Par Erik Joly, Head Investment Office , ABN AMRO Private Banking
En 2015 la croissance mondiale restait une fois de plus en-dessous des attentes des analystes. Surtout dans les pays émergents, la croissance n’était pas au rendez-vous. En Europe par contre, la croissance économique correspondait bien aux attentes. Aux Etats-Unis et au Japon, on assistait à des chiffres relativement encourageants. Le ralentissement de l’économie chinoise et la baisse ininterrompue des matières premières dans le courant de 2015, ont été déterminants pour l’évolution de l’économie mondiale. Qu’en est-il pour 2016 ?
Nous tablons sur une reprise modérée de l’économie mondiale. Nous sommes conscients qu’il peut y avoir des différences régionales assez prononcées. En effet, plusieurs risques peuvent faire barrage à la croissance. A cause des problèmes en Chine et de l’évolution des matières premières, bon nombre de pays émergents éprouvent de plus en plus de difficultés à mettre en ordre leurs finances publiques. Il est également difficile de prévoir comment les marchés financiers et les différentes économies réagiront au resserrement monétaire aux Etats-Unis. Et pour finir, n’oublions pas que les tensions géopolitiques sont loin d’être résolues.
Mais il y a des éléments positifs. En Europe ainsi qu’aux Etats-Unis, la reprise est bel et bien au rendez-vous, grâce notamment à une demande interne forte et à un taux de chômage qui est généralement en baisse. Ces deux régions font également de sérieux progrès en matière de renforcement du système financier. Les banques centrales continuent à jouer un rôle crucial dans la gestion et la maîtrise des risques macro-économiques (bien qu’opposées dans la direction de la politique monétaire poursuivie).
La Chine et l’Inde incarnent le “turnaround” dans les économies émergentes. Les marchés des matières premières sont en train de se stabiliser, bon nombre de devises de pays émergents se déprécient et les autorités locales prennent des mesures pour stimuler leurs économies. Tout cela devrait bénéficier aux exportations et faire en sorte que les marchés émergents n’aient plus d’impact négatif sur la croissance de l’économie mondiale.
Après avoir connu une période où les cours des actions anticipaient les bénéfices des sociétés, nous voilà arrivés à un rééquilibrage : les prestations des actions iront de paire avec la croissance bénéficiaire des sociétés. Les marchés actions ont une valorisation correcte; avec un rapport cours/bénéfice (attendu) de 15.5, on se trouve dans la bonne moyenne. Mais il est un fait que ce ratio a déjà bien progressé pendant ces cinq dernières années. Il démontre que le marché se trouve maintenant dans un phase (plus) mature. Des taux plus élevés aux Etats-Unis ne devraient avoir qu’un impact minime sur les cours de bourse, madame Yellen ayant “préparé” le marché avec soin à un resserrement progressif. L’économie US se trouve dans un stade plus avancé dans le cycle économique, ce qui laisse à nos yeux aux sociétés américaines peu de possibilités pour augmenter leur marges bénéficiaires de façon à exponentielle. L’Europe est nettement mieux positionnée ; les marges opérationnelles peuvent s’améliorer et la faiblesse de l’euro permettra aux sociétés d’améliorer leurs bénéfices.
En termes de valorisation, les actions européennes se traitent à 14,8 les bénéfices attendus, contre 16.5 fois pour les actions américaines. Les primes de risque (yieldspreads) que les obligations étatiques de la zone euro offraient par rapport aux Bunds allemands et au cash, ont largement disparu.
Les obligations « corporate » sont bien positionnées pour tirer profit de la reprise économique en Europe ainsi que d’un dollar fort.
La dernière intervention de Monsieur Draghi a démontré que la BCE à des difficultés pour atteindre ces objectifs en matière d’inflation (proche de, mais en dessous des 2%). Mais on ne peut jamais exclure un retour de l’inflation. Il suffirait que les prix du pétrole (qui sont anormalement bas pour l’instant) remontent, pour que l’inflation réapparaisse.