Par DPAM
Au cours des deux dernières semaines, tous les regards étaient à nouveau tournés vers la Conférence annuelle des Parties sur le climat, la 27ème du genre. Il n’est malheureusement pas surprenant qu’une certaine constance soit maintenue dans toutes les conférences à savoir un manque de promesses et d’engagements ambitieux.
Trois questions-clés étaient sur la table avant la COP. Qu’en est-il à la clôture de celle-ci ?
Première question-clé : Combler le fossé
Les nouveaux engagements sont-ils conformes à la stratégie de Paris ou sont-ils encore complètement à côté de la plaque ?
Résultat de l’après COP27 : Négatif
Nous sommes encore loin d’être sur la voie d’un scénario à 1,5°C, voire en dessous de 2°C. Aucune mise à jour remarquable des CDN, comme prévu et déjà annoncé dans la période précédant la COP27. Mises à part quelques annonces par-ci par-là telles que celles de l’Union européenne (57 % de réduction des émissions d’ici 2030), du Mexique sur une future mise à jour de ses ambitions avec le soutien financier des États-Unis et du Botswana, qui a doublé son objectif de CDN, la situation ne changera guère.
L’Inde a suscité de grands espoirs en promettant une réduction progressive des combustibles fossiles. Avec les États-Unis, l’Union européenne et le Royaume-Uni à bord, l’idée a gagné en crédibilité et en popularité, mais les grands exportateurs de combustibles fossiles comme l’Arabie saoudite ne se sont pas joints aux efforts.
Aucun engagement de réduction ou d’élimination progressive des combustibles fossiles (même en excluant le charbon « réduit » de l’engagement), ni aucun engagement de plafonnement des émissions d’ici à 2025 n’ont atteint le texte final, et n’ont probablement même pas été envisagés. Nous restons sur la version de la COP précédente, aucun progrès sur la question des combustibles fossiles malgré l’urgence soulignée par tous les rapports scientifiques. Un lien peut-être avec le nombre multiplié par quatre des déléguées de l’industrie des combustibles fossiles présents à la COP (plus de 600 !).
Comme lot de consolation, on peut mentionner la nouvelle alliance trilatérale entre le Brésil, l’Indonésie et la République démocratique du Congo sur la conservation des forêts. C’est une victoire importante, bien que probablement davantage attribuable au retour de Lula da Silva comme président du Brésil, qu’à la COP elle-même.
Deuxième question-clé : Une facture toujours plus lourde
Est-il enfin temps de combler le déficit de financement de la transition ?
Résultat post-COP27 : Négatif
Les engagements nationaux de financement de la transition sont toujours à la traîne. Les besoins annuels d’adaptation sont estimés entre 160 et 340 milliards de dollars d’ici à 2030 et entre 315 et 565 milliards de dollars d’ici à 2050. Les engagements actuels des pays développés sont loin d’atteindre la promesse collective de 100 milliards de dollars, sans parler des besoins d’adaptation totaux. Un nouvel objectif collectif de financement du climat est attendu pour 2024. La procrastination est à son comble.
Pour sa part, la Belgique a annoncé un objectif de financement de 138 millions d’euros d’ici à 2024, en mettant l’accent sur le financement de l’adaptation par des subventions, afin de soutenir ses pays partenaires africains et les pays les moins avancés.
Heureusement, les partenariats public-privé ont le vent en poupe, et force est de constater que les États-Unis et l’Union européenne jouent un rôle de premier plan dans ce domaine. Grâce à un mélange de subventions, de prêts et d’investissements, le financement du secteur privé parvient aux pays en développement, tout en permettant un partage des risques. Des initiatives telles que les partenariats pour une transition énergétique équitable (déjà annoncés l’année dernière) soutiennent la transition de l’Afrique du Sud vers l’abandon du charbon et ont clairement déclenché d’autres initiatives. Ainsi, l’Indonésie a annoncé un accord de 20 milliards de dollars lors du sommet du G20, le Viêtnam travaille sur un accord et l’Égypte a annoncé un nouveau partenariat majeur lors de la COP27.
Mais ces engagements sont-ils suffisamment fermes ? Les changements politiques (par exemple, les élections américaines) ou les tensions géopolitiques (crise énergétique, guerre) vont-ils entraver la réalisation de ces engagements ?
Concernant l’article 6 de l’accord de Paris et un marché international du carbone, aucun progrès n’a été réalisé. Bien que les développements sur les principes de crédits carbone à haute intégrité avant la COP27 aient été une bonne nouvelle, les négociateurs de la COP n’ont pas semblé désireux d’intégrer le concept dans un texte formel.
Un accord a été conclu pour créer un fonds d’aide en cas de catastrophe climatique. Cela peut être considéré comme une victoire majeure pour les nations les plus vulnérables, étant donné la longue résistance des économies développées à créer un fonds dédié aux pertes et dommages.
L’Union européenne a, en outre, tenté de modifier la base de financement d’un tel fonds en y ajoutant la Chine (non pas pour ses émissions historiques, mais pour ses émissions actuelles, son manque d’ambition et sa puissance économique). Une initiative qui n’a pas été bien accueillie par les pays en développement. Toutefois, si des économies à croissance rapide comme la Chine, la Russie et l’Arabie saoudite ne se joignent pas aux objectifs et aux engagements ambitieux, les concentrations de GES ne diminueront pas.
Un autre constat positif est l’accord entre le président français Emmanuel Macron et la première ministre de la Barbade Mia Mottley pour mettre en place un groupe chargé de suggérer des changements lors de la prochaine réunion des gouverneurs du FMI et de la Banque mondiale au printemps 2023. L’inscription du financement de la résilience climatique à l’ordre du jour officiel du FMI et de la Banque mondiale peut être considérée comme une étape positive. Cela va-t-il réformer complètement les institutions financières internationales ? On peut l’espérer.
Troisième-question clé : L’innovation et la collaboration vont-elles nous sauver tous ?
Résultat après la COP27 : Neutre
Bien qu’elles ne soient pas directement liées à l’innovation en termes industriels, de nouvelles normes ISO ont été publiées sur le Net Zero et les plans de transition, tant pour les investisseurs que pour les entreprises. Il s’agit d’une mesure positive visant à normaliser le marché et à garantir que des changements crédibles sont effectués.
Conclusion
La COP27 peut être considérée comme un nouvel échec. Les efforts de réduction des émissions, les fameux NDC, ne sont pas suffisamment renforcés, les actions de financement de la transition des pays développés vers les pays en développement sont toujours en deçà des montants promis et le fonds pour les pertes et dommages annoncé semble être une autre promesse conditionnelle ou un vœu pieux.
Les pays riches doivent comprendre qu’un fonds pour les pertes et dommages, l’étape majeure de la COP27, ne sera financièrement viable que si nous maintenons le réchauffement de la planète à 1,5°C et donc si nous renforçons les objectifs de réduction et d’élimination progressive des combustibles fossiles. L’atténuation du changement climatique et l’adaptation à ce changement sont liées et entremêlées.
En outre, la COP n’a pas réussi, une fois de plus, à aborder la question délicate des économies à croissance rapide comme la Chine, la Russie et l’Arabie saoudite. Sans la participation de ces nations à des objectifs et des engagements ambitieux, les concentrations de GES ne diminueront pas.
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