Par Daniel Wild, Chief Sustainability Officer chez J. Safra Sarasin
Les effets de la perte de biodiversité sont déjà perceptibles et mesurables. De nombreuses espèces animales ont ainsi disparu au cours des 50 dernières années. Il faut reconnaître que notre compréhension de la biodiversité et la fixation de mesures et d’objectifs ont peut-être dix ans de retard par rapport au changement climatique.
Quelle importance pour la planète ?
La biodiversité est cruciale pour la planète et est la thématique la plus importante après le changement climatique. On estime que plus de la moitié du PIB mondial dépend directement ou indirectement d’écosystèmes intacts (par exemple le sol, l’air, l’eau) grâce à des services écosystémiques connexes tels que la pollinisation, la protection contre les inondations ou le stockage du CO2. La perte de biodiversité repose essentiellement sur cinq menaces :
- Changement d’affectation des sols et des mers
- Pollution
- Surexploitation des espèces
- Changement climatique
- Espèces invasives
Le danger est réel et pas seulement hypothétique, car les effets de la perte de biodiversité sont déjà perceptibles et mesurables. Ainsi, le « Living Planet Index », qui rassemble des données de 20.811 populations de 4.392 espèces, a diminué de plus de 68 % au cours des 50 dernières années.
Une attention suffisante ?
Ce sujet important suscite de plus en plus d’attention, grâce à une plus grande couverture médiatique et des reportages plus nombreux. Mais aussi parmi les personnes qui observent leur propre environnement : les oiseaux et les papillons que nous connaissions pendant notre enfance ont disparu. Autrefois, les pare-brises étaient couverts d’insectes après un trajet dans la campagne. Ils restent étonnamment propres aujourd’hui. La société commence à discerner tous ces liens, même si elle a encore du mal à comprendre l’énorme complexité de l’écosystème mondial.
Les agriculteurs sont-ils suffisamment sensibles à la biodiversité ?
L’agriculture et la sylviculture font assurément partie des thèmes principaux de la biodiversité, car elles ont de nombreux impacts négatifs (utilisation des terres, déforestation, utilisation de pesticides, ruissellement, monocultures, etc.) mais elles dépendent aussi fortement de services écosystémiques sains.
Toutefois, accuser uniquement les agriculteurs ne suffit pas, car les consommateurs devront eux aussi adapter leur demande. À cet égard, il sera important de réduire la demande de produits à forte intensité de ressources (par exemple, la production de viande bovine à forte intensité de CO2 et d’eau), en plus de mettre l’accent sur des moyens de production plus durables.
COP15 : quel résultat ?
Il faut reconnaître que notre compréhension de la biodiversité et la détermination des mesures et des objectifs nécessaires ont peut-être dix ans de retard par rapport au changement climatique. La convention de Montréal sur la biodiversité, issue de la COP15, pose donc les jalons, s’accorde sur l’importance de la biodiversité et établit un cadre mondial pour relever les défis de la perte de biodiversité.
Elle fixe aussi des objectifs concrets tels que la restauration de 30 % des écosystèmes dégradés, la réduction d’au moins 50 % des risques liés aux pesticides ou la réduction d’au moins 50 % de l’introduction d’espèces exotiques invasives. Le tout d’ici 2030.
Toutefois, sur la base de cette feuille de route, il reste encore beaucoup à faire pour définir les méthodes. Le succès du cadre dépend fortement de la volonté politique de coopérer au niveau mondial et de mettre en œuvre en temps utile les règles nécessaires pour atteindre ces objectifs.
Biodiversité et retour sur investissement : un duo compatible ?
Cela dépend de la conception de la stratégie. Comme pour d’autres thèmes du développement durable, les fournisseurs de solutions affichent souvent une croissance supérieure à la moyenne lorsqu’ils contribuent aux Objectifs de développement durable (ODD) de l’ONU, dont la biodiversité fait évidemment partie. Mais comme la pertinence de la biodiversité couvre de nombreux secteurs, il n’est pas facile de définir les caractéristiques financières d’une approche potentielle, ni même de déterminer une référence pertinente.