La Revue : Une question de croissance

Une question inquiète les observateurs des marchés : l’économie pourra-t-elle encore assurer sa croissance sans être soutenue par les politiques monétaires accommodantes pratiquées par les banquiers centraux ?

« Il est évident que le désendettement structurel opéré au niveau mondial a eu un effet de ralentissement sur la croissance qui ne pourra plus atteindre les niveaux qui prévalaient avant la crise. La croissance donne néanmoins des signes de reprise. Par exemple, aux Etats-Unis, la demande domestique reprend vigueur soutenue par une relance du secteur immobilier et des taux d’emploi à la hausse. Les entreprises recommencent à investir et les bonnes nouvelles en matière de ressources énergétiques supporteront une réindustrialisation dans ce pays. Cependant, la croissance pourrait être freinée par un resserrement budgétaire qui serait néanmoins salutaire pour la situation du déficit public de ce pays », explique Peter Vanden Houte, Chief Economist chez ING Belgium.

En Europe, le pessimisme reste de mise même si des éléments positifs apparaissent. L’évolution de la croissance mondiale soutient les exportations nettes et la Commission semble assouplir sa politique d’austérité, ce qui soulage les ménages et favorise la consommation dans certains pays. « L’inflation reste sous contrôle et la chute importante de la prime de risque enregistrée sur cette région est un facteur favorable pour la croissance. Le gros problème en Europe reste la fragmentation des marchés financiers qui pénalise les PME dans les pays périphériques qui ont besoin du soutien de ce marché. La solution passerait par la mise en place d’une vraie union bancaire en Europe, » estime Peter Vanden Houte.

Selon cet économiste, si la reprise est attendue, elle sera molle. La Banque centrale européenne maintiendra sa politique de taux d’intérêts faibles même si cela passera par des mesures monétaires moins conventionnelles.

Globalement, les taux de croissance attendus pour 2013 devraient être de près de 2% aux Etats-Unis, légèrement négatif en Europe, nul en Belgique, de 2,4% au Japon et de 7,8% en Chine.

Et la Belgique dans tout ça ?

Globalement, en Europe, on assiste à une amélioration du coût du travail. « Les coûts unitaires dans les pays périphériques ont diminué et convergent vers les coûts allemands. Mais nous attirons l’attention sur le fait que, pendant ce temps, ces coûts unitaires ont augmenté en Belgique, en France et en Italie. Alors que la Belgique était auparavant parmi les bons élèves de la classe, depuis le déclenchement de la crise, ses coûts unitaires du travail n’ont cessé de grimper engendrant une perte de compétitivité de notre pays », note Peter Vanden Houte. « On a entendu certaines personnes vanter la recette belge après la crise. Mais, en réalité, nous avons préféré privilégier des mesures à court terme plutôt qu’à moyen terme. En préservant, à court terme, le pouvoir d’achat des ménages, nous avons provoqué une perte de compétitivité de notre pays. Nous avons un handicap salarial. Les remèdes à cette situation devraient passer par des mesures comme le blocage des salaires ou encore la diminution des durées de préavis. Nous avons un marché du travail peu souple. Les barrières à la sortie sont aussi des barrières à l’entrée », souligne Etienne de Callataÿ, Chief Economist à la Banque Degroof.

En ce qui concerne l’évolution de la balance courante, on constate un mouvement de convergence des pays périphériques qui ont amélioré le déficit de leur balance courante. « Par contre, à cet égard, la situation de la Belgique est inquiétante car nous sommes passés d’un surplus de la balance courante à un déficit. Cette évolution négative met en exergue la perte de compétitivité de notre pays », regrette Peter Vanden Houte. La dégradation en Belgique est plus marquée qu’ailleurs. Ce sont donc des mesures structurelles qui sont attendues dans notre pays.