
Par Vincent Juvyns, Stratégiste chez J.P. Morgan AM
Le thème de la reflation, ce mélange d’accélération de la croissance et de retour de l’inflation favorisé par des politiques fiscales et budgétaires plus expansionnistes, agite les marchés financiers depuis qu’en novembre 2016, Donald Trump est devenu le 45ème président des États-Unis en défendant un ambitieux programme de relance budgétaire. Bien que ce dernier n’ait jusqu’ici rien fait de concret en la matière, la dynamique reflationniste est bel et bien là en ce début 2017, grâce à l’impact conjugué de politiques monétaires toujours très accommodantes globalement et de politiques budgétaires déjà plus expansionnistes dans divers pays comme la Chine et le Japon, ainsi qu’en Europe.
Si cet environnement reflationniste est globalement positif d’un point de vue économique et par extension pour les marchés financiers, on pouvait néanmoins craindre à la fin de l’an dernier que celui-ci, conjugué à une politique commerciale plus protectionniste des Etats-Unis, ne pénalise le monde émergent. En effet, l’accélération de la croissance et de l’inflation oblige les banques centrales, et surtout la première d’entre-elles, la Réserve fédérale américaine (« Fed »), à normaliser leurs politiques monétaires, ce qui s’est historiquement traduit par une hausse des taux longs et du dollar ainsi que par un ralentissement des flux financiers vers les émergents.
Bien qu’il soit toujours dangereux de dire que « cette fois c’est différent », il faut néanmoins reconnaître que depuis le début de l’année on a assisté à exactement l’inverse puisque bien que la Fed ait continué à remonter son taux directeur, les taux US à 10 ans sont restés stables, le dollar s’est globalement affaibli et les flux vers les marchés émergents se sont renforcés.
Cette situation s’explique par différents facteurs. Signalons tout d’abord que la croissance accélère à nouveau davantage dans les pays émergents que dans les pays développés (cf. Graphique 1).
[1] FactSet, Consensus Economics, J.P. Morgan Asset Management. .“Différentiel de croissance” correspond aux estimations du consensus pour la croissance des marchés émergents (EM) pour les 12 prochains mois moins les estimations du consensus pour les marchés développés (DM) pour les 12 prochains mois. Données fournies par Consensus Economics.
En effet, selon le FMI[1], les pays émergents devraient afficher une croissance de 4.5% en 2017 contre 2% pour les pays développés. On observe ensuite que si l’inflation augmente globalement, c’est essentiellement le cas dans les pays développés, alors que dans les pays émergents elle tend à se stabiliser voire à baisser. (cf. Graphique 2)
[1] Thomson Reuters Datastream, J.P.Morgan Asset Management.
Enfin, dans ce contexte, les banques centrales émergentes, contrairement à leurs consœurs dans les pays développés, ne sont pas obligées de durcir leur politique monétaire et peuvent même dans certains cas plutôt s’offrir le luxe de l’assouplir. En effet, ces dernières années, les taux directeurs réels des banques centrales émergentes ont été portés à des niveaux historiquement élevés afin de soutenir les devises émergentes dans le sillage du Taper Tantrum[2]. Cependant, ces mesures semblent aujourd’hui superflues, puisque grâce à leur regain de croissance et à la réduction de leurs déséquilibres macro-économiques, les pays émergents attirent à nouveau des capitaux et voient les pressions baissières sur leurs devises diminuer.
Ainsi, avec une croissance en hausse, une inflation en baisse et des politiques monétaires potentiellement plus souples, la plupart des pays émergents se trouvent dans une position relativement confortable d’un point de vue économique et pour les investisseurs obligataires, la meilleure manière de tirer parti de ces développements est notamment de privilégier la dette émergente qui , en plus d’être soutenue par ces bons fondamentaux économiques, continue à afficher un rendement supérieur à 5%[3].
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Lire aussi le corner Fenêtre sur le Monde
[1]FMI, World Economic Outlook, 30 avril 2017
[2] Remontée des taux américains et baisse des devises émergentes soudaine suite a un discours de Ben Bernanke en mai 2013
[3] Thomson Reuters Datatstream, 12 juin 2017