La Revue : Prévisions économiques, que de pessimisme !

Peut-on encore croire les prévisions des économistes alors que la crise de l’été 2011 n’avait pas été anticipée ? Peut-on encore faire confiance aux théories et aux stratégies d’allocation alors que tous les paradigmes ont volé en éclats ? Malgré la grande incertitude et la volatilité importante qui planent sur les marchés, comme chaque année, les économistes refont immanquablement leurs prévisions pour l’année suivante et, inexorablement, les journalistes les répercutent.

L’évolution des marchés sera  conditionnée à la sortie de la crise dans la zone euro. Le risque présent dans l’environnement économique se traduit par des niveaux de volatilité importants. En ce qui concerne l’inflation, il faudrait que la monétisation de la dette se concrétise par une augmentation des crédits dans le système. Mais ce n’est pas le cas. Christophe Donnay, Economiste à la Banque Pictet, n’entrevoit donc pas de poussée inflationniste en 2012 mais plutôt une simple adaptation de l’inflation à son niveau structurel. Sur un plus long terme, l’inflation viendra plutôt des pays émergents.

Peter Vanden Houte, Chief Economist chez ING, estime que la zone euro enregistrera un déclin en 2012. Mais, il y a un peu d’optimisme dans l’air. Le deuxième trimestre 2012 devrait voir un revirement du cycle économique en Europe, pour autant que les gouvernements arrivent enfin à enrayer la crise de l’euro. Le problème redevient donc essentiellement politique. « Les Etats-Unis se portent un peu mieux pour l’instant, bien que le pays soit également confronté à des problèmes de dette qui auront pour conséquence que la croissance restera modérée en 2012. Même les pays émergents présentent des signes de refroidissement », prédit cet économiste. Selon lui, l’année 2012 ne devrait pas voir de poussées inflationnistes, l’environnement étant peu propice à une hausse du prix de matières premières. Le niveau des taux d’intérêts européens ne devrait pas connaitre de hausse importante en 2012. Au contraire ! « Nous estimons que le taux passera sous la barre de 1 % et qu’il restera à ce niveau pendant toute l’année 2012. Dans ces circonstances, les taux à long terme devraient également rester bas, malgré une certaine volatilité. Concernant les taux de change, les péripéties de l’euro restent source de fluctuations. Tant que les marchés financiers craindront un éclatement de la zone euro, il est difficile d’anticiper une hausse de la monnaie unique, même si le dollar ne semble pas en mesure de présenter de bons fondamentaux », estime Peter Vanden Houte.

Les niveaux d’endettement des pays ne sont plus tenables et nous sommes, sans aucun doute, dans une période charnière durant laquelle des efforts importants devront être entrepris pour réduire cet endettement. Cela ne se fera pas sans l’émergence de conflits sociaux.

En ce qui concerne les pays d’Europe de l’Est, la situation est également préoccupante. Comme nous l’avons déjà souligné dans nos rubriques, ces pays sont fortement dépendants des banques européennes pour leur financement. La situation des banques dans la zone euro aura donc un impact négatif sur les économies de ces pays. «  Une dépréciation du change fait courir d’importants risques macro-économiques aux pays où l’endettement privé ou public est largement libellé en devises étrangères. Ainsi, en cas de dérapage cambiaire, la Hongrie serait la plus exposée à un cercle vicieux mêlant dégradation de la solvabilité et sortie de capitaux », souligne Manolis Davradakis de chez AXA IM.

Pour Anton Brender, Economiste chez Dexia, l’Europe se dirige vers la récession. « Mais il n’est pas difficile d’être plus pessimiste ! » ajoute Anton Brender. « La politique est devenue facteur de risque : l’impasse budgétaire, qui a provoqué un choc de confiance fin juillet, est loin d’être surmontée et la crise européenne pourrait s’aggraver, et peser significativement sur la croissance». En ce qui concerne les Etats-Unis, il va falloir une consolidation du marché boursier et une hausse de la masse salariale pour que la reprise américaine ne tourne pas court en 2012.

Dans ce pessimisme ambiant, il va falloir admettre qu’un changement d’approche est nécessaire. Un changement d’approche économique, sociale et politique. Un changement de mentalité aussi dans un environnement où la capacité à exploiter les opportunités sera plus que jamais nécessaire.