissait plutôt jusqu’ici la chronique des faits divers ? L’une des raisons tient sûrement à son adoption par le Japon comme méthode de paiement, une belle reconnaissance officielle pour une monnaie sans banque centrale ni Etat d’origine… et qui n’appartient à personne. Depuis, le cours du Bitcoin bat sans cesse de nouveaux records : 2760 dollars le 25 mai dernier.
Plus que le succès du Bitcoin, la technologie qui permet son existence, la Blockchain, est une révolution qui bouleverse nos échanges. Cette technologie de rupture fait « tout simplement » disparaître la nécessité de ces tiers de confiance (banques centrales, Etats, notaires, etc.) que l’on pensait incontournables. Les fabuleux progrès qu’elle engendre vont bien au-delà du champ de la finance. Après le Nasdaq, les banques et l’assurance, tous les secteurs sont impactés : l’Estonie l’expérimente pour des actes notariés, Sony pour l’éducation, l’Yonne pour des compteurs d’eau connectés… En consignant toutes les transactions, cet outil technologique à l’historique infalsifiable offre un potentiel inédit. On peut préférer les cahiers d’antan, il n’en reste pas moins que ce registre de l’internet sécurisé et partagé par tous jouera un rôle croissant dans nos échanges, tout en minimisant leurs coûts. Le champ des possibles commence à peine à s’entrouvrir.
Nous vivons l’un de ces moments de l’Histoire où l’innovation bouleverse notre quotidien : les biotechnologies révolutionnent la médecine, l’intelligence artificielle et la robotique façonnent peu à peu notre existence et l’économie devient collaborative et décentralisée. Face à de tels changements, l’inquiétude et les réflexes de défense sont instinctifs, et il peut être tentant de « regretter la douceur des lampes à huile » et « le charme des équipages »1. L’histoire nous l’a pourtant appris : les transitions sont difficiles mais nécessaires, et le doute et l’inquiétude sont les pires ennemis de nos sociétés. Les Canuts, les tisserands lyonnais de la soie, l’ont expérimenté à leur détriment… On a beau vouloir détruire à coup de sabot la modernité (les métiers Jacquard en l’occurrence), l’innovation est inéluctable et nous devons apprendre à vivre avec ce progrès parfois déroutant.
Quelles conséquences pour les métiers de l’épargne ? A l’évidence, l’accélération des technologies nous impacte et nous affectera, comme tous les autres métiers.
A l’heure où la France semble décidée à épouser son époque, et comme Jean-Baptiste Say2 l’a préconisé, « nous qui apercevons dans les progrès même que nous avons faits, le germe de progrès plus grands encore, marchons avec plus de hardiesse et de confiance vers le chemin de l’avenir ».
- Discours de Charles de Gaulle, 14 juin 1960
2 La Décade, http://www.cerclejeanbaptistesay.com/
La divergence des rendements obligataires dans la zone euro : menace ou opportunité ?
Par Maria Municchi, Deputy Fund Manager at M&G
Le 8 mai 2017
En dépit d’un certain réalignement des rendements des emprunts d’État européens à long terme après la crise de la dette de la zone euro en 2012, c’est à nouveau la divergence qui a prédominé au cours des dernières années.
De manière simpliste, c’est là une situation en contradiction avec l’amélioration des fondamentaux. Si la forte accélération des niveaux d’endettement du Portugal et de l’Espagne explique en partie l’évolution des rendements durant la crise de la dette de la zone euro, les niveaux ont toutefois cessé de croître depuis 2013. Dans le même temps, les tendances du PIB se sont améliorées et le risque de déflation semble s’être atténué.
Dès lors, comment pouvoir justifier la divergence accrue entre les rendements des obligations souveraines européennes à long terme ?
La corrélation entre le ratio dette/PIB et les rendements obligataires est tout sauf simple, en particulier lorsque l’État est à même d’imprimer sa propre monnaie. Dans la zone euro, cette corrélation est encore plus compliquée. Premièrement, les niveaux d’endettement deviennent plus importants parce que les différents pays membres de la zone euro ne peuvent contrôler leurs propres devises. Deuxièmement, la nature conditionnelle du soutien de la BCE a l’impact suivant : le fait que les obligations de la zone euro représentent plus un « risque de crédit » ou un « risque de taux » est subordonné à la volonté des politiciens nationaux d’obtempérer à l’UE et au FMI. C’est d’ailleurs ce que l’on a pu constater dans le cas du parti Syriza en Grèce et, plus récemment, ce qui a joué un rôle clé dans l’envolée des rendements obligataires portugais au début de l’année 2016.
Cela signifie que, même si les fondamentaux peuvent s’être stabilisés et voire même améliorés dans certains pays, l’instabilité des caractéristiques de risque des actifs eux-mêmes sont susceptibles de changer. Le travail d’un investisseur est d’évaluer si l’évolution des prix témoigne de réels changements dans ces caractéristiques ou d’un changement dans la façon de les considérer des investisseurs.
Si le risque de défaut des pays de la zone euro a été maintes fois évoqué depuis la crise, aucun défaut ne s’est toutefois produit (bien que la décote (« haircut ») appliquée à la Grèce puisse être considérée comme son équivalent). Aussi, les questions qui se posent sont les suivantes : surestimons-nous simplement le risque de défaut de ces pays parce que la crise de la dette de la zone euro est passée par là ? La caractéristique émotionnelle du biais de disponibilité fausse-t-elle notre raisonnement et nos décisions ?
Qu’est-ce qui a changé ? 2012 a en effet été témoin d’une crise véritable et profonde pour la zone euro, mais la situation est désormais meilleure et, même si certains problèmes subsistent, l’environnement macroéconomique s’est amélioré et les efforts budgétaires entrepris par le Portugal et d’autres ont été substantiels. Le PIB européen a progressé à un solide niveau de 1,8 % et le marché du travail s’est amélioré avec un taux de chômage désormais inférieur à 10 %. La confiance s’est elle aussi fortement améliorée dans l’ensemble des pays, laissant ainsi entrevoir une plus forte convergence économique au sein de la zone euro (ce que Mario Draghi a d’ailleurs souligné dans de récents discours).
De plus, grâce à l’extrême faiblesse des taux d’intérêt et l’intensif programme de « QE » qui ont suivi la crise de la dette de la zone euro, même les pays les plus endettés ont été à même de se refinancer à des rendements attractifs. Et ils l’ont fait en allongeant sensiblement leurs échéances de manière à bénéficier de rendements moins élevés pendant plus longtemps. Même si les niveaux d’endettement peuvent s’avérer identiques à ceux d’il y a trois ans de cela, la composition de cette dette a changé avec l’aide la BCE.
Par exemple, en Italie, le coupon moyen est passé de près de 5 % pour les obligations émises en 2012 à moins de 1 % pour celles émises en 2016, tandis que l’échéance moyenne pondérée par la taille de l’émission a été allongée de 2,8 à 10 ans. Cette tendance s’est également retrouvée en Espagne et au Portugal.
Tirer avantage de la baisse des rendements afin de se refinancer à des termes plus intéressants est apparemment désormais envisagé aux États-Unis (alors même que les taux commencent à augmenter) et semble intéressant (même si les effets positifs peuvent ne pas être si évidents qu’ils semblent l’être). Toutefois, grâce à des dettes moins chères à rembourser et à l’embellie de leurs économies, ces pays européens devraient ainsi être mieux placés, en dépit des nombreux problèmes politiques, afin d’éviter tout défaut (et, par conséquent, méritent un écart de rendement moins élevé par rapport aux bunds allemands !).
Dans l’ensemble, il semble que le thème des mauvaises dynamiques de la dette ne soit pas suffisamment intéressant puisqu’il n’a en effet pas figuré au centre de l’attention des investisseurs depuis un certain temps. Aussi, qu’est-ce qui détermine l’évolution des prix ? Le calendrier électoral chargé en Europe a certainement pris le pas et occupe le devant de la scène à l’heure actuelle.
La sortie de l’euro est l’un des aspects qui divise le plus, à telle enseigne que certains se demandent même si le fait de l’inclure dans le programme était tout simplement une bonne idée. Comme je l’avais exposé concernant le référendum en Italie de l’an dernier, il convient de se méfier du fait que le « Brexit » n’influence notre vision des dynamiques dans d’autres pays européens.
Comme toujours, il est essentiel de faire la distinction entre le changement de sentiment des investisseurs et les véritables changements dans l’économie. Nous ne pouvons pas savoir qui va remporter les prochaines élections et ce que le « Brexit » va impliquer dans la pratique pour l’Europe, mais nous pouvons savoir si nous sommes adéquatement rémunérés pour les risques que nous prenons.
Il semble que les retombées des événements d’il y a cinq ans dans la zone euro et du « Brexit » l’an dernier aient joué un rôle important en influant sur notre façon de voir les choses au cours des douze derniers mois. La réalité économique est complexe, mais la récente divergence des rendements obligataires semble avoir été plus liée à ces impressions qu’aux fondamentaux sous-jacents. Dans ce contexte, par rapport à un bund allemand à 30 ans avec un rendement de 0,9 %, un emprunt d’État italien à 30 ans offrant un rendement de 3,2 % ou un emprunt portugais offrant un rendement de 4,4 % apparaît plus comme une opportunité qu’une menace.
Pourquoi vivons-nous un cycle de crédit unique?
Le 25 avril 2017
par Michael C. Buchanan, Directeur général adjoint des Investissements, Western Asset Management (filiale de Legg Mason)
Le cycle de crédit actuel est unique en son genre. Des forces sans précédent sont en jeu, et nous pensons qu’elles vont engendrer un cycle plus long que ceux que nous avons pu connaître jusqu’à présent. Ce cycle très particulier sera unique, pour trois raisons principales.
- Évolution de la régulation
Si les régulateurs se sont montrés excessivement permissifs avant la crise financière, nous sentions qu’ils changeraient leur fusil d’épaule et qu’une réglementation plus stricte favoriserait les investissements en obligations. La capitalisation des banques américaines et européennes a augmenté en flèche dans le sillage de règles plus strictes sur les marchés des capitaux propres.
