Biodiversité : pourquoi les investisseurs devraient s’y intéresser

Par Pictet AM

Ces 30 dernières années ont vu une amélioration de la prospérité humaine plus importante que tous les siècles passés réunis.

Nous avons construit plus de routes, de bâtiments et de machines que jamais auparavant. Les gens vivent plus longtemps et en meilleure santé, et l’accès à l’éducation n’a jamais été aussi facile. Le PIB moyen par habitant a été multiplié par 15 depuis 1820. Plus de 95 % des nouveau-nés atteignent aujourd’hui leur 15ème anniversaire, alors qu’ils n’étaient qu’un sur trois au XIXème siècle[i].

L’homme conduit des espèces animales et végétales à l’extinction et détruit leurs habitats pour nourrir une population en constante augmentation. Et, depuis quelques décennies, les hommes consomment plus de ressources naturelles que la Terre ne peut en reconstituer naturellement sur une période de 12 mois, réduisant ainsi ce qui est disponible pour les générations futures[ii].

 

Le rôle des régulateurs

 

Pour mettre fin à cette relation non durable, il faut mieux comprendre l’impact de la biosphère sur le bien-être humain et sa contribution à la croissance économique. Les décideurs politiques considèrent désormais la protection de la biodiversité comme une priorité aussi urgente que l’arrêt du réchauffement climatique.

 

Alors que la biodiversité rivalise avec le changement climatique en tant que préoccupation environnementale la plus pressante, les régulateurs et les décideurs politiques sont susceptibles d’introduire davantage de taxes, de permis et de compensations liés à la biodiversité, et d’intégrer le capital naturel dans les statistiques économiques nationales telles que le PIB. En comprenant les différentes menaces que la perte de biodiversité fait peser sur les entreprises, les investisseurs peuvent commencer à évaluer correctement ces risques, identifier les lacunes du cadre ESG actuel et découvrir de nouvelles façons d’investir dans le capital naturel.

 

Le rôle du secteur financier

 

Mais ces efforts ne doivent pas se limiter à l’arène politique. Le secteur financier doit lui aussi jouer un rôle plus actif. En tant que gestionnaire du capital mondial, il est particulièrement bien placé pour aider à construire une économie qui fonctionne avec, et non contre, la nature.

 

Il peut faciliter une transition positive pour la nature, en transformant la manière dont il alloue le capital et en développant de nouveaux modèles pour évaluer plus précisément les risques et les opportunités liés à la biodiversité.

 

Il convient de noter qu’en canalisant les investissements vers des entreprises développant des technologies et des services environnementaux avancés, le secteur financier a contribué à améliorer l’efficacité dans tous les domaines, de l’utilisation de l’énergie à l’agriculture, en passant par le commerce et les transports.

 

Par exemple, grâce au développement de l’agri-technologie, le monde peut produire presque trois fois plus de céréales à partir d’une terre donnée qu’en 1961[iii].

 

Le taux d’amélioration du rendement céréalier moyen a dépassé celui de la croissance démographique. Cependant, la majeure partie des investissements traditionnels va aux activités économiques en place qui causent des dommages environnementaux et sociaux.

 

Le secteur financier doit donc contribuer à l’effort mondial visant à réduire les dommages, tout en favorisant le rétablissement de la nature.

 

Comment financer la biodiversité ?

 

Même si les entreprises et les investisseurs parviennent à mieux comprendre comment ils influencent et sont influencés par la perte de biodiversité, ces efforts n’aboutiront à rien sans une révolution des capitaux liés à la biodiversité.

 

Historiquement, le financement de la biodiversité a eu tendance à se concentrer sur la collecte de fonds pour les activités de conservation. Plus récemment, cependant, on a assisté à une augmentation constante des investissements dans la biodiversité et le capital naturel, y compris les titres qui visent explicitement à minimiser la perte de biodiversité et à capitaliser sur le potentiel de croissance du capital à long terme.

 

Des fonds investissant dans des entreprises spécialisées dans la restauration de la biodiversité et les services écosystémiques ont été lancés à grand renfort de publicité ces deux dernières années, neuf fonds sur onze ayant fait leurs débuts depuis 2020. Les actifs sous gestion dans ce groupe ont plus que doublé pour atteindre 1,3 milliard de dollars, contre seulement 525 millions de dollars au début de la décennie[iv].

 

La transformation de l’alimentation et de l’utilisation des terres actuelles en faveur de pratiques régénératives a le potentiel de créer un marché de la biodiversité et de la nature d’une valeur de 4 500 milliards de dollars d’ici 2030.

Les fonds qui investissent dans la biodiversité et le capital naturel ont pour objectif de contribuer à l’intégration de pratiques commerciales plus durables et régénératrices dans toute une chaîne de valeur, impliquant des secteurs tels que l’agriculture, la sylviculture, les technologies de l’information, la pêche, les matériaux, l’immobilier, la consommation discrétionnaire et les produits de base, les services publics et les produits pharmaceutiques.

 

L’OCDE estime que les investissements visant à protéger la biodiversité s’élèvent à moins de 100 milliards de dollars par an. C’est une somme dérisoire, surtout si on la compare à ce qu’attire le changement climatique (632 milliards de dollars).

 

Un rapport de 2019 de la Coalition pour l’alimentation et l’utilisation des terres[v], par exemple, a constaté que les efforts visant à transformer l’alimentation et l’utilisation des terres actuelles en faveur de pratiques régénératives, productives et circulaires ouvriront de nouvelles chaînes de valeur et de nouveaux modèles commerciaux. Le rapport estime que cette transformation a le potentiel de créer un marché de la biodiversité et de la nature d’une valeur de 4.500 milliards de dollars d’ici 2030.

 

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[i] Our World in Data, accessed at 14.10.2022

[ii] Global Footprint Network, accessed at 14.10.2022

[iii] Our World in Data

[iv] Source: Broadridge and Pictet Asset Management, data as of 31.07.2022

[v] Source: Food and Land Use Coalition, September 2019, https://www.foodandlandusecoalition.org/wp-content/uploads/2019/09/FOLU-GrowingBetter-GlobalReport.pdf 

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