Qu’entend-on par «philanthropie»?

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Par Christoph Courth, Head of Philanthropy Services chez Pictet Wealth Management

Il existe de multiples définitions de la philanthropie. Il suffit d’ailleurs de chercher le terme sur Internet pour s’en rendre compte. La notion de charité remonte certainement aux débuts de l’humanité, mais la philanthropie au sens où nous l’entendons aujourd’hui n’est apparue qu’au début de XXème siècle avec l’essor des fortunes privées, dans le sillage de la deuxième révolution industrielle. Au XXIème siècle, la philanthropie connaît un nouveau souffle, et si les élans de prodigalité de célébrités et autres milliardaires de la technologie sont souvent médiatisés, force est de souligner que la générosité ne se limite pas à ces personnalités.

 

On observe aujourd’hui une augmentation des fortunes privées à l’échelle mondiale, et notamment parmi les entrepreneurs, qui sont statistiquement plus enclins à «donner en retour». Une partie de cette richesse accumulée provient aussi de particuliers ayant personnellement vu et/ou connu la pauvreté et les inégalités dans les pays en développement. Mais, la montée en puissance des «millennials», génération dotée d’une forte conscience sociale, et la volonté toujours plus prononcée des entreprises – familiales en particulier – à agir sur le long terme, alimentent également cet accroissement des ressources.

 

Dans un monde qui, grâce à la technologie, paraît soudain beaucoup moins vaste, il est difficile d’ignorer les innombrables défis auxquels l’humanité est confrontée. Et nos téléphones portables, toujours à portée de main, nous permettent d’agir de façon très réactive.

L’engagement des philanthropes modernes prend aujourd’hui des formes très variées, qu’il s’agisse de donner de son temps, de mobiliser son entreprise ou d’accompagner un capital philanthropique par des investissements visant à générer des changements à long terme pour l’humanité et la planète sur laquelle nous vivons.

 

Quelle voie choisir?

 

En matière de philanthropie, les voies d’action sont aussi multiples que variées. C’est ce qui rend le domaine passionnant, mais aussi complexe et difficile à appréhender. Quelles sont les bonnes et les mauvaises approches et quelle est la solution la plus adaptée à chaque situation?

Plusieurs possibilités s’offrent aux particuliers et aux familles qui souhaitent mobiliser leur fortune en faveur du bien social et environnemental.

 

  • Les dons de bienfaisance ne requièrent généralement qu’un investissement en temps et en ressources limité. Ils reposent souvent sur une approche distanciée, consistant en donations financières à des organisations caritatives existantes et dont le travail est reconnu.
  • La philanthropie recouvre le don d’actions ou de biens immobiliers, en nature ou en espèces. Elle nécessite un investissement en temps et en énergie plus important et exige une approche plus active. La philanthropie implique une connaissance plus approfondie de la destination des fonds donnés. Elle requiert un compte-rendu plus conséquent de la part des bénéficiaires. L’objectif final, ainsi qu’un plan d’action pour y parvenir, sont généralement définis à l’avance.
  • La philanthropie catalytique suppose un objectif final et un plan d’action plus structurés, ainsi qu’une stratégie de sortie à tous les niveaux de l’opération. La philanthropie catalytique s’appuie généralement sur des données objectives et statistiques pour déterminer le choix des destinataires et des modes d’action et évaluer leur impact. Elle implique la mobilisation de toutes les ressources disponibles pour comprendre les causes profondes des problèmes auxquels elle entend remédier et vise la transformation de systèmes entiers.
  • La finance sociale correspond généralement à des prêts et/ou investissements dans des entreprises sociales ou des organisations à but non lucratif. Elle recouvre les initiatives caritatives axées sur le résultat, les investissements en lien avec des programmes spécifiques, le capital-risque philanthropique, la microfinance, les obligations à impact social et de développement, les mécanismes de finance mixte et les prêts aux entreprises sociales.

 

Quelles sont les motivations des philanthropes?

 

Comprendre et s’interroger en toute honnêteté sur les raisons (souvent nombreuses) qui motivent une démarche philanthropique constitue une première étape cruciale. Pourquoi?

Dans une étude publiée en 1994, Russ Alan Prince et Karen Maru File ont identifié sept profils de philanthropes sur la base de leurs intérêts et des organisations à but non lucratif soutenues.

Chaque profil a été établi en fonction des comportements et convictions ayant justifié un soutien à un organisme à but non lucratif ou une action en son nom parmi l’échantillon de donateurs considéré. L’étude met en évidence les attentes des uns et des autres en termes de communication, d’engagement, de participation au processus décisionnel et de reconnaissance.

Bien sûr, personne ne s’inscrit dans une seule catégorie. Il s’agit surtout de déterminer les traits les plus et les moins dominants pour chaque profil.

 

  1. Le philanthrope communautaire
  • souhaite soutenir une communauté, un réseau ou un groupe auquel il appartient;
  • estime que la charité commence à la maison;
  • cible ce qui lui donne le plus grand sentiment d’attachement, de transparence et d’engagement actif.
  1. Le croyant
  • agit sur la base d’une foi, d’une philosophie ou de croyances spécifiques;
  • ne se limite pas à une contribution financière, mais donne aussi de son temps et de sa
  • personne;
  • s’aligne généralement sur l’action d’autres personnes dont il partage le mode de pensée.
  1. Le mondain
  • est largement motivé par le plaisir tiré de son action;
  • voit dans la philanthropie un échange de bons procédés;
  • tend à soutenir les arts et les hautes études.
  1. L’altruiste
  • agit par empathie et cherche à aider sans contrepartie;
  • se laisse généralement guider par ses sentiments et ses émotions;
  • tend à agir de façon distanciée, parfois anonyme, et n’attend pas de reconnaissance.
  1. Le philanthrope «redevable»
  • cherche à «donner en retour» en soutenant un domaine dont il a directement bénéficié;
  • estime qu’il est du devoir des plus riches de donner et attend de ses semblables qu’ils
  • agissent en conséquence;
  • donne de façon très directe et ne cherche généralement pas à changer le monde.
  1. L’héritier
  • considère la philanthropie comme une tradition familiale, qui fait partie de son héritage;
  • agit souvent dans un cercle proche et dans le cadre d’une fondation familiale;
  • concentre généralement son action sur quelques domaines spécifiques.
  1. L’investisseur
  • perçoit la philanthropie comme une opportunité intéressante;
  • adopte une approche méthodique et aborde le domaine comme n’importe quel autre
  • investissement;
  • voit dans la philanthropie la possibilité d’un engagement gagnant-gagnant.

 

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