Une certaine différence est observable entre la façon dont les banques américaines, d’une part, et les banques européennes, d’autre part, ont géré cette crise. Aux États-Unis, les banques ont acté des charges substantielles plus rapidement, comme le montre la baisse des fonds propres survenue entre 2007 et 2008. Les banques européennes ont choisi une approche plus graduelle. Le résultat fut le même des deux côtés de l’Atlantique : des ratios de fonds propres solides et une amélioration manifeste des bilans. Presque toutes ces grandes banques peuvent désormais se prévaloir de ratios de fonds propres record. Les institutions financières représentent une part très conséquente du marché des obligations de qualité. Les réglementations limitant la capacité d’investissement des banques en vue de souscrire des rachats par endettement (LBO) ont permis de réduire le risque d’augmentation marquée des cessations de paiement dans un proche avenir.
- Complaisance des banques centrales
Jamais les banques centrales ne s’étaient montrées aussi complaisantes dans le monde entier. Cette politique a contribué à prolonger l’environnement de crédit favorable. Elles ont injecté des montants record de liquidités. Les bilans de la BOJ, de la BCE, de la Fed et de la BOC ont augmenté de plus de 10 000 milliards de dollars depuis 2010. Aucune de ces banques centrales n’a indiqué d’une quelconque manière son intention de réduire son bilan à court terme. Au contraire, elles restent engagées dans leur objectif de maintien du niveau de liquidité.
- Prises de risques limitées dans le chef des managements des entreprises
Pour les entreprises, 2007-2008 a été une période extrême, unique dans nos existences. Les entreprises ont vu leurs concurrentes, leurs fournisseurs et leurs clients faire faillite parce qu’ils n’avaient pas de contrôle sur leurs bilans. Ce n’est pas demain la veille que les directeurs financiers, les PDG et les trésoriers adopteront à nouveau ces comportements à risques qui finissent par faire basculer les fondamentaux.
Les entreprises sont traditionnellement assez prudentes dans la gestion de leur bilan. Sur le marché des obligations de qualité, une hausse du taux d’endettement est principalement attribuable à deux phénomènes. Épinglons le rapprochement d’une société bien notée financièrement avec une autre entreprise de taille comparable. Sur la durée, ces types d’acquisition tendent à déboucher sur une baisse prévisible et fiable du taux d’endettement. Par ailleurs, les entreprises de grande qualité, qui n’ont presque pas de dettes, ont choisi de profiter de taux d’intérêt faibles pour s’endetter quelque peu. Ces entreprises affichent toujours un excellent bilan et restent prudentes.
Sur le marché des titres à haut rendement, la baisse des prix des matières premières a entraîné de fortes tensions dans les secteurs de l’énergie, des métaux et de l’exploitation minière. Ces secteurs ont connu en 2016 un niveau très élevé de défauts. Mais, désormais, avec la reprise des prix des matières premières, et alors que les entreprises les plus faibles et vulnérables ont déjà été déclarées en cessation de paiements, le taux d’impayés sur les entreprises ayant survécu baisse rapidement. Les autres secteurs sur le marché du haut rendement n’ont pas connu d’évolution de leur taux d’endettement au cours des 5 dernières années, et les défauts de paiement ont atteint des niveaux historiquement bas.
- La Fed ne devrait pas durcir sensiblement sa politique
Une hausse des taux de la Fed était prévue et a été annoncée le 15 mars, mais ce sont plutôt les raisons avancées par la Fed qui donnent à réfléchir. Ce qui a réellement changé, ce sont les conditions financières. Elles se sont améliorées, qu’il s’agisse de ce que l’on peut observer concernant les cours des actions, les marchés des spreads en général ou sur le dollar U.S. Tout cela offre un peu plus de latitude à la Fed mais le discours ne devrait pas évoluer davantage.
Les prévisions de taux de la Fed devraient rester proches de leur niveau actuel. En revanche, la Fed a conscience des initiatives et des politiques pro-business discutées par l’Administration Trump. Mais la Fed a toujours clairement fait savoir son intention de se fonder sur des chiffres réels. Donc, en attendant que l’horizon se dégage, la Fed adoptera une attitude manifestement plus ferme. Trois hausses de taux cette année, en 2017, cela paraît raisonnable. C’est généralement le scénario intégré par les marchés.
Pourquoi le Japon mérite que l’on s’y attarde
Par Seung Kwak, gérant de Capital Group, Japan Equity
Le 20 mars 2017
Les actions japonaises ont résisté malgré une année 2016 chaotique. Au-delà de l’incertitude, des opportunités s’offrent aux investisseurs.
La croissance léthargique de l’économie japonaise en 2016 a incité les investisseurs à la prudence. Les mesures anti-déflation du Premier ministre Shinzo Abe portent-elles leurs fruits ?
Malgré leurs détracteurs, les « Abenomics » vont dans la bonne direction. Commençons par le premier pilier : la politique monétaire. Pour certains, malgré des mesures de relance énergiques, l’inflation reste nettement en deçà de l’objectif de 2 % de la Banque du Japon (BoJ). Les signes sont pourtant encourageants.
L’inflation sous-jacente dite « core-core » (hors prix alimentaires et de l’énergie) est positive depuis quelques années. Et bien que faible, l’inflation globale semble vouée à remonter progressivement. Cette remontée se fait grâce à la dissipation progressive de certains des principaux freins à son accélération: recul des cours pétroliers et appréciation du yen. La pénurie de main-d’œuvre et la hausse des salaires qui en découle devraient également doper les prix à la consommation. Globalement, les anticipations d’inflation pourraient être bientôt relevées du fait des politiques pro-croissance du nouveau gouvernement américain.
Il faut aussi souligner les efforts soutenus de la Bank of Japan (BoJ) pour sortir le Japon de la déflation. En 2016, elle a ajusté ses politiques, adopté des taux d’intérêt négatifs et engagé des mesures pour pentifier la courbe des taux de l’emprunt d’État japonais (JGB) à 10 ans (elle devrait ainsi maintenir les rendements proches de 0 % jusqu’à ce que l’inflation se rapproche de 2 %).
Le deuxième pilier, la politique budgétaire, reste positif. Le gouvernement a décidé l’année dernière de reporter une seconde hausse de la taxe sur la consommation, et dévoilé un plan de relance budgétaire de 28.000 milliards de yens comprenant des dépenses d’infrastructure et des aides aux régions. Les effets de ce plan seront ressentis au fur et à mesure de son déploiement.
Le troisième pilier, la stratégie de croissance, est particulièrement décisif pour l’avenir à long terme du Japon. Dans ce domaine aussi, les progrès sont visibles. Le gouvernement a notamment instauré une politique de l’offre destinée à stimuler la croissance économique. Sur le marché de l’emploi, il fait la promotion du principe d’égalité de traitement pour réduire l’écart des salaires entre travailleurs réguliers et temporaires, et encourage les entreprises à embaucher davantage de femmes, de personnes âgées et d’étrangers pour accroître l’offre de main-d’œuvre dans l’économie.
D’autres mesures sont destinées à doper la productivité. Le gouvernement cherche à stimuler l’innovation dans des domaines comme l’intelligence artificielle, l’automatisation industrielle, l’Internet des objets et la recherche médicale.
En parallèle, la gouvernance d’entreprise progresse au Japon, non seulement dans la forme mais aussi sur le fond, ce qui devrait contribuer à améliorer le pilotage des entreprises, optimiser l’allocation du capital et, espérons-le, stimuler l’investissement.
Les perspectives de bénéfices des sociétés japonaises se sont redressées. Cela va-t-il durer ?
Les résultats des sociétés devraient rester solides, y compris après 2017. La conjoncture s’améliore au Japon et dans le reste du monde, et le yen reflue, ce qui constitue un contexte favorable aussi bien pour les sociétés orientées sur leur marché intérieur que vers l’international. L’amélioration des ventes et de la rentabilité pourrait leur permettre d’enregistrer des résultats à deux chiffres. En ce qui concerne le yen, les sociétés se montrent prudentes. D’après l’enquête Tankan réalisée en décembre 2016 par la BoJ, elles tablent sur un cours proche de 103 JPY pour 1 USD, ce qui confirme les anticipations d’appréciation du yen par rapport à la précédente enquête. Ces prévisions dépassent également le cours d’environ 113 récemment observé. Si le yen se maintient, alors les résultats pourraient être révisés à la hausse.
Quelle est la formule secrète des meilleures entreprises?
Par Filip Lerno, managing partner Belgium et Colin Price, managing partner de la practice leadership consulting chez Heidrick & Struggles
Le 6 février 2017
Qu’est-ce qui distingue les meilleures organisations des autres ? Qu’est-ce qui fait que celles-ci créent plus de valeur que leurs concurrents dans des contextes équivalents ? Derrière ces questions il y a un énorme enjeu : comment aider les dirigeants et leurs équipes à être ou à devenir plus performants que leurs concurrents ?
Une étude menée par Heidrick & Struggles auprès de plus de 3.000 équipes de dirigeants entre 2014 et 2016 a démontré que les équipes les plus performantes parvenaient à dégager des résultats 23% supérieurs à ceux qui sont à la traîne[i]. Elle a également montré que les 23 entreprises les plus performantes (parmi le FT 500) créaient trois fois plus de valeur en sept ans que les autres.
En y regardant de plus près, il a été établi que le facteur différentiant majeur est la capacité « d’accélérer leur performance », c’est-à-dire la capacité d’imposer leur rythme aux autres. Grandir tout en continuant à être agiles, réduire le « time to value », avoir une approche holistique de la performance et de son accélération : voilà les éléments de la formule secrète pour réussir mieux que les autres !
L’étude du FT 500 a également mis en avant que peu importe le secteur où l’on opère : entre les secteurs les plus et les moins créateurs de valeur, la différence des taux de profits moyens est de 19%. En revanche, au sein d’un même secteur, les organisations performantes réalisent des profits supérieurs de 34% par rapport aux autres. Autrement dit, la qualité de l’exécution crée plus de valeur que les choix stratégiques ! Ce n’est plus où vous allez qui compte, c’est à quelle rapidité vous y arriverez.
En creusant encore plus, « LA formule secrète » a pu être déterminée comme suit :
Accélération = mobiliser, exécuter, transformer, avec agilité !
En interrogeant les dirigeants des organisations les plus performantes, on est frappé par leurs obsessions communes : la simplicité de l’organisation, le sens de l’urgence, le focus sur les talents, l’anticipation grâce aux signaux faibles,… Aucun de ces leaders ne s’intéresse aux process, aux niveaux hiérarchiques, aux contraintes organisationnelles.
En réalité, il existe plusieurs schémas de pensée disruptifs qui distinguent les meilleurs dirigeants.
