Par Eugen Biller, Gérant de portefeuille obligataire chez ODDO BHF Asset Management GmbH
Les placements durables ont le vent en poupe comme le montre l’attitude d’investisseurs toujours plus nombreux à la recherche de solutions qui leur permettent non seulement de dégager un potentiel rendement, mais également de soutenir des projets ayant un impact concret et durable sur l’environnement.
Transparence nécessaire
Les investisseurs éco-responsables souhaitent avant tout connaître précisément ce qu’il advient de leur argent.
En matière de transparence, les « Green Bonds », ou obligations vertes, occupent une place particulière dans l’univers des investissements durables, dans le sens où elles sont régies par des principes spécifiques (Green Bond Principles, GBP), une norme commune établie en 2014 par les émetteurs membres de l’Association internationale des marchés de capitaux (ICMA). Les obligations vertes sont des titres dont les capitaux servent exclusivement à financer ou refinancer des projets verts éligibles, nouveaux ou déjà existants.
Un cadre réglementaire établi
Les Principes applicables aux obligations vertes sont des lignes directrices en matière de transparence et de reporting qui sont appliquées de manière volontaire par les émetteurs afin de contribuer à promouvoir l’intégrité de ce marché. Ils fournissent un cadre clair à l’émission d’obligations vertes.
Les GBP reposent sur quatre grands principes :
- L’utilisation des fonds (« use of proceeds »)
- Le processus d’évaluation et de sélection des projets
- La gestion des fonds levés
- Le reporting
Les catégories de projets verts éligibles recouvrent, entre autres, les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique, la prévention et la maîtrise de la pollution, la gestion durable des ressources naturelles vivantes et des sols, la préservation de la biodiversité terrestre et aquatique, les moyens de transport propres, la gestion durable des ressources en eau, l’adaptation au changement climatique, les bâtiments écologiques ainsi que les produits, technologies de production et processus adaptés à l’économie circulaire.
Depuis, la Commission européenne a instauré le premier cadre réglementaire légal pour cette classe d’actifs en plein essor en adoptant la norme de l’Union Européenne relative aux obligations vertes européennes (EUGBS), dans l’intention d’en faire une référence mondiale.
Des besoins de financement immenses
La transformation nécessaire pour atteindre les objectifs climatiques de l’Accord de Paris requiert d’immenses investissements dans les décennies à venir. Les obligations sont une classe d’actifs essentielle pour garantir le financement de projets d’une telle envergure tout en proposant aux investisseurs un rendement mesurable. Les obligations durables offrent ainsi aux investisseurs une possibilité de financer directement des projets spécifiques qui peuvent contribuer à la transformation de l’économie.
Le marché des obligations durables au sens large, qui recouvre non seulement les obligations vertes, mais également les obligations sociales (qui cherchent à lutter contre la pauvreté ou à encourager la construction de logements sociaux) et les obligations durables (qui prennent en compte des objectifs à la fois environnementaux et sociaux), connaît une croissance fulgurante. Le volume des émissions en cours a été multiplié par cinq entre 2000 (250 milliards d’euros) et aujourd’hui (env. 1.400 milliards d’euros)1.
Près des trois quarts sont des obligations vertes
Cette évolution a de quoi réjouir les investisseurs. En effet, le nombre croissant d’émetteurs améliore non seulement les possibilités de diversification, mais également la liquidité du marché. À cela s’ajoute le fait que les obligations durables présentent un risque de crédit relativement plus faible. En effet, dans la mesure où le marché est dominé par des institutions para-étatiques et des entreprises non cycliques, elles affichent des notations solides et un profil défensif. Mais comme pour toutes les obligations, une analyse du risque de crédit approfondie est indispensable dans le processus de sélection, en effet cette classe d’actif présente cependant un risque de perte en capital, de taux et de crédit.
Une approche de gestion innovante
Si les gérants d’actifs tendent de plus en plus à miser sur les fonds obligataires à maturité pour les obligations traditionnelles, ce n’est pas encore le cas des obligations vertes et durables. Mais l’élargissement de la base d’émetteurs et l’activité d’émission croissante pourraient changer la donne.
Ainsi, les investisseurs peuvent poursuivre plusieurs objectifs en même temps. Outre la diversification que procure les fonds d’investissement classiques et la sélection active des titres basée sur l’analyse du risque de crédit, les fonds obligataires à maturité offrent les avantages caractéristiques des obligations individuelles : la volatilité et le risque de défaut des titres diminuent avec l’échéance résiduelle. Les fonds obligataires à maturité offrent donc aux investisseurs une meilleure visibilité du rendement cible attendu sans oublier que ces fonds présentent également un risque de perte en capital.
De plus, en affichant un objectif, les obligations durables offrent une grande transparence et doivent publier une documentation détaillée sur l’utilisation des fonds investis. Les investisseurs peuvent alors consulter les documents de reporting pour savoir comment leur argent a été employé.
- Source : Bloomberg Global Aggregate EUR Green Social Sustainability Bond Index, data as of 12/08/2023