Longtemps, la préservation du capital naturel a été l’affaire des écologistes et/ou des États. Aujourd’hui, un nombre croissant d’entreprises se penche sur la valeur associée à la biodiversité et à son intégration comptable. Et pour cause : la biodiversité et les écosystèmes sont à l’origine d’une multitude de ressources utilisées par nos entreprises comme par exemple les denrées alimentaires, le bois, l’énergie, l’eau potable, les ressources génétiques – pour n’en citer que quelques unes. Ainsi, le déclin de la biodiversité et la dégradation de nos écosystèmes constituent des défis majeurs pour les secteurs dont l’activité dépend de l’utilisation du capital naturel et des services éco-systémiques: agroalimentaire, textile, services aux collectivités, pharmaceutique, automobile, et plus indirectement certains services tels que le tourisme et l’assurance (bienfaits de la biodiversité sur le contrôle des risques naturels, difficultés d’accès aux ressources et risque de défaut des assurés). C’est également un défi considérable pour les secteurs ayant un impact environnemental direct ou indirect sur la biodiversité comme le secteur de l’énergie, de la construction (BTP), ou encore l’industrie des mines et métaux.
On estime que 40% de l’économie mondiale repose sur des produits et processus biologiques (PNUE-UNEP). Pourtant, la biodiversité diminue à un rythme sans précédent. Les taux actuels d’extinction d’espèces seraient jusqu’à mille fois plus élevés que les niveaux jugés naturels[1]. 60% des services rendus par les écosystèmes de la planète sont déjà dégradés, et ces dommages écologiques devraient s’accentuer avec la croissance démographique, la modification de l’affectation des sols, le développement économique et le changement climatique.
Ainsi, les secteurs dont les activités sont étroitement liées à l’accès au capital naturel (ex : matière premières) et aux services vitaux (ex : qualité de l’eau) doivent réagir avant que leur activité économique ne soit en danger suite à une exploitation excessive de la Nature. Ce manque de pro-activité pour éviter ce risque peut sans doute en partie être expliqué par le fait que la sauvegarde de la biodiversité est perçue comme un coût supplémentaire. Nous sommes convaincus qu’au contraire, promouvoir et contribuer à la biodiversité peut générer des profits supplémentaires et des avantages compétitifs
Dans une précédente étude intitulée « Biodiversité et croissance économique: une relation fusionnelle » (disponible sur www.axa-im.be ), nous avions analysé les sociétés européennes des secteurs les plus en relation avec la biodiversité et les services éco-systémiques, en comparant leur marge opérationnelle et la qualité de leur stratégie biodiversité. Les secteurs retenus étaient le pétrole, la construction, l’agroalimentaire, le tabac, la pharmacie et les services aux collectivités. On note, à l’exception du secteur du pétrole, un lien entre la qualité de la stratégie menée par l’entreprise et sa marge opérationnelle.
La lutte contre le changement du climat ne peut se faire sans tenir compte de la détérioration des ressources naturelles et des écosystèmes. Par exemple, plus de 25% d’émissions de gaz à effet de serre seraient supprimés si l’on stoppait la destruction de la biodiversité. Autre exemple parlant, selon le rapport publié par l’EEB (Economie des Ecosystèmes et la Biodiversité), la perte des services rendus par la nature (services écologiques) représenteraient 6% du PIB mondial d’ici 2050 si l’on ne fait rien. Il est urgent que les analystes et investisseurs réclament plus de transparence de la part des entreprises sur les actions menées en faveur de la biodiversité.
Cet article est rédigé par AXA-IM
[1] Ecosystems and human well-being, opportunities and challenges for business and industry, 2005
Je trouve que c’est une bonne astuce de voir le problème de la biodiversité et de l’environnement du point de vue économique : ce sera peut-être une façon de faire bouger les choses, car les autres arguments semblent laisser nos dirigeants – tant économiques que politiques – de glace (désolée pour cette expression si peu appropriée au vu du réchauffement global du climat). Malheureusement, il y a bien plus que le climat et la biodiversité : il y a aussi le problème des réserves halieutiques qui ne sont plus que l’ombre d’elles-mêmes et de la pollution des mers, la chasse à la baleine et le massacre des requins et des thons, toutes espèces évoluant en haut de la chaîne alimentaire marine, dont la disparition perturbe grandement l’équilibre, laissant la place aux espèces indésirables telles que les méduses.
Arrêtons surtout de penser à court terme et de consommer notre planète comme nous consommons les kleenex !