En voici 4 parmi les plus distinctifs :
- La vigilance : être à l’écoute de tous les signaux faibles et savoir les corréler pour comprendre plus vite que les autres : une forme spécifique d’intelligence, celle du guetteur …
- L’allocation rapide des ressources : peu importe où sont les ressources, tout l’enjeu est d’allouer le plus vite possible les meilleures ressources aux meilleures opportunités. C’est la fin des territoires protégés !
- Le dépassement des paradoxes : plutôt que de choisir entre des alternatives qui s’excluent mutuellement, les meilleurs dirigeants pensent à comment dépasser les paradoxes. Ce n’est plus « soit… ou… », mais « et … et… ».
- Un leadership « liquide » : plutôt que de cultiver le pouvoir et l’autorité, les dirigeants performants s’affranchissent des hiérarchies et libèrent les organisations
Dès lors, nous savons désormais comment observer si ces schémas de pensée sont à l’œuvre dans les organisations, les équipes de direction et les dirigeants. Nous savons également comment aider ces dirigeants à modifier leurs états d’esprit pour adopter des comportements plus performants… Autant dire que toutes les organisations peuvent améliorer leur capacité d’accélération pour devenir plus performantes !
[i] Méthode détaillée par Colin Price et Sharon Toye dans l’ouvrage collectif « Accelerating Performance », éditions Wiley, décembre 2016.
Pour en savoir plus : https://www.accelerating-performance.com/
Les « visions » de Donald Trump
Par Philipp Vorndran, Flossbach von Storch
Le 12 janvier 2017
Donald Trump a nourri les espoirs, annonçant tour à tour la construction d’un grand mur le long de la frontière entre les États-Unis et le Mexique, de fortes baisses d’impôt et la création de millions d’emplois pour les travailleurs américains. Objectifs réalistes ou chimères ?
Les marchés boursiers ont jusqu’à présent été impressionnés par Donald Trump. Ses promesses visant des baisses d’impôt significatives et des investissements massifs dans les infrastructures américaines en décrépitude ont suffi à étayer la remontée des cours.
En revanche, les craintes de bon nombre d’investisseurs au cours de la campagne semblent s’être volatilisées. Elles portaient notamment sur la construction d’un mur le long de la frontière mexicaine ou l’imposition de droits de douane répressifs sur les produits de pays exportateurs trop performants, la Chine en tête. Le protectionnisme représenterait un grand danger pour l’économie mondiale et, par conséquent, pour les marchés d’actions. Alors, la question qui se pose est la suivante : les déclarations de Donald Trump ont-elles déjà été pardonnées et oubliées ?
On peut supposer que le futur président veut réussir à tout prix. N’oublions pas que Donald Trump est d’abord et surtout un entrepreneur avant d’être un homme politique. En regardant le budget américain d’un peu plus près, on s’aperçoit que l’impôt sur le revenu représente près de la moitié des rentrées d’argent, soit la part du lion des recettes du gouvernement. Les baisses d’impôts annoncées par Donald Trump risquent donc d’avoir un fort impact négatif sur le budget américain. En effet, cette mesure à elle seule nécessiterait d’être financée par une hausse des nouveaux emprunts d’environ deux points de pourcentage. En chiffres, cela correspondrait à plus de 100 milliards de dollars d’emprunts.
Lorsque l’on y ajoute les 4% supplémentaires de nouveaux emprunts indispensables, la dette publique américaine s’établirait à plus de 6% du produit intérieur brut (PIB) l’année prochaine. Et cela ne tient même pas compte des investissements dans les infrastructures prévus par Donald Trump !
Donald Trump a annoncé qu’il prévoyait de faire appel à des investisseurs privés afin que ces investissements n’aient que peu ou pas d’incidence sur les recettes fiscales, mais aucune précision n’a été apportée à ce jour. Finalement, on peut penser que la majeure partie de ces investissements sera financée par un élargissement de la dette.
Si le nouveau gouvernement met en œuvre ses plans d’investissement, stimulant ainsi l’économie américaine, il serait intéressant de voir la réaction de la Réserve fédérale américaine (Fed). Dans ce cas, la Fed serait obligée d’augmenter les taux d’intérêt qu’elle contrôle. Elle pourrait même augmenter ses taux plus rapidement que ce qu’il avait été anticipé. La victoire de Donald Trump a (légèrement) changé la donne, et cela se voit déjà sur le marché obligataire. Les rendements des bons du Trésor américain à dix ans ont décollé de leur plancher estival de 1,4 % pour atteindre 2,4 %.
Il est même possible que les rendements du Trésor grimpent jusqu’à 3 % pendant un temps. Le dollar US s’apprécierait alors en conséquence et plomberait les exportations.
Les mesures budgétaires de Donald Trump pourront stimuler l’économie américaine, mais uniquement sur le court terme. La vigueur du billet vert et la hausse des taux d’intérêt formeraient une barrière naturelle à la croissance.
Il serait bien possible que Donald Trump tire parti de ces événements en rejetant la faute sur la Réserve fédérale et sa présidente, Janet Yellen. Étant donné que le mandat de cette dernière prend fin en 2018, le président américain pourrait alors privilégier une personne mieux disposée à son égard, susceptible de soutenir ses plans d’investissement « de manière constructive ». C’est la situation à laquelle nous assistons au Japon, où le gouverneur de la Banque du Japon, Haruhiko Kuroda, suit presque à la lettre les instructions du Premier ministre Shinzo Abe.
Les politiques d’investissement de Donald Trump vont certainement avoir des conséquences. Les gouvernements européens vont attendre de voir si ces politiques produisent l’effet désiré en termes de croissance ; les gouvernements italien, espagnol, français et surtout grec vont surveiller la situation de près. Les réductions de dépenses réclamées par les grandes puissances économiques de la zone euro pourraient être délaissées en cas de succès des politiques de Donald Trump.
Une hausse sensible des taux d’intérêt en Europe est cependant peu probable sur le long terme. Les pays lourdement endettés de la zone ne peuvent tout simplement pas se le permettre !
Des taux d’intérêt appelés à rester négatifs pour les détenteurs de comptes bancaires suisses
Par Mario Eisenegger, associate investment specialist, M&G Investments
Le 12 décembre 2016
La nouvelle a fait l’effet d’une bombe lorsque Postfinance, la première banque suisse dite « trop grosse pour faire faillite » (« too-big-too-fail »), a annoncé l’instauration de taux d’intérêt négatifs pour ses clients détenteurs de comptes de dépôt de plus de 1 million de francs suisses. Beaucoup se demandent désormais combien de temps cela prendra avant que les banques n’appliquent cette même formule aux épargnants. Nous serions portés à croire que cela ne sera pas très long compte tenu de la situation toujours difficile qui est celle des banques suisses.
Une partie de l’économie suisse est notamment tributaire de l’Europe en raison d’importantes relations commerciales. Pour cette raison, la Banque nationale suisse (BNS) s’emploie à travailler sur le taux de change EUR/CHF via une combinaison de taux d’intérêt négatifs et d’interventions sur le marché des changes. Durant les deux semaines qui ont suivi l’élection présidentielle américaine, les dépôts à vue de la BNS, le plus important moyen de financement des achats de devise et par là même une indication des interventions sur le marché, ont augmenté de plus de 6 milliards de francs suisses. Afin de replacer ce montant dans son contexte, il représente à peu près la moitié des interventions observées au cours de la semaine qui avait précédé l’abandon du taux plancher de 1 euro pour 1,20 franc suisse en janvier 2015. Le franc suisse, connu pour être une devise refuge, a été considéré comme une monnaie satisfaisante pour permettre aux investisseurs de se protéger contre la politique de relance de Donald Trump.
Il est peu probable que la BNS relève ses taux avant que la Banque centrale européenne (BCE) ne mette fin à son programme d’assouplissement quantitatif compte tenu des pressions haussières que cela exercerait sur la devise helvétique. Dans la mesure où la BCE devrait laisser inchangés ses taux d’intérêt négatifs et prolonger son programme de « QE » d’au moins 6 mois à l’occasion de sa prochaine réunion en décembre, la politique de taux fortement négatifs de la BNS semble appelée à persister.
Le secteur bancaire suisse pâtit de l’environnement de taux d’intérêt négatifs et les principales banques helvétiques ont, jusqu’à une époque récente, hésité à répercuter ces taux négatifs sur leurs clients particuliers de crainte de voir leurs dépôts fondre comme neige au soleil. Les banques suisses sont confrontées au problème classique d’une courbe des taux plate qui a érodé les marges d’intérêt nettes de leur activité d’intermédiation qui consiste pour le sujet qui nous concerne à emprunter à court terme et prêter à plus long terme (transformation des échéances). En tant que transformatrices des échéances, les banques sont d’importantes bénéficiaires de primes de terme et l’aplatissement de la courbe des taux a constitué un autre facteur d’érosion de la rentabilité des banques. Comme l’illustre le graphique ci-dessous, la courbe des taux suisse est relativement plate par rapport aux courbes britannique et américaine, et ce, même après la récente baisse des emprunts d’État à long terme. Les courbes des emprunts d’État américains et britanniques ont ainsi été particulièrement touchées compte tenu de l’hypothèse du marché selon laquelle les gouvernements des deux pays sont susceptibles d’accroître leurs émissions de dette afin de financer des dépenses budgétaires.
Même si la courbe des taux d’intérêt suisse est susceptible de s’aplatir encore un peu plus sous l’effet de facteurs techniques tels que les différentiels de rendement entre les pays développés, l’environnement économique fondamental devrait toutefois continuer d’exercer des pressions baissières sur les rendements. La croissance économique a certes surpris par sa vigueur en dépit de la surévaluation de la devise, mais le PIB réel suisse demeure cependant inférieur à son moyenne à long terme. La BNS prévoit une croissance du PIB de l’ordre de 1,5 % en 2016 et n’anticipe pas une forte accélération au cours des années suivantes.
L’économie est également encore loin de générer des tensions inflationnistes et est même en déflation depuis deux ans. Si une inflation globale positive est probable au cours des mois à venir à la faveur de la hausse du prix du pétrole, l’inflation sous-jacente demeure quant à elle peu élevée, ce qui devrait limiter tout potentiel d’accélération de l’inflation au cours des prochaines années.
Concernant l’évolution de la réglementation, les banques suisses sont également confrontées à des exigences de fonds propres plus strictes pour leurs actifs pondérés en fonction de leur risque et à des ratios d’endettement plus contraignants que leurs concurrentes étrangères, la taille de certaines banques les rendant en effet systémiquement importantes pour l’économie helvétique. Les exigences plus rigoureuses en matière de fonds propres pour les banques suisses se sont même vues attribuer un nom sur la scène réglementaire financière : « Swiss finish ».
