Dans notre blogpost précédent, nous évoquions déjà la Grèce et avions expliqué qu’un Grexit, une sortie de ce pays de la zone Euro, ne serait pas une bonne solution pour la péninsule hellénique, et encore moins pour l’Europe. Aujourd’hui, après plus d’un mois de négociations, un accord a été trouvé sur un troisième plan de sauvetage pour la Grèce. Ce plan prévoit un financement supplémentaire de 85 milliards d’euros pour le pays en échange d’un nouveau package d’économies, d’impôts et de réformes. Peut-on enfin parler de sauvetage définitif ?
Nous ne le pensons pas. Après ce plan de financement, la dette grecque s’élèvera à plus de 200 % du produit intérieur brut : un niveau intenable qui entraînera irrémédiablement l’économie hellène dans un cercle vicieux. Les économies et autres efforts nécessaires pour réduire le passif pèseront en effet encore longtemps sur la croissance économique, réduisant encore les possibilités de rembourser les emprunts à l’avenir. Pour en arriver à un niveau d’endettement durable, un effacement d’une partie de la dette grecque est nécessaire, en échange de majorations d’impôts, d’économies et de réformes effectivement appliquées. Toutefois, la population allemande refuse tout effacement de la dette. La population grecque, quant à elle, en a assez de devoir se serrer la ceinture.
Tout ceci démontre l’erreur fondamentale de construction dans la zone Euro. Dans une union monétaire, il devrait y avoir un accord sur la politique économique à mener. Cependant, la zone Euro est constituée de 19 gouvernements, attachés à leur indépendance et qui doivent remporter des élections. La politique économique optimale au sein de la zone Euro n’est pas forcément soutenue par une majorité démocratique dans chaque État-membre qui la compose. Une étude académique démontre que les unions monétaires peuvent fonctionner avec des États indépendants (le principe de « souveraineté ») ou avec la démocratie, mais pas avec les deux. Étant donné que l’objectif est bien de sauver l’union monétaire sans évidemment abolir la démocratie, plusieurs traités ont été signés ces dernières années pour limiter la souveraineté des États-membres au profit de l’Europe. Prenons comme exemple l’union bancaire (où l’Europe contrôle à la place de chaque État) ou le sixpack (qui permet à l’Europe de se prononcer sur les budgets des Etats-membres).
L’introduction de toutes ces mesures a rendu la politique économique plus cohérente au sein de l’Europe et réduit les risques pour la zone Euro. C’est une des raisons pour lesquelles les taux que les pays comme l’Irlande, l’Espagne et l’Italie doivent payer se sont à nouveaux normalisés.
D’autre part, le transfert de pouvoir des États-membres individuels vers le niveau européen n’a pas entraîné un renforcement de l’assise démocratique de la zone Euro. Ainsi, le mandat de l’Eurogroupe – le rassemblement des ministres des finances qui dirige la zone Euro – n’est pas clair, et son processus décisionnel n’est pas non plus un modèle de transparence. En outre, le pouvoir du Parlement européen reste relativement limité. Le risque que les États-membres, qui expriment chacun l’opinion de leur propre population, aient des visions opposées quant à la politique à suivre, reste donc bien présent dans la zone Euro.
Le renforcement de la zone Euro a débouché, à court terme, sur une plus grande stabilité sur les marchés financiers, mais les changements ne sont toutefois pas encore assez fondamentaux pour résoudre définitivement les conflits existants entre une politique cohérente, la souveraineté et la démocratie. À l’avenir, nous pouvons donc nous attendre à de nouvelles crises et à de longues réunions nocturnes à Bruxelles…
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Il n’est pas certain qu’une politique européenne soit susceptible d’empêcher qu’avec une monnaie unique une évolution dynamique n’entraîne les investissements aux endroits les plus rentables. Regardez le contraste du niveau de développement entre régions au sein des Etats-Unis et dans nos pays dont les niveaux de vie sont globalement semblables. Demain les grecs iront travailler en Allemagne et cela renforcera les différences de développement, comme hier, les limousins ou les auvergnats ont été à Paris