Selon les données fournies par Quantalys concernant la performance des fonds à fin novembre 2021, on constate que certains pays émergents sortent du lot alors que d’autres s’enfoncent dans le marasme.
On remarque ainsi que l’Inde et la Russie sont les marchés d’actions qui ont le mieux performé depuis le début de l’année. En revanche, les marchés boursiers brésilien et, plus largement, sud-américains ont réalisé les moins bonnes performances au 30 novembre dernier. Il en résulte que les marchés de la zone EMEA (Europe, Middle East et Africa) ont largement surperformé les marchés d’Asie et d’Amérique latine cette année. Comment expliquer cette divergence de performance entre les pays émergents depuis le début de l’année ?
Gestion de la crise sanitaire
« Nous nous garderions bien de faire des déclarations générales sur la divergence de performance entre les différents marchés d’actions de la région EMEA, étant donné les différents moteurs de ces marchés/régions. Cependant, nous pouvons faire quelques observations. Tout d’abord, la divergence des performances n’est pas un phénomène nouveau pour les marchés émergents en 2021. Nous avons observé une tendance similaire en 2020, car les différents pays ont connu des expériences très différentes en matière de Covid, de sorte que l’année a commencé avec une divergence significative dans les évaluations de départ », souligne Patrick Garvin, Product Director chez Invesco.
Pour rappel, les pays d’Asie du Nord ont mieux réussi à contenir le virus. Cette situation contraste avec celle des pays d’Asie du Sud, d’Amérique latine et d’Europe orientale. Plus personne n’ignore que les programmes de vaccination se sont fait à des rythmes différents. De plus, le calendrier des restrictions et des mesures de relance a également eu un impact sur le sentiment des investisseurs.
Matières premières
Parmi les éléments qui influencent les économie émergentes, il y a les prix des matières premières. Selon que le pays est un exportateur de matières premières ou un importateur, les conséquences de la hausse des prix de ces matières seront différentes. Il faut donc analyser cet impact pays par pays. La Russie a ainsi clairement été un grand bénéficiaire de la hausse des prix du pétrole et du gaz. Elle a également bénéficié de politiques monétaires et fiscales très conservatrices.
Le Brésil est un gros exportateur alors que l’Inde est surtout importatrice de ces matières premières. « La forte hausse des prix des produits de base a profité à certains pays émergents, tandis que les pressions inflationnistes sont susceptibles de réduire les marges d’exploitation des entreprises qui pratiquent des prix élevés », ajoute Patrick Garvin.
L’Inde est le marché le plus performant d’Asie cette année. Or, ce pays a subi l’une des pires épidémies avec l’apparition du variant delta au deuxième trimestre. Pourquoi l’Inde a-t-elle alors si bien performé en 2021 ? « La résilience du marché boursier est en partie attribuable à l’activité croissante des investisseurs particuliers, à la facilité des liquidités et aux signes de reprise des bénéfices. Les perspectives de la demande intérieure sont positives, avec des signes d’un nouveau cycle de l’immobilier résidentiel après un repli prolongé. Cependant, la valorisation du marché dans son ensemble est élevée par rapport à l’histoire, ce qui représente un défi pour les investisseurs ayant une approche disciplinée de la valorisation », constate Patrick Garvin.
Le Brésil à la traîne
Le Brésil affiche des performances assez décevantes en 2021. Au-delà du prix des matières premières, il faut aussi tenir compte, dans les pays émergents, de critères comme la situation politique ou le niveau de corruption. « Nous ne considérons pas cette situation des marchés brésiliens comme injustifiée compte tenu de la réponse bâclée à la crise, de l’incertitude politique et de la faiblesse des fondamentaux économiques (fort endettement de l’État et faiblesse des comptes extérieurs). Bolsonaro doit faire face à une élection présidentielle en octobre 2022, dont il contestera probablement le résultat s’il est serré, un peu comme le président Trump l’a fait il y a 12 mois. Cela dit, le Brésil devrait bénéficier d’une forte demande et de prix élevés pour les matières premières, soutenus par le mouvement mondial de décarbonisation. Nous trouvons également des raisons d’être optimistes quant à la réouverture des marchés intérieurs », estime Patrick Garvin.
Et pour 2022 ?
On ne peut pas avoir une approche globale de ces pays. Chaque économie, chaque entreprise doit faire l’objet d’une analyse approfondie. Ce type de marchés doit aussi se concevoir au travers de fonds spécialisés compte tenu de leurs spécificités. « Nous avons tendance à nous pencher sur le risque du moment. Dans ce sens, le Brésil et la Chine semblent être des zones intéressantes pour rechercher de nouvelles opportunités, étant donné la récente sous-performance de ces marchés. Nous sommes fermement convaincus que la valorisation de départ est l’un des meilleurs prédicteurs des rendements futurs. Nous sommes donc d’un optimisme prudent quant à l’avenir lorsque nous regardons les valorisations des marchés émergents, qui sont particulièrement raisonnables par rapport aux marchés d’actions mondiaux et américains », conclut Patrick Garvin.