Dans certains portefeuilles, en gestion discrétionnaire ou en sicav, le poids des valeurs financières est important. Plus de sept ans après la crise financière, une telle pondération se justifie-t-elle ? Les avis sont partagés.
Le secteur financier est confronté à un environnement assez particulier : alors que les taux d’intérêt sont au plancher, les liquidités placées par les investisseurs et les entreprises sur les comptes bancaires atteignent néanmoins des montants surprenants. Les banques doivent rémunérer ces dépôts à des conditions supérieures aux taux d’intérêt offerts sur les dépôts auprès de la BCE alors que la BCE vient encore d’abaisser ses taux.
Par ailleurs, les exigences réglementaires en matière de solvabilité et de fonds propres sont assez contraignantes. Les régulateurs imposent également des obligations qui génèrent des coûts importants pour le secteur. « Si les banques doivent mobiliser des ressources financières plus importantes en termes de fonds propres sans augmenter leur business, la rentabilité peut être affectée. Si elles veulent augmenter leur chiffre d’affaires, elles doivent avoir davantage de fonds propres : c’est un cercle sans fin. La seule manière pour les banques d’accroître leur rentabilité est de diminuer leurs coûts », explique Frédéric Liefferinckx, Membre du comité de direction de Leleux Associated Brokers. Cette pression sur les coûts opérationnels se traduit par une diminution du nombre d’agences et par des coupes dans le personnel, comme annoncé encore récemment chez BNP Paribas Fortis ou chez ING.
Par ailleurs, les régulateurs imposent aux gestionnaires de fonds d’investir dans des valeurs cotées. La plupart des grands fonds d’investissement copient ou suivent de très près les indices. Or, les valeurs financières sont fortement pondérées dans ces indices, ce qui explique la présence de ces valeurs dans la majorité des portefeuilles. « Le secteur financier représente 20% de la composition des indices européens. Ne pas être présent dans ce secteur peut représenter un risque », prévient Rudy De Groodt, equity specialist chez BNP Paribas Fortis.
Cependant, il convient d’être sélectifs dans ses choix. Même si le secteur, dans son ensemble, a sous-performé en 2015, quelques institutions bancaires ont réalisé de très belles performances. « Les banques françaises ont réalisé de très bonnes performances et on a aussi assisté à l’introduction en bourse d’ABN Amro. Les marges de ce secteur sont soutenues par les diminutions de coûts qui ont été réalisées », reconnaît Vincent Juvyns, Stratégiste chez J.P. Morgan AM. Cet avis est partagé par les stratèges de BNP Paribas Fortis. « L’économie va mieux et nous avons tout lieu de penser que les banques devront faire moins de réserves car il y aura moins de défauts sur l’encours des crédits. De plus, la politique de la BCE est efficace. On assiste à une hausse des crédits octroyés au secteur privé, entreprises et particuliers. Cette relance des crédits est bénéfique pour les marges dégagées par les banques », note Xavier Timmermans, Stratège chez BNP Paribas Fortis. Beaucoup de gestionnaires intègrent donc ces valeurs en portefeuille. Ils reconnaissent cependant qu’il faut y entrer en respectant des critères stricts : donner la préférence aux banques européennes domestiques orientées vers le retail et, surtout, il convient de bien se focaliser sur les valorisations.
Mais ces valorisations ne sont pas toujours faciles à analyser et tous les gestionnaires de fonds ne sont pas unanimes sur ce secteur. « Pour nous, la valorisation est importante lorsque nous intégrons une valeur en portefeuille. Nous devons donc pouvoir valoriser correctement une société avant d’y investir. Nous n’intégrons pas de valeurs financières (banques ou assurances) en portefeuille parce que nous estimons qu’elles ne sont pas suffisamment transparentes. Nous ne pouvons pas juger de la qualité de leurs fonds propres ou de leurs bilans. Nous préférons donc rester à l’écart de ce secteur. Ce secteur ne se prête pas à notre méthodologie », avoue Guy Wagner à la Banque de Luxembourg. Il est vrai que les bilans des banques sont extrêmement difficiles à analyser et à interpréter et que la visibilité et la transparence de ce secteur sont encore assez réduites.
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