Non, la prochaine crise ne viendra pas des dettes publiques !

Les urnes ont livré leur verdict. Dès la formation des instances de pouvoir, et au-delà des slogans, les élus vont devoir s’attaquer à résoudre de nombreuses situations parfois critiques. Parmi celles-ci, le niveau des dettes publiques sera à nouveau au rendez-vous. Certains prédicateurs alarmistes nous ont annoncé une catastrophe imminente dont l’origine serait le niveau d’endettement des Etats. Mais qu’en est-il dans les faits ? Analyse avec Etienne de Callataÿ, Président et chief economist d’Orcadia Asset Management.

Où en est-on aujourd’hui concernant l’endettement des pays européens ?

Au niveau européen, nous sommes dans une situation budgétaire d’entre-deux. Nous n’assistons ni à une détérioration de l’endettement public ni à une catastrophe. Même en Italie, alors que la situation de ce pays défraye régulièrement la chronique, le ratio dette publique/PIB n’est pas alarmant. La dette italienne comparée à son produit intérieur brut reste relativement stable. Par ailleurs, d’autres pays ont indiqué vouloir pratiquer l’austérité et ne le font pas dans les faits. C’est le cas de la Belgique qui ne connaît pas d’assainissement structurel de ses finances. Finalement, nous ne connaissons ni l’austérité que certains critiquent, ni le dérapage dont beaucoup s’inquiètent.

Pourtant, des problèmes subsistent ?

En réalité, il faut se placer dans une perspective inter-temporelle. Avec le vieillissement de la population, on pourrait connaître des années plus difficiles au niveau budgétaire. Dans un environnement de croissance faible, il conviendrait de se soucier davantage du bien-être des générations futures en étant plus stricts dans nos choix budgétaires. Etre plus stricts n’est pas incompatible avec davantage d’investissements. On peut ainsi envisager plus d’investissements pour assurer la transition environnementale, par exemple, puisque ces investissements seront au service des générations futures. Cela supposera donc plus d’impôts et moins de dépenses courantes mais surtout davantage d’efficacité des pouvoirs publics.

Le niveau d’endettement public est-il un réel danger ?

Ceux qui annoncent une crise financière majeure qui aurait comme point de départ les finances publiques sont dans l’erreur. A court terme, nous ne courons pas de danger immédiat avec un endettement financé à des taux bas. De même, la situation italienne est encore tenable même si elle n’est pas souhaitable. Il n’y a pas de raison d’être catastrophiste. Le problème de l’Italie est avant tout celui d’un manque de croissance et ce serait mal jugé que de se braquer uniquement sur les finances publiques. A court terme, le risque c’est surtout une crise qui serait provoquée par une panique alimentée sur le sujet des finances publiques par des gourous ou des économistes. Il faut arrêter de proclamer une crise budgétaire aux conséquences catastrophiques !

Quelles orientations faut-il alors privilégier ?

Le réel danger est à long terme dans le cadre de l’équilibre entre les générations. Des dépenses d’investissement devraient se faire. Or, nous sommes dans un environnement de faible croissance. Il faut aussi être conscients qu’il faudra un jour rembourser les emprunts auxquels nous avons souscrits. Il faut donc éviter de se mettre dans une situation de dépendance vis-à-vis de marchés financiers qui sont sujets à des mouvements de panique. Nous devrions pratiquer la tempérance budgétaire. Si la croissance est supérieure à 1,5%, nous devrions nous attacher à réduire le déficit public tout en favorisant ce qui est bon pour les générations futures. C’est le cas des dépenses liées à l’environnement, par exemple. Il ne faut pas de dogmatisme non plus. Nous devons agir en fonction de la conjoncture en sachant qu’il y a des contraintes budgétaires à respecter.

Et en une phrase de conclusion ?

Arrêtons de faire paniquer inutilement. Certains estiment qu’il faut faire paniquer les gens pour les faire bouger. Dans son discours de départ de la Banque Centrale Européenne, Peter Praet a rappelé qu’il ne fallait pas souscrire à cette vision qui consiste à faire paniquer la population. En une phrase je conclurais donc : la panique est mauvaise conseillère !

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