Durant les 30 dernières années, on a assisté, à travers le monde, à une création de richesse sans précédent. « On estime ainsi que les sommes qui passeront dans les années à venir de la génération des « baby boomers » vers la génération X, les millenials ou la génération Z sont considérables. Ce phénomène est assez récent. On estime que 3,2 trilliards d’euros feront ainsi l’objet d’un transfert intergénérationnel. Ces transferts seront particulièrement importants en Asie et aux Etats-Unis », estime Stéphanie Lair Crommen, Head of wealth solutions chez Pictet.
Des difficultés lors de la transmission
Lorsque le patrimoine est important, ce transfert de richesse peut provoquer des sentiments divers. Il y a, d’une part, l’angoisse de la génération qui détient ces avoirs. Il faut préparer la génération suivante à la fois d’un point de vue financier mais aussi concernant la passation de pouvoir si l’on transmet une entreprise familiale. Cette génération n’a pas toujours confiance dans les capacités des générations montantes. « Se posent alors plusieurs problèmes. Que faire s’il y a un désintérêt total de la jeune génération pour la reprise de l’entreprise familiale ? Quid aussi de l’incompétence ? La place dans la famille peut aussi jouer un rôle dans l’affectation future du patrimoine », souligne Stéphanie Lair Crommen.
Dans certains cas, on assiste aussi à une certaine difficulté à travailler ensemble. La collaboration intergénérationnelle est difficile quand les aînés n’ont pas totalement confiance dans la capacité des plus jeunes à reprendre les rênes de l’entreprise. « Rappelons qu’en 1820, on héritait en moyenne à 20 ans. En 1960, on héritait à 40 ans. Aujourd’hui, le transfert se fait plutôt vers 60 ans et ce, en raison de l’évolution de l’espérance de vie », épingle Stéphanie Lair Crommen. Et l’on n’assiste pas à une tendance vers le saut de génération.
Des défis
Quels sont alors les principaux défis lors d’un transfert intergénérationnel ? Le premier défi consiste à maintenir une famille soudée. « On assiste de plus en plus à l’éclatement des familles. La dispersion géographique est aussi plus importante qu’auparavant. Les choix de carrière sont plus variés. La question de la gouvernance familiale et de la partie du patrimoine qui va rester en commun peut alors se poser », note Stéphanie Lair Crommen.
La protection du patrimoine à l’avenir est aussi un défi de taille. Il convient également de préparer correctement les héritiers de façon à ce qu’ils deviennent des héritiers responsables. En général, les problèmes qui surviennent sont relatifs à un manque de confiance ou de communication.
Il y a aussi des défis du côté de ceux qui reçoivent le patrimoine en héritage. « Certains peuvent considérer ce patrimoine comme un fardeau. Il y a la pression familiale qui induit qu’ils n’ont pas droit à l’échec. D’autres questions sont aussi latentes : quel sera le rôle de l’héritier dans la société familiale ? Quelle est finalement son identité ? On remarque alors que deux tiers des jeunes ne veulent pas reprendre l’activité familiale », ajoute Stéphanie Lair Crommen.
Des tabous et des causes
Parfois, pour protéger leurs enfants, les parents ne communiquent pas sur l’importance du patrimoine familial. Cela peut alors être un choc pour la génération suivante lorsqu’elle en hérite. Au-delà du patrimoine, il faut aussi transmettre des valeurs et des devoirs.
Mais les croyances et causes défendues par les jeunes générations ne sont pas toujours les mêmes que celles défendues par leurs ainés. « Les jeunes ne veulent pas entendre parler de philanthropie car, pour eux, les notions d’impact et de protection de l’environnement sont intégrées de façon transversale dans leurs visions », constate Stéphanie Lair Crommen. Les attentes des générations montantes ne sont donc pas toujours en phase avec celles de la génération qui transmet. Le meilleur conseil que l’on puisse donner lorsqu’un transfert de richesse est abordé est de communiquer. La communication sur tous les plans est primordiale. « On peut aussi se faire aider par un médiateur neutre qui n’a aucun intérêt tant du côté de la génération qui transfère que de celui de la génération qui va recevoir. Il faut construire un espace de dialogue et de confiance entre les parties », conclut Stéphanie Lair Crommen.
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