Dans ce contexte, les banques suisses sont désormais contraintes de trouver de nouveaux moyens afin de se doter de modèles économiques rentables. Nous avons déjà pu voir certaines banques répercuter les taux négatifs sous la forme d’une augmentation de leurs commissions et taux d’emprunt. Mais, maintenant que Postfinance a brisé la glace en appliquant directement des taux négatifs aux dépôts de ses clients particuliers, nous nous attendonss à ce que d’autres banques lui emboitent le pas. Des taux d’intérêt négatifs pourraient ainsi devenir la nouvelle normalité pour les détenteurs de comptes suisses, tout au moins sur un horizon à moyen terme.
Pourquoi investir en Afrique Sub-Saharienne?
Par Capital Group
Le 30 novembre 2016
Les marchés obligataires d’Afrique subsaharienne offrent un potentiel de croissance supérieure, des rendements structurellement plus élevés, une corrélation limitée avec les autres marchés émergents et un potentiel de contraction durable des rendements. Pourtant, conjuguée à la fragilité des marchés obligataires de ce continent, la diversité peut constituer un véritable défi pour les investisseurs à long terme. Nous pensons qu’une recherche sur le terrain et une
analyse macro-économique exhaustive sont le meilleur moyen pour déterminer les perspectives fondamentales de chaque pays d’après les valorisations des obligations.
Une croissance ininterrompue
Alors que de nombreux pays affichent depuis un moment une croissance en berne et des taux d’intérêt négatifs, l’Afrique subsaharienne continue d’enregistrer une croissance supérieure à 5%, ce qui est élevé, y compris pour un pays émergent. Ce dynamisme offre un soutien pour assurer le service de la dette.
Des rendements structurellement supérieurs
Comme d’autres économies frontières, les pays d’Afrique subsaharienne présentent pour la plupart un faible niveau de développement et des risques très spécifiques plus marqués. Cela se reflète généralement dans leurs rendements supérieurs, qui ont également tendance à être plus élevés au sein de leur groupe de notation, où ces caractéristiques devraient déjà être prises en compte. Prenons un exemple : malgré une meilleure note de solvabilité, un endettement équivalent et un taux de croissance supérieur à celui du Honduras (à 5,5 %, contre 3,5 %), le Kenya affiche des rendements supérieurs de 200 points de base environ.
Des résultats moins corrélés à ceux d’autres marchés émergents
La plupart des marchés obligataires d’Afrique subsaharienne, notamment les marchés locaux, présentent des corrélations inférieures à celles généralement constatées avec les autres marchés émergents. Ainsi, celle entre le Nigeria et des marchés émergents traditionnels comme la Turquie ou le Brésil est souvent nulle, voire négative, contre un niveau proche de 0,4-0,6 avec l’Afrique du Sud, considérée comme un marché mature d’Afrique subsaharienne. Les devises d’Afrique subsaharienne sont elles aussi faiblement corrélées aux marchés émergents plus traditionnels. Ces marchés peuvent avoir un impact positif au sein du portefeuille, tout en réduisant le risque global de ce dernier par le biais des corrélations plus limitées.
Potentiel de contraction durable des rendements et des spreads
À mesure que le niveau de vie progresse et que le secteur privé se développe, la demande de services financiers s’accroît, ce qui alimente la demande d’actifs financiers libellés en devise locale et contribue, avec l’amélioration des institutions (ex. : banques centrales indépendantes), à l’élargissement et à l’approfondissement des marchés locaux. À mesure qu’un marché local gagne en profondeur et s’ouvre aux investisseurs étrangers, les taux d’intérêt réels peuvent reculer et il peut évoluer vers un modèle de marché émergent plus traditionnel, généralement plus diversifié et avec un secteur financier plus développé. De la même manière, à mesure que les économies de marché émergentes évoluent vers un modèle de marché développé, on peut s’attendre à une amélioration de leur note de solvabilité (à long terme) et à une contraction de leurs spreads.
Un continent pluriel
Malgré les avantages potentiels offerts par les obligations d’Afrique subsaharienne, les nouveaux investisseurs peuvent avoir des difficultés à appréhender l’immensité de l’Afrique. Ce continent compte 1,1 milliard d’habitants (soit 17 % de la population mondiale) répartis dans 54 pays et qui parlent 2 100 langues. Sa superficie dépasse celle de la Chine, de l’Inde, des États-Unis et de la majeure partie de l’Europe réunis. Il est divisé en cinq régions distinctes : le nord, l’ouest, le sud, l’est et le centre, chacune affichant un niveau de développement économique propre.
Étant donné la nature variée du continent, les investisseurs doivent tenir compte de plusieurs éléments importants. La gouvernance et la corruption en font partie. Selon l’organisme mondial de surveillance de la corruption Transparency International, sur les 10 pays jugés les plus corrompus dans le monde en 2015, six figuraient en Afrique subsaharienne.
Un autre aspect est la diversification économique. Bon nombre de pays d’Afrique subsaharienne, comme le Nigeria et le Gabon, sont tributaires des exportations de pétrole et d’autres matières premières. Cela peut être problématique puisqu’un pays trop dépendant des matières premières peut avoir des difficultés à rembourser sa dette lorsque leurs prix reculent. Cela étant, plusieurs pays sont importateurs de pétrole. C’est le cas de la Côte d’Ivoire, du Kenya et du Sénégal. Enfin, les perspectives macroéconomiques varient sensiblement d’un pays à l’autre de la région, des pays qui sont jugés en bonne voie (Côte d’Ivoire) à ceux qui sont en plus grande difficulté (Zambie).
Comment l’investisseur peut-il exploiter ces opportunités, mais aussi ces risques ? La première chose à retenir est que chaque pays d’Afrique est différent, que ce soit sur le plan économique, politique, religieux, ethnique, culturel, et bien d’autres aspects encore. Le danger est d’adopter une approche d’investissement universelle, sans appréhender les forces et faiblesses de chaque pays de ce continent si éclectique.
Et bien sûr, il est essentiel de soupeser les valorisations absolues et relatives des obligations au regard des perspectives fondamentales de chaque pays.
Les investisseurs doivent accepter les fluctuations des prix
Par Philipp Vorndran, Capital Market Strategist chez Flossbach von Storch
Le 25 octobre 2016
Les investisseurs ont peur de la volatilité ou, en d’autres termes, des fluctuations des prix. Ils évitent donc les investissements dont les prix pourraient connaître de fortes fluctuations. C’est un problème dans un monde sans intérêt, car une stratégie d’évitement comme celle-ci signifie de dire adieu aux rendements sur le long terme. Une inflation, même modérée, suffit à éroder lentement mais sûrement la valeur de votre épargne.
Les investisseurs ont deux possibilités. Soit ils abandonnent toute idée de rendement et déposent leur argent à la banque, soit ils apprennent à faire la distinction entre de simples fluctuations de prix et un réel risque d’investissement. La seconde option est la plus intelligente des deux sur le long terme.
Pour l’essentiel, le risque réel auquel l’investisseur est confronté est celui de ne pas atteindre ses objectifs d’investissement, par exemple de se préparer une retraite suffisante. Plus l’investisseur a de temps, moins il a besoin de s’inquiéter des fluctuations de prix. En d’autres termes, moins il est risqué pour lui d’investir en actions, qui ont un rendement attendu supérieur à celui des obligations. L’analyse historique montre qu’un portefeuille d’actions répliquant l’indice d’actions américain S&P 500 ou l’indice Dax n’a jamais enregistré de perte absolue sur une période de dix à douze ans. Dès lors, des fonds dont l’investisseur n’a pas besoin pour une période prolongée peuvent être investis en toute confiance en actions ou en obligations d’entreprise à haut rendement.
L’un des problèmes est que, depuis plusieurs décennies, les investisseurs ont été gavés de l’idée que volatilité et risque sont une seule et même chose et sont de ce fait intimidés. Les universitaires aiment tout particulièrement à renvoyer à cette association apparemment simple. Après tout, les fluctuations des prix sont faciles à mesurer et conviennent bien à la description du concept abstrait de « risque ». Toutefois l’argument présente un certain nombre de failles.
Par exemple, la volatilité d’un investissement est toujours particulièrement élevée si son prix vient à chuter fortement. Selon la théorie, lorsque le prix est « bas », le risque est automatiquement élevé. Aucun investisseur intelligent ne peut accepter cette contradiction. Pourquoi l’achat d’une action au prix de 50 serait-il plus risqué que l’achat au prix de 100 si la qualité de la société n’a pas changé ?
L’utilisation de la volatilité comme mesure du risque est également trompeuse. Si un épargnant a déposé plus que le montant légalement garanti de 100.000 euros sur un compte dans la mauvaise banque, ce n’est pas sans risque, même si la valeur de son épargne ne fluctue pas. En outre, un Bund allemand à dix ans avec un rendement de moins 0,1 pour cent n’est pas non plus exempt de risque, bien que la théorie ait paradoxalement un point de vue différent, puisqu’après tout la perte à l’échéance est « certaine ».
L’horizon d’investissement constitue un facteur nettement plus important lors de l’évaluation du risque. Un investisseur qui effectue des placements à long terme doit s’efforcer d’ignorer les fluctuations des prix, qui exagèrent généralement le véritable niveau de risque. Il doit plutôt se concentrer sur la qualité des investissements et leur valorisation. Les investisseurs qui achètent, à prix raisonnable, des actions de sociétés présentant des perspectives de bénéfices à long terme, un bilan solide et une équipe dirigeante capable peuvent tranquillement attendre que la qualité sous-jacente se reflète dans des prix en hausse. Ils sont également récompensés par des paiements de dividendes réguliers.
Les investisseurs en quête de rendements attractifs sur le long terme n’ont d’autre choix que d’accepter les fluctuations des prix. Malheureusement, il n’y a plus d’alternative.
Comment l’assouplissement quantitatif fausse les prix
Par Yves Longchamp, Head of Research chez ETHENEA
Le 6 septembre 2016
Un programme d’assouplissement quantitatif (QE) consiste à acheter une grande quantité d’actifs, quel qu’en soit le prix. Par conséquent, les prix perdent leur précieuse dimension informative, qui permet aux investisseurs d’opérer un choix judicieux entre différentes classes d’actifs.
