Le capital est mal taxé, les pièges à l’emploi pénalisent certains travailleurs et les taxes environnementales sont à l’ordre du jour. Ces différentes mesures fiscales ont fait l’objet du débat lorsdu Petit Déjeuner Financier organisé ce jeudi par La Libre Belgique et le blog MoneyStore. Philippe Defeyt, Président de l’Institut pour un Développement Durable et
Colette Téchy, Conseillère Juridique Wealth Analysis and Planning chez ING Private Banking ont abordé ces différents thèmes sans tabou, tout en émettant des propositions à envisager dans la durée.
Chenils fiscaux
« Alors que la taxation sur les revenus immobiliers a fait l’objet d’un statu quo durant des décennies, on semble préférer taxer le patrimoine mobilier en Belgique. Et cette taxation mobilière a subi de nombreuses modifications. Le précompte mobilier a ainsi augmenté de 100 % passant de 15 à 30% en quelques années même si le précompte sur les dividendes d’actions a fait récemment l’objet d’un petit cadeau fiscal de la part du gouvernement Michel », constate Colette Téchy. On a aussi assisté à une ébauche de taxation sur la fortune avec l’instauration de la taxe sur les comptes-titres à partir de 500.000 euros. Il faut cependant reconnaître que la Belgique fait figure d’exception en ne taxant pas les plus-values réalisées et en taxant faiblement les revenus immobiliers. Peut-on dire que le capital est suffisamment taxé ? Ou est-il plutôt mal taxé ? « Nos systèmes d’imposition sont illisibles, inefficaces et inefficients. A force de créer des niches fiscales, nous avons construit de véritables chenils ! Toutes les aides ou primes octroyées se retrouvent finalement dans la poche des vendeurs et jamais dans celles des consommateurs », relève Philippe Defeyt. On constate par ailleurs, que le système fiscal en vient à conditionner le style de vie des personnes. On encourage ainsi la propriété immobilière plutôt que la location et le transport en voiture est favorisé grâce au système des voitures de société qualifié aussi de « voitures salaires ».
Sur le long terme
Il ne faut cependant pas avoir peur de certaines réformes et, au-delà des slogans électoraux, il convient d’analyser les conséquences pratiques des propositions. « En toute logique, il conviendrait de taxer plutôt les revenus que le patrimoine et, dans ce cadre, de taxer les revenus réels car, aujourd’hui, on taxe des revenus mobiliers négatifs. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, certaines réformes apporteraient à la fois plus d’efficacité dans la redistribution et plus d’équité », note Philippe Defeyt. Cet économiste suggère alors de réfléchir au-delà des cadres traditionnels. Pour éviter les pièges à l’emploi et permettre à certains de rejoindre le marché du travail sans perte de revenus, il propose d’instaurer un précompte professionnel négatif qui permettrait ainsi de pouvoir bénéficier directement d’un crédit d’impôt. En ce qui concerne les taxes environnementales, il serait faux de croire que ces taxes auraient un impact négatif sur la croissance ou la productivité. « La Suède est pionnière en matière de taxation environnementale et elle a pourtant un taux de croissance des plus élevés en Europe. L’Allemagne et la Suisse sont aussi des pays qui ont des politiques cohérentes en matière environnementale. Cependant, il faut être conscient que les mesures qui doivent être prises en matière de taxation doivent l’être sur une période de transition. Il faut qu’elles soient instaurées progressivement et de façon efficace », ajoute Philippe Defeyt. Cette transition progressive doit aussi s’appliquer aux voitures de société. « Aujourd’hui, cette façon de diminuer la fiscalité sur les salaires se heurte au problème climatique. Sans supprimer cet avantage, il faudra sans doute l’adapter en tenant compte des émissions de CO2 ou en proposant des alternatives qui répondent davantage aux attentes des jeunes générations », estime Colette Téchy. Les deux orateurs rappellent à cet égard que nos choix de vie ne devraient pas être conditionnés par des choix d’optimisation fiscale. Des réformes en matière fiscale sont nécessaires et devront être envisagées par le futur gouvernement sur le long terme et surtout de façon efficace et cohérente dans le temps au fil des différentes législatures.
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