
L’expression « état-providence » désigne les interventions dans le domaine économique et social de l’Etat dans la société. Cette définition est cependant souvent limitée aux seules interventions de l’Etat dans le domaine de la protection sociale (indemnités de chômage, pensions, assurances et assistances sociales,…). D’un point de vue historique, on place le système d’assurance sociale initié par Bismarck à la fin du XIXème siècle comme étant le point de départ de cette notion. En 1945, la France crée le concept de la sécurité sociale.
Cependant, depuis les années 70 on parle de crise de l’état-providence. Qu’entend-on par là ? Avec le ralentissement de la croissance, la montée du chômage et les difficultés liées au financement du système de sécurité sociale, l’Etat peine à remplir ses fonctions d’état-providence. On dit alors que le système n’est plus efficace et qu’il laisse sur le bord du chemin une série de personnes démunies.
Dans son dernier ouvrage[i] co-rédigé avec Mathieu Lefebvre, Pierre Pestieau analyse cette crise de l’état-providence. Le premier constat qui y est posé est le changement d’environnement que la société a connu depuis la fin de la seconde guerre mondiale. La mondialisation de l’économie, le vieillissement de la population, les évolutions du marché du travail et des structures familiales ou encore le ralentissement de la croissance sont autant de facteurs qui ont pesé sur le fonctionnement du système de protection sociale.
Or, contrairement à ce qu’il pourrait paraître de prime abord, en Europe, la performance de l’état-providence est plutôt satisfaisante même si des différences apparaissent entre pays. « Ce bilan satisfaisant, et qui va à l’encontre de jugements hâtifs et idéologiques souvent émis, ne doit cependant pas nous faire oublier que les menaces demeurent, sans doute plus vives que dans le passé. Ces menaces appellent des réformes urgentes et difficiles, qui se heurtent souvent à un certain conservatisme social et au souci d’un grand nombre de citoyens qui veulent maintenir leurs droits acquis », rappelle Pierre Pestieau.
Des réformes sont donc nécessaires pour adapter le régime de la sécurité sociale à la nouvelle donne économique et sociale. Dans leur ouvrage, les auteurs proposent donc certaines pistes en précisant que les solutions apportées ne doivent pas se limiter aux personnes les plus démunies.
L’état-providence devrait être capable de résorber la fracture sociale qui est une des sources de la montée des populismes. « La toute première fracture est celle qui s’articule autour du revenu et de la richesse. Il y aussi celle qui tourne autour de la santé et de l’emploi. Il y a encore la fracture médicale créée par les déserts médicaux, la fracture numérique qui exclut ceux qui ne peuvent pas avoir accès à la révolution digitale et la fracture identitaire qui oppose ceux qui se sentent menacés par la globalisation et l’immigration et ceux qui au contraire y voient une opportunité. Une autre fracture largement étudiée est géographique. C’est celle qui oppose les gens des centres villes à ceux des banlieues et des campagnes », note encore Pierre Pestieau. L’état-providence n’est donc pas mort mais pour assurer sa continuité, il ne faudrait pas le réduire à sa seule composante financière.
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[i] L’Etat providence : défense et illustration, Presses Universitaires de France – PUF, 2017
Précis et concis… parfait