Il n’est pas logique que les rendements des obligations allemandes d’échéance longue soient négatifs ni que les rendements des obligations italiennes soient inférieurs à ceux de leurs homologues américaines. Il est encore plus choquant de constater l’incapacité de la Banque d’Angleterre à acheter un nombre suffisant de Gilts pendant les premiers jours de la mise en œuvre de son nouveau QE, alors que le prix offert était nettement supérieur à ceux du marché. Il est par ailleurs notoire que les Gilts sont surévalués.
Les programmes d’assouplissement quantitatif sont conçus différemment en fonction des banques centrales et incluent des obligations souveraines, des obligations d’entreprises, des titres adossés à des actifs (Par exemple, 80 milliards d’euros par mois pour la Banque centrale européenne et 80.000 milliards de yens par mois pour la Banque du Japon) et des actions à divers degrés. Leur dénominateur commun est que les achats se concentrent essentiellement sur les obligations souveraines.
Les rendements des emprunts d’État sont déterminants dans le cadre de l’allocation d’actifs, car ils font office de taux sans risque et constituent dès lors la base de la valorisation de tous les autres actifs. Par conséquent, la distorsion de ce marché spécifique, renforcée par les politiques de taux d’intérêt négatifs, se propage aux autres actifs, ce qui donne lieu à des anomalies de valorisation sur tous les marchés financiers.
Selon le Financial Times, la valeur de marché des obligations à rendement négatif s’élève à 13.400 milliards de dollars[1], un chiffre impressionnant qui démontre l’ampleur de la distorsion des prix sur ce segment de marché clé. Outre les achats susmentionnés par les banques centrales qui faussent directement les prix des actifs risqués, les primes de risque et de liquidité sont également altérées par la soif de rendement des investisseurs, qui les force à s’exposer à plus de risque pour un rendement équivalent.
Indépendamment de l’importance de la distorsion des prix sur chaque marché individuel, les prix des actifs restent cohérents les uns par rapport aux autres. Si des anomalies de prix peuvent être observées dans toutes les classes d’actifs, les marchés financiers se comportent de manière cohérente et synchronisée, selon leur propre logique.
Prix ridicules
Nous nous demandons combien de temps cette situation va durer et quelle proportion elle peut atteindre. En un mot, elle perdurera tant que les banques centrales conserveront leur crédibilité, c’est-à-dire tant qu’elles auront la capacité et la volonté de se montrer convaincantes aux yeux des acteurs du marché. Elle se prolongera aussi longtemps que la banque centrale la plus puissante et, de fait, la plus crédible, du monde sera en mesure de fixer les prix à des niveaux ridicules. Si cela se vérifie, les taux sans risque devraient converger vers un niveau plancher et les prix des actifs risqués augmenter presque indépendamment des fondamentaux économiques. Comme dans les économies communistes, le résultat est, à terme, l’égalité et non l’équité.
Trois symptômes potentiels pourraient indiquer que la phase terminale est atteinte.
- Tout d’abord, la crédibilité des banques centrales et des gouvernements est directement remise en cause, entraînant dès lors une hausse et une divergence des rendements des emprunts d’État à mesure que le risque est réévalué.
- Ensuite, le marché des changes absorbe une partie des anomalies de prix en rééquilibrant les économies et les marchés via d’importants ajustements des taux de change.
- Pour terminer, la perte de crédibilité est directement reflétée par la perte de pouvoir d’achat au niveau domestique, c’est-à-dire par l’inflation. Il convient de noter que ce type d’inflation n’est pas imputable à un problème de trop d’argent pour trop peu de biens demandés, comme c’est généralement le cas, mais plutôt à un manque de confiance dans les institutions susceptible d’engendrer une hyperinflation, comme nous le rappellent les événements extrêmes qui se sont déroulés en Allemagne dans les années 1920, en Hongrie en 1946 et plus récemment au Zimbabwe à la fin des années 2000 et au Venezuela aujourd’hui.
L’or, une bonne couverture contre un arrêt brutal du système
Si nous ne décelons aucun de ces symptômes actuellement, il est possible de se protéger contre cette éventualité en investissant dans l’or, un actif qui n’est pas sous le contrôle direct des institutions et qui représente une alternative aux liquidités et dont le coût a augmenté de manière impressionnante avec l’introduction des taux d’intérêt négatifs.
Le cas du Japon est intéressant à de nombreux égards et constitue une source d’espoir dans la perspective de cette analyse. Pendant plus de deux décennies, le Japon a fait face à une «économie zéro», c’est-à-dire une économie où la croissance, l’inflation et les rendements ont été faibles. Depuis 1980, le ratio dette publique/PIB a été multiplié par 5, atteignant environ 250% actuellement selon le FMI, un niveau intenable. Par ailleurs, le gouvernement et la banque centrale du Japon ont mis en place diverses politiques qui n’ont, pour l’essentiel, eu aucun effet: les rendements n’ont pas été revalorisés et la croissance et l’inflation n’ont pas fait leur retour. Le japonais a évolué en sens inverse des intentions de la Banque du Japon, indiquant que les investisseurs testent la crédibilité de l’institution, mais sans déclencher de crise de crédibilité en bonne et due forme. La japonisation des marchés financiers et des pays occidentaux pourrait dès lors s’avérer être une situation bénigne.
Le recours généralisé à des politiques monétaires non conventionnelles dans les économies développées, en particulier le QE, a donné lieu à des anomalies de prix massives. Si les prix des actifs sont faussés, ils sont néanmoins cohérents les uns par rapport aux autres. Tant que les banques centrales conserveront leur crédibilité, la situation pourrait perdurer. Aucun symptôme de phase terminale n’est actuellement observé, ce qui signifie que la convergence des prix devrait se poursuivre. L’or représente une bonne couverture contre un arrêt brutal de ce système, à moins que nous ne devenions tous japonais.
[1] http://www.ft.com/cms/s/0/973b6060-60ce-11e6-ae3f-77baadeb1c93.html#axzz4HZXmWYWF
Brexit et taux d’intérêts négatifs : Quel impact sur l’économie japonaise ?
Par Seung Kwak, portfolio manager Capital Group
Le 8 août 2016
Les taux d’intérêt japonais sont entrés en territoire négatif. Pourtant, le yen s’est fortement apprécié. Comment cela affectera-t-il les exportateurs japonais ?
La politique des taux d’intérêt négatifs de la banque centrale du Japon est très controversée, même dans l’Archipel. En effet, si le yen s’est renchéri, il n’y a pas eu d’impact positif sur les dépenses des entreprises ni d’accélération visible de la croissance des prêts, malgré des taux historiquement bas, voire négatifs.
Concernant les exportateurs japonais, l’appréciation du yen affectera certainement leurs résultats à court terme. Fin juin, le dollar s’établissait à 102 yens, contre près de 120 yens l’an dernier. La variation annuelle a donc affecté les résultats. Voici trois ans, toutefois, alors que le dollar cotait 80 yens, un certain nombre d’entreprises japonaises ont ajusté leur base de coûts selon un scénario où le dollar valait de 80 à 85 yens. Par conséquent, si le choc à court terme affectera leurs résultats à court terme, à long terme (à 1 dollar = 100 yens), les résultats des exportateurs japonais se maintiendront à des niveaux compétitifs.
D’aucuns redoutent que les taux d’intérêt négatifs aient un impact négatif sur les banques, qui représentent une partie importante du marché japonais. Comment cette situation nuira-t-elle à leur rentabilité ?
Les taux d’intérêt négatifs pèsent certainement sur les perspectives de rendement des banques japonaises, notamment parce que les taux d’intérêt de leurs prêts domestiques sont affectés. Néanmoins, les spreads des taux domestiques et les bénéfices sur ces taux ne représentent qu’environ 25 % des profits des grandes banques. De nombreuses banques ont modifié leur modèle d’entreprise pour gagner de l’argent sur les commissions et les frais, à l’instar des trusts, des fonds communs de placement, ou des gestionnaires d’actifs. D’autres banques développent leurs opérations à l’étranger.
Nos analystes spécialisés dans les banques nippones modifient certaines de leurs recommandations sur le secteur, faisant évoluer le positionnement sur les géants bancaires vers des institutions financières plus spécialisées, susceptibles de bénéficier de certaines tendances. Citons entre autres la croissance de la gestion d’actifs et la transition des prêts non liés aux spreads vers des activités basées sur les commissions et les frais.
Si l’on considère une période de trois à cinq ans, l’instauration de taux d’intérêt négatifs n’est pas un objectif en soi, mais un moyen de pratiquer la reflation. Si, grâce à sa politique de taux d’intérêt négatif, le Japon parvient à infléchir cette dynamique déflationniste dans un délai d’un à deux ans, cela pourrait déboucher sur un boom pour les valeurs financières japonaises.
Comment le Brexit affectera-t-il l’économie japonaise ?
Le Brexit est un événement très récent. Il y a un risque de contagion du secteur financier mondial. Les autorités japonaises, tout comme les banques centrales, ont mis en place les filets de sécurité nécessaires, afin de fournir des liquidités en cas de contraintes sur les activités de financement. Mais le Brexit est un processus en cours. Un processus qui ne s’achèvera que dans deux ans. Entre-temps, la question reste de savoir si d’autres États membres de l’UE suivront l’exemple du Royaume-Uni.
Un aspect positif pour le pays est que le gouvernement Abe est cohérent et possède un mandat fort pour ramener le Japon sur le chemin de la croissance nominale. Ces 5 à 10 dernières années, les hauts représentants du gouvernement japonais (y compris le Premier ministre) ont changé très fréquemment. Mais sous Abe, qui bénéficie du soutien de la population, le pays se trouve actuellement dans une situation bien différente de celle de l’Europe, plus volatile.
Le marché pourrait réévaluer le Japon s’il peut être démontré que des facteurs internes portent la croissance japonaise, malgré la confusion qui règne en Europe. Parmi ces facteurs, figurent les politiques de croissance telles que la réforme du travail et l’emploi des travailleurs étrangers dans certains secteurs spécifiques.
Les FinTechs mettront en danger le secteur financier
Par PwC
Un récent rapport publié par PwC évalue l’émergence des nouvelles technologies dans le secteur des services financiers et leur incidence sur les acteurs du marché. Selon ce rapport, 83 % des entreprises financières traditionnelles estiment qu’elles risquent de perdre des parts de marché en faveur des entreprises FinTech, ces nouvelles entreprises de technologie financière indépendantes. Plus stupéfiant encore, ce pourcentage grimpe jusqu’95 % dans le cas des organismes bancaires.
