Qu’est-ce que la finance islamique ?

Les Musulmans ont une éthique particulière en matière financière. Cette éthique s’inscrit dans la ligne des principes édictés par la Sharia. La Sharia règle les activités et les pratiques quotidiennes des musulmans dans leurs relations humaines. Contrairement aux chrétiens qui ont une église hiérarchisée, les musulmans n’ont pas d’autorité suprême comme le pape et les thèmes de finance islamique sont donc traités différemment de part le monde dans différentes écoles de « Sharia Scholars », érudits en Sharia qui ont également une formation en finance.

Quelle est l’origine de la finance islamique ? Pour retrouver ces origines, il faut remonter au VII ème siècle. A cette époque, le prophète fixe les règles de la pratique de la finance en fonction des us et coutumes de l’époque, une époque où l’usure était courante.

Tombée en désuétude, la finance islamique reprend vigueur dans les années 70 en Egypte et au Pakistan mais se solde par un échec. C’est dans les années 90, sous l’impulsion de la banque Islamic Development Bank, que de nouveaux instruments financiers, de nouvelles banques et une régulation plus modernes réapparaissent au Moyen-Orient.  L’Islamic Development Bank a pour vocation d’être la banque mondiale pour les Musulmans. Elle a été constituée en 1975 et est basée en Arabie Saoudite. Elle a pour but de promouvoir le développement économique et social dans les pays musulmans et de promouvoir la finance islamique.

Qu’est ce qui distingue la finance islamique de la finance conventionnelle ? Pour l’Islam, l’argent ne peut pas être une fin en soi mais bien un moyen de financer de la valeur ajoutée, idéalement dans des projets sociaux. Cela signifie donc qu’à toute opération financière, il faut une contrepartie économique réelle.

Concrètement, cela se traduit aujourd’hui par quelques règles. Les taux d’intérêt sont bannis de la finance islamique. On ne peut pas investir dans certains secteurs : porc, cigarettes, alcool, jeux, pornographie, armes. Les produits et les contrats ne peuvent pas engendrer d’incertitude. Ils sont  donc construits et écrits de façon à ce que tout soit clair au départ et ils tentent de prévoir tous les cas de figure. Par ailleurs, les sociétés dans lesquelles les investissements se font doivent répondre à certaines règles très strictes, y compris en matière de financement, qui sont génératrices de stabilité financière. Les commissions pour services financiers rendus et les dividendes sont par contre autorisés dans la mesure où ils rémunèrent un service ou le développement d’un projet économique.

Alors, la finance islamique est–elle hypocrite ou éthique ? La finance islamique peut certainement être considérée comme une forme de finance éthique. Ces règles, parfois archaïques, aboutissent à des investissements plutôt sains qui évitent certains secteurs. Ces règles engendrent aussi un cloisonnement de la finance islamique qui lui a permis d’éviter l’effet domino de la crise financière de 2008 mais ne nous leurrons pas : cette finance développe aussi une certaine forme d’hypocrisie qui lui permet de survivre et d’engendrer des bénéfices en accord avec la Sharia.

Comment investir en respectant les règles de la Sharia ? Sur le marché des ETF, il existe un tracker « Shariah compliant » qui investit dans l’indice Dow Jones respectant les règles en matière d’investissement islamique. Cet indice investit dans des grandes multinationales dont la gestion et les comptes sont en concordance avec les règles de la Shariah. Trois scholars  garantissent le caractère purement islamique de ce produit. Il n’existe pas de produits financiers ni de fonds conformes aux règles de la « Sharia » en Belgique. Le contexte régulateur ne s’y prête pas tant au niveau légal que fiscal. Il serait d’ailleurs plus difficile d’assurer la protection du consommateur contre les usuriers quand ce sont des commissions qui sont perçues en lieu et place des intérêts. La Grande-Bretagne, quant à elle, a assoupli sa législation et a fourni un cadre légal pour ces fonds.