Par Astrid Dutré en Sophie Slits, Senior Estate Planners à la Banque Nagelmackers
En cas de décès, le législateur a défini qui étaient les héritiers et leur part d’héritage. Rédiger un testament permet de déterminer à qui reviendra une partie du patrimoine au moment du décès.
Un testament prime sur les dispositions successorales légales et permet donc d’y déroger. Cependant, on ne peut pas faire ce que l’on veut de la totalité de son patrimoine par testament. Le législateur a en effet prévu des limites à cette liberté de disposer de son patrimoine. Certains membres de la famille, les ‘héritiers réservataires’, ont droit à une part de la succession, quoi que l’on décide. Cette part minimale à laquelle on ne peut pas toucher s’appelle la ‘réserve’.
On peut disposer de la ‘quotité disponible’, à savoir ce qui reste après l’attribution de la ‘réserve’. On peut en faire don de son vivant ou l’attribuer par testament à qui on veut.
Les descendants sont des héritiers réservataires. La réserve des descendants est égale à la moitié du patrimoine. Ils se la partagent en parts égales.
Si on a des enfants, la quotité disponible est, par conséquent, toujours la moitié de la succession, quel que soit le nombre d’enfants.
Le conjoint survivant est aussi un héritier réservataire. La réserve du conjoint survivant est double : il a droit à la moitié de l’usufruit des biens de la succession et à l’usufruit de la totalité de l’habitation familiale et des meubles meublants.
Si la quotité disponible a été dépassée et que la réserve est touchée, les héritiers réservataires peuvent introduire une action en réduction auprès du tribunal afin de réclamer leur part réservataire.
Un testament est-il utile et nécessaire ?
Dans certaines situations familiales, le testament permet de réparer certains oublis du législateur successoral.
Les cohabitants de fait n’héritent pas automatiquement l’un de l’autre et les cohabitants légaux n’ont qu’un droit successoral limité (l’usufruit sur l’habitation familiale et le mobilier qui s’y trouve). Il peut dès lors être utile de s’avantager mutuellement par le biais d’un testament. Il peut aussi être utile pour les conjoints d’établir un testament. De cette manière, ils peuvent s’accorder plus que ce que prévoit la loi. Il ne faut toutefois jamais perdre de vue la réserve des enfants.
Dans le cas d’une famille recomposée, les beaux-enfants ne sont pas des héritiers légaux ; ainsi, un testament sera nécessaire si un beau- parent veut leur attribuer une part de son patrimoine au moment de son décès.
Legs aux petits-enfants
Vu qu’en cas de présence d’enfants, le législateur a prévu que ceux- ci seront les héritiers légaux, un grand-parent devra rédiger un testament s’il veut attribuer un legs à ses petits-enfants.
Ainsi, il est possible de rédiger un testament dans lequel le testateur attribue la quotité disponible ou une partie de cette quotité disponible de son patrimoine à ses petits-enfants.
Le testament peut prévoir que le legs de la quotité disponible sera fait en pleine propriété (les petits-enfants auront directement le patrimoine légué) ou que le legs de la quotité disponible sera attribué en usufruit au conjoint survivant ou au parent des petits-enfants (les petits-enfants n’auront pas directement le patrimoine légué).
Eviter les discussions
Si l’on craint une dispute à propos du partage d’un bien immobilier, un désaccord sur le sort de la maison familiale ou encore un conflit général entre les héritiers, la rédaction claire d’un testament peut permettre d’éviter toute discussion et favoriser la paix des familles. Pour veiller au respect de ses dernières volontés, le testateur peut aussi désigner un exécuteur testamentaire qui sera le garant de la bonne exécution du testament.
Favoriser un proche
Et si le testateur désire désigner comme légataire une tierce personne qui lui est chère ? Que ce soit un voisin, une ASBL, une commune ou une fondation… toute personne physique ou morale peut être bénéficiaire d’un legs.
Pour les personnes physiques, les droits de succession seront déterminés en fonction du lien de parenté et pour les personnes morales, des taux particuliers sont prévus.
Déshériter un enfant ou son conjoint ?
Il n’est pas possible de déshériter un enfant car il est un héritier réservataire. Mais il est possible de limiter sa part successorale à sa réserve par le biais d’un testament.
Et qu’en est-il du conjoint dont on est séparé de fait ?
Le conjoint séparé de fait reste un héritier légal, il héritera donc. La rédaction d’un testament permettra d’éviter cela. Le conjoint survivant peut en effet être totalement déshérité si les trois conditions suivantes sont remplies : les époux doivent être séparés de fait depuis six mois au moins, le testateur doit avoir obtenu par acte judiciaire un logement séparé et après cet acte judiciaire, les époux ne peuvent pas avoir repris la vie commune.