Le rapport, intitulé « Blurred Lines: How FinTech is shaping Financial services », répertorie les réponses de 544 CEO, directeurs des départements Innovation, CIO et cadres supérieurs spécialisés en transformation numérique et technologique dans le domaine des services financiers dans 46 pays. 23 % des acteurs traditionnels actuellement en place sur le marché estiment que leurs parts de marché pourraient se voir menacées, face à l’émergence des entreprises FinTech. Et ces entreprises FinTech prévoient d’ailleurs de s’emparer de 33 % des parts de marché des entreprises classiques présentes sur le marché.
C’est au niveau des services bancaires et des moyens de paiement que la pression est la plus forte
L’étude souligne que la menace est la plus marquée au niveau des entreprises actives dans les services bancaires et les moyens de paiement. Selon les participants à l’enquête spécialisés dans le segment des transferts de fonds et moyens de paiement, les FinTech pourraient, au cours des cinq prochaines années, grignoter jusqu’à 28 % de leurs parts de marché, comparé à 24 % pour les organismes bancaires. En matière de gestion de fortune et gestion de portefeuille, ce pourcentage se monte à environ 22 %, comparé à 21 % pour le secteur des assurances.
Principales menaces émanant des entreprises FinTech
Principale menace pointée par deux tiers (67 %) des entreprises issues du secteur financier, la pression sur les marges bénéficiaires, suivie en deuxième position par la perte de part de marché (59 %). Une des principales manières dont les entreprises FinTech supportent le point de pression sur les marges par des processus novateurs consiste à améliorer les fonctions-échelons au niveau des coûts d’exploitation. À titre d’exemple, la tendance à utiliser des plateformes basées sur le cloud réduit non seulement les coûts initiaux mais aussi les frais d’infrastructure en cours.
La technologie Blockchain, inexploitée et sous-estimée par les entreprises de services financiers
La Blockchain, technologie de stockage et de transmission d’informations financières, transparente et sécurisée, représente le prochain bond qui va véritablement révolutionner l’optimisation des processus d’entreprises. Selon PwC, la concurrence dans le domaine des services financiers pourrait, à l’avenir, subir des mutations radicales, les réserves de bénéfices actuels étant perturbées et redistribuées aux propriétaires des nouvelles plateformes Blockchain, d’une efficacité redoutable. Cette technologie révolutionnaire crée non seulement des économies de coûts colossales mais aussi des avancées considérables en termes de transparence. Et malgré tout, les participants à l’étude la classent au bas de l’échelle de leurs priorités.
Bien que la majorité d’entre eux (56 %) reconnaît l’importance de cette nouvelle technologie, 57 % affirment être hésitants ou peu enclins à s’engager à l’utiliser.
« Confrontées à des technologies novatrices, les leaders mondiaux réussissent en les intégrant rapidement au tissu même de leur entreprise, comme partie intégrante de leur processus business as usual, déclare Filip De Wolf, Technology Consulting Partner chez PwC Belgique.
« La technologie Blockchain et ses nouvelles plateformes décentralisées offrent aux sociétés du secteur financier une occasion tout à fait unique de transformer leur mode de fonctionnement. Selon nous, le manque de compréhension de la Blockchain et son effet déstabilisateur entraînent des risques considérables pour les modèles économiques existants et les entreprises qui ne prennent pas le temps d’en comprendre l’impact sous-estimeront les opportunités et les menaces que cette technologie peut représenter. »
Défis pour les FinTech et les acteurs actuels sur le marché
L’étude de PwC indique que le mode de collaboration le plus courant avec les FinTech est le partenariat conjoint (32 %), fait révélateur, selon PwC, que les entreprises du secteur financier ne sont pas prêtes à aller dans ce sens, ni à investir à fond dans les FinTech.
Lorsqu’on leur demande quels défis représentent pour elles les FinTechs, 53 % des acteurs présents sur le marché citent la sécurité informatique, l’incertitude réglementaire (49 %) et les différences au niveau des modèles économiques (40 %).
Dans le cas des FinTechs, les différences de gestion et de culture (54 %), les processus opérationnels (47 %) et l’incertitude réglementaire (43 %) étaient censés être considérés comme les trois défis-clés à relever par les entreprises FS classiques.
Filip De Wolf, Technology Consulting Partner chez PwC Belgique, précise :
« Les FinTechs révolutionnent le secteur des services financiers de l’extérieur. D’après PwC, d’ici 3 à 5 ans, les investissements cumulés en FinTech dans le monde pourraient bien être supérieurs à 150 milliards USD et les institutions financières et les entreprises de technologie se disputent pour entrer sur le terrain de jeu. Vu que les frontières entre la finance traditionnelle, les sociétés de technologie et les entreprises de télécommunication sont en voie de s’estomper, les solutions novatrices sont innombrables et il n’y a évidemment pas de solution directe pour naviguer dans les méandres de ce nouveau paysage technologique », poursuit Filip.
Gregory Joos, Leader Risk & Regulatory au sein du Département Financial Services de PwC Belgique conclut : « Vu le rythme de développement soutenu des technologies, les acteurs actuellement présents sur le marché ne peuvent tout simplement pas se permettre d’ignorer les FinTechs. Or, notre étude laisse apparaître que 25 % des entreprises classiques, soit un pourcentage non négligeable, n’ont pris absolument aucune mesure concernant les FinTechs. Au rythme effréné où se produisent les changements, aucune entreprise de services financiers ne peut se reposer sur ses lauriers. »
Lien vers l’étude (en anglais)
Les investisseurs ont des anticipations irréalistes !
Par Schroders
Une enquête Schroders Global Investor Study 2016, conduite auprès de 20 000 investisseurs basés dans 28 pays, a mis en évidence des anticipations irréalistes, et en particulier au sein de la génération du Millénaire (personnes âgées de 18 à 35 ans). L’enquête met aussi en évidence une trop grande dépendance des investisseurs belges envers les retraites publiques, ainsi que des anticipations de revenus irréalistes pour les projets d’investissement destinés à accroître leur épargne- retraite. Néanmoins, la récente réforme des systèmes de retraite belges sonne bel et bien comme un avertissement.
Des attentes disproportionnées en matière de revenu
Selon l’enquête, les anticipations de revenu et de performance à long terme des investisseurs sont beaucoup trop élevées. En moyenne, le niveau de revenu souhaité à travers le monde est de 9,1 %, alors que les taux d’intérêt avoisinent des niveaux historiquement faibles dans de nombreux pays, ce qui expose à un grand risque de déception. Les anticipations de la génération du Millénaire (personnes âgées de 18 à 35 ans) sont encore moins réalistes, avec un revenu minimal moyen souhaité de 10,2 % par an, contre 8,4 % pour les investisseurs de 36 ans et plus.
En moyenne, les investisseurs belges souhaitent un revenu de 6,6 % (contre 7,9 % en Europe). Plus des trois quarts (77%) seraient satisfaits avec un revenu inférieur à 10%. Une petite proportion (7 %) souhaiterait un minimum de 15 %, ce qui est irréaliste.
En moyenne, la génération du Millénaire belge souhaite un revenu de 8,0%. Plus des trois cinquièmes (61 %) seraient satisfaits avec un revenu inférieur à 10 %. Une petite proportion (10 %) souhaiterait un minimum de 15 %, ce qui est irréaliste.
Biais en faveur des investissements à court terme
L’enquête a aussi mis en évidence le biais des investisseurs en faveur des investissements à court terme. Les investisseurs internationaux ont tendance à conserver leurs investissements un peu plus de trois ans en moyenne (3,2 ans). Si ce type d’horizon se prête bien aux marchés des liquidités et de certains types d’obligations, il se révèle souvent trop court pour lisser l’effet de volatilité accompagnant les investissements en actions. Moins d’un cinquième (18 %) des investisseurs déclarent rester investis pendant au moins cinq ans, alors que c’est la durée minimale réaliste pour un placement sur les marchés d’actions, et près d’un tiers (31 %) ont une perspective très courte, conservant leurs investissements moins d’un an. Une fois de plus, cette tendance est plus marquée chez la génération du Millénaire, qui investit en moyenne 18 mois de moins que les investisseurs d’au moins 36 ans (2,3 ans vs. 3,9 ans).
En Belgique, les investisseurs restent en moyenne investis un peu plus longtemps que dans les autres pays, avec une période d’investissement d’environ quatre ans (3,8 ans), contre 3,2 ans à travers le monde. Un quart (25 %) ont une perspective à très court terme, investissant au maximum un an. Un peu plus (27 %) investissent entre 1 et 3 ans, et près de la moitié (48 %) investissent plus de 3 ans.
Investir pour des besoins financiers immédiats
Malgré ce manque de connaissances apparent, les résultats ont indiqué que les investisseurs sont toujours en quête de revenus. Les investisseurs internationaux ont avancé trois raisons principales pour investir, reposant toutes sur les revenus actuels ou futurs : compléter leur retraite, réinvestir leurs revenus et accroître leur portefeuille, ainsi que compléter leur salaire. L’enquête montre toutefois que la génération du Millénaire préfère investir pour des besoins financiers immédiats que pour des gains sur le long terme. Comparée aux investisseurs plus âgés, la génération du Millénaire est plus susceptible d’investir pour compléter son salaire (46 % vs. 41 %), d’aider financièrement ses enfants ou d’autres proches (30 % vs. 19 %), d’acheter un bien autre qu’un logement (28 % vs. 16 %) et de financer les études de ses enfants (26 % vs. 16 %). En revanche, la génération du Millénaire est moins susceptible d’investir pour compléter sa retraite (35 % vs. 52 %), réinvestir ses revenus ou accroître son portefeuille d’investissements (41 % vs. 46 %) que les investisseurs d’au moins 36 ans. Plus que pour les autres investisseurs, pour les Belges, la principale raison d’investir est liée aux revenus actuels ou futurs, et non à l’épargne en vue d’acheter quelque chose. Ils investissent pour compléter leur pension ou annuité de retraite (55 %), pour réinvestir leurs revenus et accroître leur portefeuille (43 %) et pour compléter leur salaire/revenus (48 %).
Rôle des conseillers financiers
Les conseillers financiers restent un acteur important du processus décisionnel et la moitié (50 %) des investisseurs interrogés dans le monde fait part de son intention d’en consulter un dans le cadre de sa prochaine décision d’investissement. Cette propension est évidente chez la génération du Millénaire comme pour ses aînés. Toutefois, 44 % des investisseurs internationaux ont déclaré vouloir effectuer leurs propres recherches.
