
Selon les données fournies par Quantalys, les fonds investis dans les valeurs technologiques et la bourse chinoise ont le mieux performé en 2020. Ce n’est plus une surprise ! Mais quels sont les facteurs qui expliquent que la bourse américaine soit si performante ? Pourquoi l’Europe est-elle toujours à la traîne ? Comment peut-on expliquer le succès de la bourse chinoise alors que ce pays a été le foyer de la pandémie ? Pourquoi le Brésil peine à sortir de sa position de perpétuel loser ? Eclairage et commentaires avec Bernard Keppenne, chief economist chez CBC Banque.
L’ère des technologiques
Les valeurs technologiques ont été les grandes gagnantes de l’année 2020. Mais il convient de nuancer ce succès. « Quand on parle de valeurs technologiques, il s’agit des actions américaines. On constate une divergence flagrante entre l’Europe et les Etats-Unis. Les indices européens sont le reflet d’un tissu économique vieillissant. Nous sommes, en Europe, encore dans la vieille économie. Les indices européens sont plus orientés vers les sociétés financières et les énergies », constate Bernard Keppenne.
En effet, quand on se penche sur la composition des indices, on remarque que le poids d’AB Inbev dans le Bel20 est extrêmement important. Dans le CAC 40, l’industrie du luxe s’en est bien tirée. Cette performance est cependant loin derrière celle des valeurs technologiques américaines qui ont profité des effets de la pandémie. On pense ici aux plateformes de téléchargement, à l’e-commerce ou au télétravail. Ce retard de l’économie européenne pèse sur les indices boursiers de cette zone.
Un succès à long terme ?
Mais le succès des technologies américaines peut-il tenir dans la durée ? « Penser que ces valeurs vont rester inscrites dans les indices sur le long terme est illusoire. On voit déjà, aujourd’hui, un changement dans les comportements des jeunes. Ils commencent à délaisser Facebook au profit d’Instagram et de Snapchat. Les habitudes et les modes changent. Il y aura donc un turnover dans les indices et les performances des valeurs technologiques », prévient Bernard Keppenne. Si l’on regarde l’évolution des grandes capitalisations américaines entre 1980 et 2020, on constate que bon nombre d’entreprises sont sorties des grands indices et ont été remplacées. Sans compter que certaines valeurs, dont on estimait qu’elles avaient du potentiel, n’ont jamais intégré les grands indices boursiers. Il convient donc de surveiller les disrupteurs dans ces différents métiers.
« Par ailleurs, les marchés ont un horizon différent de celui de l’économie. Ils sont déjà avec une vue sur la phase post-vaccination. Or, l’économie n’est pas encore sortie des effets de la pandémie. Les prévisions concernant une reprise forte de l’économie en 2021 ont été revues à la baisse. On se pose aussi des questions sur le rythme des vaccinations et sur le nouveau variant du virus », note ce chief economist.
La résilience de la Chine
Dans ce contexte, une zone géographique a su tirer son épingle du jeu. Le marché boursier chinois a affiché de très belles performances en 2020. Comment peut-on expliquer ce succès ? « C’est le grand paradoxe de l’année 2020. Foyer de l’épidémie, ce pays a su gérer de façon extrêmement efficace la propagation du virus. On le voit encore aujourd’hui. Lorsque 150 cas de coronavirus sont déclarés, des mesures imposent un lockdown total de 11 millions d’habitants pendant une semaine. En Europe, on se contente de confinement partiel, de mesures imposées puis levées, de couvre-feu à 18 heures etc,… », constate Bernard Keppenne. On peut dire que, grâce à une meilleure gestion de la pandémie, la Chine progresse mieux que les Etats-Unis et ce pays rattrapera plus rapidement les Etats-Unis.
L’or et le Brésil
L’or a aussi profité de certains événements en 2020. D’une part, les banques centrales ont fait des achats plus importants du métal précieux. A cela s’ajoute un contexte de taux d’intérêt très bas. « Finalement, détenir de l’or n’est pas pénalisant puisqu’on n’a plus de rendement obligataire peu risqué. On peut aussi tabler sur son aspect spéculatif », reconnaît Bernard Keppenne. Quant au Brésil, il n’arrive décidément pas à sortir de l’ornière. C’est le grand perdant de 2020 selon les données fournies par Quantalys. La gestion catastrophique de la crise sanitaire est venue se greffer sur des fondamentaux économiques peu solides. Les perspectives pour ce pays ne sont vraiment pas bonnes.