Par William De Vijlder, BNP Paribas Invetsment Partners
Malgré des commentaires négatifs fin 2011, les marchés financiers ont agréablement surpris les investisseurs cette année. Il est donc tentant d’affirmer qu’il faudrait toujours faire l’inverse de ce que pense l’opinion générale, à savoir acheter lorsque l’actualité est mauvaise et vendre lorsque l’optimisme règne. La réalité est bien entendu plus complexe mais il est évident qu’un investisseur doit évaluer la « date de validité » d’un thème : lorsque les mauvaises nouvelles s’emparent des marchés, il convient de se concentrer sur le rayon de soleil perceptible à travers les nuages car il peut être le prélude à de plus larges éclaircies et inversement, lorsque le ciel est dégagé, il convient de chercher d’où peuvent venir les premiers nuages.
Jusqu’où faut-il investir à contre-courant à l’heure actuelle ? Il semble, au vu des nouvelles récentes, que le verre des investisseurs est plutôt à moitié plein. Le marché de l’emploi américain est enfin en train de s’améliorer ; les indicateurs de confiance européens semblent se stabiliser ; la Chine a assoupli ses exigences en matière de réserves obligatoires; la réduction d’impôt sur les revenus introduite sous l’administration Bush est prolongée et un accord a été conclu concernant la Grèce. La lecture de la première page du Financial Times de samedi dernier (S&P gains hint at budding recovery) me donne l’impression qu’il est temps d’examiner ce qui pourrait provoquer un retournement de situation dans le climat d’optimisme actuel.
Je perçois à cet égard 5 facteurs potentiels. Premièrement, la hausse des marchés. Depuis le début de l’année, les indices Eurostoxx 50 et S&P500 ont grimpé d’environ 10% et 8% respectivement. Les différents marchés émergents ont fait encore mieux. Bon nombre d’investisseurs ont d’ores et déjà engrangé plus de gains sur leurs actions que ce qu’ils prévoyaient pour toute l’année. Par conséquent, plus cette tendance se poursuivra, plus la tentation de prendre une partie de ses bénéfices sera grande. Deuxièmement, les chiffres économiques. Ces derniers vont clairement dans la bonne direction aux États-Unis, y compris sur le marché de l’emploi, et le secteur de la construction semble de surcroît se redresser. En Europe, les indicateurs de confiance sont apparus satisfaisants. Plus les résultats sont bons, plus il est difficile de surprendre agréablement les économistes et des chiffres décevants pèseraient bien entendu sur le moral des investisseurs. Troisièmement, les élections en Grèce, qui auront lieu en avril, menacent de se concentrer uniquement sur la situation économique et financière du pays et la politique en la matière. Elles seront certainement suivies avec attention par les investisseurs internationaux. Quatrièmement, la hausse des cours pétroliers. En dollars, le baril de Brent a franchi la barre des 120 et gravite autour du sommet de 2008 en euros. Cette flambée est naturellement liée au risque géopolitique (Iran) et il ne faut pas s’attendre à ce que ce facteur passe au second plan. La poursuite de cette montée du cours de l’or noir, pour des raisons politiques mais aussi, par exemple, en anticipation d’une amélioration économique mondiale au second semestre, serait à terme gênante, non seulement pour les banques centrales (regain des craintes inflationnistes) mais également pour les perspectives de croissance. Cinquièmement, la remise en évidence des grands défis structurels, tant en Europe qu’aux États-Unis, avec en conséquence des prévisions de croissance qui resteront plutôt modestes par rapport aux mesures historiques. L’investisseur devra donc évaluer quand un ou plusieurs de ces cinq facteurs gagneront de l’importance. Pour l’heure, le contexte est à l’abondance de liquidités disponibles et ce sont ces dernières qui soutiennent indirectement les cours boursiers, mais gardons néanmoins à l’esprit l’argument de la « date de validité ».