Par rapport au reste du monde, les investisseurs belges affichent une connaissance moyenne du rôle d’une société de gestion. Un peu plus d’un tiers (37 %) sait qu’une société de gestion « gère de l’argent pour le compte de clients, regroupant leurs fonds dans différentes stratégies d’investissement à long terme ». Presque autant de sondés (30 %) ont répondu que le rôle d’un conseiller financier est de « fournir des conseils d’investissement et de recommander des produits financiers adaptés dans lesquels investir ».
Ensuite, près de la moitié des investisseurs belges (47 %) disent avoir le même niveau de compréhension que l’investisseur moyen et 15 % pensent avoir un niveau inférieur. Malgré tout, la Belgique l’affiche l’un des plus forts taux (22 %) d’investisseurs estimant ne pas avoir besoin d’améliorer leurs connaissances. Les méthodes d’amélioration privilégiées sont s’entretenir avec un conseiller financier (38 %), prendre le temps de faire leurs propres recherches (32 %) et participer à des événements gratuits organisés par des sociétés de gestion (30 %). Un peu moins regrettent ne pas avoir bénéficié d’un meilleur enseignement à l’école ou à l’université (21 %) ou aimeraient voir des vidéos financières en ligne (20 %). La génération du Millénaire (40 %) et les femmes (27 %) sont nettement plus susceptibles de consulter des amis et leur famille pour leur prochaine décision d’investissement que les personnes de 36 ans et plus (12 %) ou les hommes (15 %).
Espérance de vie après la retraite
Les investisseurs estiment investir principalement pour compléter leur retraite et pensent qu’ils vivront plus de vingt ans (21,2 ans en moyenne à travers le monde, 20,3 ans en Belgique) après leur retraite, mais ils sont relativement peu nombreux à comprendre l’engagement financier que cela représente. Les résultats mettent en évidence une trop grande dépendance des investisseurs envers les retraites publiques, ainsi que des anticipations de revenus irréalistes pour les projets d’investissement destinés à accroître leur épargne-retraite.
Anticipations de performances irréalistes et dépendance excessive envers les retraites publiques
La priorité des investisseurs internationaux est d’épargner pour leur retraite ; 45 % affirment qu’ils investissent principalement pour compléter leur retraite. Les résultats indiquent que les investisseurs espèrent alimenter leur épargne-retraite via trois sources principales ; le système de retraite public (contribution moyenne de 19 %), leur régime de retraite professionnel (en moyenne 18 %), ainsi que leur épargne personnelle et leurs investissements (en moyenne 21 %).
Autre facteur préoccupant mis en évidence par l’enquête, il se pourrait que les investisseurs comptent trop sur la rente que leur versera le système de retraites publiques. Selon l’enquête, les investisseurs estiment que celui-ci contribuera à hauteur de 19 % de leurs revenus de retraite. Or si les investisseurs pensent que le système public va largement compléter leur retraite tout en ayant des anticipations de revenus irréalistes, il est probable que leur épargne-retraite ne soit pas à la hauteur de leurs attentes.
Belgique : hormis en Allemagne et en Espagne, c’est là où les revenus de retraite étaient le plus susceptible d’être basés sur les retraites publiques (31 %), avec une contribution moindre des autres formes d’épargne (19 %), des régimes de retraite professionnels (12 %) et des plans personnels de retraite (14 %).
Les investisseurs belges estiment que les principaux moteurs pour choisir un produit d’investissement reposent sur les éléments les plus tangibles et mesurables associés à un investissement, qui permettent clairement une comparaison directe : obtenir une performance supérieure à l’inflation (7,9), récupérer au final au moins le montant investi (7,8) et une croissance potentielle à long terme (7,6) ont été classés comme les plus importants en moyenne sur une échelle de 0 (« pas du tout important ») à 10 (« essentiel »).
La réforme des systèmes de retraite belges sonne comme un avertissement
La réforme des systèmes de retraite belges de décembre 2015 a rappelé aux investisseurs qu’ils doivent compléter leur retraite avec d’autres revenus d’investissement. En général, plus les personnes sont jeunes, moins elles pensent que le régime de retraite public sera la seule source de revenu de retraite. Ainsi, 45 % de la population n’appartenant pas à la génération du Millénaire estiment que le système de retraite public leur fournira plus d’un quart de leur revenu de retraite ; parmi la génération du Millénaire, ils ne représentent que 16 %. Autre différence marquée, le pourcentage de personnes de la génération du Millénaire estimant qu’elles travailleront au moins à temps partiel pendant leur retraite (50 % vs. 14 %), ainsi que leur conviction que les membres de leur famille les aideront à la retraite. Ainsi, 40 % pensent que leurs proches ou leurs enfants les aideront, contre 8 % pour la génération plus âgée.
Concernant la réforme des systèmes de retraite de 2015, elle ne rassure que 10 % d’entre eux. Une majorité écrasante la considère comme un premier pas ou un signe qu’ils devront eux-mêmes en faire plus. Les investisseurs qui ont le sentiment que cela ne fera pas de réelle différence pour eux, sont comme on peut s’y attendre concentrés parmi les personnes déjà ou bientôt retraitées.
Impact de la taxe belge sur les mouvements financiers spéculatifs
Les investisseurs belges ont aussi donné leur avis sur la taxe sur les mouvements financiers spéculatifs. Les réponses confirment les impressions qui s’étaient déjà dégagées à l’égard de cette taxe, à savoir que la majorité des investisseurs (55 %) ont modifié leur comportement soit en évitant d’investir dans une seule action, soit en utilisant des instruments qui ne sont pas soumis à cette taxe.
Comment mettre en place une couverture du risque de change?
Par iDealing
Le 12/5/2016
Un des moyens d’obtenir un portefeuille diversifié, pour un investisseur belge, consiste à acheter des actions ou des obligations belges. Il existe également un autre univers de titres dans d’autres pays. Les États-Unis et le Royaume-Uni, par exemple, possèdent un grand nombre d’entreprises importantes, qui émettent des actions et des obligations. Celles-ci peuvent constituer un complément intéressant dans un portefeuille, mais elles comportent des risques de change. C’est le cas, par exemple, si vous avez acheté des parts dans une société américaine. Si leur valeur boursière augmente de 10 % mais que, dans le même temps, la valeur du dollar américain baisse de 10 % par rapport à l’euro, l’investisseur aura alors obtenu un rendement nul en euros sur cette position.
Pour éviter une telle situation, une autre stratégie consiste à acheter des titres étrangers, mais à couvrir le risque de change. Il existe deux façons de couvrir le risque de change. La première (si vous disposez de l’expérience nécessaire) consiste à échanger un CFD (Contract for Difference) selon la paire de devises utilisées, en misant sur une dépréciation du dollar par rapport à l’euro. La seconde (pour les investisseurs moins expérimentés) est d’acheter un ETF (Exchange Traded Fund) sur la paire de devises utilisées, dont la valeur augmente lorsque le dollar recule par rapport à l’euro. Par exemple, le LEUR, qui est coté à la bourse de Londres, voit sa valeur augmenter lorsque le dollar recule et lorsque l’euro monte.
Un autre moyen consiste à acheter simplement des devises étrangères. Il peut parfois s’avérer judicieux d’intégrer directement des devises en portefeuille. Par exemple, dans le climat actuel, les investisseurs pourraient avoir l’impression que c’est l’économie américaine qui offre les meilleures perspectives au niveau mondial et qu’ils peuvent alors simplement vendre leurs euros en échange de dollars américains. Indépendamment de ce qu’il adviendra des titres qui se trouvent dans leur portefeuille, ils obtiendront un retour sur investissement positif en cas d’une hausse du dollar.
Le monde des taux négatifs et ses conséquences indésirables
Par M&G
Le 25 avril 2016
Le monde a déjà connu des taux d’intérêt négatifs : la Suisse a fixé des taux d’intérêt inférieurs à zéro pour les étrangers dans les années 1970 afin de ralentir les flux de capitaux vers le franc suisse. Toutefois, le contexte actuel de taux négatifs est nettement plus étendu : la Suisse, le Danemark, la Suède, le Japon, et la zone euro ont tous suivi le mouvement. Les objectifs des mécanismes de transmission des taux négatifs ont fait couler beaucoup d’encre (coûts d’emprunt directs plus abordables pour les ménages et les entreprises, se traduisant par un regain d’activité économique, effet de rééquilibrage des portefeuilles où les investisseurs vendent des actifs à rendement faible/négatif en vue d’acquérir des instruments plus risqués, réduisant ainsi les coûts de financement des entreprises, et, de manière controversée, diminuant l’attrait de la devise d’un pays dans un monde où la dévaluation compétitive est jugée souhaitable. Ce post cherche toutefois à mettre en évidence certaines autres conséquences des taux négatifs, parfois involontaires, et parfois engendrant divers problèmes pour les décideurs.
Voici une liste de dix observations.
- Si vous êtes une entreprise disposant de liquidités abondantes, les taux négatifs représentent un coût imprévu. Par exemple, les compagnies d’assurance collectent les primes auprès des clients et réalisent un rendement sur les montants investis. Dans un contexte de taux négatifs, le règlement anticipé d’une prime pèse sur vos rendements. Ce principe est vrai pour toutes les entreprises : les payeurs tardifs deviennent vos clients les plus précieux. C’est également vrai pour les services fiscaux. Dans le canton suisse de Zoug, le fisc a demandé aux contribuables de reporter le règlement de leurs impôts aussi longtemps que possible. Selon les calculs, cette mesure va économiser au canton 2,5 millions de francs suisses par an.
- Les ventes de coffres-forts. En retirant votre argent d’un compte bancaire pour l’enfermer chez vous, ou dans un espace sécurisé, vous pouvez être sûr que les taux d’intérêt ne descendront pas en deçà de zéro. Vous serez également à l’abri d’une mise à contribution des déposants en cas de difficulté du secteur bancaire (Chypre, par exemple). Selon le magasin de mobilier japonais Shimachu, les ventes de coffres représentent 2 fois ½ celles d’il y a un an.
- Les ménages ne sont pas les seuls à cacher des liquidités pour éviter de payer pour épargner. La société d’assurance allemande Munich Re expérimente le stockage physique de billets de banque (10 millions d’euros en billets pour commencer).
