Pourquoi le vote des actionnaires en assemblée générale est-il si important ?

Par Ophélie Mortier, Chief Sustainable Officer chez DPAM

A la veille de la saison des assemblées générales des actionnaires des entreprises européennes et nord-américaines, quelles sont les grandes tendances ?  De quelle manière les actionnaires peuvent-ils vraiment influer les entreprises dans lesquelles ils investissent ?

Certains diront que la responsabilité actionnariale n’a qu’un impact limité sur les entreprises et, en particulier, sur leurs obligations et leurs engagements de durabilité.

En effet, les propositions à l’agenda des assemblées sur des questions d’ordre environnemental, social ou de gouvernance restent très limitées soit moins de 4% des points sur lesquels les actionnaires sont invités à s’exprimer.

 

Evolution de l’acte de vote

 

En effet, les sujets majoritaires restent ceux de gouvernance d’entreprise purs tels que l’élection du conseil d’administration, l’approbation des comptes, le paiement du dividende, éventuellement des modifications de structure de capital ou encore des questions de rémunérations des fonctions exécutives.

 

Et pourtant, le vote est un outil de plus en plus utilisé par les investisseurs engagés pour s’exprimer par rapport à la politique durable et les engagements environnementaux, sociaux et de gouvernance des entreprises. D’une part, les règlementations globales rendent les conseils d’administration de plus en plus responsables de la supervision des enjeux ESG. D’autre part, l’acte de vote évolue vers plus de proactivité de la part des investisseurs. Alors que dans le passé, ces derniers avaient tendance à plutôt réagir face aux points d’agenda sur lesquels ils étaient interrogés, aujourd’hui, ils anticipent les assemblées générales des entreprises visées et élaborent une stratégie de vote en fonction de leurs attentes sur les engagements durables de ces dernières.

 

Un levier en matière environnementale

 

Ainsi sur la question environnementale et du changement climatique, d’une part les propositions de « Say on Pay » continuent à progresser et bien qu’elles restent aujourd’hui hors cadre réglementaire et non contraignante, l’étude de cas de TotalEnergies va sans doute marquer un tournant. D’autre part, sur un principe de comptabilité climatique, de plus en plus d’investisseurs engagés sur l’initiative de Net Zero (zéro émissions d’ici 2050) utilisent leur vote comme levier pour faire pression sur les entreprises et leurs stratégies de réduction de gaz à effet de serre.

 

Dès lors, même en l’absence de point relatif de loin ou de près à la stratégie climatique de l’entreprise, l’investisseur peut mettre une stratégie de vote dite « campagne du Non » en place. Il peut alors voter contre un membre ou le président ou l’ensemble du conseil d’administration de manière à exprimer son mécontentement sur les progrès enregistrés par l’entreprise sur la question climatique. Contester la nomination d’un ou plusieurs membres du conseil reste un outil de résistance ESG important durant la saison des votes.

 

Le cas de TotalEnergies

 

Mais revenons sur l’intéressant cas de TotalEnergies qui lors de l’assemblée générale de juin dernier a refusé de mettre à l’agenda une proposition d’actionnaires sur un alignement de ses émissions dites de scope 3 (émissions indirectes) et sa stratégie Net Zero, argumentant dans un communiqué de presse que la proposition était non recevable étant donné qu’elle empiétait sur la compétence du conseil d’administration en matière de politique publique pour définir la stratégie de l’entreprise.

 

L’Autorité des Marchés Financiers (AMF) française s’est déclarée incompétente pour délibérer le cas et TotalEnergies a obtenu gain de cause. En réaction, le groupe d’actionnaires n’a pas supporté la proposition de stratégie climatique déposée par l’entreprise même. Ce cas pourrait faire office de précédent pour l’avenir des résolutions sur le climat à l’instar de l’affaire Carlos Ghosn et la rémunération du CEO de Renault qui a fini par donner lieu à une obligation légale de transparence sur la rémunération des fonctions exécutives. En attendant l’image de meilleur de la classe du pétrolier français a été quelque peu entachée.

 

Affaire à suivre…

 

A l’heure où le flottant des entreprises européennes tend à augmenter en général et que les actionnaires du flottant restent ceux qui expriment le plus leur mécontentement aux assemblées générales, il sera intéressant de suivre les évolutions des votes sur les points clés tels que la nomination du conseil d’administration ou la rémunération des fonctions exécutives. D’une part, ces points restent des leviers importants d’une résistance certaine sur les enjeux de durabilité des entreprises. D’autre part, on continue à observer un écart entre les déclarations des investisseurs, notamment sur la question des rémunérations des fonctions exécutives jugées excessives et leur implémentation en vote (la majorité des points de politique et rapport de rémunération a été largement supportée malgré les critiques vocales).

 

La saison 2023 sera intéressante à plusieurs égards sur les avancements en termes de durabilité d’abord pour vérifier si la constatation d’un support décroissant aux propositions des actionnaires se confirme. Ensuite le contexte socio-économique devrait inciter les actionnaires à rester attentifs d’une part aux enjeux ESG et leur supervision par le Conseil d’administration et d’autre part à la question de la rémunération des fonctions exécutives entre guerre des talents et ralentissement économique.

 

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