En 2013, les marchés actions devraient évoluer au gré de grands événements, et leur orientation dépendra beaucoup de la capacité des dirigeants politiques et des banquiers centraux à parvenir à des accords et à prendre les bonnes décisions politiques. Nul doute qu’on observera une expansion importante et synchronisée des bilans des banques centrales en 2013. Les autorités monétaires étant toutes embarquées dans des plans d’assouplissement quantitatif, ce qui semblait non conventionnel il y a quelques années est maintenant devenu la norme. Le signal envoyé aux marchés obligataires reste fondamentalement inchangé. Les rendements des emprunts souverains devraient rester faibles, les rendements réels négatifs encourageant les investisseurs à rechercher des performances positives dans des actifs de duration courte, générateurs de revenu.
Les actions peuvent être tirées à la hausse soit par la croissance des résultats, soit par l’expansion des multiples ; mais les perspectives de hausse des bénéfices sont plutôt modestes dans les pays développés. Ainsi, les marges bénéficiaires étant déjà à des plus hauts historiques, la croissance des chiffres d’affaires s’établira à 4-5 % aux États-Unis et en Asie, moins en Europe Toutefois, même si cela ne vient pas des bénéfices, les actions pourraient quand même connaître un rebond en fonction des progrès réalisés sur certaines thématiques clés. Ce scénario positif pour les actions repose sur trois facteurs favorables :
- Les valorisations sont raisonnables par rapport à l’historique, avec des PER de 13 à 14 fois les résultats des 12 derniers mois. Même si ce n’est extrêmement bas, l’attrait relatif des actions s’amplifie lorsque l’on compare les valorisations à celles des obligations souveraines et Investment Grade.
- Depuis quelques années, les marchés actions subissent des décollectes importantes sans discontinuer, de sorte que le niveau des actions dans les portefeuilles institutionnels atteint un plus bas sur 30 ans. Les actions sont une classe d’actifs mal aimée, mais de plus en plus, on sent que cette tendance pourrait s’inverser.
- La volatilité se dissipe ; or, depuis 2008, c’était la malédiction récurrente des actions, le VIX s’étant souvent envolé au-delà du seuil de 20 %. Nous avons toujours pensé qu’aucune reprise ne pourrait survenir sur les marchés actions avant que la volatilité s’atténue, et nous constatons avec satisfaction que l’indice VIX est retombé à près de 15 % et qu’il n’a pas dépassé 20 % depuis juillet.
Même si ces facteurs rendent une réévaluation possible, la progression des marchés pourrait être endiguée par plusieurs obstacles majeurs. Ainsi, selon nous, les actions seront soumises à trois risques majeurs en 2013 :
- Celui d’absence de résolution dans la question de la falaise budgétaire, qui précipiterait une récession américaine, voire mondiale. Les chances de « tomber dans le précipice » (ce qui coûterait alors près de 4 % au PIB) sont sous-estimées en raison du fossé idéologique qui divise le Congrès.
- Celui d’un blocage de la crise économique, souveraine et bancaire en Europe, qui demeure pour l’instant irrésolue même si les promesses de la banque centrale ont eu un impact positif Un regain de tension n’est pas à exclure étant donné que la situation politique des pays périphériques se radicalise. De plus, la dynamique défavorable de la dette et les fondamentaux économiques moroses sont signes d’une possible nouvelle dégradation.
- Celui lié aux problématiques géopolitiques, notamment au Moyen-Orient, qui pourraient entraîner un risque important et imprévisible : ainsi, il est possible que l’on assiste à un point culminant des tensions entre Israël et l’Iran sur la question nucléaire.
Par conséquent, que peuvent faire les investisseurs ? Les emprunts d’État n’offrant plus de réserve de valeur déduction faite de l’inflation, il faudra poursuivre la quête de rendement, notamment vers les actifs de duration courte.
Dans ce contexte, le revenu des actions reste intéressant compte tenu du rendement du dividende des actions par rapport à celui des obligations souveraines. En Europe, les investisseurs peuvent s’attendre à des rendements d’actions proches de 3 à 4 % (à l’exception du secteur financier, où beaucoup d’établissements ne versent plus de dividendes). Les bilans des entreprises sont robustes, les flux de trésorerie solides et les ratios de distribution relativement faibles, ce qui laisse un potentiel de croissance. Nous pensons que nous observerons une croissance des résultats et du dividende de 4 à 5 % en 2013, notamment dans les grandes sociétés de qualité. Donc si l’on combine des dividendes de 3 à 4 % et une croissance estimée de 4 à 5 %, nous pouvons générer des performances totales attrayantes de 7 à 8 %, ce qui devrait favoriser de nouveaux flux d’investissement dans les fonds d’actions à revenu.
Sur le plan sectoriel, nous pensons que la dynamique de leadership de l’année dernière restera inchangée. La qualité restera un thème important, et les actions à rendement du capital élevé conserveront un attrait particulier. Certaines valeurs de la santé, des technologies et de la consommation sont toujours intéressantes. Nous identifions des sociétés de grande qualité bien implantées, qui bénéficient de facteurs structurels puissants tout en versant des dividendes à leurs actionnaires, comme par exemple Nestlé, Unilever et Sanofi. En investissant dans ces multinationales, les investisseurs peuvent être quasiment sûrs d’en avoir pour leur argent et parallèlement, ils recevront un revenu plus élevé que celui des emprunts d’État. Ainsi, certains groupes pharmaceutiques affichent des PER inférieurs à 10 % malgré tout un très bon rendement du capital. Dans les technologies, on peut voir aussi que le potentiel de croissance du dividende est élevé ; certaines grandes valeurs sont devenues des entreprises matures plus stables, à croissance plus faible, qui génèrent une performance totale intéressante. Par exemple, à 3,5 % le rendement de Microsoft peut sembler un peu faible, mais il est couvert près de quatre fois par les liquidités : cela se traduit par un fort potentiel de hausse des dividendes, dans des proportions nettement supérieures à la croissance des bénéfices.
Sur le plan géographique, les marchés émergents sont relativement attractifs compte tenu de leur meilleure croissance économique et de l’attrait des devises locales, porteuses d’un rendement élevé. En effet, nous pensons que l’appréciation des devises sera un thème de plus en plus important dans les pays émergents compte tenu de l’expansion synchronisée des bilans des banques centrales des pays développés. L’économie chinoise est bien placée pour rebondir en 2013 ; l’inflation a été maîtrisée et la transition politique est désormais assurée, ouvrant ainsi la voie à des politiques accommodantes. Les investisseurs semblent fonder leurs prévisions sur une croissance économique de 6 à 8 %, et le marché devrait beaucoup mieux se comporter maintenant que la Chine a surmonté ces obstacles.
Parmi les marchés développés, les États-Unis offrent un potentiel si le précipice budgétaire peut être évité. Le marché immobilier (baromètre important pour l’ensemble de l’économie) se redresse et la confiance des ménages connaît également une embellie. D’autre part, dans l’énergie, les États-Unis pourraient devenir le premier producteur de gaz et de pétrole grâce à l’exploitation de leurs réserves de gaz de schiste. Toutefois, c’est l’effet plus global de la baisse des coûts énergétiques qui sera particulièrement favorable ; cela donnera ainsi aux États-Unis un avantage concurrentiel sur les autres pays développés en favorisant la relance de la production manufacturière américaine, car de nombreux secteurs industriels (des produits chimiques à l’ingénierie) devraient bénéficier d’une baisse significative du coût des facteurs de production.