- Si le stockage physique de liquidités perturbe le mécanisme de transmission, que peuvent faire les banques centrales pour le rendre plus difficile ? Mario Draghi, président de la Banque centrale européenne (BCE), a suggéré le retrait du billet de 500 euros, qui représente 30% des espèces en circulation. Il a mentionné l’utilisation du billet comme réserve de valeur pour le crime organisé, plutôt que comme un désagrément dans le fonctionnement de la politique monétaire, mais il s’agit nettement d’un facteur d’influence.
- Les autorités financières pourraient également empêcher (soit explicitement par le biais de la réglementation, soit par la bonne vieille méthode du « froncement de sourcils ») le retrait de montants élevés par les banques, les fonds de pension et les assureurs. En Suisse, une banque semble avoir refusé d’autoriser un fonds de pension à retirer un montant élevé de son compte sous forme de billets. La Banque nationale suisse (BNS) a apparemment demandé aux banques de se montrer « restrictives » quant à de tels règlements, au grand dam de l’association suisse des fonds de pension.
- Les taux négatifs engendrent un fardeau technologique et administratif. Les institutions financières sont contraintes de changer leurs systèmes informatiques, il a fallu modifier les contrats (par exemple, les contrats de swap de l’ISDA), et remanier les documents obligataires (planchers des obligations à taux variable).
- Alors que l’Euribor à 12 mois est devenu négatif en février 2016 pour la première fois, les propriétaires espagnols de biens immobiliers (dont les versements des intérêts hypothécaires sont généralement indexés sur ce taux, sans aucune valeur plancher à zéro) ont vu leurs frais s’effondrer. La banque espagnole Bankinter a également proposé des crédits hypothécaires indexés sur les taux suisses, et certains clients perçoivent des versements de leur banque chaque mois (en pratique, la banque réduit le montant du capital dû plutôt que de régler en espèces). Le secteur hypothécaire espagnol a souvent été invoqué comme motif du refus de la BCE d’adopter des taux négatifs, puisque cette mesure aurait un effet dévastateur sur le compte de résultat des banques. Une raison similaire, liée au secteur britannique de l’épargne-logement, a été avancée la Banque d’Angleterre pour justifier le maintien des taux au niveau relativement élevé de 0,5%.
- Un scénario différent a eu un impact sur le secteur bancaire suisse. Paradoxalement, les taux des crédits hypothécaires en Suisse proposés par les banques ont augmenté une fois les taux d’intérêt devenus négatifs. Les banques de détail du pays ont réalisé qu’il serait difficile de répercuter les taux négatifs sur les déposants que la BNS leur impute sur les réserves. Afin de conserver un niveau de bénéfices similaire, elles doivent donc faire payer davantage les emprunteurs, et les taux de crédit ont fait état d’une hausse. Les compagnies d’assurance suisses proposent également des crédits hypothécaires, et se financent par l’émission d’obligations à long terme plutôt que par le biais des dépôts ; ainsi, elles ont réussi à répercuter les taux inférieurs sur les investisseurs, et ont relativement gagné en compétitivité par rapport aux banques.
- Comme nous l’avons vu, la capacité à retirer les billets de banque du système officiel peut interférer avec le fonctionnement du mécanisme de transmission de la politique monétaire, garantissant effectivement un taux plancher à zéro pour ceux qui y ont recours. Autrement dit, la question de la monnaie électronique est devenue d’actualité. Les économies modernes évoluent généralement dans cette direction, de toute manière : les cartes de crédit, les transactions par téléphone mobile, PayPal, la banque électronique ont connu une hausse exponentielle ces dernières années. En Suède, les espèces ne représentent plus que 2% de l’économie, contre 7,7% aux Etats-Unis et 10% en zone euro. En partie, la réduction de l’usage des espèces en Suède a été motivée par les nouvelles règles destinées à limiter l’évasion fiscale, même si le pays est également un adepte de la première heure des nouvelles technologies. Du fait de la réduction des espèces en circulation, il devient plus difficile d’échapper aux taux négatifs. Les autorités pourraient-elles supprimer totalement le papier-monnaie ? C’est même un sujet débattu par Andy Haldane, de la Banque d’Angleterre, dans le cadre de la fixation des taux négatifs. Conseil : ne jamais aborder un tel sujet en public, dans la mesure où il déchaîne les passions.
- Afin d’atténuer les conséquences indésirables des taux négatifs, la plupart des banques centrales ont tenté de limiter le préjudice causé par les taux négatifs aux bénéfices des banques par l’introduction de taux d’intérêt progressifs. Différents niveaux de taux s’appliquent aux diverses parties des réserves bancaires. Dans le cas du Japon, les réserves détenues avant l’adoption des taux négatifs rapporteraient toujours 0,1%, par exemple. Les banques sont généralement incitées à ne pas convertir les réserves en billets, puisqu’une telle réduction est opérée sur la tranche supérieure de taux d’intérêt, plutôt que de la tranche la plus basse.
Qu’avons-nous manqué ?
Vers une mise en pratique des promesses de la COP21 ?
Par Dirk Hoozemans, analyste des secteurs de l’énergie et des services aux collectivités au sein de l’équipe Actions internationales de Robeco.
Le 23 mars 2016
L’objectif central de la COP21 visant à limiter le réchauffement climatique à 2 degrés pourra-t-il réellement être atteint ? Ou les gouvernements continueront-ils de faire l’autruche en matière de changements climatiques ?
Les gouvernements ont désormais assez bien renoncé à leur politique de l’autruche et ont tout à fait conscience de l’importance de répondre à cette problématique. La COP21 a reçu la participation de 196 pays, dont 187 ont été signataires. L’adoption d’une approche ascendante constitue un développement positif. Chaque pays soumettant sa propre contribution nationale (NDC – Nationally Defined Contribution) en matière de réduction d’émissions, il semblerait que l’on soit plus engagé qu’avant à atteindre l’objectif de limitation du réchauffement climatique à 2 °C, et au mieux à 1,5 °C.
Lors de cette conférence, il est également ressorti qu’un scénario de 2 °C ne sera pas soutenu par les contributions nationales actuelles. C’est donc la raison pour laquelle les pays doivent mettre en place un mécanisme d’examen visant à vérifier les progrès enregistrés par chaque pays tous les cinq ans. Il est par ailleurs très probable que l’on assiste à un durcissement continu des objectifs. En ce sens, il s’agit donc là d’une étape clé et les pays semblent assez prêts à s’engager sur cette voie. Une approche ascendante est plus efficace en matière de réduction des émissions qu’une approche descendante, dont la mise en œuvre est plus délicate.
Ces efforts pour lutter contre le changement climatique auront-ils un impact sur le secteur de l’énergie ?
Nous assisterons à un nouveau durcissement des politiques en matière de climat visant à réduire les émissions carbone en s’attaquant en premier lieu aux plus grands émetteurs de carbone qui utilisent les énergies fossiles. Des objectifs seront fixés en premier pour le charbon – qui représente environ 45 % des émissions carbones totales du secteur de l’énergie – ensuite pour le pétrole et, en dernier lieu, pour le gaz en raison de leurs émissions carbones plus réduites. Dans le même temps, les pays devront investir plus dans les sources d’énergies renouvelables telles que l’énergie solaire ou éolienne. Le faible prix du pétrole constitue toutefois un problème. En effet, il y a un an, le prix du pétrole était très élevé et les coûts relatifs à l’énergie éolienne et solaire étaient en baisse. Les énergies renouvelables étaient, de ce fait, plus compétitives. Toutefois, en ce moment, les hydrocarbures sont de nouveau très compétitifs par rapport aux énergies renouvelables. La grande question est donc de savoir quelle attitude va être adoptée par chacun des pays vis-à-vis de cette situation. Leur approche est-elle axée sur le long terme et font-ils des investissements importants dans les énergies renouvelables, ou privilégient-ils la compétitivité économique en prévoyant de retarder leurs investissements tant que les prix du pétrole sont si bas ?
Il y aura aussi un autre changement. Le Conseil de stabilité financière du G20 exercera plus de pression sur la manière dont les entreprises rendront publique leur exposition au changement climatique. Toutefois, il n’est pas toujours facile de chiffrer en termes monétaires le risque carbone. C’est plus simple si vous êtes producteur d’hydrocarbures ou une compagnie aérienne que si vous êtes, par exemple, une banque ou un détaillant. Nous sommes par ailleurs confrontés à des tendances à la décarbonation au sein du secteur de l’investissement. La Portfolio Decarbonization Coalition (PDC) a été créée pour examiner la manière dont les investisseurs mesurent les risques carbone au sein des portefeuilles et leur attitude vis-à-vis de cette question. Ont-ils recours à l’exclusion ou à une sorte d’ajustement du risque ? Cette approche est donc multidimensionnelle.
Les entreprises du secteur de l’énergie adapteront-elles de manière réaliste leurs modèles commerciaux pour opérer une transition des énergies fossiles vers les énergies renouvelables ?
Il s’agit là d’une évolution et non pas d’une révolution. S’il est évident que les entreprises du secteur de l’énergie ont un intérêt direct dans une économie axée sur les hydrocarbures, elles sont toutefois parfaitement conscientes des développements actuels. Les grandes compagnies pétrolières opèrent une transition dans leurs portefeuilles en passant du pétrole au gaz, qui est une source d’énergie plus propre. Il est néanmoins impossible d’abandonner les sources d’énergies traditionnelles du jour au lendemain. Dans le scénario qui limiterait sérieusement le réchauffement climatique, les véhicules électriques devraient représenter un quart du parc automobile mondial d’ici à 2030. À l’heure actuelle, ces véhicules représentent moins de 1 %. Pour cela, il faudrait une croissance considérable, soutenue par des investissements massifs en infrastructures dans ce domaine. Lorsque les prix du pétrole sont élevés, les consommateurs ont plus facilement tendance à changer de type de véhicule, ce qui n’est pas le cas quand l’essence est de nouveau bon marché à la pompe. En outre, les économies émergentes sont toujours fortement dépendantes du charbon pour leurs besoins en matière de production d’électricité. Le remplacement des énergies fossiles se fera de manière progressive.
Comment les investisseurs peuvent-ils s’adapter à la tendance visant à lutter contre le changement climatique en utilisant des énergies alternatives ?
Désinvestir des pollueurs comme le charbon est une manière de voter avec ses pieds. L’engagement est une autre manière de faire une différence. On ne peut ignorer ce qui se passe sous son nez. Toutefois, la transition vers les énergies renouvelables nécessite des investissements massifs. La COP21 a ainsi également permis de déterminer comment doit être assuré le financement à hauteur de plus de 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 qui permettra aux marchés émergents de développer leurs infrastructures en matière d’énergies renouvelables.